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MacDONALD, James Edward Hervey (Harvey), artiste, éducateur et auteur, né le 12 mai 1873 à Durham, Angleterre, fils de William Henry MacDonald, ébéniste, et de Margaret Usher (Ussher) ; le 12 mai 1899, il épousa à Swansea (Toronto) Harriet Joan Prior Lavis (nommée à la naissance Harriet Joanna Dionysius Lavis ; 1871–1962), et ils eurent un fils, Thoreau* ; décédé le 26 novembre 1932 à Toronto.
James Edward Hervey MacDonald joua un rôle majeur dans la fondation, en 1920, du groupe des Sept, cercle de peintres de Toronto qui, dans les années précédant la Première Guerre mondiale et la décennie et demie qui la suivit, fournit au Canada une identité visuelle qui accompagna sa naissance comme nation. À titre d’aîné, d’une dizaine d’années, des membres de ce cercle créatif (si on exclut Thomas John (Tom) Thomson*, mort en 1917, avant l’officialisation du groupe), il jouissait d’une certaine autorité naturelle. Plus significatifs, ses talents multiples de peintre, de graphiste, d’enseignant, de poète, d’écrivain, d’administrateur et de pionnier en matière esthétique lui valurent de devenir le guide spirituel du groupe : personne d’autre n’exerça une influence aussi forte et durable sur les grands artistes canadiens de cette période.
MacDonald devint une figure importante en raison de son engagement profond comme enseignant et comme mentor auprès des praticiens tant du dessin commercial que des beaux-arts. Il parvenait à séparer le dessin commercial, qui occupait une place majeure dans sa vie, de son travail d’artiste, qui l’amenait à rompre avec les conventions, à prendre des risques et à prêcher l’innovation par l’exemple. Lorsque ses peintures audacieuses et inventives subissaient le feu des critiques, il ripostait aux railleries par des arguments pleins d’esprit et tranchants, qu’on diffusait largement.
Homme grand, mince, de stature plutôt frêle et aux cheveux roux légèrement ondulés, MacDonald était sensible, presque délicat, compétent et pourvu d’un sens de l’humour pétillant. Très curieux de tout, il s’intéressait à l’industrie, à l’agriculture, au jardinage, à la construction, à la nature sauvage et à la pêche. Il n’était toutefois pas doué pour l’aviron, le camping ou autres activités dites viriles. Un de ses premiers biographes, le conservateur d’art Edmund Robert Hunter, a écrit en 1940 : « Il soutenait que la vie se composait d’une seule pièce, et que le devoir de chaque homme était de la comprendre, d’y trouver sa juste place, et d’être utile et heureux. La tyrannie de la tradition en art ou sous toute autre forme lui répugnait […] Il dédaignait le fumiste, le charlatan, le poseur, l’arriviste, le lâche, l’homme qui se mettait à plat ventre, et les rejetait avec mépris. Il n’adhérait à aucune religion officielle […] Sa religion ressemblait à celle [du poète Robert] Burns dans sa passion pour la décence, la bienveillance et la justice. » Entouré de collègues fascinés par les transcendantalistes Ralph Waldo Emerson et Henry David Thoreau – il nomma son seul enfant en l’honneur de ce dernier – et par des théosophes convaincus (en particulier Lawren Stewart Harris*), et lui-même admirateur de Walt Whitman, MacDonald, qui s’inspira de ceux-ci, devint partisan d’un spiritualisme pondéré.
Né en Angleterre d’un père canadien et d’une mère anglaise, James Edward Hervey avait presque 14 ans lorsque sa famille s’installa au Canada. Il vécut d’abord à Hamilton, où il suivit des cours du soir à la Hamilton Art School, puis à Toronto. Il fut apprenti à la Toronto Lithographing Company, tout en fréquentant la Central Ontario School of Art and Design les soirs et les fins de semaine. En 1894, il mit ses talents au service de la Grip Printing and Publishing Company (Grip Limited à partir de 1901), entreprise d’art commercial et de gravure.
