Titre original :  William Fraser., BM1,S5,P0725

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FRASER, WILLIAM, prêtre catholique et évêque, né en 1778 ou 1779 à Glenn Cannich, Écosse, aîné des 12 enfants de John Fraser et de Jane Chisholm ; décédé le 4 octobre 1851 à Antigonish, Nouvelle-Écosse.

William Fraser étudia au séminaire de Samalaman, dans la région de Moidart, en Écosse, après avoir fréquenté l’école élémentaire de son district natal. En janvier 1794, il entreprit ses études théologiques au Royal Scots College de Valladolid, en Espagne, où il fut ordonné le 8 janvier 1804. Peu après, il rentra en Écosse où son cousin, Mgr John Chisholm, lui confia la responsabilité de toutes les missions de la région de Lochaber. Pendant une décennie, il desservit la population réduite mais dispersée de l’endroit, puis passa huit ans à la direction du College of Killechiarain, séminaire des Highlands, dans l’île de Lismore. La vie missionnaire et la vie scolaire convenaient bien à Fraser, qui était aimé et respecté des paroissiens comme des élèves. Il vit ses talents reconnus lorsque, après la mort en 1818 d’un autre de ses cousins, Æneas Chisholm, évêque de Lismore, il apparut parmi les candidats à la succession qui étaient proposés à la Propagande. Il ne fut pas sélectionné, mais cet événement le plaça en bonne position pour des nominations futures.

Durant toutes ses années à Lismore, Fraser avait exprimé le vif désir d’imiter certains de ses compatriotes highlanders en immigrant en Nouvelle-Écosse. La présence de l’Église catholique dans cette colonie avait d’abord été assurée, pendant les xviie et xviiie siècles, par des missionnaires venus de France et de Nouvelle-France pour desservir la population acadienne. Puis, après que la Nouvelle-Écosse fut passée aux mains de la Grande-Bretagne en 1763, quelques prêtres avaient eu la permission de s’installer au milieu des catholiques qui se trouvaient parmi la population autochtone et acadienne ainsi que parmi les immigrants irlandais et écossais, de plus en plus nombreux. Les activités de l’Église dans les Maritimes avaient été placées sous la juridiction du diocèse de Québec et dirigées, à compter de 1787, par un vicaire général nommé par l’évêque de Québec. En 1815, la Propagande, à Rome, avait jugé que le territoire du diocèse devenait trop vaste et, en 1818, l’abbé Edmund Burke*, vicaire général de la Nouvelle-Écosse, avait été sacré évêque titulaire de Sion et vicaire apostolique de la Nouvelle-Écosse. En juin 1821, l’abbé Angus Bernard MacEachern* était sacré évêque titulaire de Rosen et nommé vicaire général de l’Île-du-Prince-Édouard, du Nouveau-Brunswick et des îles de la Madeleine.

Avant de mourir, en 1820, Mgr Burke avait offert à Fraser une mission près d’Antigonish, mais celui-ci dut attendre jusqu’en 1822 pour obtenir la permission de se rendre en Nouvelle-Écosse. Quand Fraser arriva, en août, le pape n’avait pas encore nommé le successeur de Burke. L’abbé John Carroll, curé de Halifax, exerçait les fonctions d’administrateur. Mgr MacEachern, qui était d’origine écossaise, présenta Fraser aux Highlanders de l’île du Cap-Breton et de la région d’Antigonish. Peu après, Fraser fut affecté à une mission du cap Mabou, dans l’île du Cap-Breton, et, moins d’un mois plus tard, il fut chargé des missions des lacs Bras d’Or. En janvier 1824, il fut nommé curé de la paroisse St Ninian, dont le siège se trouvait à Antigonish ; il allait y demeurer toute sa vie.

Dès décembre 1823, grâce à ses aptitudes et à son dévouement pour les missions, Fraser fut recommandé comme un digne candidat à la succession de Burke. Le 7 décembre 1824, après un effort concerté pour trouver un candidat irlandais, Léon XII approuva la nomination de Fraser comme évêque titulaire de Tanen et vicaire apostolique de la Nouvelle-Écosse. Fraser fut sacré à Antigonish le 24 juin 1827 par son bon ami MacEachern. Son vicariat s’étendait sur toute la partie continentale de la Nouvelle-Écosse ; dans l’Est vivait une importante population de Highlanders, tandis que le sud-ouest était peuplé d’Acadiens et qu’une communauté active et croissante d’Irlandais habitait Halifax et les alentours. En septembre 1830, l’île du Cap-Breton, où vivait un grand nombre d’Écossais, était ajoutée au vicariat et, six ans plus tard, les Bermudes étaient placées sous la juridiction de Fraser. Lui-même estimait déjà, en 1831, que la population catholique de la province s’élevait au moins à 50 000 personnes, dont plus de la moitié venaient d’Écosse et seulement un dixième environ, d’Irlande.

