MOODY, JOHN, lieutenant-colonel, gouverneur adjoint à Plaisance (Placentia), né vers 1677, mort en 1736.
Le 18 février 1703, Moody fut affecté à l’Independent Company du capitaine Michael Richards en garnison à Terre-Neuve, avec le grade de lieutenant. Lorsque Moody atteignit Saint-Jean, Richards se préparait à partir avec le commodore Graydon après avoir nommé Thomas Lloyd commandant de la garnison. Or, l’année suivante, les colons et les soldats se plaignirent amèrement de la conduite de Lloyd, et Bridges, le nouveau commodore, ramena celui-ci en Angleterre au mois d’octobre, laissant Moody à la tête des forces armées à Saint-Jean.
Il y avait toujours eu des frictions entre les citoyens de Saint-Jean et les chefs militaires, ces derniers considérant avoir droit à certains privilèges et à certains bénéfices. Bien que cela leur fût défendu par les règlements, tous les commandants militaires faisaient des spéculations commerciales sur les marchandises, l’huile et le poisson, et réalisaient ainsi des profits appréciables. Comme le commandant jouissait, par sa situation, de certains avantages, les citoyens protestaient contre un tel état de choses ; Moody fut bientôt l’objet d’accusations semblables à celles qui avaient été portées contre Lloyd. Au cours de l’hiver de 1704–1705, un incident vint fournir des motifs d’accusation plus précis et plus frappants contre Moody. En décembre, Moody condamna une dénommée Christian, femme de ménage à l’emploi de Margaret Jackson, fille de John Jackson, à la peine du fouet pour vol présumé de rhum et de brandy. Les détails de l’affaire se perdent dans un fouillis de rapports contradictoires, mais il se peut fort bien que le seul crime dont Christian fût coupable ait été d’en savoir trop long sur la vie intime de Moody. Quoi qu’il en soit, elle mourut quelques jours après son supplice et un certain nombre de citoyens accusèrent Moody d’avoir causé sa mort. L’été suivant, à la demande de l’accusé lui-même, il y eut procès et le tribunal, présidé par le commodore Bridges, déclara que les accusations étaient « malveillantes et sans fondement » ; la femme, selon le tribunal, était morte d’une maladie vénérienne.
Au cours du même hiver (1704–1705), Moody eut l’occasion de démontrer le courage et la fermeté dont il était capable au combat. En janvier 1705, des troupes françaises d’environ 600 hommes en provenance de Plaisance, sous les ordres d’Auger de Subercase, assiégèrent, au fort William, un petit détachement de l’Independent Company commandé par Moody. Celui-ci réussit, avec seulement une soixantaine d’hommes, à repousser l’ennemi, et lui infligea la perte de 200 hommes. Il fut admirablement secondé au cours du siège par son lieutenant (et, plus tard, son ennemi personnel), Robert Latham.
Lloyd revint prendre le commandement des troupes en octobre et, le 21 novembre 1705, Moody partait pour l’Angleterre à bord du Looe, avec le commodore Bridges. L’on sait que John Jackson, avec qui Moody était resté lié d’amitié même après l’affaire de la femme Christian, se trouvait dans le même convoi. Le Looe fit naufrage à l’île de Wight et il y eut des pertes de vie, mais Moody et Bridges s’en tirèrent. La conduite valeureuse de Moody au fort William lui valut d’être nommé lieutenant dans les Coldstream Guards le 14 mars 1707. Peu de temps après, il fut promu au rang d’aide-major.
Par la suite, la France ayant cédé Plaisance à l’Angleterre par le traité d’Utrecht en 1713, Moody fut élevé au rang de lieutenant-colonel, sans en recevoir la solde, et nommé gouverneur adjoint de Plaisance, sous les ordres du colonel Nicholson, gouverneur de la Nouvelle-Écosse. Une ordonnance de la reine Anne permit aux citoyens français de Plaisance de vendre leurs domaines, Moody, tout comme William Taverner*, s’attira la colère des capitaines des bateaux de pêche anglais de passage à Terre-Neuve, en se rendant acquéreur de plusieurs terres et d’un grand nombre de propriétés, y compris les terres ayant appartenu à Pastour de Costebelle, l’ancien gouverneur français.
En 1717, les contrôleurs des comptes de l’armée recommandèrent qu’ordre fût donné à Moody de rentrer en Angleterre avec le commodore William Passenger pour répondre aux nombreuses accusations portées contre lui et pour mettre de l’ordre dans les comptes de la garnison. Le lieutenant-colonel Martin Purcell fut nommé gouverneur à Plaisance pour succéder à Moody. Ce dernier, qui avait loué ses propriétés terreneuviennes à diverses personnes, vécut par la suite à Londres. Atteint de la goutte, il reçut une demi-solde de l’armée jusqu’à sa mort en 1736. Le nom de sa femme, Mme Ann Moody, figure à partir de cette date sur la liste des veuves pensionnées.
Le journal (ou « Relation » ) que Moody a laissé du siège de janvier 1704/1705, est conservé au Public Record Office, Londres (C.O. 194/3/H.10).
PRO, C.O. 194/3, 194/4, 194/5, Index to Nfld corresp. 8 234 ; W.O. 24/662–24/682 (half pay registers, 1717–1734) ; 24/806 (widows’ pensions) ; CSP, Col., 1704–05, 1706–08, 1708–09, 1712–14, 1714–15, 1716–17, 1717–18.— Dalton, English army lists, IV.
Michael Godfrey, « MOODY, JOHN », dans Dictionnaire biographique du Canada, vol. 2, Université Laval/University of Toronto, 2003– , consulté le 17 nov. 2024, https://www.biographi.ca/fr/bio/moody_john_2F.html.
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Auteur de l'article: | Michael Godfrey |
Titre de l'article: | MOODY, JOHN |
Titre de la publication: | Dictionnaire biographique du Canada, vol. 2 |
Éditeur: | Université Laval/University of Toronto |
Année de la publication: | 1969 |
Année de la révision: | 1991 |
Date de consultation: | 17 nov. 2024 |