En 1903, MacDonald partit travailler en Angleterre pour le réputé Carlton Studio de Londres, agence d’art commercial fondée par des amis canadiens, puis revint quatre ans plus tard à la Grip Limited comme dessinateur en chef. L’une des premières personnes que l’entreprise embaucha ensuite fut Thomson, dont MacDonald reconnut le talent en germe. Avant 1911, année où MacDonald quitta son poste pour peindre à temps plein, encouragé par Harris et par le docteur et mécène James Metcalfe MacCallum, la Grip Limited avait engagé Arthur Lismer*, Franklin Carmichael* et Francis Hans (Frank) Johnston* ; Frederick Horsman Varley* commençait à y travailler au moment du départ de MacDonald. Il faudrait attendre quelques années et une horrible guerre avant que ces artistes se rassemblent pour former le groupe des Sept.
En 1911, MacDonald devint membre de l’Arts and Letters Club, où, en novembre, il présenta sa première exposition solo, réunissant de petites esquisses à l’huile montrant Toronto et ses environs, notamment High Park, près de chez lui. Harris et le paysagiste Charles William Jefferys* s’enthousiasmèrent aussitôt devant l’originalité de son travail, « aussi indigène que les rochers, ou la neige, ou les pins, ou […] la drave qui constituent si souvent ses thèmes », écrivit Jefferys dans le magazine du club, et rare dans « un pays aussi provincial et imitatif dans ses goûts ».
Avec Harris, MacDonald peignit des lieux urbains à Toronto. Pour réaliser des esquisses, il l’accompagna également dans les Laurentides, dans les collines de la Gatineau, dans la région d’Algoma, au lac Supérieur et finalement, en 1924, dans les montagnes Rocheuses, que MacDonald adopterait comme lieu de retraite estivale durant six ans. MacDonald peignit également au lac Simcoe, dans la baie Georgienne, dans le parc Algonquin de même qu’en Nouvelle-Écosse. Même s’il ne fut jamais de santé robuste, il parvint à faire plus de 20 voyages pour réaliser des croquis un peu partout au Canada ; il peignit aussi à la Barbade pendant qu’il se remettait de problèmes de santé. En 1913, MacDonald et Harris vécurent un moment décisif lorsqu’ils visitèrent une exposition de peintres scandinaves contemporains à l’Albright Art Gallery à Buffalo, dans l’État de New York. La manière dont ces artistes peignaient leurs paysages, qui rappelaient ceux du Canada, fut une révélation. MacDonald décrivit ainsi sa réaction et celle de Harris : « Cela semblait un art de la terre et des bois et des eaux et de la roche et du ciel […] C’était ce chant de louange de leurs pays qui captura nos âmes canadiennes sensibles. » Cette expérience incita MacDonald et Harris à encourager les artistes canadiens à se consacrer à la géographie de leur propre pays avec autant d’ambition et d’originalité. La guerre en Europe freina la poursuite de leur mission, mais l’effet stimulant de la révélation perdura. À Toronto, Harris et le docteur MacCallum firent construire le Studio Building, qui ouvrit ses portes en 1914 ; il comptait six ateliers pour encourager MacDonald, Thomson et Alexander Young Jackson*, entre autres, à peindre à temps plein. Le groupe des Sept tint sa première exposition (comprenant notamment des œuvres du défunt Thomson) en mai 1920. MacDonald et Harris avaient probablement choisi les peintres invités à se joindre au groupe. Au fil du temps, alors que d’autres artistes s’associaient aux membres originaux et que certains se tournaient vers l’abstraction, MacDonald commença à sentir un relâchement dans les normes. Le groupe présenterait sa dernière exposition en 1932.
