McDOUGALL, JOHN, industriel et financier, né vers 1825 dans le Berwickshire, Écosse ; il épousa en secondes noces Mary Cowans* ; décédé le 29 août 1892 à Montréal.
John McDougall arrive au Canada avec ses parents en 1832. Tout jeune encore, il commence son cheminement dans le monde industriel par l’apprentissage des métiers de mécanicien et de fondeur de fer chez William Burry, dont l’usine est située à Montréal, le long du canal de Lachine. Devenu l’associé de ce dernier en 1854, il a droit au tiers des profits de la William Burry and Company. Cette nouvelle société jouit, dès le départ, de l’appui financier d’Alexander Walker Ogilvie*, qui lui procure aussi de nombreux contrats de fabrication et d’entretien de la machinerie de ses moulins à farine. À la mort de Burry en mars 1858, McDougall acquiert la part de ce dernier au prix de 10 878,29 $. À titre d’unique propriétaire de l’établissement, il décide de concentrer ses activités dans la production d’objets de précision en fer et en acier, domaine dans lequel ses ouvriers et lui-même ont acquis une compétence certaine. Dans un élan d’enthousiasme, afin de signifier avec fierté ses origines, il rebaptise aussitôt l’entreprise du nom de Caledonia Iron Works.
Sous la direction de McDougall, on y fabrique surtout des meules de moulin, mais on y produit également, sur commande, de nombreux articles en fer, diverses pièces d’équipement de scierie, des machines lourdes, des chaudières à vapeur, des machines fixes et des tuyaux de toutes sortes. De plus, pendant les années 1860, l’établissement est vendeur attitré de certains instruments, dont une roue de turbine hydraulique de marque Leppel. En 1871, la production annuelle des ateliers de McDougall se chiffre à 140 000 $, ce qui représente le quart de toute la production de la région montréalaise en équipement de transport ; 60 hommes, soit 12 % de la main-d’œuvre employée dans ce secteur, y travaillent et reçoivent à eux seuls 20 % de la masse salariale. En 1881, le nombre de ses hommes de métier atteint 300. À la même époque, McDougall obtient des contrats importants de la ville de Montréal et de municipalités voisines pour la fourniture et l’installation de tuyauterie et de pompes à incendie. La prospérité de l’entreprise augmente donc sans cesse.
Dès 1864, au moment où sa dette envers la succession Burry est éteinte, McDougall décide de profiter des retombées qu’apporte à l’industrie du fer et de l’acier la construction ferroviaire en plein essor au début des années 1860, et il tente l’expérience de la fabrication de roues de wagons de chemin de fer. Pour s’assurer une bonne clientèle, il s’associe en décembre 1864 à Alfred Brown, vendeur de fer réputé de Montréal, et forme la John McDougall and Company dont on construira la fonderie en arrière des bâtisses de la Caledonia, Iron Works, rue William. Les deux établissements seront dirigés d’un bureau unique, situé au centre de la ville, au 22 de la rue du Saint-Sacrement. McDougall ne se réserve que le tiers des bénéfices de la compagnie mais, en 1873, il met fin à cette association en achetant la part de Brown.
Grand ami de Louis-Adélard Senécal*, le constructeur de chemins de fer le plus important au Québec, McDougall n’a plus besoin d’un vendeur, mais d’un bon comptable. Aussi invite-t-il Robert Cowans, son beau-frère, à devenir son associé ; il lui offre en échange de ses services le tiers des profits de l’entreprise. Prévue pour une durée de trois ans à compter du 25 avril 1876, leur association ne sera jamais renouvelée, mais non plus révoquée. Cowans s’engage dans tous les projets financiers de McDougall et obtient même, en 1890, une procuration générale qui lui permet d’agir seul au nom de la John McDougall and Company. Et, tandis que l’économie canadienne subit les contrecoups de la grande crise de 1873–1879, les usines de fer et d’acier, qui approvisionnent les compagnies ferroviaires, deviennent d’année en année plus florissantes.
La fonte qu’utilise McDougall provient en grande partie de forges américaines mais, dès 1863, il s’intéresse aux forges du Saint-Maurice, parce qu’elles produisent un fer reconnu pour ses propriétés exceptionnelles de cristallisation au moment de la refonte en coquille, ce qui est essentiel pour produire la bande d’acier qui entoure une roue de wagon de chemin de fer. Il conclut avec le propriétaire John McDougall*, de Trois-Rivières – son homonyme mais sans aucune parenté connue –, des ententes en vue d’acheter toute sa production de fer. Après la mort de ce dernier en 1870, il tente de s’emparer de ses forges, mais il échoue. Déçu, il se tourne vers les forges de Saint-Pie-de-Guire, sur la rive sud du Saint-Laurent, qu’il acquiert en 1874 et exploite jusqu’en 1881. L’année précédente, il a entrepris la mise en valeur à Drummondville d’un complexe industriel plus important, qui comprend deux hauts fourneaux d’une capacité de production de sept à huit tonnes par jour. La compagnie profite de la Politique nationale du gouvernement de sir John Alexander Macdonald pour l’obtention de primes accordées à la production canadienne du fer, à partir de 1884 jusqu’en 1910. Considérées comme un département des fonderies montréalaises, les forges de Drummondville leur fournissent, au moins jusqu’en 1890, environ le tiers des 45 tonnes de fonte qu’elles utilisent quotidiennement. Puis l’intérêt de McDougall pour ces forges diminue grandement, et la production se poursuit au ralenti jusqu’à leur vente à la Canada Iron Corporation (aujourd’hui Canron) en 1908.
