SPARKS, NICHOLAS, propriétaire foncier et marchand de bois, né en 1794 dans la paroisse de Darrah, comté de Wexford (République d’Irlande), décédé le 27 février 1862 à Ottawa, Haut-Canada.
L’importance de Nicholas Sparks tient beaucoup plus aux biens qu’il possédait qu’à ce qu’il fit. Il ressembla sur bien des points à des centaines d’autres hommes d’affaires habiles, mais on se souvient de lui parce qu’il fut propriétaire de la majeure partie de ce qui devint le centre-ville d’Ottawa.
II émigra au Bas-Canada en 1816 et s’engagea au service du patriarche des pionniers de la vallée de l’Outaouais, Philemon Wright*, à Hull. Sparks fit rapidement la preuve de ses dons en affaires. En 1819, il était chargé d’aller acheter des fournitures pour Wright à Montréal et à Québec. Il amassa bientôt un certain capital et s’installa à son propre compte. En 1821, Sparks vivait de l’autre côté de la rivière Outaouais dans le canton de Nepean, comté de Carleton, Haut-Canada, et se présentait comme un agriculteur. Le 25 septembre de la même année, il acheta un lot de l’arpenteur John Burrows Honey (connu plus tard sous le nom de John Burrows). Sparks reçut, pour la somme de £95, 200 acres de terrain ainsi que des denrées et des biens meubles. Il s’agissait du lot C, concession C, canton de Nepean.
Le lot C allait accaparer la vie entière de Sparks et être à l’origine de sa fortune et de son rang. Pendant la majeure partie de sa carrière, il allait se préoccuper de défendre son droit sur la propriété. Sparks rencontra tout de suite des difficultés avec ce lot. Apparemment Burrows Honey avait vendu un terrain dont il n’était pas propriétaire. La vente initiale eut lieu le 25 septembre 1821, alors que Burrows Honey ne reçut de titre incontestable qu’en 1823 pour la moitié sud du lot et en 1824 pour la partie nord. C’est pourquoi la vente du lot à Sparks ne fut pas inscrite dans le greffe du comté avant le 20 juin 1824. Cette confusion, qui a engendré toutes sortes de controverses entre les historiens de la région sur la date de l’achat, ne s’arrêta pas là. Le titre de Burrows Honey restait douteux, ce qui amena Sparks à racheter les 100 acres de la partie sud le 20 juin 1826. Mais des doutes persistaient ; le 6 mai et le 10 juillet 1830, Sparks versa respectivement à John Burrows Honey et à sa femme la somme symbolique de 5 shillings, achetant ainsi le titre de propriété pour les 200 acres au complet. Il ressort de cet imbroglio que le fameux achat n’eut pas lieu comme on veut bien le croire le 20 juin 1826 mais bien cinq années plus tôt, c’est-à-dire le 25 septembre 1821, même si les formalités juridiques ne furent pas remplies avant 1830.
L’année 1826 fut tout de même marquée d’événements importants. À la fin de 1826, la décision fut prise de faire passer le canal de Rideau à travers le lot C. Le village de Bytown (Ottawa) se développa autour de l’embouchure du canal, et Sparks devint propriétaire des terrains d’une communauté tout entière. C’est pendant ces mois que Sparks donna une autre assise à sa fortune. Le 2 novembre 1826, Sparks et Sally Olmstead, veuve de Philemon Wright, fils, reçurent leur permis de mariage. Cette union consolida les liens de Sparks avec les dirigeants du commerce du bois sur la rivière Outaouais.
Pendant plusieurs années Sparks joua un rôle relativement important dans le commerce du bois sur cette rivière. Il augmenta les intérêts substantiels que lui rapportait le bois de construction grâce à des associations plus ou moins officielles avec les Wright, William et John Thomson, et Peter White pendant les années 1830, et avec la maison Anderson et Paradis à Québec pendant les années 40. Sparks fut un homme d’affaires habile dans le domaine du bois comme dans celui de la propriété foncière. Il était continuellement en retard pour payer ses dettes. En 1834, il fut poursuivi et jugé pour des denrées non payées après livraison ; trois ans plus tard son créancier essayait encore de récupérer ses £2 803.
C’est dans le domaine de la spéculation foncière que Sparks récolta les plus gros dividendes. Dès le 18 décembre 1826, il commença de vendre des portions du lot C et vendit le terrain à l’ouest de l’embouchure du canal pour £200 l’acre, tandis qu’il lui avait coûté 9 shillings et 6 pence l’acre. La vente et la location à bail de terrains eurent vite fait de l’enrichir. Comme il était l’une des rares personnes disposant d’argent liquide, Sparks devint également le plus gros prêteur de Bytown et parvint assez souvent à récupérer des terrains qu’il avait vendus. En janvier 1832, par exemple, il accepta un lot en retour d’une dette de £75. En mai 1832, il vendit un lot adjacent pour £600. Les tractations compliquées de Sparks atteignirent le comble de l’ironie en juillet 1844, lorsqu’il loua une partie d’un lot de 66 pieds sur 99 pieds pour £200 à John Burrows.
