MacKENZIE, KENNETH, trafiquant de fourrures, né en Écosse, fils de Colin MacKenzie et d’une prénommée Margaret ; il se noya le 26 août 1816 près de Sault-Sainte-Marie, Haut-Canada.

Kenneth MacKenzie entra au service de la North West Company le 1er mai 1800, à titre d’apprenti commis, pour une période de cinq ans. Le 2 juin suivant, Daniel Williams Harmon* rapportait son départ, en compagnie de cinq autres commis, de la pointe aux Érables (Maple Point, près de Sault-Sainte-Marie) en direction de Grand Portage (près de Grand Portage, Minnesota), qu’ils atteindraient en traversant le lac Supérieur. Cet hiver-là, on lui confia, semble-t-il, la responsabilité du dépôt de Grand Portage en l’absence du docteur Henry Munro, commis et surveillant hivernant. Des documents dont on dispose, on peut déduire qu’il fut stationné à cet endroit jusqu’en 1803, et par la suite à Kaministiquia (Thunder Bay, Ontario), lieu de rendez-vous de la compagnie sur le lac Supérieur à partir de cette année-là.

Son apprentissage achevé à l’automne de 1805, MacKenzie succéda à Munro, qui avait été muté au Pic, dans le Haut-Canada. C’est lui, vraisemblablement, le McKenzie qu’une liste de 1806 désigne comme l’un des deux commis de Kaministiquia, car en 1807 « M. Kenneth McKenzie » avait la direction du fort William (nouveau nom du poste). En 1807, également, il fut choisi comme associé éventuel ; il obtint l’appui tant des hivernants de la vieille North West Company que de ceux de la New North West Company (nommée parfois la XY Company), laquelle avait été absorbée par la North West Company en novembre 1804 [V. sir Alexander Mackenzie]. Obtenant la part de John Finlay en 1808, il servit comme associé hivernant au département du fort William jusqu’à la fin de 1815, sauf pendant l’année qu’il passa au Bas-Canada, son tour venu, en 1812–1813.

MacKenzie joua un certain rôle dans la guerre de 1812. Quand la nouvelle de l’éclatement des hostilités atteignit le fort William, il écrivit à Duncan Mackintosh, à Sandwich (maintenant partie de Windsor, Ontario), faisant état du succès rapide des plans de la North West Company visant à mobiliser tant ses employés que les Indiens. Sa lettre, interceptée par les troupes américaines, fut plus tard soumise au conseil de guerre chargé de juger le général américain défait, William Hull, pour justifier sa décision de ne pas envahir le Canada. Pendant son séjour à Montréal en 1812, MacKenzie devint capitaine dans le Corps of Canadian Voyageurs, lors de sa formation en octobre. Après le licenciement de cette unité en mars 1813, il se trouva au nombre des Nor’Westers mandatés pour servir dans « les régions indiennes et conquises ». Il fut admis, cette année-là, au sein du Beaver Club.

À l’été, MacKenzie retourna au fort William. Au cours du rendez-vous de 1815, la crise qui allait amener la chute définitive de la North West Company parut imminente. Les envois de marchandises et de ravitaillements en provenance de l’Est avaient parfois été interrompus par la guerre, et, pendant la même période, John Jacob Astor avait accaparé toutes les provisions de tabac en corde, qui avait la préférence des Indiens. Ces facteurs, combinés avec la chute inattendue des commissions et les coûts élevés pratiqués sur le fleuve Columbia ainsi que dans le trafic avec la Chine, provoquèrent l’ire des hivernants contre les compagnies qui, à Montréal, dirigeaient la traite. MacKenzie accepta le rôle d’intermédiaire entre les hivernants qui ne cachaient plus leur hostilité et les deux représentants des intérêts montréalais, Simon McGillivray*, de la McTavish, McGillivrays and Company, et Alexander McKenzie*, de la Sir Alexander Mackenzie and Company (nom donné parfois à la New North West Company). Croyant que l’« ami K. attisait plutôt qu’il n’apaisait » les craintes des hivernants, McGillivray nota aussi son refus de participer à un « comité d’enquête » des hivernants. À l’automne de 1815, MacKenzie était de retour à Montréal, où il succéda à Alexander McKenzie à titre d’agent de la North West Company représentant la Sir Alexander Mackenzie and Company. Son salaire annuel de £500, ajouté à sa part des profits de la compagnie, est l’indice d’une influence et d’un prestige exceptionnels : son prédécesseur n’avait reçu que £200 de salaire, alors que son successeur, Pierre Rastel* de Rocheblave, n’allait toucher que £400.