Dès sa nomination, Fraser trouva que les Irlandais de Halifax, déçus qu’un de leurs compatriotes n’ait pas été choisi comme évêque, constituaient une responsabilité particulièrement lourde. En choisissant de demeurer à Antigonish – où il jugeait sa présence nécessaire parce qu’il parlait le gaélique –, Fraser s’aliéna les Irlandais de Halifax, qui estimaient que le siège du diocèse aurait dû être dans la communauté la plus populeuse. Carroll ayant quitté la province à la fin de 1827, Halifax se retrouva sans curé et le successeur désigné par Fraser, l’abbé John Loughnan, bien qu’Irlandais, allait subir le ressentiment des Irlandais envers Fraser. En 1839, avec l’aide de l’archevêque de Dublin, Daniel Murray, et après des représentations répétées de la part des habitants de Halifax, Fraser parvint à obtenir les services de deux prêtres irlandais, Lawrence Joseph Dease et Richard Baptist O’Brien. Ils se révélèrent populaires auprès des Irlandais de Halifax, mais ne s’entendirent pas avec Loughnan qui estimait qu’ils collaboraient trop étroitement avec les « riches et les puissants » et subvertissaient son autorité de représentant de Mgr Fraser.

Les difficultés de Fraser à Halifax ne demeurèrent pas ignorées de la Propagande à Rome. Après une visite à Halifax en 1840, Mgr John England, évêque de Charleston, en Caroline du Sud, fit à l’archevêque de Dublin un compte rendu détaillé de la situation qui y régnait. Murray écrivit ensuite à Rome, pressant les cardinaux de nommer, pour assister Fraser, un évêque coadjuteur irlandais nanti du droit de succession. Dans une lettre datée du 19 octobre 1840, le père Vincent de Paul [Merle], supérieur des trappistes de la Nouvelle-Écosse et ami de Fraser, fit une recommandation semblable. À la fin de 1841, la situation s’aggrava à la suite d’une querelle entourant le départ de Dease. Un comité de marguilliers et d’électeurs de la cathédrale St Mary fit appel à Fraser pour qu’il permette à Dease de rester. Les accusant de s’immiscer dans les affaires du clergé, Fraser rejeta sèchement leur requête, déclarant que « toute demande future [...] sera[it] reçue avec [...] un mépris absolu et bien mérité ». Partisan de Fraser, l’abbé Hugh O’Reilly, curé de Pictou, écrivit dans un journal local, sous le pseudonyme d’Hibernicus, une série de lettres attaquant « la conduite des schismatiques irlandais et catholiques de la capitale ». Ces lettres anonymes amenèrent le conflit sur la place publique et pressèrent encore davantage Rome d’agir.

Le 9 janvier 1842, Grégoire XVI approuva une recommandation de la Propagande à l’effet de transformer le vicariat apostolique de la Nouvelle-Écosse en diocèse et de nommer un prêtre irlandais, William Walsh, coadjuteur de Fraser, avec droit de succession. Durant toutes leurs discussions, les autorités de Rome n’avaient ni communiqué avec Fraser, ni reçu de ses nouvelles. Fraser apprit la nomination de Walsh dans un journal de Halifax et dans une lettre que celui-ci écrivit après son sacre, en mai 1842. Fraser avait quelque raison de croire qu’il avait été traité injustement et il était ennuyé que quelques dissidents, parmi les 60 000 catholiques de la province, soient parvenus à obtenir une intervention aussi radicale des autorités romaines. Il avait l’appui de 21 des 23 prêtres du diocèse qui, le 27 mai 1842, envoyèrent au cardinal Giacomo Filippo Fransoni, préfet de la Propagande, une pétition dans laquelle ils pressaient le pape d’annuler la nomination de Walsh et exprimaient leur loyauté et leur soutien à Fraser. Treize de ces prêtres écrivirent aussi à Walsh pour lui faire part de leur opposition à sa nomination et à la « faction » de Halifax qui avait provoqué la crise.

L’arrivée de Walsh à Halifax, en octobre 1842, polarisa encore davantage les forces favorables et opposées à Fraser. Traditionnellement, un coadjuteur ne peut agir sans l’autorisation de son évêque, et Fraser hésitait à investir Walsh de quelque autorité avant d’avoir reçu de Rome la confirmation officielle de sa nomination. Il prescrivit cependant à Walsh de prendre la responsabilité des affaires temporelles de l’Église à Halifax des mains des marguilliers et électeurs de St Mary qui, croyait-il, avaient créé une bonne part de ses difficultés. Il conserva aussi Loughnan dans ses fonctions de vicaire général, décision qui allait susciter une querelle ouverte entre Loughnan et Walsh. Pendant presque un an et demi, des mémoires provenant des deux camps affluèrent à Rome. Finalement, en mars 1844, Walsh s’embarqua pour cette ville afin d’obtenir une solution définitive au problème. Il semblait à la plupart des observateurs que la seule solution était de diviser le diocèse selon l’origine des fidèles en créant un diocèse pour les Écossais et un autre pour les Irlandais. Fraser avait proposé cette possibilité en mai 1842, avant même d’avoir entendu parler de la nomination de Walsh. Celui-ci approuvait cette solution, mais il estimait que le problème venait en partie de ce que Fraser était inapte à administrer et à gouverner un diocèse, si petit soit-il, et croyait que, même en n’ayant que les régions écossaises, Fraser aurait encore besoin d’un coadjuteur pour l’assister.

