ROSAMOND, BENNETT, manufacturier et homme politique, né le 10 mai 1833 à Carleton Place, Haut-Canada, fils aîné de James Rosamond et de Margaret Wilson ; le 24 juillet 1852, il épousa à Smiths Falls, Haut-Canada, Adair Mary Roy, et ils eurent deux fils et une fille ; décédé le 18 mai 1910 à Londres et inhumé à Almonte, Ontario.

Bennett Rosamond fit ses études à la grammar school de Carleton Place. En 1857, son père installa sa famille et sa fabrique de lainages non loin de là, à Almonte, sur le Mississippi, dans l’espoir d’avoir à sa disposition plus d’énergie hydraulique. En 1859, Bennett, alors âgé de 26 ans, entra dans l’entreprise paternelle. En 1862, lui et son frère William prirent la suite de leur père à la Victoria Woolen Mills et lancèrent un ambitieux programme d’expansion sous la raison sociale de B. and W. Rosamond and Company. En moins de deux ans, la capacité de production de leurs fabriques doubla. En 1866, ils associèrent à l’entreprise George Stephen*, qui était très proche de financiers de Montréal. Ce serait grâce aux relations de Stephen que les frères Rosamond auraient des intérêts dans la Canada Cotton Manufacturing Company de Cornwall, formée en 1872, et dans la Cobourg Woollen Company, constituée juridiquement en 1885.

Dans les années 1860, les techniques de production des lainages connurent des progrès rapides. Les entreprises qui s’y adaptèrent en tirèrent des avantages importants. En 1866, les Rosamond construisirent une vaste usine dans l’île Coleman, à Almonte. Elle produisait surtout des lainages fins ; ces étoffes étaient de plus en plus en demande, mais les Rosamond devaient importer presque toute la laine qui entrait dans leur fabrication. En outre, l’entreprise bâtit une plus petite usine pour produire des couvertures. Cinq ans après naquit une société à responsabilité limitée, la Rosamond Woollen Company ; le capital-actions en était de 300 000 $. Stephen y était associé, mais c’était Bennett Rosamond qui la tenait sous son autorité : il en fut président et directeur administratif jusqu’à sa mort.

En 1882, Rosamond fit un nouveau pas dans la voie de l’expansion en fondant l’Almonte Knitting Company, avec l’aide de plusieurs hommes d’affaires montréalais, dont Donald Alexander Smith* et James Alexander Cantlie. L’entreprise, qui produisait des sous-vêtements, avait un capital-actions de 100 000 $. D’abord directeur administratif, Rosamond accéda à la vice-présidence en 1892 et à la présidence en 1898. Entre-temps, la compagnie avait multiplié ses points de vente et, en 1899, elle avait des représentants à Montréal et à Toronto. Le succès de cette fabrique, comme des autres usines de Rosamond, provenait en partie de ce qu’il faisait venir des spécialistes de Grande-Bretagne et modernisait constamment sa machinerie. En 1892, le Globe de Toronto en disait : « [c’est] la meilleure du dominion et il est douteux que d’autres [fabriques] sur le continent aient une machinerie plus complète et plus perfectionnée ». Le rôle de plus en plus important que jouait Rosamond à la Canadian Manufacturers’ Association témoigne aussi de la réputation de ses usines. D’abord membre du comité de direction, il fut président en 1890.

Dans Almonte, Rosamond avait adopté un comportement typiquement paternaliste. Actif dans les affaires municipales, il fut simple membre et président du conseil municipal de canton ; dans les années 1880, il fut maire d’Almonte. En outre, il fut président du bureau d’Éducation. Il donna à la municipalité un hôpital qu’on baptisa en son honneur ; il soutenait financièrement l’église anglicane St Paul ; il participa à un projet de sauvegarde du cours supérieur du Mississippi. Envers ses ouvriers, il pouvait être bienveillant : il organisait pour eux des réceptions à Noël, parrainait une chorale et leur assurait la jouissance d’un « spacieux terrain de croquet ». Il escomptait, en retour, qu’ils lui accorderaient leur suffrage, ce qu’ils faisaient généralement.

