HENDERY, ROBERT, orfèvre, commerçant et manufacturier d’argenterie, né le 14 décembre 1814 à Corfou (Kerkyra, Grèce) ; décédé le 20 juillet 1897 à Montréal.
La tradition familiale raconte qu’à l’époque de la naissance de Robert Hendery son père (qui s’appelait peut-être Robert) était chirurgien dans l’armée britannique à Corfou. Par la suite, il retourna dans son Écosse natale, où son fils apprit le métier d’orfèvre. Vers 1837, le jeune Robert immigra à Montréal. Peut-être entra-t-il à la George Savage and Son, le plus gros détaillant montréalais de bijouterie et d’orfèvrerie, mais il est plus probable qu’il devint compagnon de Peter Bohle, qui faisait des couverts et d’autres articles de table en argent pour l’entreprise des Savage. Le 16 mai 1843, veuf depuis peu et père d’au moins un garçon, il épousa Sarah Maysenhoelder, fille d’un autre orfèvre montréalais, John Maysenhoelder. Le couple allait avoir six enfants.
En 1851, Hendery était l’associé de Bohle et tenait avec lui une boutique rue Craig. En 1855, ils participèrent à l’Exposition universelle de Paris mais, à la fin de l’année ou au début de 1856, ils mirent fin à leur association et Hendery prit la suite des affaires. À l’exposition provinciale de 1858, il présenta « des médailles, des coupes de même qu’un joli couteau à poisson et une fourchette ». Toutefois, il en vint progressivement à produire, entre autres, des pièces d’orfèvrerie domestique d’une plus grande originalité qui présentaient souvent une riche ornementation en relief ou ciselée. Il ne tarda pas à devenir le plus gros producteur montréalais de trophées et de pièces remises en guise de cadeaux officiels et, de plus en plus, il se consacra à l’orfèvrerie religieuse, qui faisait l’objet d’une demande croissante. Il s’essaya aussi à la sculpture sur argent ; dans ce domaine qui compte relativement peu de pièces canadiennes, il est l’un de ceux qui en fabriqua le plus.
Cette réorientation coïncida avec l’arrivée, chez Hendery, d’un jeune concepteur et ciseleur venu d’Angleterre, Felix Louis Paris. Au fait des techniques et des styles pratiqués chez les orfèvres anglais à la mode, Paris put aider son patron à mieux concurrencer les importations anglaises, qui dominaient le marché colonial. Il travailla au moins 20 ans pour Hendery et épousa l’une de ses filles en 1867.
Lorsque se tint à Montréal l’exposition provinciale de 1863, Hendery n’avait pas son égal parmi les manufacturiers d’argenterie de la ville. Sa renommée reposait surtout sur les pièces destinées à servir de présents officiels. Parlant de son étalage, où l’on pouvait voir notamment des services à thé et à café, des coupes, des gobelets et des centres de table, la Montreal Gazette déclara que ces objets étaient « la preuve la plus convaincante que le Canada n’aura[it] pas besoin, à l’avenir, d’importer de l’étranger des pièces servant de cadeaux officiels ». Son ouvrage le plus remarquable était une pièce d’,argenterie d’art, qui devait être présentée à George-Étienne Cartier*. Sur une base triangulaire ornée de divers emblèmes nationaux, s’élevaient une forme centrale évoquant un érable, dont les branches soutenaient divers plats, et un groupe de sculptures réunissant trois personnages historiques : « Jacques Cartier[*], le premier des navigateurs ; Montcalm [Louis-Joseph de Montcalm*], le premier des généraux français ; l’évêque Plessis [Joseph-Octave Plessis*], le premier représentant de l’Église au Canada ».
De confession anglicane, Hendery fut l’un des premiers orfèvres canadiens à fabriquer pour l’Église d’Angleterre une quantité notable de vases sacrés pour la communion. En 1861, il s’était distingué en fabriquant un service de sept pièces pour la communion destiné à la cathédrale Christ Church de Montréal. De style néo-gothique et conforme aux préceptes de l’Ecclesiological Society d’Angleterre, ce service est peut-être le premier qui témoigne de l’influence des tractariens sur l’orfèvrerie canadienne. En 1864, Hendery en fabriqua un autre, de style classique, pour l’église St James the Apostle et, en 1880, la croix, ou bâton pastoral, du métropolitain de la province ecclésiastique anglicane du Canada. Prenant la relève de Paul Morand*, il fit aussi bon nombre de pièces pour l’Église catholique. Il fabriqua même de l’argenterie rituelle juive, dont deux paires de rimmonim (baguettes autour desquelles on enroule la thora) pour la synagogue Shaar Hashomayim.
Afin de remplir ses commandes toujours plus nombreuses, Hendery ouvrit en 1866 un magasin de détail distinct de sa fabrique, et l’entreprise prit le nom de Robert Hendery and Company. Cependant, dès 1870–1871, il n’avait plus ce magasin ; il avait abandonné la vente et se cantonnait dans son métier de fabricant. En 1877, l’entreprise produisit, d’après un dessin de Felix Louis Paris, une pièce d’argenterie d’art à la fois majestueuse et d’une sobriété toute classique qui fut remise à George Washington Stephens* par un groupe de citoyens montréalais en reconnaissance de ses dix ans d’échevinage.
Le 4 juillet 1887, Hendery prit comme associé John Leslie, Écossais d’origine qui était devenu son apprenti en 1864 et travaillait pour lui depuis cette date. Il avait des clients à l’extérieur de la province de Québec depuis longtemps déjà, mais une fois qu’il se fut associé à Leslie, son marché connut une expansion considérable, surtout en Ontario. La Hendery and Leslie, dont la renommée ne cessait de grandir, continuait de produire aussi bien de la vaisselle d’usage courant que des pièces sur commande. Le trophée Carslake, remis en 1890 à la compétition de la Province of Quebec Rifle Association, est un remarquable exemple de ce qu’elle pouvait exécuter en fait de créations originales. Selon la Gazette, cette œuvre imposante était « l’un des plus magnifiques trophées jamais fabriqués au Canada ». L’entreprise maintenait aussi sa réputation artistique en orfèvrerie religieuse : le service pour la communion présenté en 1896 à la cathédrale Christ Church de Hamilton, en Ontario, par la famille de l’évêque Charles Hamilton, est de toute première qualité.
Avec ses divers associés, Robert Hendery était devenu le plus grand fabricant d’argenterie du Canada. Pourtant, son entreprise fut toujours assez petite : elle comptait six employés en 1861, et une vingtaine en 1894. Finalement, sa santé l’obligea à en confier l’administration à Leslie puis, en 1895, il lui vendit sa part et prit sa retraite. Deux ans plus tard, la Henry Birks and Sons acheta la Hendery and Leslie.
L’auteur tient à remercier Andrea Kirkpatrick, Winnie Kirkpatrick et Angela Houstoun, qui l’ont aidé dans ses recherches. [r. f.]
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Ross Fox, « HENDERY, ROBERT », dans Dictionnaire biographique du Canada, vol. 12, Université Laval/University of Toronto, 2003– , consulté le 22 déc. 2024, https://www.biographi.ca/fr/bio/hendery_robert_12F.html.
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Auteur de l'article: | Ross Fox |
Titre de l'article: | HENDERY, ROBERT |
Titre de la publication: | Dictionnaire biographique du Canada, vol. 12 |
Éditeur: | Université Laval/University of Toronto |
Année de la publication: | 1990 |
Année de la révision: | 1990 |
Date de consultation: | 22 déc. 2024 |