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FAIRBANKS, CONSTANCE (Piers), secrétaire, journaliste, rédactrice en chef, sténographe, poète et conférencière, née le 10 mai 1866 à Dartmouth, Nouvelle-Écosse, fille de Lewis Piers Fairbanks et d’Elizabeth (Ella) Ann Dewolfe ; le 7 janvier 1901, elle épousa à Halifax Harry Piers, et ils eurent un fils ; décédée le 17 janvier 1939 dans cette ville.
Constance Fairbanks naquit dans une des plus vieilles et éminentes familles de la Nouvelle-Écosse, dont les membres s’étaient illustrés dans les domaines juridique, commercial et politique. Son grand-père paternel, Charles Rufus Fairbanks*, avait été maître des rôles et juge de la Cour de vice-amirauté ; son père, Lewis Piers, était ingénieur civil et propriétaire du canal Shubenacadie, projet mis en branle par Charles Rufus ; et son oncle paternel, Samuel Prescott Fairbanks*, ancien homme politique, était employé dans la fonction publique. En raison de problèmes de santé, Constance fit la majeure partie de ses études à la maison.
Constance semblait promise à une existence raffinée, mais, à cause des revers de fortune de son père, elle fut contrainte de travailler pour gagner sa vie, fait très inhabituel pour une jeune fille de la grande bourgeoisie. Elle obtint son premier poste en 1887, en tant que secrétaire de Charles Frederick Fraser*, surintendant du Halifax Asylum for the Blind ; elle occupa cet emploi durant trois ans. À cette époque, elle commença à collaborer au journal hebdomadaire de Fraser, le Critic, qui se définissait, en 1888, comme « un journal provincial des Maritimes voué au commerce, au secteur manufacturier, à l’exploitation minière et à l’agriculture ». Sa ligne éditoriale était résolument progressiste et il appuyait des causes comme le droit de vote des femmes. En 1890, Mlle Fairbanks fut nommée rédactrice adjointe et, deux ans plus tard, promue directrice de la rédaction.
À titre de représentante du Critic, Mlle Fairbanks assista au congrès de la New England Woman’s Press Association à Boston, en mai 1890, et cette expérience la marqua profondément. Comme bien des gens des provinces Maritimes, avant et après elle, elle choisit d’émigrer dans les « États de Boston », ce qu’elle fit en 1893. Elle décrocha à St Johnsbury, au Vermont, un poste de rédactrice adjointe au Caledonian, journal appartenant à un cousin éloigné, Arthur Fairbanks Stone. Son jeune frère Kenneth travaillait également dans cette ville, comme dessinateur. Malgré sa petitesse, la communauté avait une réputation enviable de culture intellectuelle. Un des orateurs itinérants qui y vint, l’humoriste français Paul Blouet (connu sous le pseudonyme de Max O’Rell), avait écrit en 1892 : « Il y a ici une douzaine d’églises, une bibliothèque publique, une salle de lecture, un musée, des écoles, et une salle de conférences […] La ville ne compte que six mille habitants, dont mille cent sont venus assister à ma conférence ce soir – dans quelle ville européenne de six mille habitants [verrait-on] mille cent personnes se déplacer pour une causerie littéraire ? » Mlle Fairbanks appuyait la lutte pour le droit de vote des femmes et fut peut-être active dans le St Johnsbury Woman’s Club, fondé en mai 1892. On ne sait ni quand ni pourquoi elle quitta le Vermont, mais elle était de retour à Halifax en 1898. Il se peut que la solitude et le mal du pays influencèrent sa décision. Quoi qu’il en soit, elle resta très attachée à la Nouvelle-Angleterre : en février 1899, elle prononcerait devant la Halifax Literary Society une conférence sur l’histoire et l’héritage littéraire de la ville de Concord, au Massachusetts.
Le court passage de Mlle Faibanks comme rédactrice adjointe au Caledonian, en 1893–1894, avait vraisemblablement conclu sa carrière journalistique. Après son retour à Halifax, elle aurait sans doute repris ses fonctions au Critic, si ce dernier n’avait cessé ses activités en 1896. Au lieu de cela, elle travailla comme sténographe et devint auteure indépendante de prose et poèmes. En 1893, elle avait fait une première incursion d’édition littéraire en publiant avec Harry Piers, à Halifax, Frankincense and myrrh, selections from the poems of the late Mrs. William Lawson, (M.J.K.L.). L’auteure de ce livre de 152 pages, Mary Jane Katzmann*, originaire de la région, avait probablement mentoré Mlle Fairbanks. En 1896, cette dernière recevait déjà des critiques élogieuses pour son propre travail. En 1900, Theodore Harding Rand* publia trois de ses poèmes dans A treasury of Canadian verse. L’un s’intitule Halifax :
Faisant face à la mer, gardien de notre terre,
Tes forts et tes remparts redoutables dominent
[l’écume
Dont les vagues grugent sans cesse le rivage
[rocailleux,
Tandis que les vents salins apportent chez nous des
[bouffées d’odeurs marines.
