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Gosnell, R. Edward, enseignant, journaliste, fonctionnaire, bibliothécaire, statisticien, auteur et archiviste, né le 14 août 1859 à Saint-Dunstan-du-Lac-Beauport (Lac-Beauport, Québec), fils de John Gosnell (Gosnold, Gosneld) et de Margaret Fachnie ; le 20 octobre 1886, il épousa à Cobourg, Ontario, Agnes Theresa Wilson (décédée le 11 décembre 1898), et ils eurent une fille ; décédé le 5 août 1931 à Vancouver et inhumé à l’Ocean View Burial Park de Burnaby, Colombie-Britannique.

Troisième des quatre fils d’un agriculteur irlandais presbytérien et d’une Écossaise, Edward Gosnell naquit au Bas-Canada. Il étudia dans des écoles publiques en Ontario ; à l’âge de 22 ans, il travaillait déjà comme enseignant. Environ un an et demi plus tard, il abandonna l’éducation pour le journalisme et trouva un emploi au Chatham Tribune. Il agit ensuite à titre de rédacteur en chef du Port Hope Times durant deux ans, puis du Chatham Planet pendant cinq ans. Avant 1886, il avait ajouté l’initiale R. (pour Richard ou Robert, selon certaines sources) devant son prénom, afin d’éviter la confusion avec un homonyme. Il signa le plus souvent ses publications ainsi : R. E. Gosnell. À Chatham, sa fréquentation du Macaulay Club, société d’art oratoire et de théâtre, éveilla son intérêt pour la recherche historique.

Comme il le raconterait, Gosnell s’installa à Vancouver en 1888 dans le but d’écrire pour le Daily News-Advertiser, fondé par Francis Lovett Carter-Cotton*. Un résumé de sa carrière, paru en août 1894 dans un article du Daily Colonist, préciserait toutefois qu’il y vint aussi « en raison de problèmes de santé ». Au début du mois d’avril 1890, il démissionna de son poste de chef de rubrique locale au Daily News-Advertiser et devint courtier pour une entreprise immobilière de Vancouver.

À la fin de l’année 1890, Gosnell quitta le secteur immobilier pour occuper un emploi au sein du British Columbia Exhibit Committee, chargé de monter une exposition et de la présenter à la Toronto Industrial Exhibition (plus tard l’Exposition nationale canadienne) et dans d’autres villes canadiennes. Dans le cadre de cette fonction, il rédigea la première de ses nombreuses publications sur la Colombie-Britannique : British Columbia : a digest of reliable information regarding its natural resources and industrial possibilities, brochure parue à Vancouver en 1890 pour vanter les qualités de la province. Des contribuables furieux écrivirent au Vancouver Daily World pour critiquer le financement du document par la Compagnie du chemin de fer canadien du Pacifique et le gouvernement municipal, d’autant plus qu’on n’y mentionnait aucunement Vancouver. De Montréal, Gosnell répondit à ses détracteurs en publiant une lettre dans le journal le 23 octobre 1890 : « Chaque homme ou chaque famille que l’on convainc de s’établir où que ce soit en Colombie-Britannique est un gain direct pour Vancouver. » Pour justifier le manque d’information sur la ville dans la brochure, il invoqua « les circonstances dans lesquelles l’impression a[vait] été réalisée ».

Au printemps de 1891, Gosnell occupait le poste de commissaire du recensement canadien pour le district de New Westminster en Colombie-Britannique. Ses liens politiques et sociaux avec des conservateurs – et probablement aussi son talent à se faire valoir – expliquent peut-être sa nomination, par le ministre de l’Éducation, au Dominion History Committee on Manuscripts. Son rôle consistait à représenter la province au sein de ce comité chargé de décerner des prix aux meilleurs manuels d’histoire du Canada soumis avant le 1er janvier 1895 ; il en ferait encore partie en 1913.