Le lot C continua cependant de connaître toutes sortes d’aventures juridiques compliquées. Le 17 novembre 1826, Sparks avait autorisé le lieutenant-colonel John By*, qui dirigeait les travaux du canal de Rideau, à utiliser les terrains nécessaires à la construction. Le contrat stipulait que le terrain pris sur chaque côté du canal ne dépasserait pas 200 pieds de long et « que les terrains non exigibles pour le service de Sa Majesté seraient restitués une fois le canal terminé ». By prit les quelque 88 acres de terrain qui lui étaient nécessaires. En 1827, il essaya d’en acheter d’autres, à savoir la colline qui serait connue sous le nom de Barracks Hill jusqu’à la construction sur cet emplacement des édifices du parlement. Sparks exigea £500, et By trouva le prix trop élevé. Le colonel saisit la propriété conformément aux clauses de la loi de 1827 concernant le canal de Rideau, qui autorisait à prendre les terres nécessaires à la construction du canal.
Sparks entreprit une campagne qui dura 20 ans pour recouvrer son bien. Il poursuivit By pour violation du droit de propriété ; il intenta un procès aux fonctionnaires de l’Intendance militaire qui occupaient les lieux ; il organisa des campagnes de pétition et pressa les députés locaux de porter le débat à la législature. En vérité, si Sparks s’était montré sans pitié à l’égard de ses propres clients, on peut dire que l’armée lui rendit la pareille. By et l’Intendance militaire interprétèrent les modalités du contrat et de la loi dans un sens démesurément large. Les terrains réquisitionnés « pour les besoins du canal » furent utilisés pour des casernes, des terrains de manœuvre, des résidences d’officiers et même comme pâturages pour les chevaux.
En 1843 et 1845, les amis de Sparks à la législature tentèrent de lui faire restituer ses terres en recourant à la loi. Le gouvernement impérial fut obligé de céder. L’Intendance militaire eut beau soutenir qu’elle avait besoin des terrains pour des fins stratégiques, elle dut accepter le principe de l’indemnisation. En septembre 1846, un conseil d’arbitrage se réunit pour définir les modalités de l’indemnisation. Grâce à des pressions politiques à l’Assemblée législative, le conseil fut composé à l’avantage de Sparks. L’imprimeur de la reine et ex-député de Bytown, Stewart Derbishire, s’arrangea avec l’inébranlable défenseur des droits de propriété, John Alexander Macdonald*, pour écraser le délégué de l’Intendance militaire, James Sutton Elliott. Ils accordèrent à Sparks £27 000.
La victoire de Sparks sur l’Intendance militaire confirma qu’il était le patriarche de Bytown. Ce fut toutefois un patriarche d’un genre très particulier. Il fit quelques dons à la communauté mais étonnamment peu nombreux, compte tenu de sa fortune. En 1828, il fit don d’un terrain à l’église presbytérienne St Andrew et, quatre ans plus tard, donna un emplacement à la Christ Church de l’Église d’Angleterre. Sa dernière donation importante fut un terrain pour construire une prison et un tribunal en 1839. Son rôle dans l’entreprise hasardeuse sur la rue Wellington du Her Majesty’s Theatre, dont il était un des actionnaires des débuts, donne une meilleure idée de sa véritable nature. En 1856, lorsque les promoteurs furent incapables de remettre à Sparks l’argent qu’ils lui devaient, le patriarche ne voulut rien entendre de leurs arguments en faveur de la culture. Il recourut aux services de son avocat pour les obliger à le payer.
En dépit de son rang éminent, Sparks nourrissait peu d’ambitions politiques. Il ne chercha jamais à se faire élire à l’Assemblée. À l’occasion, il joua un rôle dans certaines affaires municipales, en faisant partie, par exemple, du conseil municipal de Bytown de 1847 à 1849 et du conseil municipal d’Ottawa de 1855 à 1857 et en 1860, mais ce fut sans doute dans le but de protéger ses terres.
Nicholas Sparks mourut le 27 février 1862 à l’âge de 68 ans. Il laissait un bel héritage à sa femme et à ses 3 enfants, Nicholas, Mary, qui épousa le marchand de bois Alonzo Wright*, et Esther, qui épousa James Dyson Slater. Sparks avait quelque 78 débiteurs qui lui devaient plus de $19 000. Ses biens comprenaient 440 lots à Ottawa, évalués au minimum à $80 686, ainsi que des terres dans les cantons avoisinants et une grande maison sur la rue Sparks. Cette fortune démontrait indéniablement qu’avec de la chance, de la ténacité et de la sagacité, on pouvait réussir au Canada à l’époque des pionniers.
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Michael S. Cross, « SPARKS, NICHOLAS », dans Dictionnaire biographique du Canada, vol. 9, Université Laval/University of Toronto, 2003– , consulté le 22 déc. 2024, https://www.biographi.ca/fr/bio/sparks_nicholas_9F.html.
Permalien: | https://www.biographi.ca/fr/bio/sparks_nicholas_9F.html |
Auteur de l'article: | Michael S. Cross |
Titre de l'article: | SPARKS, NICHOLAS |
Titre de la publication: | Dictionnaire biographique du Canada, vol. 9 |
Éditeur: | Université Laval/University of Toronto |
Année de la publication: | 1977 |
Année de la révision: | 1977 |
Date de consultation: | 22 déc. 2024 |