Toute l’année, la marche lourde des hommes armés,
La sonnerie perçante du clairon, les fusils midi et soir,
Et la musique militaire, nous rappellent encore
Que la Grande-Bretagne nous protège
[avec une volonté jalouse.
Au cours des 40 années suivantes, les textes de Mlle Fairbanks seraient publiés dans plusieurs magazines au Canada et en Angleterre.
En 1901, à l’âge de 34 ans, Mlle Fairbanks se maria avec son ancien corédacteur, Piers, récemment nommé conservateur adjoint des archives publiques, conservateur du Provincial Museum et bibliothécaire de la Provincial Science Library. Mlle Fairbanks était membre de l’Église d’Angleterre mais, à la demande de Piers, elle accepta que leur mariage soit célébré par le révérend John Forrest*, ministre de l’Église presbytérienne au Canada et recteur de la Dalhousie University. Mme Piers n’avait plus besoin de travailler pour gagner sa vie, mais elle continua de proposer ses services à titre de sténographe jusqu’à la naissance de son fils, en 1903. Son mariage lui permit de consacrer sa vie à la promotion des arts et des lettres, et à l’écriture de poèmes. Elle encouragea grandement la production de pièces de théâtre dans les Maritimes et elle appuierait activement la Theatre Arts Guild de Halifax. En 1905, avec Kate Mackintosh*, entre autres, elle fonda le Ladies’ Musical Club of Halifax, dont elle fut longtemps la secrétaire publicitaire. Membre du comité directeur de la section provinciale de la Canadian Authors Association (comme son mari, qui ferait également partie du conseil national), elle présida le concours de poésie et le comité de publication de l’organisme ; elle supervisa aussi l’évaluation des textes reçus au concours de 1934 et fit paraître les meilleurs dans An Acadian sheaf. Comme le livre se vendit bien, on répéta l’expérience l’année suivante ; parmi les lauréats publiés dans ce deuxième volume figuraient Egbert Chesley Allen*, Kathryn Munro et Kenneth Leslie*. Mme Piers était également membre de la Poetry Society, fondée en Angleterre en 1909. Elle écrivit des comptes rendus de livres pour le Darmouth Patriot, et des critiques musicales et théâtrales pour l’Acadian Recorder, hebdomadaire de Halifax. Conférencière recherchée en matière de musique, d’histoire et de littérature, elle présenta en mars 1927, à la Nova Scotia Historical Society, un exposé sur la maison de campagne de Richard John Uniacke* au mont Uniacke.
Mme Piers n’avait reçu aucune formation classique. Comme on le souligna dans la notice nécrologique parue dans le Canadian Author de Montréal en avril 1939, elle fut toutefois « éduquée dans la riche tradition des chanteurs acadiens ». Non seulement elle lisait beaucoup, mais elle suivait des cours universitaires afin de développer ses talents littéraires. Elle se considérait vraiment comme une versificatrice et ses contemporains la prenaient au sérieux, même si elle n’était pas du même calibre que sa tante Catherine (Cassie) Fairbanks, dont The lone house, paru à Halifax en 1859, et The log of the sail of the Sailors’ Rest, publié dans la même ville dans les années 1880, sont des petits bijoux du genre. Mme Piers aspirait à devenir une grande poète, mais elle n’y parvint pas. Comme elle l’écrivit en 1936 à Martha Eugenie Perry, de la section de Victoria et des îles de la Canadian Authors Association : « Même si je ne peux espérer atteindre un jour les hauteurs du mont Parnasse, je sais tout de même que mes écrits ont donné à certains plus qu’un simple plaisir, et, en ce sens, peut-être en valent-ils la peine. » Un recueil de ses poèmes, intitulé Christmas pie, serait publié l’année avant sa mort.
Constance Fairbanks (Piers) fut l’une des premières femmes journalistes, rédactrices et critiques, et cela constitue sa principale contribution à la vie culturelle canadienne. Elle encouragea l’écriture plus qu’elle ne la pratiqua elle-même de façon significative. Dans Canadian men and women of the time, paru à Toronto en 1912, Henry James Morgan* la décrit comme une « littératrice », ce qui saisit parfaitement sa nature : elle était en effet une amatrice de littérature qui, à défaut de posséder un talent naturel ou des connaissances appliquées, faisait preuve d’un enthousiasme passionné et d’une intelligence rigoureuse. À une époque plus récente, on l’aurait qualifiée de spécialiste des arts et de la culture. Les activités artistiques correspondaient à la nature et aux goûts des femmes intellectuellement douées issues, comme elle, de la grande bourgeoisie. Sa notice nécrologique parue dans le Canadian Author la décrit comme une personne « chaleureuse » et infailliblement gentille, qui fit beaucoup pour « appuyer et faire progresser » la cause de la Canadian Authors Association. Lors du congrès national et de l’assemblée annuelle de l’organisme, qui se tint quelques mois après la mort de Mme Piers, Nathaniel Anketell Michael Benson*, directeur de la rédaction du Canadian Poetry Magazine, lui rendit hommage, ainsi qu’à d’autres personnes. Comme le relata l’édition d’octobre 1939 du Canadian Author, il loua ces gens pour avoir « si loyalement fait entendre leurs opinions et leurs chansons dans [les] pages [de la revue] » et pour s’être consacrés à « cette noble cause de la poésie ».
