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MIGNAULT, ARTHUR (baptisé Michel-Antoine-Arthur), médecin, homme d’affaires, philanthrope et officier, né le 29 septembre 1865 à Saint-Denis (Saint-Denis-sur-Richelieu, Québec), fils d’Henri-Adolphe Mignault, médecin, et de Marie-Émélie-Valérie Brodeur ; probablement le 23 décembre 1912, il épousa dans la paroisse Saint-Jacques-le-Majeur, à Montréal, Marie-Béatrice Boyer, fille du sénateur libéral Arthur Boyer, et ils eurent au moins une fille ; décédé le 26 avril 1937 à Montréal.
Arthur Mignault fait ses études classiques au séminaire de Saint-Hyacinthe de 1877 à 1880 environ, puis reçoit sa formation de médecin à l’école de médecine et de chirurgie de Montréal (affiliée au Victoria College de Cobourg, en Ontario), alors une sérieuse concurrente de l’université Laval à Montréal. Après l’obtention de son diplôme en 1888, il aurait pratiqué la médecine aux États-Unis pendant quelques années. De retour à Montréal en 1896, il fonde, vers la fin du xixe siècle, la Compagnie chimique franco-américaine Limitée. C’est grâce notamment à l’un de ses produits, les Pilules rouges pour les femmes souffrant d’anémie et d’autres maladies, qu’il fera fortune.
Grand sportif, Mignault se livre à ses passions : le polo, la chasse à courre et les courses de chevaux. En 1901, il crée le premier club de polo pour les Canadiens français. Il est aussi l’un des rares Canadiens français admis dans des associations sportives privées anglophones comme le Montreal Jockey Club et le Montreal Hunt Club. Il s’intéresse également à la course automobile, activité pour laquelle il remporte même un prix en 1904. Philanthrope, il offre en 1913 l’un de ses terrains situés au centre-ville de Montréal pour en faire une aire de jeux pour les enfants défavorisés. Il en confie l’organisation et la promotion au quotidien la Presse.
De toutes ses passions, c’est sans doute sa carrière militaire que Mignault affectionne le plus. En 1892, ce dernier s’est d’abord enrôlé comme soldat au sein du 84e bataillon d’infanterie de Saint-Hyacinthe, dans la milice active non permanente, et y sert jusqu’en 1899. En 1903, il entre au service du 65e régiment (carabiniers Mont-Royal) où, en 1909, il reçoit le titre d’officier-chirurgien. À la veille de la Première Guerre mondiale, il est capitaine dans le quartier général du district militaire no 4 (Montréal).
La notoriété de Mignault prend véritablement son envol à l’entrée en guerre du Canada. En 1914, il compte parmi les fondateurs importants de la première unité canadienne-française du Corps expéditionnaire canadien, soit le 22e bataillon d’infanterie (qui deviendra le Royal 22e Régiment). En effet, il offre au premier ministre canadien, sir Robert Laird Borden, 50 000 $ pour la formation et l’équipement de ce bataillon d’infanterie composé d’officiers et de soldats de langue française. De plus, il met des voitures à la disposition de l’état-major du bataillon pour ses déplacements au Canada et en Grande-Bretagne. Les effectifs de l’unité sont comblés grâce à l’aide du clergé, des médias canadiens-français, entre autres la Presse, et de personnalités politiques éminentes telles que sir Wilfrid Laurier*, chef de l’opposition officielle, sir Lomer Gouin*, premier ministre de la province de Québec, et Raoul Dandurand*, sénateur. Pendant toute la période du recrutement, qui se poursuit jusqu’au mois de mai 1915, Mignault propose ses services pour les examens médicaux à Saint-Jean (Saint-Jean-sur-Richelieu).
En mars 1915, la fortune personnelle de Mignault contribue également à la création d’une deuxième unité francophone, le 41e bataillon d’infanterie, puis d’une troisième, le 4e hôpital stationnaire canadien (canadien-français). Mignault arrive en Grande-Bretagne le 15 mai, à titre de lieutenant-colonel et de commandant de cette dernière formation militaire. Bien que sous commandement canadien, celle-ci est assignée au service de la France pour le soin exclusif des blessés français. Durant toute la guerre, l’hôpital est installé à l’hippodrome de Saint-Cloud, dans la banlieue sud-ouest de Paris. En mai 1916, à la suite de l’arrivée d’un deuxième hôpital canadien-français dans la région parisienne, le 6e hôpital général canadien de l’université Laval [V. Gustave Archambault], mis sur pied par l’université Laval à Montréal, Mignault est élevé au rang de colonel et, à sa demande, devient l’officier supérieur médical canadien à Paris des deux hôpitaux.
Toutefois, Mignault connaît peu de popularité auprès de ses subalternes ; à la fin du mois d’octobre 1915, ses officiers ont même réclamé son renvoi par pétition. Sa gestion et sa discipline font aussi l’objet d’enquêtes de la part des autorités militaires canadiennes. Ces dernières lui reprochent notamment le non-paiement des factures de certains contrats (dont le quartier général canadien à Londres ne connaissait pas l’existence) alloués à des entreprises locales. Elles le blâment aussi pour le laisser-aller disciplinaire des membres du 4e hôpital stationnaire canadien (canadien-français), attribuable à son faible leadership et au sous-emploi de cette unité par les autorités militaires françaises. À quelques reprises, Mignault met ses supérieurs dans l’embarras. C’est le cas, par exemple, quand la réclamation des frais facturés pour le travail effectué par des entreprises françaises mène à des commissions d’enquête et au règlement des arrérages par les autorités militaires canadiennes.