En charge du fort William, MacKenzie fut inévitablement entraîné dans la controverse qui entoura la colonie de la Rivière-Rouge. En 1811, lord Selkirk [Douglas] avait réussi à obtenir une immense concession foncière, en vue de coloniser la région située au sud du lac Winnipeg (Manitoba). La North West Company s’opposait à cette nouvelle colonie, y voyant une menace à ses sources d’approvisionnement hivernales traditionnelles, en même temps qu’une manœuvre de la Hudson’s Bay Company, laquelle avait récemment adopté une politique commerciale très vigoureuse. En 1814, la North West Company avait décidé de prendre des mesures concertées contre ses adversaires ; elle avait dépêché Duncan Cameron* et Alexander Greenfield Macdonell* pour s’occuper de ce problème. Dans une lettre à Cameron, datée de 1815, MacKenzie, qui semble avoir adopté une attitude modérée, le mettait en garde : « N’allez pas, pour l’amour de Dieu, vous compromettre par vos gestes ou vos écrits – la prudence prévient les malheurs. » Néanmoins, on éloigna des colons en grand nombre en leur faisant peur ; le 19 juin 1816, leur gouverneur, Robert Semple, et une vingtaine de pionniers furent tués à Seven Oaks (maintenant partie de Winnipeg) par un parti de Métis au service de la North West Company. En août, Selkirk s’empara du fort William, où se trouvait MacKenzie, pour se venger de l’affaire de Seven Oaks et envoya tous les associés, dont William McGillivray* et Alexander McKenzie, à la seule exception de Daniel McKenzie, dans le Haut-Canada pour y être jugés. Le 26 août, MacKenzie et huit autres, en route vers l’est, se noyèrent dans le lac Supérieur après que leur canot eut chaviré près de Sault-Sainte-Marie, où MacKenzie fut par la suite enseveli. Il laissait sa femme, une Indienne du nom de Louisa, et leur fille Margaret.

Avant son départ du fort William comme prisonnier, Kenneth MacKenzie avait eu la présence d’esprit de faire son testament. Les noms de ses exécuteurs testamentaires révèlent les étroites relations qu’il entretenait avec les trois principales composantes de la North West Company : Roderick McKenzie*, de la vieille compagnie, qui était peut-être un de ses parents, John McLoughlin*, un des porte-parole des hivernants, et George Moffatt*, qui avait des liens tant avec la New North West Company qu’avec la Hudson’s Bay Company. La rapide ascension de MacKenzie doit presque certainement être attribuée à des liens de famille, de même qu’à sa compétence évidente et à sa popularité auprès des diverses factions au sein de la compagnie. Vu sa position de premier plan en tant qu’agent et ses relations avec Moffatt et McLoughlin, promoteurs de la fusion de 1821 avec la Hudson’s Bay Company, il paraît tout à fait vraisemblable que, s’il avait vécu, MacKenzie aurait émergé des ruines de la North West Company comme l’une des principales figures de la nouvelle entreprise née de l’union des deux anciennes compagnies rivales.

Jean Morrison

ANQ-M, CM1, Kenneth McKenzie, homologué le 16 sept. 1816 ; CN1-29, 11 avril 1796, 24 avril 1800.— APC, MG 19, A35, 7, notebook IV, memoranda, Fort William, 1815 ; B1, 1 ; E1, sér. 1, 22 : 8565–8567 (transcriptions) ; E2, 2, J. S. Cameron à James McTavish et Jasper Vandersluys, 29 août 1816 (transcription).— AUM, P 58, 61/122, 131, 142 (transcriptions aux APC).— Docs. relating to NWC (Wallace).— G.-B., Colonial Office, Papers relating to the Red River settlement [...] (Londres, 1819).— [John Halkett], Statement respecting the Earl of Selkirk’s settlement upon the Red River in North America [...] (Londres, 1817 ; réimpr., East Ardsley, Angl., et New York, 1968, et [Toronto, 1970]) ; Postscript to the statement respecting the Earl of Selkirk’s settlement upon the Red River ([Montréal, 1818]).— [D. W. Harmon], Sixteen years in the Indian country : the journal of Daniel Williams Harmon, 1800–1816, W. K. Lamb, édit. (Toronto, 1957).— Report of the trial of Brig. General William Hull [...], [J. G.] Forbes, compil. (New York, 1814).— James Tate, « James Tate’s journal, 1809–1812 », Hudson’s Bay miscellany, 1809–12, Glyndwr Williams, édit. (Winnipeg, 1975), 95–150.— [S. H. Wilcocke], A narrative of occurrences in the Indian countries of North America [...] (Londres, 1817 ; réimpr., East Ardsley et New York, 1968).— C. P. Wilson, « The Beaver Club », Beaver, outfit 266 (mars 1936) : 19–23.

Comment écrire la référence bibliographique de cette biographie

Jean Morrison, « MacKENZIE, KENNETH », dans Dictionnaire biographique du Canada, vol. 5, Université Laval/University of Toronto, 2003– , consulté le 16 nov. 2024, https://www.biographi.ca/fr/bio/mackenzie_kenneth_5F.html.

Information à utiliser pour d'autres types de référence bibliographique


Permalien: https://www.biographi.ca/fr/bio/mackenzie_kenneth_5F.html
Auteur de l'article:    Jean Morrison
Titre de l'article:    MacKENZIE, KENNETH
Titre de la publication:    Dictionnaire biographique du Canada, vol. 5
Éditeur:    Université Laval/University of Toronto
Année de la publication:    1983
Année de la révision:    1983
Date de consultation:    16 nov. 2024