Ce changement d’attitude de McDougall fait suite à l’échec de sa tentative, en collaboration avec Senécal en 1883, de dominer l’exploitation de tout le minerai des marais de la province en s’appropriant les forges Radnor, sur la rivière Saint-Maurice. Propriétés de la succession de George Benson Hall*, l’un des barons du bois les plus riches au Québec, ces forges et leur immense domaine forestier et minier, qui s’étend sur les deux rives du fleuve, lui auraient donné cette maîtrise depuis longtemps recherchée. Mais c’est George Edward et Thomas Joseph Drummond, de la Drummond, McCall and Company de Montréal, sa principale rivale, qui s’en sont emparés avec l’aide américaine et, depuis lors, la concurrence se fait plus difficile.
Dorénavant, McDougall s’oriente vers des transactions purement financières, toujours dans le sillage de Senécal, grand argentier du parti conservateur provincial. Il est engagé financièrement dans un grand nombre d’entreprises, plus particulièrement dans la Compagnie de navigation du Richelieu et d’Ontario, dont il est administrateur de 1882 à 1887, durant tout le règne de Senécal à la présidence du conseil d’administration. Il est également lié au syndicat financier du chemin de fer de la rive nord, dont Senécal est l’âme dirigeante, qui fait l’achat en 1882 de cette ligne pour la revendre au Grand Tronc, en réalisant un bénéfice de près d’un million de dollars. La même année, avec son ex-associé Brown, entre autres, McDougall forme un syndicat qu’appuie la Banque de Montréal, et à qui le gouvernement provincial adjuge une émission d’obligations d’un million et demi de dollars. De plus, il demeure toute sa vie le principal bailleur de fonds de la Cumberland Railway and Coal Company de Springhill, en Nouvelle-Écosse, dont il fut, avec Senécal, l’un des fondateurs au début des années 1860. Avec ce dernier et Cowans, il fait aussi partie, durant plusieurs années, des conseils d’administration de la Compagnie du chemin de fer union Jacques-Cartier et de la Compagnie du chemin de fer de Lachine et d’Hochelaga.
Malgré son peu d’audace, sa crainte du risque et cette extrême prudence en affaires proverbiale chez les Écossais, John McDougall s’est élevé au rang de l’élite bourgeoise industrielle et financière de Montréal, grâce à ses relations avec Senécal. À sa mort, survenue en 1892 à sa résidence d’été de Maisonneuve, dans l’île de Montréal, il laisse à ses cinq enfants une fortune constituée, en plus de biens meubles et immeubles, d’un grand nombre d’actions et d’obligations de plusieurs compagnies canadiennes. Son fils, Edgar Mill, a pris la relève en collaboration avec Robert Cowans, avant d’être à la tête de la Canada Iron Corporation, à laquelle il transférera en 1908 les intérêts de sa famille dans les forges de Drummondville.
AN, RG 31, C1, 1871, Montréal.— ANQ-M, CE1-125, 31 août 1892 ; CN1-208, 15 déc. 1864, 19 mars 1873 ; CN1-373, 10 mars, 28 juin 1858, 4 juill. 1859 ; CN1-438, 25 avril 1876.— BE, Drummond (Drummondville), reg. B, 36, n° 26075, 15 août 1890 ; Montréal, reg. B, 54, n° 41879, 17 nov. 1908.— QUA, Richelieu and Ontario Navigation Company, minutes, 1882–1887.— Commission géologique du Canada, Rapport des opérations de 1866 à 1869 [...] ([Montréal], 1871), 323, 327.— Québec, Statuts, 1902, chap. 114.— La Minerve, 1865–1870, 2 avril 1874, 1er févr. 1875, 5 juill. 1876, 2 mai 1877, 12 mars, 17 avril, 11, 15 juin, 17 juill., 17 déc. 1883.— Borthwick, Hist. and biog. gazetteer, 443–444.— Canadian biog. dict., 2 : 319.— Montreal directory, 1865–1866 : 54, 92, 210.— E. [R.] Arthur et Thomas Ritchie, Iron : cast and wrought iron in Canada from the seventeenth century to the present (Toronto, [1982]), 12–13.— W. J. A. Donald, The Canadian iron and steel industry ; a study in the economic history of a protected industry (Boston et New York, 1915), 58–62, 77, 111, 254, 291.— Ève Martel, « l’Industrie à Montréal en 1871 » (thèse de
Maurice Milot, « McDOUGALL, JOHN (mort en 1892) », dans Dictionnaire biographique du Canada, vol. 12, Université Laval/University of Toronto, 2003– , consulté le 21 déc. 2024, https://www.biographi.ca/fr/bio/mcdougall_john_1892_12F.html.
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Auteur de l'article: | Maurice Milot |
Titre de l'article: | McDOUGALL, JOHN (mort en 1892) |
Titre de la publication: | Dictionnaire biographique du Canada, vol. 12 |
Éditeur: | Université Laval/University of Toronto |
Année de la publication: | 1990 |
Année de la révision: | 1990 |
Date de consultation: | 21 déc. 2024 |