Gosnell connut une certaine notoriété quand, en novembre 1893, le premier ministre conservateur Theodore Davie* le désigna premier bibliothécaire permanent de l’Assemblée législative, poste qu’officialisa le Legislative Library and Bureau of Statistics Act, 1894. Comme bibliothécaire, Gosnell recevait un salaire mensuel d’à peu près 150 $, somme à laquelle on ajoutait parfois un supplément pour de la compilation de statistiques. En outre, il accepta d’agir à titre de secrétaire particulier du premier ministre, sans autre rémunération (cette fonction n’apparaît toutefois pas dans les comptes publics avant environ 1897). La loi autorisait Gosnell à acquérir des documents historiques. Dès juin 1894, il publia des annonces dans les journaux, se disant à la recherche de « souvenirs de l’établissement des pionniers […] de lettres, journaux, articles de presse, livres, brochures, rapports, chartes, cartes, photographies et croquis anciens, etc. » Il amassa des milliers de documents et fit apparemment don d’un millier d’objets de sa collection personnelle. Ces acquisitions deviendraient le noyau des Provincial Archives de la Colombie-Britannique et de leur Northwest History Collection. Gosnell commença également à recueillir de vieux papiers de ministères gouvernementaux et de Cary Castle [V. George Hunter Cary*].

En 1898, le congédiement soudain de Gosnell contrecarra cependant ses ambitions. Cela se produisit quand le pouvoir passa des mains de John Herbert Turner* à celles de Charles Augustus Semlin*, tous deux conservateurs. On abolit temporairement son poste, et on utilisa l’argent avec lequel on le payait pour rémunérer le secrétaire que Semlin avait choisi. Ethelbert Olaf Stuart Scholefield reprit le travail de Gosnell à la bibliothèque de l’Assemblée législative, mais avec le titre d’assistant et de bibliothécaire suppléant, et un salaire mensuel de 55 $. Gosnell perdit sa femme peu après et resta seul pour s’occuper de leur jeune fille, Helen Veronica. Il se mit peut-être à boire avec excès à ce moment-là, habitude qui lui causerait des problèmes.

En 1899, Gosnell fit un peu d’organisation partisane pour le jeune Parti conservateur provincial dans le district de Boundary et travailla comme rédacteur en chef du Greenwood Miner. Il retourna toutefois bientôt à la fonction publique : le premier ministre James Dunsmuir* en fit son secrétaire en 1900 et le nomma statisticien l’année suivante. En cette dernière qualité, il devait notamment renseigner des investisseurs et des immigrants potentiels sur un projet de colonisation à réaliser sur l’île de Vancouver et qui mettait en jeu des terres appartenant à l’Esquimalt and Nanaimo Railway.

Gosnell quitta son poste de statisticien en 1904 pour devenir rédacteur en chef du Daily Colonist, emploi qu’il occuperait pendant plus ou moins deux ans. Il accompagna le premier ministre conservateur Richard McBride* à Ottawa en 1906, puis en Angleterre en 1907, dans le cadre de rencontres où l’on tentait de bonifier les conditions de la Colombie-Britannique à titre de membre de la Confédération. Jusqu’en 1916, le gouvernement provincial ferait de temps à autre appel aux services de Gosnell dans ce dossier. Ce dernier passa la majeure partie de l’année 1907 en Angleterre, où il assista à la Conférence fédérale sur l’éducation ; il ne put ainsi ni se rendre au chevet de sa mère mourante ni participer à ses funérailles.

Pour souligner le centième anniversaire de la descente de l’explorateur Simon Fraser* dans l’embouchure du fleuve Fraser en 1808, Gosnell persuada le gouvernement de l’engager officiellement comme archiviste provincial de juillet 1908 à mars 1909 (au salaire mensuel d’environ 160 $) et de financer une exposition itinérante. Il prépara la Simon Fraser Centenary Exhibition, qui rassemblait des documents historiques en l’honneur des pionniers de la province, et la présenta à Victoria, à Vancouver et à New Westminster. Durant ses années à titre d’archiviste, il voyagea dans l’arrière-pays et à Seattle, dans l’État de Washington, pour acquérir du matériel, et fit copier des documents conservés en Angleterre. Savant collectionneur, il n’avait toutefois aucun talent en matière d’organisation archivistique.

