TURNBULL, WILLIAM WALLACE, homme d’affaires et philanthrope, né le 23 mai 1828 à Bear River, Nouvelle-Écosse ; le 13 juin 1854, il épousa à Maugerville, Nouveau-Brunswick, Julia Caroline Hatheway, sœur de George Luther Hatheway*, et ils eurent deux fils et trois filles ; décédé le 26 juin 1899 à Saint-Jean, Nouveau-Brunswick.

William Wallace Turnbull était le deuxième fils de William Baxter Turnbull, dont les grands-parents avaient émigré d’Édimbourg, et de Relief Ann Tucker, descendante de loyalistes. En 1846, il s’établit à Saint-Jean, où W. D. W. Hubbard, commissaire-priseur, lui offrit un emploi de commis. Moins de deux ans après, il devint teneur de livres pour la firme G. and J. Salter.

En 1851, Turnbull lança sa propre affaire d’épicerie et d’alimentation en gros ; quelques années plus tard, il entreprit l’exploitation commerciale de navires et le transport de marchandises. Décrit dans une notice nécrologique comme « le marchand le plus prospère » de Saint-Jean, il avait fondé la Turnbull and Company avec seulement 200 $ en poche ; en outre, probablement à cause d’« un bon nombre de mauvaises créances et d’entreprises hasardeuses » au début de sa carrière, il s’écoula de nombreuses années avant qu’il ne s’attire les éloges du milieu des affaires. Après le grand incendie de 1877, qui détruisit ses installations du quai South Market, Turnbull établit son entreprise rue Ward et s’associa à Joseph Flewelling Merritt. Six ans plus tard, Gabriel Wetmore Merritt se joignit à eux. Turnbull s’occupait activement du Board of Trade de Saint-Jean, dont il fut membre du conseil d’administration de 1867 à 1872 et de 1886 à 1887.

À titre d’homme d’affaires dans une ville des Maritimes en pleine période de fluctuation économique, Turnbull était bien au fait des changements que la Confédération entraînait. Il s’opposait fortement à la Politique nationale [V. Sir Samuel Leonard Tilley] et affirmait qu’elle arrachait d’« importantes sommes en taxes des poches des gens, sans [...] leur [donner...] aucun avantage compensatoire ». Il était en faveur du libre-échange, car il considérait cette pratique comme « parfaitement saine en principe » et capable d’agir pour « le plus grand bien du plus grand nombre » de ses concitoyens. Même s’il ne prit pas une part active à la vie politique, Turnbull était libéral, ce qui n’a peut-être rien de surprenant.

James Davies Lewin, collègue de Turnbull à la direction de la Bank of New Brunswick, ferait remarquer après le décès de ce dernier qu’il avait toujours été « prêt à adopter de nouvelles méthodes et à entreprendre de nouvelles activités commerciales ». Comme beaucoup de ses contemporains qui étaient à la recherche d’investissements rentables, Turnbull fut attiré par les chemins de fer. Membre du groupe qui fit construire le New Brunswick Railway, de Gibson (Fredericton) à Edmundston, il se départit de ses intérêts dans cette entreprise en 1880. Turnbull investit aussi dans l’immobilier à Saint-Jean. En 1892, il fonda la première entreprise immobilière de la ville constituée juridiquement, la Turnbull Real Estate Company, qui était le plus important propriétaire immobilier au moment de sa mort. Vers 1896, il avait vendu ses intérêts dans la Turnbull and Company aux Merritt, qui réorganisèrent l’entreprise sous le nom de Merritt Brothers and Company. Les dernières décisions que prit Turnbull dans le cours de ses affaires témoignent donc du déclin que connurent les marchands en gros de Saint-Jean après la Confédération.

Malgré que Turnbull se soit consacré presque entièrement aux affaires, il joua aussi un rôle actif dans plusieurs associations de bénévoles. Pendant sa jeunesse, il fut membre des Fils de la tempérance, et il occupa un certain nombre de fonctions dans la division néo-brunswickoise de cet organisme ; il s’abstint d’ailleurs de toute boisson alcoolique durant sa vie. En 1884, il fut élu président du Saint John Protestant Orphans’ Asylum, poste qu’il occupa jusqu’à deux ans avant son décès.