Constance Fairbanks (Piers) est l’auteure de Christmas pie : selections from verses written for private greeting cards and calendars […] (Halifax, 1938). Pour la section locale de la Canadian Authors Assoc. en Nouvelle-Écosse, elle a collaboré à l’édition de l’ouvrage An Acadian sheaf : selections from current Nova Scotian poetry (2 vol., Halifax, 1934–1935), dans lequel figurent quelques-uns de ses vers. Ses poèmes Halifax, The junction et Those far-off fields ont paru dans A treasury of Canadian verse, with brief biographical notes, T. H. Rand, édit. (Toronto et Londres, 1900 ; réimpr. Freeport, N.Y., 1969). Son poème Quietude a été publié dans A new Canadian anthology, Alan Creighton, édit. (Toronto, 1938). Il n’existe aucune bibliographie complète de sa poésie, que l’on peut lire dans plusieurs périodiques et journaux, dont : Canadian Homes and Gardens, Canadian Magazine, Canadian Poetry Magazine, Crucible, Saturday Night et Week (tous publiés à Toronto) ; Poetry of To-day : the Poetry Review New Verse Supplement et Poetry Review (tous deux parus à Londres) ; et la publication montréalaise Poetry Year Book. On ignore où se trouvent les papiers qu’elle a légués à son fils, Edward Stanyan Fairbanks Piers (1903–1971). Le manuscrit de sa communication inédite « Mount Uniacke : an old colonial mansion and its historic heirlooms » est conservé aux NSA, MG 20, vol. 676 (Nova Scotia Hist. Soc.), item 1. Une partie de sa correspondance ainsi qu’un album de coupures (qui montre clairement sa fascination pour les origines de la famille Fairbanks, ancrées en Nouvelle-Angleterre, et ses relations contemporaines) sont conservés avec les papiers de son mari aux NSA, MG 1, vol. 753–758, 758A, 1046–1051, 1153A, 1464–1466 (Harry Piers fonds).
BCA, MS-0697 (Martha Eugene Perry papers).— Halifax County Court of Probate (Halifax), Estate papers, no 14929.— NSA, MG 20, vol. 1–3 (Canadian Authors Assoc., Nova Scotia branch) ; vol. 183, 183A, 184 (Halifax Ladies Musical Club).— Acadian Recorder (Halifax), 1901–1930.— Caledonian (St Johnsbury, Vt), 1893–[1898 ?].— Critic (Halifax), 1890–1894.— Dartmouth Patriot (Dartmouth, N.-É.), 1901–1939.— C. H. Fairbanks, Fairbanks family record (Cleveland, Ohio, 1886).— R. J. Long, Nova Scotia authors and their work : a bibliography of the province (East Orange, N.J., 1918).— Thomas O’Hagan, « Some Canadian women writers », Catholic World (New York), 63 (avril–septembre 1896) : 779–795.— Simon Fraser Univ. Library, « SFU digitized collections », Canada’s early women writers, Piers, Constance Fairbanks : digital.lib.sfu.ca/ceww-747/piers-constance-fairbanks (consulté le 20 sept. 2016).— Who was who among North American authors : 1921–1939 (2 vol., Detroit, 1976), 2.— Woman’s who’s who of America : a biographical dictionary of contemporary women of the United States and Canada, 1914–1915, J. W. Leonard, édit. (New York, 1914 ; réimpr. Detroit, 1976).
Barry Cahill, « FAIRBANKS, CONSTANCE (Piers) », dans Dictionnaire biographique du Canada, vol. 16, Université Laval/University of Toronto, 2003– , consulté le 22 déc. 2024, https://www.biographi.ca/fr/bio/fairbanks_constance_16F.html.
Permalien: | https://www.biographi.ca/fr/bio/fairbanks_constance_16F.html |
Auteur de l'article: | Barry Cahill |
Titre de l'article: | FAIRBANKS, CONSTANCE (Piers) |
Titre de la publication: | Dictionnaire biographique du Canada, vol. 16 |
Éditeur: | Université Laval/University of Toronto |
Année de la publication: | 2019 |
Année de la révision: | 2019 |
Date de consultation: | 22 déc. 2024 |