WELD, WILLIAM, fermier, marchand, éditeur et journaliste, né le 10 décembre 1824 à Berwick St John, Angleterre, fils du révérend Joseph Weld et d’Elizabeth Eleanor Waks ; en 1845, il épousa Agnes Johnston, et ils eurent neuf fils et deux filles ; décédé le 3 janvier 1891 à London, Ontario.

William Weld passa son enfance à Berwick St John, où il reçut un enseignement privé. Il immigra en Amérique du Nord en 1843 et s’établit sur une terre à Delaware, dans le Haut-Canada. Grâce à l’application de principes scientifiques énoncés dans des revues britanniques et américaines, il vint à bout de problèmes d’agriculture propres au Canada, et sa ferme prospéra. Weld fut bientôt connu aux alentours pour ses succès et la qualité du bétail qu’il élevait. Sa réussite l’amena à ouvrir un commerce de distribution de graines, le Canadian Agricultural Emporium ; il put ainsi introduire le blé Red Fife [V. David Fife*] et d’autres variétés améliorées de grains dans la région de Delaware.

Weld estimait que le travail de ferme était une profession et que les cultivateurs, qu’il appelait souvent des agronomes ; avaient besoin d’une formation professionnelle. À son avis, cependant, les collèges d’agriculture étaient le refuge de rêveurs et de bénéficiaires de nominations politiques. Il savait par expérience que les revues spécialisées en agriculture constituaient une bonne source de connaissances pratiques. Comme ses voisins recherchaient déjà ses conseils, il semblait aller de soi que de spécialiste local il devienne journaliste en agriculture. En 1866, Weld fonda donc le Farmer’s Advocate and Home Magazine, qui devait devenir à la fois une entreprise commerciale et un véhicule de propagation de ses idées dans le domaine de l’agriculture.

Pendant un certain temps, le Farmer’s Advocate fut rédigé et publié à la ferme de Weld à Delaware mais, comme la revue retint bientôt toute son attention, il ouvrit vers 1867 un bureau d’édition à London, tout près de là, et laissa l’exploitation de sa ferme à deux de ses fils, William Stephen et Joseph. Les premiers numéros de la revue ne contenaient que quelques pages mais, après peu d’années, quand elle fut devenue un mensuel bien connu, on pouvait y trouver des articles sur des techniques d’agriculture, des nouvelles, une page féminine et une section destinée aux enfants, ainsi que des récits de fiction à l’intention des lecteurs ruraux. Dans les années 1880, le Farmer’s Advocate était la revue agricole la plus lue au Canada et son tirage mensuel atteignait près de 17 000 exemplaires. En 1891, un fils de Weld, Thomas Saxon, entreprit à Winnipeg la publication d’une édition pour l’Ouest.

Lorsque Weld fit ses débuts dans le journalisme, l’agriculture canadienne traversait une période de profonds changements. En Ontario, comme la fluctuation des prix rendait la culture du blé plus ou moins rentable, les fermiers se tournaient vers l’élevage du bétail et la production laitière. Weld encourageait justement la diversification des activités agricoles ; dans ses articles, il vantait les mérites de nouvelles techniques, comme l’exploitation d’une ferme laitière en hiver et l’ensilage. Il se servit aussi de sa revue pour promouvoir la colonisation du Manitoba et du Nord-Ouest, ajoutant qu’il était préférable que les fermiers de cette région se concentrent sur l’exploitation de ranchs et la culture de céréales, et laissent l’industrie laitière aux Canadiens de la région du Centre.

La place de plus en plus grande qu’occupait l’État dans l’économie agricole constituait un thème majeur de la réflexion de Weld. Il était d’accord avec certains programmes gouvernementaux, et fit même valoir qu’il avait pressé le gouvernement du dominion de renforcer les règlements de quarantaine qui protégeaient le bétail de la pleuropneumonie et d’autres maladies non répandues au Canada mais endémiques ailleurs. Il appuya aussi les règlements qui visaient à empêcher la vente de lait falsifié à des fromageries et à des beurreries. Cependant, au début des années 1870, Weld s’opposa au gouvernement ontarien, qui projetait d’établir un collège d’agriculture et une ferme modèle, en laissant entendre qu’il valait mieux laisser aux éditeurs de revues agricoles le soin d’instruire les fermiers ; il suggéra aussi de subventionner des entreprises privées, tel son commerce, afin de favoriser le travail expérimental. En 1884, lorsque le gouvernement fédéral proposa d’établir une ferme expérimentale à Ottawa, il manifesta plusieurs fois son opposition à ce projet, et prédit que la ferme tomberait inévitablement entre les mains de politiciens incompétents et de scientifiques rêveurs.