Vers la fin de sa vie, Turnbull pensa sérieusement à la possibilité d’établir à Saint-Jean une maison pour les malades incurables, qui, à cette époque, pouvaient seulement trouver refuge dans les hospices des pauvres. L’année avant sa mort, il visita un certain nombre d’établissements de ce genre aux États-Unis. Faisant valoir que Saint-Jean n’attirait plus beaucoup de marins, il offrit de doter un foyer pour les incurables de 100 000 $, à la condition que le gouvernement fédéral fasse le don du Marine Hospital à cette fin. Après avoir considéré son offre, Ottawa accepta, peut-être parce qu’on savait que Turnbull avait ajouté un codicille dans son testament selon lequel ses exécuteurs devaient fournir les fonds pour l’établissement. C’est en 1899, après le décès de Turnbull, que fut fondé le Home for Incurables ou, comme on l’appelait, le Turnbull Home. « Personne ne doit être disqualifié comme bénéficiaire pour cause de race, de sexe, d’âge, de croyance ou de couleur », avait spécifié Turnbull. On devait accorder la préférence aux déshérités de Saint-Jean, mais on pouvait aussi accueillir les malades qui avaient les moyens de payer les services offerts. Cette « magnifique bienveillance » fut l’exemple le plus éloquent de la générosité de Turnbull envers sa ville adoptive. Ses œuvres philanthropiques firent de lui l’un des citoyens exceptionnels de Saint-Jean.

Même s’il avait été élevé dans la religion presbytérienne, Turnbull assistait aux offices anglicans avec sa famille ; il ne se considérait toutefois pas comme « membre de cette Église ou d’une autre », car « son esprit [était] indécis quant à ce qui [était] vraiment la doctrine de foi et de pratique orthodoxe ». Le jour de ses obsèques, les épiciers grossistes des quais North et South Market, ainsi que ceux de la rue Ward, fermèrent leur commerce pour assister au service anglican célébré à l’église St John (Stone) pour ce « fils de ses œuvres ».

William Wallace Turnbull laissa dans le deuil sa femme et ses cinq enfants, dont Wallace Rupert Turnbull*, qui, à partir de son laboratoire de Rothesay, au Nouveau-Brunswick, serait à l’avant-garde de la recherche en aéronautique au Canada. Au moment de son décès, Turnbull était probablement l’homme d’affaires le plus riche de Saint-Jean, avec une fortune évaluée à 750 000 $. En plus de son legs à l’établissement pour les incurables et d’un don de 10 000 $ à l’église St John, il laissa des montants substantiels à ses enfants. Il donna des instructions pour que l’argent destiné à ses filles soit « au seul usage de chacune d’elles et non soumis à l’administration de leur mari ».

Elizabeth W. McGahan

APNB, RG 7, RS71, 1899, W. W. Turnbull.— Musée du N.-B., Turnbull family, CB Doc.— Daily Telegraph (Saint-Jean, N.-B.), 1er, 27 juin 1899.— St. John Daily Sun, 27, 29 juin 1899.— Saint John Globe, 3 mai, 27, 29 juin 1899.— Cyclopædia of Canadian biog. (Rose et Charlesworth), 2.— E. W. McGahan, « The port in the city : Saint John, N.B. (1867–1911) and the process of integration » (thèse de ph.d., Univ. of N.B., Fredericton, 1979), 122, 763, 765.— Harold McCullagh, A century of caring : the story of the New Brunswick Protestant Orphans’ Home (St Stephen[-Milltown], N.-B., 1986), 147.

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Elizabeth W. McGahan, « TURNBULL, WILLIAM WALLACE », dans Dictionnaire biographique du Canada, vol. 12, Université Laval/University of Toronto, 2003– , consulté le 20 déc. 2024, https://www.biographi.ca/fr/bio/turnbull_william_wallace_12F.html.

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Titre de la publication:    Dictionnaire biographique du Canada, vol. 12
Éditeur:    Université Laval/University of Toronto
Année de la publication:    1990
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