REYNARD, ALEXIS, frère convers de la Congrégation des Oblats de Marie-Immaculée et missionnaire, né à Castillon, diocèse de Nîmes, France, le 28 septembre 1828, fils d’Alexis-Joseph Reynard et de Victoire Dugas, décédé aux environs du 20 juillet 1875, près de la rivière House, affluent de la rivière Athabasca, T.-N.-O.
Alexis Reynard reçut une instruction primaire et travailla comme vigneron à la ferme paternelle. Il entra dans la Congrégation des oblats et prononça ses vœux le 9 mai 1852 ; on le désigna pour les missions de l’Athabasca en 1853. Les années 50 marquèrent, pour les missions oblates du Nord-Ouest, une période d’expansion qui fut couronnée par la fondation de la mission Saint-Cœur-de-Marie au fort Good Hope, sur le Mackenzie inférieur, non loin du cercle arctique.
Le frère Alexis travailla sous l’autorité de Mgr Vital-Justin Grandin*, de Mgr Henri Faraud* et de Mgr Isidore Clut*. Il acquit une grande habileté comme menuisier, maçon, voyageur et jardinier. C’est lui qui construisit au lac Athabasca tous les bâtiments de la mission de La Nativité (aujourd’hui Fort Chipewyan) et ceux de la mission Providence, située sur ce qui est aujourd’hui la route Mackenzie, dans les Territoires du Nord-Ouest, près de Yellowknife. En se chargeant de ces tâches, le frère Alexis permettait aux prêtres de se consacrer entièrement à leur ministère. Fort et vigoureux, il « possédait la douceur et la candeur d’un enfant ».
Depuis son entrée en communauté, le frère Alexis souhaitait ardemment devenir prêtre. Il fit souvent part de son désir à ses supérieurs mais sans grand succès au début. Il obtint enfin la permission d’étudier le latin avec le père Grandin, à La Nativité. Toutefois, sur le conseil de ses supérieurs, il abandonna finalement son projet. On en était venu à la conclusion, en 1861, que sa bonté elle-même l’empêcherait d’assumer la direction d’une mission. La frère Alexis en éprouva une déception cruelle.
Sa santé laissa à désirer pendant les dix dernières années de sa vie, mais il n’en continua pas moins à accomplir son rude travail et, en 1868 et 1869, il aida à la construction des établissements des sœurs grises à Providence. Il travailla ensuite à la mission de Notre-Dame-des-Victoires du lac la Biche, de 1870 à 1874.
Un nouveau groupe de sœurs grises quittèrent Saint-Boniface en 1875 pour se rendre à leurs maisons dans le Nord. De La Nativité, on leur envoya le frère Alexis qui devait s’occuper des moyens de transport et les conduire à destination, au nord du lac la Biche. Le frère voyageait avec deux familles métisses et une orpheline, Geneviève Duquette, que les religieuses envoyaient au lac la Biche. Un Métis d’ascendance iroquoise, Louis Lafrance, serviteur à La Nativité, leur servait de guide. Il se donnait pour bon catholique mais possédait un caractère violent et vindicatif ; même le frère Alexis l’avait déjà réprimandé.
Le petit groupe partit de La Nativité le 1er juin et atteignit les grands rapides, sur l’Athabasca, vers le 18 juin après un voyage pénible. C’est alors que les Métis refusèrent d’aller plus loin, voulant attendre la fin de la crue des eaux pour continuer. Mais le frère Alexis était bien décidé à poursuivre sa route. Il songea même à confier l’orpheline aux familles métisses mais céda néanmoins aux instances de Lafrance qui voulait les conduire tous les deux à la mission, située à 100 milles en direction du sud. Au mois d’août, un groupe de voyageurs venus de la mission du lac la Biche découvrit les restes du frère Alexis, à la rivière House, à peu de distance en amont des grands rapides. On trouva des preuves irréfutables que Lafrance avait tué le frère, lui avait arraché les membres et avait mangé son corps, puis, amenant l’orpheline jusqu’à la rivière de la Paix, lui avait fait subir le même sort. Mais justice fut faite : un soir, près de leur camp, des Indiens de la tribu des Castors tirèrent sur un maraudeur qui n’était autre que Lafrance.
C’est ainsi que prit fin la longue et laborieuse existence du frère Alexis, tout entière consacrée au service des missions du Nord-Ouest. On l’enterra au lac la Biche ; plus tard, afin qu’il reposât auprès d’autres martyrs oblats, on transporta ses restes à la mission de la congrégation, à Saint-Albert, en Alberta.
[P.-J.-B.] Duchaussois, Apôtres inconnus (Paris, 1924), 220–227.— Morice, Hist. de l’Église catholique, II : 54, 193, 379–382.— A. Philippot, Une page d’histoire des missions arctiques ; le frère Alexis Reynard O.M.I. (1828–1875), premier « apôtre inconnu » du Grand Nord canadien (Lablachère, France, 1931).
Lewis H. Thomas, « REYNARD, ALEXIS », dans Dictionnaire biographique du Canada, vol. 10, Université Laval/University of Toronto, 2003– , consulté le 20 déc. 2024, https://www.biographi.ca/fr/bio/reynard_alexis_10F.html.
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Auteur de l'article: | Lewis H. Thomas |
Titre de l'article: | REYNARD, ALEXIS |
Titre de la publication: | Dictionnaire biographique du Canada, vol. 10 |
Éditeur: | Université Laval/University of Toronto |
Année de la publication: | 1972 |
Année de la révision: | 1972 |
Date de consultation: | 20 déc. 2024 |