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BLACKSTOCK, GEORGE TATE, avocat, né le 1er avril 1856 à Newcastle, Haut-Canada, fils de William Schenck Blackstock et de Mary Hodge Gibbs ; le 25 février 1880, il épousa à Bay City, Michigan, Emiline (Emma) Moulton Fraser, et ils eurent deux fils et une fille ; décédé le 27 décembre 1921 à Toronto.
George Tate Blackstock eut une enfance éprouvante. Son père, d’ascendance irlando-écossaise, était ministre de l’Église méthodiste wesleyenne. Comme il devait faire la tournée d’une circonscription ecclésiastique, les Blackstock menèrent longtemps une existence nomade. Même s’ils réduisaient leurs besoins au minimum, ils avaient souvent du mal à joindre les deux bouts. Ils vivaient à crédit et, vu que beaucoup d’assemblées de fidèles étaient trop pauvres pour le payer en argent, le révérend Blackstock acceptait, à la place, des aliments ou d’autres biens. Parfois, les enfants habitaient chez des parents de leur mère, issue d’une famille distinguée d’Oshawa, en Ontario. Le révérend Blackstock veillait assidûment à ce qu’ils étudient la Bible, Shakespeare et les classiques. Après l’installation des Blackstock à Goderich, George Tate y fréquenta un moment la grammar school. En grande partie grâce à l’héritage de sa mère et à l’assistance de la famille de celle-ci, il fut admis en 1871 à l’Upper Canada College de Toronto, où il étudia la rhétorique. En 1874, il entra à l’école de droit d’Osgoode Hall, où il reçut son diplôme quatre ans plus tard.
Admis au barreau en 1879, Blackstock travailla d’abord au cabinet Rose, Macdonald, and Merritt, à Toronto, et se fit vite connaître pour sa compétence en droit civil. On dit que, au tribunal, il en imposait par sa présence ; c’était « un type de belle apparence, à la chevelure foncée, affable et amical dans les conversations et tout à fait dénué de réserve ou de nervosité dans les réunions mondaines ». En 1880–1881, il donna des conférences sur la Loi sur les fraudes dans le cadre d’une série organisée par l’Osgoode Legal and Literary Society. Admis au cabinet Wells, Gordon, and Sampson en 1882, il le quitta bientôt pour ouvrir son propre bureau, où il combinerait litiges civils et criminels. Conseiller juridique de la Compagnie du chemin de fer canadien du Pacifique de 1881 à 1894, il prit part aux séances d’arbitrage entre cette société et le gouvernement fédéral au sujet de l’expansion du chemin de fer vers l’ouest. En 1885, il accéda au premier conseil d’administration de la York County Law Association et, le 2 décembre 1889, il reçut le titre de conseiller fédéral de la reine. L’habileté avec laquelle il défendit Reginald Birchall* en 1890 au cours d’un retentissant procès pour meurtre accrut considérablement son prestige d’avocat plaidant, même s’il perdit la cause.
En 1892, Blackstock s’intégra à un cabinet solidement implanté dans l’establishment conservateur de Toronto : Beatty, Blackstock, Nesbitt, and Chadwick. Son frère, Thomas Gibbs Blackstock, et David Fasken y pratiquaient avec brio le droit des sociétés. Un des premiers associés à avoir une expérience de barrister, George Tate aida le cabinet à se tailler une réputation devant les tribunaux. On lui confia de nombreuses affaires d’importance, tant à titre d’avocat de la défense que de procureur de la couronne. Deux d’entre elles mettaient en cause de prétendus cartels et, dans les deux cas, il représentait la couronne. L’affaire de la Dominion Wholesale Grocers’ Guild en 1909 – association qui, dit-il, maintenait « le peuple sous un joug d’airain » – se solda par une défaite pour lui et, en 1913, il ne parvint pas à rassembler des preuves suffisantes pour intenter des poursuites contre la Stamped Ware Association, dont faisait partie l’entreprise de John McClary. Toujours en tant que procureur de la couronne, il provoqua un incident au cours de l’enquête sur le meurtre d’Ethel Caroline Kinrade, qui se déroula à Hamilton en 1909 et fit la manchette des journaux du pays. En soumettant le témoin principal, la propre sœur de la victime, à un contre-interrogatoire serré, il l’accusa d’être impliquée dans le crime, et elle s’évanouit. En mai 1913, au retour de son voyage annuel en Angleterre, il quitta le cabinet Beatty, Blackstock avec quatre autres avocats et fonda avec eux un nouveau bureau, Blackstock, Galt, and Gooderham.
Conservateur, Blackstock était un fervent adepte de l’unité impériale. Ses oncles Thomas Nicholson Gibbs* et William Henry Gibbs, qui avaient tous deux fait partie du gouvernement de sir John Alexander Macdonald*, l’avaient encouragé à se lancer en politique. Dans les années 1880, il correspondit avec Macdonald sur divers sujets ; ainsi, il intercéda par trois fois, en vain, pour que William Albert Reeve* obtienne un siège de juge au Manitoba. Candidat dans la circonscription provinciale de Lennox en 1884 et en 1885 et dans la circonscription fédérale de Durham West en 1887 et en 1891, il ne remporta la victoire à aucune de ces occasions. Le décès de Macdonald et le déclin des conservateurs semblent avoir mis fin à ses ambitions, quoiqu’il soit resté actif dans des comités du parti et se soit distingué par son zèle soutenu en faveur de la cause conservatrice.
