Provenance : Lien
BELL, CHARLES NAPIER, milicien, auteur, fonctionnaire, agent de chemin de fer, spécialiste du commerce céréalier et historien, né le 9 février 1854 à Perth, Haut-Canada, fils de James Bell et de Jane Judd ; le 15 février 1882, il épousa à Toronto sa cousine Alice Maud Georgina Bell, et ils eurent deux fils et deux filles ; décédé le 29 août 1936 à Minaki, Ontario.
Charles Napier Bell, dont le père était le registraire du comté de Lanark, fit ses études dans des écoles publiques à Perth. Dès son plus jeune âge, il manifesta un goût marqué pour l’aventure, et, à 12 ans, il s’enrôla dans le 28th (Perth) Battalion of Infantry comme sonneur de clairon pour combattre les fenians. Il resta avec l’unité jusqu’en 1870, soit jusqu’au moment où, avec le jeune Samuel Benfield Steele*, il se joignit au corps expéditionnaire de la Rivière-Rouge [V. Louis Riel*] sous le commandement du colonel Garnet Joseph Wolseley*. Il arriva à Fort Garry (Winnipeg) à l’automne de 1870, et décida rapidement de demeurer dans l’Ouest.
À Fort Garry, Bell trouva d’abord du travail comme magasinier chez les marchands Alexander Begg* et Andrew Graham Ballenden Bannatyne*. Homme sociable doté d’une personnalité joyeuse et d’une grande curiosité, il ne tarda pas à faire connaissance avec les colons de la Rivière-Rouge et passa la majeure partie de son temps libre à visiter leurs foyers et à recueillir leurs histoires. En 1872, il décrivit une vie active et bien remplie dans son journal et dans des lettres à sa famille. La même année, il entreprit un voyage le long de la rivière Saskatchewan-du-Nord pour explorer les régions encore vierges du Nord-Ouest. Il acheta un cheval, une charrette de la Rivière-Rouge, des provisions, un fusil et des marchandises de troc, et vécut avec un groupe de chasseurs métis. Durant l’année suivante, il commerça avec les Pieds-Noirs, les Assiniboines et les Cris, chassa le bison, étudia les oiseaux et autres animaux, et nota le détail de ses observations. Lorsqu’il retourna au Manitoba en 1873, le lieutenant-gouverneur Alexander Morris* lui demanda un rapport sur ses expériences. Dans son compte rendu, Bell exprima son inquiétude quant à la situation précaire des Autochtones de la région, à l’heure où les troupeaux de bisons diminuaient et où de plus en plus de chasseurs devaient se tourner vers d’autres types de gibier.
Bell trouva un emploi de commis au bureau de douane de Winnipeg, probablement à la fin de 1873 ou en 1874. Quelques années après, il quitta son travail pour devenir agent de chemin de fer, poste qu’il occuperait durant environ une décennie, d’abord à la Compagnie du chemin de fer canadien du Pacifique, puis à la Chicago, Milwaukee and St Paul Railroad Company. En 1882, il se rendit en Ontario, où il épousa Alice Maud Georgina Bell, de Kingston. Installée avec son mari à Winnipeg, cette dernière s’engagea dans diverses œuvres de bienfaisance ; le couple se joignit à la communauté de l’église presbytérienne Knox.
Bell devint secrétaire du Bureau de commerce de Winnipeg en 1886 et, peu après, de la nouvelle Winnipeg Grain and Produce Exchange, du Grain Survey Board, du Western Grain Standards Board, et d’un bureau chargé d’évaluer la qualité des céréales. Il accéda à ces fonctions en dépit de son instruction limitée, en grande partie à cause de la rareté des candidats locaux à l’époque. Engagé dans des activités commerciales à petite échelle à Winnipeg, il centra cependant sa carrière sur la promotion des intérêts économiques de la ville et de l’Ouest canadien, en particulier dans le domaine des céréales. Pour les organismes qu’il représentait, il participa à l’étranger à un certain nombre de conférences impériales sur le commerce. Le British Imperial Council of Commerce l’accueillit à titre de membre permanent. Il fut secrétaire de la Winnipeg Industrial Exhibition de 1891, de la commission royale d’enquête sur l’expédition et le transport du grain en 1899, et de la commission royale des voies de transport [V. Robert Wilson Reford*] quatre ans plus tard. En 1916, il prit sa retraite de la Winnipeg Grain and Produce Exchange (Robert Magill* lui succéda) et du commerce des céréales.
Passionné d’histoire, Bell écrivit de nombreux textes sur l’Ouest canadien. La Société historique et scientifique de Manitoba, qu’il contribua à fonder avec George Bryce en 1879, et qu’il présida de 1889 à 1891 et de 1913 à 1929, publia certains de ses premiers articles. Les débuts de la colonisation dans la province et son histoire économique constituaient ses principaux sujets de prédilection. Un de ses essais portait sur un projet, qu’il appuya avec enthousiasme, visant à créer un débouché pour le transport par la baie d’Hudson. Dans les années 1880, ses travaux parurent dans des journaux au Canada et à l’étranger, et il fut élu membre de la Royal Geographical Society, de la Royal Scottish Geographical Society, d’une société savante internationale sur l’histoire de Paris et d’un certain nombre de sociétés aux États-Unis. Son style d’écriture était clair et divertissant, et il s’efforçait de faire preuve d’impartialité. Par exemple, à l’occasion du soixante-quinzième anniversaire de la bataille de Seven Oaks (Winnipeg) [V. Robert Semple*], il reconnut, dans les Transactions de la Société historique et scientifique de Manitoba, publiées à Winnipeg, que la véracité des faits s’établissait difficilement ; afin que les lecteurs puissent tirer leurs propres conclusions, il leur fournit des comptes rendus de première main de deux versions de l’événement : le premier provenait de John Pritchard*, colon de la Rivière-Rouge, et le second de François-Firmin Boucher, de la North West Company. L’université de Manitoba lui décerna un doctorat honorifique en droit en 1914 ; elle reconnut ainsi la contribution des nombreux travaux de Bell à l’étude de l’histoire et de l’archéologie de l’Ouest canadien. Au fil des ans, Bell souligna souvent dans ses écrits la nécessité de la conservation des documents et autres sources d’information relatifs à l’histoire de l’Ouest ; en 1914, le premier ministre sir Rodmond Palen Roblin lui demanda, ainsi qu’au professeur Chester Bailey Martin*, de créer une commission qui jetterait les fondations des futures Archives du Manitoba.
