STUART, JOHN, trafiquant de fourrures et explorateur, né le 12 septembre 1780, probablement à Leanchoil, près de Nethy Bridge, Écosse, fils de Donald Stuart et de Janet Grant ; décédé le 14 janvier 1847 près de Forres, Écosse.

En 1796, ses études terminées, John Stuart entra au service de la North West Company, peut-être par l’intermédiaire de Roderick Mackenzie, qui l’avait connu enfant. Affecté d’abord au fort Chipewyan (Fort Chipewyan, Alberta), Stuart travailla ensuite dans divers postes du département de l’Athabasca. En 1805, il était l’assistant de Simon Fraser*. Celui-ci avait pour mission de trouver un trajet de ravitaillement par les Rocheuses afin que la North West Company puisse étendre ses activités jusque sur le territoire actuel de la Colombie-Britannique. À l’automne, les deux hommes établirent Rocky Mountain House (Alberta) et, l’année suivante, ce qui deviendrait le fort St James (Fort St James, Colombie-Britannique), sur le lac Stuart. Comme les Indiens aussi bien que les trafiquants souffraient de la faim, on chargea Stuart de trouver un chemin jusqu’à Nat-len (lac Fraser) où, disait-on, les provisions abondaient. Sur la foi de son rapport, Fraser construisit un poste sur ce lac en 1806. Stuart passa l’hiver de 18061807 au fort McLeod (McLeod Lake, Colombie-Britannique), établi en 1805 sur le lac du même nom.

Après l’arrivée de renforts et de provisions, à l’automne de 1807, le groupe se prépara à descendre le fleuve qui s’appelle aujourd’hui Fraser mais que l’on prenait à l’époque pour le Columbia. Le 28 mai 1808, Stuart, nommé commandant en second, quitta le fort George (Prince George) en compagnie de Fraser et de 22 hommes pour entreprendre cette descente épique. L’expérience fut des plus éprouvantes : naviguer dans les remous, les rapides et les cañons exigeait une persévérance et une adresse surhumaines. Le 2 juillet, l’équipe dépassa l’emplacement de New Westminster et arriva en vue du détroit de Georgia. Elle remonta ensuite le fleuve et regagna le fort George le 6 août. L’expédition avait été décevante : le cours d’eau était trop dangereux pour servir au ravitaillement et ce n’était pas le Columbia. Néanmoins, Stuart s’était révélé un lieutenant irremplaçable. Navigateur habile, il avait tenu le journal de l’expédition et fait les observations méridiennes ; de plus, il n’avait manifesté aucune crainte devant les Indiens, soupçonneux, dont certains n’avaient encore jamais vu d’homme blanc.

De retour au lac McLeod, Stuart fut placé en 1809 à la tête de la région située à l’ouest des Rocheuses, New Caledonia. En 1813, il se rendit du lac Stuart au Columbia dans le but de trouver une route d’approvisionnement entre le territoire de New Caledonia et la côte du Pacifique. En octobre, au fort Astoria (Astoria, Oregon), il signa, avec d’autres, le contrat de vente de la Pacific Fur Company à la North West Company, dont il devint associé la même année. Stuart retourna au fort St James en 1814, soit l’année où des marchandises de traite arrivèrent du fort George par le Fraser, la Thompson, l’Okanagan et le Columbia. Il semble que la North West Company n’adopta pas définitivement ce trajet, qui permettait aux postes de la région de New Caledonia de recevoir leurs approvisionnements d’Angleterre par bateau plutôt que de Montréal par voie de terre.

De 1817 à 1820, Stuart assuma, semble-t-il, la direction de Pierre-au-Calumet (au nord de Fort McMurray, Alberta). Il prit part aux manœuvres de harcèlement par lesquelles les Nor’Westers parvinrent à empêcher les hommes de la Hudson’s Bay Company, tel John Clarke*, de prendre pied dans la région de l’Athabasca. De retour au fort George au plus tard en mars 1821, il supervisa, cette année-là, l’établissement du fort Alexandria (Alexandria, Colombie-Britannique).

Devenu agent principal après la fusion de la North West Company et de la Hudson’s Bay Company en 1821, Stuart demeura à la direction du territoire de New Caledonia jusqu’en 1824. Puis, « incapable de supporter encore les difficultés et les épreuves » qu’il avait acceptées sans broncher jusque-là, il demanda une mutation. À cette occasion, il fit valoir que ses relations avec les Indiens avaient toujours été bonnes et nota que le meurtre de deux employés de la Hudson’s Bay Company par deux Porteurs au fort George en 1823 l’avait profondément affecté [V. ˀKwah]. Il assuma ensuite la responsabilité des districts de la Saskatchewan (1824–1826) et de Winnipeg (1826–1832). Inhabituelle pour un fonctionnaire qui avait des inclinations et des états de service comme les siens, son affectation dans le district du fleuve Mackenzie, en 1832, était peut-être une sanction. En 1830, Stuart avait maugréé contre les pratiques commerciales de l’agent principal John McLoughlin* en New Caledonia et reproché au gouverneur George Simpson* et à John George McTavish d’abandonner les femmes autochtones qu’ils avaient épousées à la façon du pays. Le portrait exagérément dur que Simpson brossa de lui dans son « Character book » de 1832 contredisait son jugement précédent. En 1828, Simpson avait en effet dit de Stuart qu’il était « le Père [...] de New Caledonia où, pendant 20 ans, il a[vait] été obligé de mener une vie de misères et de privations [... et où], avec une énergie dont peu d’hommes étaient capables, [il avait] surmonté des difficultés auxquelles la traite n’était exposée dans aucune autre partie du pays ».