En novembre 1916, Mignault est rappelé d’urgence au Canada. La mission de recruter des Canadiens français, qu’il croyait temporaire, deviendra permanente. En raison de sa notoriété au pays et de ses talents d’organisateur, on lui confie le poste de directeur du recrutement dans la province de Québec et dans tout le Canada français, au moment où le pays éprouve d’importantes difficultés dans ce domaine [V. sir Robert Laird Borden]. Le premier ministre Borden voit en lui un sauveur. Mignault s’entoure d’une équipe d’officiers en nombre supérieur à ses besoins et passe une grande partie de son temps à débattre avec les hautes instances. Malgré tous les efforts qu’il déploie dans cette tâche plutôt ingrate, la situation demeure désespérée. Compte tenu des faibles résultats obtenus, on le relève de ses fonctions. En avril 1917, la charge du recrutement des Canadiens français est confiée au lieutenant-colonel Pierre-Édouard Blondin*, ministre des Postes, et au major-général François-Louis Lessard*. Ce dernier prend Mignault dans son service, en tant que responsable du recrutement dans le district militaire no 4 (Montréal). À leur tour, Blondin et Lessard échouent dans leur entreprise. En octobre 1917, Mignault est libéré du Corps expéditionnaire canadien, puis versé à la réserve des officiers. Néanmoins, il poursuit son travail de recrutement. Il encourage ses compatriotes à s’enrôler et réclame d’ailleurs la création d’une brigade entièrement composée de Canadiens français.
Les efforts de Mignault sont d’abord reconnus par le major-général sir Eugène Fiset*, du ministère canadien de la Milice et de la Défense, qui lui adresse une lettre, datée du 10 janvier 1917, puis par la France, qui le décore chevalier de la Légion d’honneur en mai. Même après la guerre, Mignault ne cesse de faire la promotion du service militaire auprès des jeunes médecins canadiens-français.
La paix revenue, Mignault tente sa chance en investissant sa fortune personnelle dans l’achat de terrains et de commerces. Malheureusement, la crise économique des années 1930 le ruine complètement, ce qui l’affecte beaucoup. Mignault est victime d’un accident vasculaire cérébral qui atteint grandement son élocution. Il vit ensuite presque reclus dans le domaine de sa belle-famille.
En mars 1937, Arthur Mignault reçoit enfin la reconnaissance qu’il a tant convoitée et pour laquelle il a mené une longue lutte : une promotion militaire. Ce nouveau grade de brigadier honoraire couronne sa carrière militaire et met en quelque sorte un baume sur ses plaies. Malheureusement, Mignault ne peut savourer longuement sa récompense puisqu’il meurt subitement le mois suivant.
Nous tenons à remercier Mmes Anne et Dominique Perrault pour les précisions sur la vie de leur grand-père.
BAC, RG 150, Acc. 1992-93/166, boîte 6160-56 ; Acc. 1992-93/167, boîte 7881-100.— BAnQ-CAM, CE602-S12, 29 sept. 1865.— FD, Saint-Jacques, cathédrale de Montréal [Saint-Jacques-le-Majeur], décembre 1912.— Le Devoir, 27 avril 1937.— La Presse, 1901–1937.— BCF, 1922.— Canadian who’s who, 1936–1937.— J.-P. Gagnon, le 22e bataillon (canadien-français), 1914–1919 : étude socio-militaire (Québec et Ottawa, 1986).— J. L. Granatstein et J. M. Hitsman, Broken promises : a history of conscription in Canada (Toronto, 1977 ; réimpr., 1985).— Gilles Janson, « le Docteur Joseph-Pierre Gadbois, médecin et sportif, 1868–1930 » (communication présentée au 51e congrès annuel de l’Instit. d’hist. de l’Amérique française, Québec, 1998).— Michel Litalien, Dans la tourmente : deux hôpitaux militaires canadiens-français dans la France en guerre (1915–1919) (Outremont [Montréal], 2003).— Prominent people of the province of Quebec, 1923–24 (Montréal, s.d.).
Michel Litalien, « MIGNAULT, ARTHUR (baptisé Michel-Antoine-Arthur) », dans Dictionnaire biographique du Canada, vol. 16, Université Laval/University of Toronto, 2003– , consulté le 20 déc. 2024, https://www.biographi.ca/fr/bio/mignault_arthur_16F.html.
Permalien: | https://www.biographi.ca/fr/bio/mignault_arthur_16F.html |
Auteur de l'article: | Michel Litalien |
Titre de l'article: | MIGNAULT, ARTHUR (baptisé Michel-Antoine-Arthur) |
Titre de la publication: | Dictionnaire biographique du Canada, vol. 16 |
Éditeur: | Université Laval/University of Toronto |
Année de la publication: | 2019 |
Année de la révision: | 2019 |
Date de consultation: | 20 déc. 2024 |