JEFFERS, WELLINGTON, instituteur, ministre méthodiste et rédacteur en chef, né le 22 juin 1814 à Cork (république d’Irlande), fils de Robert Jeffers et de Nancy Maurice ; le 6 juillet 1841, il épousa Jane Frith, et ils eurent deux fils et une fille, puis le 21 juin 1854, à Belleville, Haut-Canada, Jane Eleanor Dougall, et ils eurent une fille ; décédé le 10 février 1896 à cet endroit.

La guerre de 1812 était terminée depuis peu lorsque le père de Wellington Jeffers quitta l’Irlande pour le Haut-Canada avec sa famille. Il s’installa d’abord à Kingston, puis dans le canton de Fredericksburgh. Homme instruit aux idées bien arrêtées, Robert Jeffers enseignait et publiait des lettres et des articles dans la presse kingstonienne. En 1818, il devint prédicateur itinérant de l’Église méthodiste épiscopale. Quatre ans plus tard, froissé, il la quitta et se fit prédicateur indépendant.

Septième et dernier enfant de la famille, Wellington reçut sa formation de base de son père. En 1837, après avoir enseigné durant plusieurs années, il déclina l’offre d’emploi intéressante que lui faisait une banque de Kingston pour devenir ministre itinérant au sein de l’Église méthodiste wesleyenne. Son ordination eut lieu en 1841. Il desservit des circonscriptions ecclésiastiques où se trouvaient certains des plus grands temples du Haut-Canada, mais ses affectations ne durèrent jamais plus de trois ans, conformément à la coutume de l’époque. Vers 1855, il exerça son ministère avec compétence à l’église méthodiste St James Street de Montréal ; son petit-fils John Wellington Graham, aussi nomade que lui, allait occuper cette charge un demi-siècle plus tard.

Tombé malade à Montréal, Jeffers fut muté à un poste moins épuisant, auprès des Sauteux de la rive nord du lac Rice, dans le Haut-Canada. Une fois remis, il revint à Toronto où on lui avait offert de succéder à James Spencer* au poste de rédacteur en chef de l’influent Christian Guardian. De juin 1860 à juin 1869, il publia des éditoriaux qui, à son avis, contenaient « de judicieuses interprétations des événements » tout en donnant libre cours à son goût pour la « controverse [...] soutenue dans un esprit de bienveillance ». Jeffers était abolitionniste et portait un intérêt particulier aux questions éducationnelles et aux nouveaux courants théologiques. Ses talents d’administrateur assurèrent de solides assises financières au journal ; comme il le signala fièrement dans son dernier éditorial, le Guardian avait « plus d’abonnements vendus que jamais, tous réglés d’avance ». En outre, Jeffers exerça de nombreuses fonctions au sein de son Église, dont celles de président de district, de secrétaire et de codélégué (vice-président) de Conférence méthodiste wesleyenne ; en 1876, il présida la Conférence de Toronto. Le Victoria College lui conféra un doctorat honorifique en théologie en 1863.

Grâce à la puissance de son esprit et à son éloquence lucide, Jeffers était remarquable dans les débats. S’il prenait la parole, tous tendaient l’oreille. Au cours des assemblées des Conférences méthodistes, à peine avait-on dit « Jeffers va parler » qu’une foule d’auditeurs quittaient les couloirs et regagnaient leur siège. À la conférence générale de 1854, on débattit de l’épineuse question de savoir si les fidèles devaient assister aux réunions de groupe hebdomadaires pour demeurer au sein de l’Église. Affirmant vigoureusement que c’était là une condition essentielle, Jeffers croisa le fer avec Egerton Ryerson* et sortit vainqueur de la discussion. Ryerson offrit ensuite sa démission à la conférence, mais la retira par la suite.

Que ce soit en chaire, aux assemblées en plein air ou dans les salles de conférences, Jeffers était un orateur inoubliable et persuasif. Sa largeur de vues enthousiasmait les jeunes étudiants et dégourdissait l’esprit des auditeurs attentifs. De toute évidence cependant, certaines gens ne pouvaient tirer aucun profit de ses paroles. Faisant allusion à ce qui se passait après les discours de Jeffers, un critique bienveillant a dit : « les brebis grasses ont eu tout leur content, mais les maigres agneaux sont repartis le ventre vide ». Parfaitement lucide jusqu’à la fin, Jeffers fit sa dernière apparition publique en 1894 pour prononcer l’oraison funèbre de son vieil ami le sénateur Billa Flint.

Wellington Jeffers passa ses 15 dernières années à Belleville, où il desservit deux congrégations, avant de prendre sa retraite en 1884. Il prêcha ensuite quelquefois dans la région, et occupa même la chaire de l’église presbytérienne John Street durant plusieurs mois, en attendant l’arrivée du nouveau pasteur, ce qui témoigne de son œcuménisme comme de celui des fidèles de cette congrégation.

J. William Lamb

J. S. Carroll, Past and present, or a description of persons and events connected with Canadian Methodism for the last forty years ; by a spectator of the scenes (Toronto, 1860).— Methodist Church (Canada, Newfoundland, Bermuda), Bay of Quinte Conference, Minutes (Toronto), 1896.— Methodist Magazine and Rev. (Toronto et Halifax), 43 (janv.–juin 1896) : 268–270.— Christian Guardian, juin 1860–juin 1869.— Daily Intelligencer (Belleville, Ontario), 13 févr. 1896.— Cornish, Cyclopædia of Methodism.— Carroll, Case and his cotemporaries, 4–5.— The chronicle of a century, 1829–1929 : the record of one hundred years of progress in the publishing concerns of the Methodist, Presbyterian, and Congregational churches in Canada, L. [A.] Pierce, édit. (Toronto, 1929).— Emma Jeffers Graham, « Three years among the Ojibways, 1857–1860 », Women’s Canadian Hist. Soc. of Toronto, Trans., no 16 (1916–1917) : 35–40, et un portrait du sujet face à la page 35.

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J. William Lamb, « JEFFERS, WELLINGTON », dans Dictionnaire biographique du Canada, vol. 12, Université Laval/University of Toronto, 2003– , consulté le 22 nov. 2024, https://www.biographi.ca/fr/bio/jeffers_wellington_12F.html.

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Titre de la publication:    Dictionnaire biographique du Canada, vol. 12
Éditeur:    Université Laval/University of Toronto
Année de la publication:    1990
Année de la révision:    1990
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