Stuart obtint en 1835 un congé qui, pour des raisons de santé, se prolongea jusqu’au 1er juin 1839, date où il quitta la Hudson’s Bay Company. Pendant cette période, soit en 1838, il écrivit à Simpson, à Edward Ellice* et à un compagnon de vieille date, Alexander Stewart, pour recommander que la compagnie engage son neveu Donald Alexander Smith*, futur lord Strathcona. Retiré à Forres, en Écosse, Stuart mourut non loin de là, à Springfield House, en 1847. Il avait eu au moins trois enfants : avec une femme dont on ignore le nom, une fille, Isabel, née en 1802, et avec Catherine La Valle, deux fils, Donald et John. En 1827, Stuart avait pris une autre épouse à la façon du pays, Mary Taylor. Elle l’avait rejoint en Écosse en 1836 mais, comme Stuart ne voulait plus tenir sa promesse de l’épouser officiellement, elle était retournée à Rupert’s Land en 1838. Au terme d’un grave litige, les sœurs de Stuart parvinrent à faire passer de £500 à £350 la somme qu’il avait léguée à cette femme.

John Stuart était un homme courageux, un bon voyageur et un trafiquant à la fois compétent et honnête dans ses transactions avec les Indiens. Il fut, pour la North West Company, un fonctionnaire d’une qualité exceptionnelle ; quant à la Hudson’s Bay Company, il la servit bien, même s’il désapprouvait parfois ses méthodes de gestion. Le lac Stuart, en Colombie-Britannique, perpétue sa mémoire.

Shirlee Anne Smith

PAM, HBCA, A.1/60 : 90 ; A.5/11 : 160 ; A.10/7 : fo 306 ; A.44/3 : 70 ; B.4/b/1 : fos 9, 14d–15 ; B.39/a/10 : fos 1d, 5 ; B.188/a/1 : fos 49–49d ; B.188/b/1 : fo 43 ; B.200/a/15 : fos 11d, 29d ; B.239/k/1 : fos 5d, 11d–12, 26, 43, 64d, 107d, 134d, 160d ; B.239/k/2 : 5, 31, 61 ; B.239/k/3 : fos 43, 62d, 76d ; C.1/834 ; D.4/116 : fos 51d–53 ; D.5/31 : fo 482 ; E.24/1 : fos 14d–15, 31d ; F.1/1 : 271–272 ; John Stuart file.— PRO, PROB 11/2138 : 149–150.— Simon Fraser, The letters and journals of Simon Fraser, 1806–1808, W. K. Lamb, édit. (Toronto, 1960).— Hargrave, Hargrave corr. (Glazebrook).— D. W. Harmon, Sixteen years in the Indian country : the journal of Daniel Williams Harmon, 1800–1816, W. K. Lamb, édit. (Toronto, 1957).— HBRS, 1 (Rich) ; 10 (Rich) ; 30 (Williams).— G. C. Davidson, The North West Company (Berkeley, Calif., 1918 ; réimpr., New York, 1967).— Rich, Hist. of HBC (1958–1959), 2.— Van Kirk, « Many tender ties ».— J. N. Wallace, The wintering partners on Peace River from the earliest records to the union in 1821 ; with a summary of the Dunvegan journal, 1806 (Ottawa, 1929).— W. S. Wallace, « Strathspey in the Canadien fur-trade », Essays in Canadian history presented to George MacKinnon Wrong for his eightieth birthday, Ralph Flenley, édit. (Toronto, 1939), 278–295.— Corday MacKay, « With Fraser to the sea », Beaver, outfit 275 (déc. 1944) : 3–7.

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Shirlee Anne Smith, « STUART, JOHN (1780-1847) », dans Dictionnaire biographique du Canada, vol. 7, Université Laval/University of Toronto, 2003– , consulté le 22 déc. 2024, https://www.biographi.ca/fr/bio/stuart_john_1780_1847_7F.html.

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Auteur de l'article:    Shirlee Anne Smith
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Titre de la publication:    Dictionnaire biographique du Canada, vol. 7
Éditeur:    Université Laval/University of Toronto
Année de la publication:    1988
Année de la révision:    1988
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