Actif dans la vie sociale de Winnipeg, Bell appartint au Club de Manitoba, au St Charles Country Club et au Canadian Club (qu’il présida en 1912). Membre de la loge maçonnique de l’endroit, qui l’élut grand maître en 1895, il siégea au Suprême conseil du 33e degré du rite écossais ancien et accepté de la franc-maçonnerie du Canada. Durant de nombreuses années, il fit partie du conseil d’administration de l’Hôpital Général de Winnipeg. Il occupa aussi des postes de second plan ; en 1896, par exemple, on le nomma consul du Guatemala à Winnipeg.
Amateur passionné de patinage sur glace, Bell, chaussé de ses patins, parcourut en 1877 les 22 milles entre Winnipeg et Selkirk en deux heures et quart. On lui attribue le mérite d’avoir introduit le patinage artistique dans l’Ouest canadien ; de plus, il entraîna le patineur de vitesse winnipegois Jack McCulloch (aussi originaire de Perth), qui remporterait le championnat mondial de 1897 à Montréal.
Charles Napier Bell mourut en 1936, à l’âge de 82 ans. De cet infatigable défenseur des intérêts de l’Ouest canadien, on retient son association à la quasi-totalité des activités publiques et commerciales, de nature non politique, de Winnipeg. La vie de ce fervent partisan de l’histoire de l’Ouest fut à l’image de la croissance et du développement de son coin de pays. Il partageait nombre des valeurs et traditions de l’élite commerciale de la région, mais ses écrits révèlent qu’il ne souhaitait pas laisser le souvenir d’un homme d’affaires. L’esprit d’aventure qui le conduisit dans le Nord-Ouest, avec guère plus qu’un cheval et une charrette de la Rivière-Rouge, l’accompagna durant toute son existence, qu’il consacra à l’avenir de l’Ouest canadien et à la mémoire de son passé.
Le DBC/DCB tient à remercier Jim Blanchard, ancien directeur des services de référence à l’Elizabeth Dafoe Library de la Univ. of Manitoba, à Winnipeg, pour l’aide apportée pendant la préparation de cette biographie.
Parmi les publications de Charles Napier Bell figurent les ouvrages Our northern waters […] (Winnipeg, 1884) et The Selkirk settlement and the settlers […] (Winnipeg, 1887), ainsi que plusieurs articles de journaux parus à Winnipeg dans Commercial, Country Guide and Nor’-West Farmer, Manitoba Free Press et Manitoba Sun. Bell a aussi publié plusieurs articles dans les Trans. (Winnipeg) de la Hist. and Scientific Soc. of Manitoba, dont « The affair of “Seven Oaks” », 1re sér., no 43 (1891–1892) : 16–24. Une liste de ses contributions à ce périodique est accessible à l’adresse suivante : Manitoba Hist. Soc., « Memorable Manitobans : Charles Napier Bell (1854–1936) » : www.mhs.mb.ca/docs/people/bell_cn.shtml (consulté le 27 sept. 2018).
AM, MG10 F2 (Hist. and Scientific Soc. of Manitoba fonds) ; MG14 C23/3/2 (Notebook and account book of Charles N. Bell) ; MG14 C100 (Robert and Agnes Bell fonds).— Evening Tribune (Winnipeg).— A. F. J. Artibise, Winnipeg : a social history of urban growth, 1874–1914 (Montréal et Londres, 1975).— Alexander Begg et W. R. Nursey, Ten years in Winnipeg : a narration of the principal events in the history of the city of Winnipeg from the year A.D. 1870 to the year A.D. 1879, inclusive (Winnipeg, 1879).— R. [C.] Bellan, Winnipeg first century : an economic history (Winnipeg, 1978).— Canadian men and women of the time (Morgan ; 1898 et 1912).— W. J. Healy, Winnipeg’s early days […] (Winnipeg, 1927).— D. A. MacGibbon, The Canadian grain trade (Toronto, 1932).— W. L. Morton, Manitoba : a history (Toronto, 1957).— Douglas Owram, Promise of Eden : the Canadian expansionist movement and the idea of the west, 1856–1900 (Toronto, 1980).— Winnipeg Grain and Produce Exchange, Annual report (Winnipeg), 1889–1908.
Leslie D. Castling, « BELL, CHARLES NAPIER », dans Dictionnaire biographique du Canada, vol. 16, Université Laval/University of Toronto, 2003– , consulté le 20 nov. 2024, https://www.biographi.ca/fr/bio/bell_charles_napier_16F.html.
Permalien: | https://www.biographi.ca/fr/bio/bell_charles_napier_16F.html |
Auteur de l'article: | Leslie D. Castling |
Titre de l'article: | BELL, CHARLES NAPIER |
Titre de la publication: | Dictionnaire biographique du Canada, vol. 16 |
Éditeur: | Université Laval/University of Toronto |
Année de la publication: | 2021 |
Année de la révision: | 2021 |
Date de consultation: | 20 nov. 2024 |