On tenait Blackstock pour un orateur éloquent et plein d’esprit. Aussi bien en Grande-Bretagne et aux États-Unis qu’au Canada, il était souvent invité à des banquets, à des assemblées politiques et à des réceptions où se retrouvait la fine fleur de la société. « Partout on me fait fête, écrivit-il de New York en 1903, dîners et lunchs se succèdent sans interruption [...] Tout le monde dit que je suis le simple citoyen étranger le plus connu aux États-Unis. » Ses discours et articles, consacrés en général à des thèmes politiques, étaient abondamment cités. En septembre 1907, devant l’Association des manufacturiers canadiens, il plaida en faveur d’« une conception plus élevée du devoir impérial » et reprocha au Canada de ne pas aider suffisamment la Grande-Bretagne à maintenir ses forces armées et à porter les fardeaux de l’Empire. À propos d’un discours prononcé par lui plus tôt le même mois au Canadian Club de Toronto, le Saturday Night déclara : « [c’était] le plus spirituel et le plus divertissant de l’année, et le plus direct ; il appelait les Canadiens à se donner des idéaux élevés en matière de citoyenneté et d’art de gouverner ». En mars 1911, Blackstock fonda, avec Alexander Whyte Wright* et le député provincial Arthur Clarence Pratt, la section canadienne d’une association anglaise, l’Imperial Mission, et en fut élu premier président. Cette section décida de promouvoir l’unité impériale en luttant contre la réciprocité, alors défendue par le gouvernement de sir Wilfrid Laurier*. En Angleterre, Blackstock était une vedette. La National Conservative Union avait fait appel à lui maintes fois pour qu’il prononce des discours pendant la campagne électorale britannique de 1910 et, par la suite, il déclina plusieurs invitations à se présenter au Parlement.
Par moments, Blackstock dut négliger sa carrière d’avocat à cause de sa santé. En plus, il eut des problèmes personnels. Dans les années 1890, des « soucis domestiques » l’avaient miné. Il confia à un ami que, « pendant qu’il attendait son tour de prendre la parole au tribunal, la sueur se mettait à couler du bout de ses doigts ». Atteint d’« hypocondrie hystérique chronique » selon des médecins spécialistes de New York et de Toronto, notamment le docteur Daniel Clark*, il séjourna dans plusieurs établissements américains. Sa femme obtint le divorce le 1er octobre 1896 à Newport, dans le Rhode Island, pour défaut de pourvoir. On ignore toutefois « si ses problèmes familiaux étaient la cause ou la conséquence de ses difficultés personnelles », comme le dit une histoire du cabinet Beatty, Blackstock. Finalement, son état de santé et des problèmes de vision l’obligèrent à abandonner la pratique du droit.
George Tate Blackstock retomba malade en Angleterre avant la Première Guerre mondiale. Il finit par rentrer au Canada, où deux de ses sœurs prirent soin de lui. Il vécut quelque temps à Buffalo, dans l’État de New York, après la fin des hostilités, et mourut dans sa maison de Toronto. Un concert d’éloges suivit son décès. Un de ses amis, membre réputé du barreau new-yorkais, y alla de cette phrase, qui exprimait avec éloquence la perte ressentie par nombre de gens : « Que cet homme ait reçu des qualités si brillantes et si attachantes, puis ait été privé de sa vigueur physique et laissé si démuni dans la fleur de l’âge, voilà un exemple de la totale prodigalité de la nature. »
George Tate Blackstock est l’auteur de « Canada and the Venezuelan settlement », Canadian Magazine, 8 (nov. 1896–avril 1897) : 170–175.
AO, RG 22-305, nº 44453.— Bay City Daily Tribune (Bay City, Mich.), 26 févr. 1880.— Daily Mail and Empire, 2 oct. 1896, 28 déc. 1921.— Evening Telegram (Toronto), 28, 30 déc. 1921.— Globe, 3 oct. 1896, 30 oct. 1905, 25 juill. 1906, 27 sept. 1907, 9 janv., 11–13 mars, 5 mai 1909 ; 28, 30 déc. 1921.— Toronto Daily Star, 28 déc. 1921.— World (Toronto), 2 oct. 1896, 30 oct. 1905.— Frank Arnoldi, « George Tate Blackstock », Canadian Magazine, 58 (nov. 1921–avril 1922) : 424–435.— C. M. Blackstock, All the journey through (Toronto, 1997).— Canadian men and women of the time (Morgan ; 1912).— C. I. Kyer, « The transformation of an establishment firm : from Beatty Blackstock to Faskens, 1902–1915 », dans Essays in the history of Canadian law, D. H. Flaherty et al., édit. (8 vol. parus, [Toronto], 1981– ), vol. 7 (Inside the law : Canadian law firms in historical perspective, Carol Wilton, édit., 1996) : 161–206.
S. Craig Wilson, « BLACKSTOCK, GEORGE TATE », dans Dictionnaire biographique du Canada, vol. 15, Université Laval/University of Toronto, 2003– , consulté le 21 déc. 2024, https://www.biographi.ca/fr/bio/blackstock_george_tate_15F.html.
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Auteur de l'article: | S. Craig Wilson |
Titre de l'article: | BLACKSTOCK, GEORGE TATE |
Titre de la publication: | Dictionnaire biographique du Canada, vol. 15 |
Éditeur: | Université Laval/University of Toronto |
Année de la publication: | 2005 |
Année de la révision: | 2005 |
Date de consultation: | 21 déc. 2024 |