Weld était d’avis que les gouvernements étaient incapables d’exploiter une ferme expérimentale qui offrirait de l’information utile aux agriculteurs. Peut-être craignait-il aussi que ce type d’établissement ne menace la position dominante qu’occupait sa revue dans le domaine de l’information agricole. Toutefois, sa méfiance à l’égard du gouvernement s’atténua quand William Saunders* et James Wilson Robertson*, deux spécialistes en agriculture qu’il respectait, furent nommés à la Central Experimental Farm en 1886. En quelques années, les pages du Farmer’s Advocate s’enrichirent d’articles de Robertson et d’autres fonctionnaires, ce qui força Weld à reconsidérer son opinion sur les fermes gouvernementales. Enfin, le fait que Saunders ait réussi à faire diminuer les influences politiques à la ferme expérimentale persuada Weld d’accepter ce qu’il appelait « l’inévitable », et il cessa ses attaques. En 1890, il avait fait sienne l’idée de la participation du gouvernement à la recherche et à la formation en agriculture, et il faisait l’éloge de John Carling*, fondateur du réseau de fermes expérimentales.

Membre actif d’un certain nombre d’organismes du domaine agricole, Weld contribua en 1874 à la formation du premier chapitre de la National Grange of the Patrons of Husbandry dans l’ouest de l’Ontario. L’année suivante, il devint maître de la Delaware Grange et délégué provisoire de la Grange fédérale. Weld partageait l’avis des membres selon lequel la politique de parti divisait les agriculteurs et les empêchait de s’entendre sur les questions agricoles ; il désapprouvait cependant leurs boycottages et leurs plans de commercialisation coopératifs. Il démissionna de ses fonctions peu de temps après et rédigea une série de critiques ; en 1880, il s’était complètement dissocié de l’organisme.

Weld mourut dans un accident bizarre. En grimpant sur le toit de sa maison pour chercher la source d’une fuite, il tomba dans un puits de lumière. Il eut la tête coincée dans le réservoir d’eau qui alimentait sa salle de bain et, incapable de se dégager, il se noya.

Grâce à ses éditoriaux directs qui poussaient le gouvernement à adopter des règlements efficaces, à ses attaques sur l’esprit de parti et le favoritisme ainsi qu’aux nouvelles techniques qu’il mit de l’avant, William Weld devint le journaliste agricole le plus connu de son temps. Malgré le ton souvent acerbe et excessif de ses articles, il était prêt à reconnaître ses erreurs et à évoluer. Ses contemporains virent en lui un visionnaire, un pionnier de bonnes techniques agricoles et un défenseur objectif des intérêts des agriculteurs. La survie du Farmer’s Advocate au xxe siècle témoigne de la portée de ses réalisations.

Ian M. Stewart

Canada, chambre des Communes, Journaux, 1884, app. 6.— Farmer’s Advocate and Home Magazine (London, Ontario), 1867–1891.— J. E. Middleton et Fred Landon, The province of Ontario : a history, 1615–1927 (5 vol., Toronto, [1927–1928]).— A. [G.] Bogue, « The fighting farmer, William Weld », Western Ontario Hist. Notes (London), 3 (1945) : 75–78.

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Ian M. Stewart, « WELD, WILLIAM », dans Dictionnaire biographique du Canada, vol. 12, Université Laval/University of Toronto, 2003– , consulté le 20 déc. 2024, https://www.biographi.ca/fr/bio/weld_william_12F.html.

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Auteur de l'article:    Ian M. Stewart
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Titre de la publication:    Dictionnaire biographique du Canada, vol. 12
Éditeur:    Université Laval/University of Toronto
Année de la publication:    1990
Année de la révision:    1990
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