En 1864, Rosamond brigua le siège de Lanark North à l’Assemblée législative en se présentant de façon inopinée comme candidat conservateur ; on crut un moment qu’il l’emporterait, mais William McDougall lui infligea une cuisante défaite. Aux élections fédérales de 1872, rapporta le Perth Courier, ses « ouvriers d’usine étaient présents en masse » à l’assemblée de mise en candidature ; cependant, à cause d’une scission parmi les conservateurs, Rosamond fut défait encore une fois. Quelques semaines plus tard, sourd aux avertissements de ses amis, il se présenta à l’élection complémentaire qui se tenait dans la circonscription provinciale de Lanark North. William Clyde Caldwell le battit de justesse et remporta encore la victoire sur lui en 1883. Malgré tous ces déboires, Rosamond restait un membre actif du Parti conservateur. La Politique nationale, qui exemptait de droits la laine importée et protégeait les fabricants de lainages, cimenta ses liens avec le gouvernement fédéral de sir John Alexander Macdonald*. Élu en 1891 député fédéral à l’élection partielle dans Lanark North, Rosamond siégea à la Chambre des communes jusqu’en 1904. Il y consacra le plus gros de son temps et de ses énergies à la défense du tarif protecteur et de l’industrie lainière, surtout à compter de 1897, année où les droits d’importation des lainages britanniques baissèrent considérablement à cause de la révision du tarif par le gouvernement libéral.

Pendant près d’un demi-siècle, Bennett Rosamond dirigea de main de maître les entreprises familiales et fut l’un des porte-parole de l’industrie lainière au Canada. En suivant les hauts et les bas de ses compagnies, qui connurent leur apogée dans les années 1890, et leur déclin au début du xxe siècle, on a une bonne idée de l’évolution de cette industrie. Sa vie privée fut plus sombre. Marié jeune, il se sépara de sa femme après moins de dix ans. Le fils qu’il avait préparé à prendre sa succession, John M., mourut avant lui, comme ses autres enfants. Cela pourrait expliquer pourquoi on le tenait pour un homme dur, terre à terre. Il mourut en Angleterre en 1910, en revenant du Midi de la France, où il avait passé l’hiver. Sa succession, estimée à plus de 296 000 $, alla à son petit-fils George Stuart Rosamond, éleveur à Innisfail, en Alberta. Son neveu, Alexander George Rosamond, prit la direction des fabriques.

Richard M. Reid

AO, RG 22, Ser. 168, n° 2506.— Almonte Express (Almonte, [Ontario]), 1861–1862.— Almonte Gazette, 1872, 20 mai–3 juin 1910.— Globe, 24 sept. 1892.— Ottawa Valley Journal (Ottawa), 29 mai 1910.— Perth Courier (Perth, Ontario), 28 oct.–11 nov. 1864, 2, 16, 30 août 1872.— Toronto Daily Mail, 26 mars 1887.— Canadian directory of parl. (Johnson)— Canadian Manufacturer (Toronto), 1er juin 1888.— Canadian men and women of the time (Morgan ; 1898).— Canadian textile directory [...] (Montréal), 1885 : 23 ; 1888–1889 :313.— [J. J.] B. Forster, « Finding the right size : markets and competition in mid- and late nineteenth-century Ontario », Patterns of the past : interpreting Ontario’s history [...], Roger Hall et al., édit. (Toronto et Oxford, 1988), 150–173.— Index to incorporated bodies and to private and local law under dominion, and Manitoba, Ontario and Quebec statutes, proclamations and letters patent [...], P.-[H.] Baudouin, compil. (Montréal, [1897]).— Ontario marriage notices (Wilson).— Prominent men of Canada (Adam).— R. [M.] Reid, « The Rosamond Woolen Company of Almonte : industrial development in a rural setting », OH, 75 (1983) : 266–289.

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Richard M. Reid, « ROSAMOND, BENNETT », dans Dictionnaire biographique du Canada, vol. 13, Université Laval/University of Toronto, 2003– , consulté le 21 déc. 2024, https://www.biographi.ca/fr/bio/rosamond_bennett_13F.html.

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Titre de la publication:    Dictionnaire biographique du Canada, vol. 13
Éditeur:    Université Laval/University of Toronto
Année de la publication:    1994
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