On ne renouvela pas l’engagement de Gosnell à ce poste. En juillet 1909, on le nomma secrétaire de la commission royale d’enquête sur le bois et l’exploitation forestière [V. Frederick John Fulton]. Scholefield, promu bibliothécaire en chef vers 1900, lui succéda comme archiviste provincial en 1910. (On ne séparerait les rôles de bibliothécaire de l’Assemblée législative et d’archiviste provincial qu’en 1974.) Gosnell continua d’obtenir des contrats du gouvernement britanno-colombien et reçut 300 $ par mois en 1913–1914 pour son aide dans les pourparlers visant à améliorer les conditions de l’après-Confédération. En septembre 1914, le premier ministre McBride en fit son secrétaire. Gosnell remplit les mêmes fonctions auprès du premier ministre conservateur William John Bowser en 1916 et, pendant une courte période, du premier ministre libéral Harlan Carey Brewster*. À la fin de l’année financière 1916–1917, ce dernier l’informa qu’il n’avait plus besoin de ses services.

Gosnell puisa dans ses connaissances pour produire nombre d’ouvrages sur la Colombie-Britannique et son histoire. Le plus important, Year book of British Columbia […], dont il dirigea la publication, reçut l’appui financier du gouvernement provincial et parut à Victoria de 1897 à 1914. A history o[f] British Columbia, livre publié en 1906, ne constitue pas le meilleur exemple de ses talents de recherchiste et de rédacteur. En 1908, Gosnell fit paraître à Toronto, dans la collection Makers of Canada, Sir James Douglas ; cette biographie du gouverneur colonial sir James Douglas* s’avère peut-être son ouvrage le plus réussi (il la cosigna cependant avec Robert Hamilton Coats*). Dans The story of confederation, with postscript on Quebec situation (livre paru en 1918, probablement à Victoria), il lance une mise en garde : le fossé créé entre les Canadiens anglais et les Canadiens français en raison de la conscription durant la Première Guerre mondiale et les appels à l’autonomie canadienne lancés par les nationalistes canadiens-français [V. Henri Bourassa*] représentent une menace importante pour les impérialistes britanniques comme lui ; afin de favoriser l’unité nationale, il conviendrait d’enseigner les deux langues dans les écoles. Malgré la contribution indéniable de Gosnell aux ouvrages sur l’histoire de la Colombie-Britannique, des critiques contemporains et modernes qualifièrent son travail de désorganisé et de parfois inexact. Selon ses nombreuses lettres publiées dans divers journaux, il manifestait un grand intérêt pour maintes questions politiques relatives à la Colombie-Britannique ; les relations fédérales-provinciales, dont l’immigration, les titres fonciers autochtones et la rétrocession à la province, par le Canada, des terres situées entre la ceinture ferroviaire et le bloc de la rivière de la Paix, retinrent particulièrement son attention.

Quand il perdit son poste au gouvernement provincial en 1917, Gosnell partit vivre à Ottawa, où il accomplit certaines tâches pour le gouvernement fédéral et travailla comme membre de la tribune de la presse parlementaire. Un mauvais investissement immobilier l’entraîna selon lui dans une situation précaire. Entre 1922 et 1929, à partir d’Ottawa, Gosnell mena une campagne épistolaire – d’abord auprès du premier ministre libéral John Oliver*, puis du premier ministre Simon Fraser Tolmie – afin de réclamer un dédommagement pour son don de livres à la bibliothèque de l’Assemblée législative et une pension pour ses services à la Colombie-Britannique. Dans son « Memorandum re statement of claim for superannuation », joint à sa lettre à Oliver du 18 décembre 1922, Gosnell écrivit : « J’ai en effet cherché à influencer les gouvernements de Turner, Dunsmuir et [Edward Gawler] Prior en ce qui concerne le crédit coopératif, les explosifs à faible coût, les centres de formation pour agriculteurs, l’établissement de petites exploitations, le défrichage, la collaboration avec le dominion dans la construction des chemins de fer, l’immigration, les bibliothèques itinérantes – de plus, avec un certain succès. » Gosnell insistait aussi sur le fait qu’il avait agi, à sept reprises, à titre de secrétaire particulier d’un premier ministre ; Oliver jugea cet argument non pertinent, car le poste n’appartenait pas à la fonction publique. Dans une note de service du 20 juin 1925, Oliver conclut qu’il avait bien évalué la situation de Gosnell trois ans plus tôt : « La condition précaire actuelle de M. Gosnell est uniquement due à son imprévoyance et à son intempérance bien connue. »