Le débat se poursuivit, Fraser, Walsh et leurs partisans exposant leurs positions respectives aux cardinaux qui, le 2 septembre 1844, décidèrent que le diocèse devait être scindé. Le diocèse de Fraser, fondé officiellement le 22 septembre, comprenait l’île du Cap-Breton et le territoire des comtés actuels d’Antigonish et de Guysborough. Le 20 juillet 1845, Walsh devint évêque de Halifax et Fraser, évêque d’Arichat. Malgré le fait que le siège du diocèse ait été Arichat, Fraser choisit de demeurer à Antigonish, ce qui lui causa plus tard, avec les Acadiens de l’île du Cap-Breton, des problèmes semblables à ceux qu’il avait connus avec les Irlandais de Halifax.

Fraser avait perdu la bataille, mais il avait gagné la guerre : il n’avait plus à s’occuper de la « faction » irlandaise de Halifax et, pendant les six années suivantes, il revint à ses premières amours – développer les missions du diocèse en construisant des écoles et des églises pour ses compatriotes écossais. Ses difficultés à Halifax avaient eu plusieurs causes, et l’antagonisme historique entre Écossais et Irlandais n’était pas la moindre. La personnalité de Loughnan et la détermination des catholiques irlandais de Halifax de participer aux affaires de l’Église avaient aussi joué, mais Fraser aurait pu surmonter ces difficultés. Son manque d’aptitudes administratives l’empêcha de résoudre le problème avant qu’il ne prenne de trop grosses proportions. Il demeura à Antigonish et, en définitive, ce furent d’autres personnes qui prirent des décisions.

Même si ce conflit de juridiction marqua sa carrière d’évêque, Fraser accomplit beaucoup dans le domaine de l’éducation. En 1838, il avait accepté de mauvaise grâce une proposition de la communauté irlando-catholique de créer à Halifax un collège, reconnu juridiquement le 29 mars 1841 sous le nom de St Mary’s College. À Arichat, il ouvrit la St Andrew’s Grammar School, embryon de la St Francis Xavier University d’Antigonish. Il encouragea aussi la formation de plusieurs groupes de tempérance dans tout le diocèse.

Quand William Fraser mourut à Antigonish le 4 octobre 1851, ce ne fut pas de ses faiblesses d’administrateur dont on se souvint. On le décrivit plutôt comme un « prélat profondément instruit, [...] vénérable, [qui] était toujours remarquablement affable, honnête et discret », qui « ne recherchait jamais la gloire » et qui « avait conquis l’attachement et le respect de toutes les classes de la société ». Fuyant les richesses, il vécut simplement parmi les gens qu’il desservait. On peut dire de lui qu’il fut un bon missionnaire, plus doué des vertus ecclésiastiques fondamentales de sa vocation que des compétences politiques et administratives nécessaires à un évêque. Son successeur fut Colin Francis MacKinnon*.

David B. Flemming

AAH, William Fraser papers ; William Walsh papers.— Hibernicus [Hugh O’Reilly], The letters of Hibernicus : extracts from the pamphlet entitled A report of the committee of St. Mary’s, Halifax, N.S., and a review of the same (Pictou, N.-É., 1842).— G. M. Haliburton, Clansmen of Nova Scotia (Halifax, 1979).— A. A. Johnston, Hist. of Catholic Church in eastern N.S.— D. J. Rankin, A history of the county of Antigonish, Nova Scotia (Toronto, 1929).— J. E. Burns, « The development of Roman Catholic church government in Halifax from 1760 to 1853 », N.S. Hist. Soc., Coll., 23 (1936) : 89–102.— A. A. Johnston, « The Right Reverend William Fraser, second vicar apostolic of Nova Scotia, first bishop of Halifax, and first bishop of Arichat », SCHÉC Report, 3 (1935–1936) : 23–30 ; « A Scottish bishop in New Scotland : the Right Reverend William Fraser, second vicar apostolic of Nova Scotia, first bishop of Halifax, and first bishop of Arichat », Innes Rev. (Glasgow, Écosse), 6 (1955) : 107–124.— Mason Wade, « Relations between the French, Irish and Scottish clergy in the Maritime provinces, 1774–1836 », SCHÉC Study sessions, 39 (1972) : 9–33.

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David B. Flemming, « FRASER, WILLIAM », dans Dictionnaire biographique du Canada, vol. 8, Université Laval/University of Toronto, 2003– , consulté le 24 déc. 2024, https://www.biographi.ca/fr/bio/fraser_william_8F.html.

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Auteur de l'article:    David B. Flemming
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Titre de la publication:    Dictionnaire biographique du Canada, vol. 8
Éditeur:    Université Laval/University of Toronto
Année de la publication:    1985
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