ROBERTS, CHARLES, officier, né vers 1772 en Angleterre ; décédé le 4 mai 1816 à Londres.
On sait peu de chose de Charles Roberts, sauf en ce qui a trait à sa carrière canadienne. Il reçut une commission d’enseigne dans l’armée britannique en 1795 ; envoyé aux Antilles immédiatement après, il y servit pendant une dizaine d’années, à Trinidad surtout, avec le 57e et le 37e d’infanterie. Il parvint à acheter un grade de capitaine en 1801 ; il souffrit cependant d’attaques répétées de fièvre, et, en 1806, devenu inapte au service régulier, il dut, à l’âge de 34 ans, « chercher le repos dans un bataillon de vétérans ». Roberts joignit les rangs du 10th Royal Vétéran Battalion, qu’on était alors à mettre sur pied en Angleterre et qu’on destinait au service de garnison dans les colonies d’Amérique du Nord. Il débarqua à Québec à l’automne de 1807. Espérant se voir confier des tâches relativement plus faciles au sein des bataillons de vétérans, il fut quelque peu surpris de se trouver bientôt en mission au fort Saint-Jean, sur le Richelieu, par suite de la pénurie de troupes régulières capables de faire face à la menace militaire que représentaient alors les États-Unis [V. sir George Cranfield Berkeley]. De surcroît, en 1811, Roberts fut spécifiquement désigné pour assumer une responsabilité encore plus lourde : celle de commander au fort St Joseph (St Joseph Island, Ontario), un établissement éloigné, sur le lac Huron, qu’on avait créé après l’abandon de Michillimakinac (Mackinac Island, Michigan) en 1796 et dont l’importance tenait à la traite des fourrures et au maintien des bonnes relations avec les Indiens.
Le 8 juillet 1812, Roberts apprenait que les États-Unis avaient déclaré la guerre le 18 juin ; il décida d’entreprendre une action immédiate contre la garnison américaine de Michillimakinac. Agissant largement de sa propre initiative et faisant preuve d’énergie et d’esprit de décision, malgré une santé bien affaiblie, il rassembla puis dirigea contre le poste américain un détachement formé de sa petite garnison de 46 vétérans, de quelque 180 voyageurs et trafiquants de fourrures canadiens, et de 400 Indiens, sous les ordres de Robert Dickson* et de John Askin. La garnison de Michillimakinac, composée de 61 hommes, n’était pas encore au courant du déclenchement des hostilités ; elle se rendit le 17 juillet, peu après l’arrivée du détachement britannique.
Dans l’immédiat, les répercussions de cette conquête sans effusion de sang dépassèrent de beaucoup l’importance de Michillimakinac. L’action de Roberts valut aux Britanniques l’appui des Indiens qui avaient été jusque-là indécis, ce qui permit non seulement d’assurer la maîtrise de la région ouest du lac Michigan, mais aussi d’exercer une nette pression sur le général de brigade américain William Hull, à Detroit. Ce dernier invoqua la perte de Michillimakinac et l’engagement possible des tribus indiennes du Nord-Ouest dans le conflit comme étant parmi les principaux motifs de sa décision de se rendre à Brock, avec ses hommes, le 16 août 1812. La capitulation de Hull joua un rôle déterminant : elle assurait pour une autre année les positions britanniques dans la partie ouest du Haut-Canada et permettait aux Britanniques de concentrer leurs ressources sur la rivière Niagara en prévision de la prochaine poussée des Américains. Roberts fut loué publiquement pour son succès, et ses supérieurs, dont Prevost, rendirent hautement témoignage dans leurs écrits aux efforts qu’il avait déployés.
La tension que Roberts s’était imposée pour s’emparer de Michillimakinac et, ensuite, pour régler les problèmes inhérents à la défense du poste eut vite raison de sa santé déjà bien mauvaise. De plus, on rapportait que sa garnison de vétérans était « affaiblie et épuisée par une incorrigible ivrognerie ». Par ailleurs, les demandes constantes de nourriture et de présents, de la part des Indiens, aggravaient grandement les problèmes dus à l’isolement et à la distance. De lui-même, Roberts décida de former une compagnie de Canadiens (les Michigan Fencibles), en 1813, pour soutenir sa garnison. En mai de la même année, il dut toutefois demander un congé ; souffrant d’une « grande faiblesse de l’estomac et des intestins », il fut finalement remplacé en septembre. Après un voyage épuisant, il arriva à Montréal et fit rapport sur la situation à Michillimakinac. Sa longue maladie était alors « trop profondément enracinée pour qu’il pût même caresser l’espoir de s’en remettre entièrement » ; il demanda d’être mis à la retraite et de toucher sa solde entière. Cette requête et d’autres demandes visant à obtenir de l’avancement ou différentes affectations restèrent sans effet, et Roberts retourna en Angleterre en 1815, censément pour un congé de six mois. Sa santé ruinée, il fut finalement mis à la retraite avec solde entière, mais il mourut un an après son retour en Angleterre.
Si faible qu’eût été la récompense de Charles Roberts pour ses fidèles services, sa conduite « courageuse » lui avait du moins gagné le respect et l’approbation tant des Indiens que de ses supérieurs. La prise de Michillimakinac doit être considérée comme un coup décisif pour la réussite de la défense du Haut-Canada pendant la guerre de 1812.
APC, MG 24, A9 : 203, 221–225, 233s. (copies dactylographiées) ; RG 8, I (C sér.), 2 ; 231 : 123 ; 232 : 75–78 ; 256 : 187s. ; 676 : 183–186, 201s., 232s., 236–238 ; 677–679 ; 681 ; 688a-c ; 689 : 87 ; 789 : 79, 97–99, 109, 123–128 ; 790 : 18–20, 22s. ; 1168 ; 1171 : 279–282, 304 ; 1203 1/2K : 174 ; 1218 : 439s. ; 1221 ; 1227.— John Askin papers (Quaife).— G.-B., WO, Army list, 1794–1818.— C. T. Atkinson et D. S. Daniell, Regimental history : the Royal Hampshire Regiment [...] (3 vol., Glasgow, 1950–1955), 1 : 151–156, 226.— A. R. Gilpin, The War of 1812 in the old northwest (Toronto et East Lansing, Mich., 1958), 89–91, 106s., 128, 241.— Walter Havighurst, Three flags at the straits : the forts of Mackinac (Englewood Cliffs, N.J., 1966), 113–123.— Hitsman, Incredible War of 1812, 67–69.— Reginald Horsman, « The role of the Indian in the war », After Tippecanoe : some aspects of the War of 1812, P. P. Mason, édit. (East Lansing et Toronto, 1963), 60–77.— C. L. Kingsford, The story of the Duke of Cambridge’s Own (Middlesex Regiment) (Londres et New York, 1916), 57–60.— G. F. G. Stanley, « The Indians in the War of 1812 », CHR, 31 (1950) : 145–165.
Glenn A. Steppler, « ROBERTS, CHARLES », dans Dictionnaire biographique du Canada, vol. 5, Université Laval/University of Toronto, 2003– , consulté le 17 déc. 2024, https://www.biographi.ca/fr/bio/roberts_charles_5F.html.
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Auteur de l'article: | Glenn A. Steppler |
Titre de l'article: | ROBERTS, CHARLES |
Titre de la publication: | Dictionnaire biographique du Canada, vol. 5 |
Éditeur: | Université Laval/University of Toronto |
Année de la publication: | 1983 |
Année de la révision: | 1983 |
Date de consultation: | 17 déc. 2024 |