En 1929, R. Edward Gosnell ne poursuivait plus sa demande de compensation pour les livres offerts à la bibliothèque ; l’un de ses successeurs à titre de bibliothécaire provincial, John Hosie, ne trouva aucune preuve de l’existence de tels dons. À la suite de l’élection du gouvernement conservateur de Richard Bedford Bennett* en juillet 1930, Gosnell déclara dans une lettre à un cousin : « Un ami très proche de Bennett et du gouvernement m’a assuré en toute connaissance de cause qu’on subviendrait amplement à mes besoins jusqu’à la fin de mes jours. » Ce scénario ne se réalisa toutefois pas. En avril 1931, à cause de sa bronchite chronique, Gosnell retourna en Colombie-Britannique vivre avec sa fille. Après sa mort, le gouvernement provincial se procura quelques documents et livres en ne payant que pour le coût de leur transport, et accorda 100 $ à sa famille pour contribuer au règlement des frais funéraires. Afin de perpétuer la mémoire de Gosnell, on avait donné son nom à une voie d’évitement de la Canadian National Railway Company en Colombie-Britannique en 1929, et sa fille dévoila un portrait de lui à la bibliothèque de l’Assemblée législative en 1950. Les archives publiques et la bibliothèque de la Colombie-Britannique, dont il posa les fondations, continuent d’attirer des chercheurs de partout dans le monde.

David Mattison

BAC possède un répertoire des publications de R. Edward Gosnell.

AO, RG 80-5-0-144, no [008468].— BAC, R233-35-2, Ontario, dist. Bothwell (178), sous-dist. Howard (A), div. 1 : 27.— BCA, GR-0441.223, file 14 ; GR-0441.246, file 8 ; GR-0441.306, file P-3-D ; GR-0975.2.8 ; GR-1738.61.16 ; GR-2951, no 1931-09-454793 ; MS-1111 ; PR-1407.— FD, Church of England (Valcartier, Québec), 18 déc. 1859.— Daily Colonist (Victoria), 26, 28 août 1894 ; 21 janv. 1950.— Inland Sentinel (Kamloops, C.-B.), 1er juin 1894.— Vancouver Daily Province, 15 avril 1928.— Vancouver Daily World, 15 avril, 14 août 1890.— C.-B., Treasury Dept., Public accounts (Victoria), 1893–1917.— Terry Eastwood, « R. E. Gosnell, E. O. S. Scholefield and the founding of the Provincial Archives of British Columbia, 1894–1919 », BC Studies (Vancouver), no 54 (été 1982) : 38–62.

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David Mattison, « GOSNELL, R. EDWARD », dans Dictionnaire biographique du Canada, vol. 16, Université Laval/University of Toronto, 2003– , consulté le 22 nov. 2024, https://www.biographi.ca/fr/bio/gosnell_r_edward_16F.html.

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Auteur de l'article:    David Mattison
Titre de l'article:    GOSNELL, R. EDWARD
Titre de la publication:    Dictionnaire biographique du Canada, vol. 16
Éditeur:    Université Laval/University of Toronto
Année de la publication:    2023
Année de la révision:    2023
Date de consultation:    22 nov. 2024