À l’instar de la plupart de ses collègues artistes, MacDonald ne pouvait vivre uniquement de sa peinture ; il vendait la plus grande partie de ses œuvres à des musées publics, dont la Galerie nationale du Canada, où le conservateur Eric Brown l’appuyait fermement. Au cours des années, il poursuivit son travail en art commercial, rémunéré à la commission, qui l’amena à réaliser des illustrations pour des magazines et des catalogues, l’ornementation de livres (souvent à l’invitation des éditeurs John McClelland* et Lorne Albert Pierce*) et des décors de scène, ainsi que des affiches (de guerre, entre autres), des publicités, des ex-libris, des plaques commémoratives et d’autres articles du même genre. Pendant un certain temps, il enseigna, notamment avec John William Beatty*, à la Shaw Correspondence School, et aux écoles d’été de l’Ontario Society of Artists et de l’Ontario College of Art. Conférencier actif, il publia aussi des articles et des poèmes dans des revues, dont le Canadian Forum (Toronto). Il reprit un emploi à temps plein en 1921 à l’Ontario College of Art. Enseignant populaire et compétent, MacDonald devint directeur du département d’arts graphiques et d’art commercial six ans plus tard. En 1929, il accepta également de diriger l’établissement, succédant à George Agnew Reid*. Ses tâches d’enseignant et d’administrateur constituaient une lourde charge de travail, car il ne refusait aucune responsabilité ; il devint l’un des grands directeurs du collège.
Durant sa carrière, MacDonald peignit entre 600 et 800 esquisses à l’huile et 150 toiles. Parmi ses œuvres majeures figurent : Tracks and traffic et The elements (1912 et 1916 ; toutes deux au Musée des beaux-arts de l’Ontario) ; Laurentian hills (1914 ; collection privée) ; The tangled garden et The solemn land (1916 et 1921 ; Musée des beaux-arts du Canada) ; Church by the sea (1924 ; Vancouver Art Gallery) ; et Rain in the mountains (1924 ; Art Gallery of Hamilton). En 1915–1916, avec Thomson et Lismer, il conçut et réalisa de remarquables panneaux décoratifs pour le chalet du docteur MacCallum à la baie Georgienne (conservés aujourd’hui au Musée des beaux-arts du Canada). En 1923, il dessina le décor de la coupole de l’église anglicane St Anne de Toronto, autre de ses grandes réalisations ; il travailla en collaboration avec une équipe de neuf artistes – dont deux de ses collègues du groupe des Sept, Varley et Carmichael, ainsi que les sculptrices Frances Norma Loring* et Florence Wyle* – qui l’aida à compléter les peintures murales et autres ornementations de l’intérieur de l’église, laquelle deviendrait un lieu historique national.
MacDonald dut composer avec sa mauvaise santé pendant la plus grande partie de sa vie adulte. Souvent, il travaillait même quand il aurait dû se reposer. En 1917, il s’effondra sous le poids de ses difficultés financières, de son désarroi après la mort de Thomson et de son dégoût devant le massacre continuel en Europe. Fin 1931, il partit séjourner à la Barbade pour se remettre d’un accident vasculaire cérébral ; un autre, plus violent, l’emporta en 1932. Membre de l’Ontario Society of Artists en 1909, il était devenu membre associé de l’Académie royale des arts du Canada en 1912, avant sa nomination tardive comme académicien à part entière en 1931, à l’âge de 58 ans.
En 1930, James Edward Hervey MacDonald avait affirmé dans une conférence qu’il avait préparée : « L’art est la communication réussie d’une expérience précieuse. » Dans son essai sur MacDonald, rédigé pour la collection Thomson du Musée des beaux-arts de l’Ontario, Shirley Lavinia Thomson [Cull*] conclut qu’il avait atteint ce but : « Le public canadien réagit toujours à l’éclat de sa couleur, à la vigueur de ses compositions et à la riche variété de ses paysages. »
James Edward Hervey MacDonald a publié quatre recueils de poèmes : The manger (s.l.n.d.), Village & fields : a few country poems (Thornhill, Ontario, 1933), West by east and other poems (Toronto, 1933) et My high horse : a mountain memory ([Thornhill], 1934). Postes Canada a émis des timbres reproduisant certains de ses tableaux : Mist fantasy, northland (1922 ; Musée des beaux-arts de l’Ontario) en 1973, et Falls, Montreal River (1920 ; Musée des beaux-arts de l’Ontario) en 1995, dans le cadre d’une série sur les membres originaux et trois membres subséquents du groupe des Sept. En 2013, la Monnaie royale canadienne a émis, dans une série sur le groupe des Sept, une pièce en argent de 20 $ gravée d’une image de Sumacs, panneau décoratif que MacDonald avait peint pour le chalet du docteur McCallum. Une série de timbres émise en mai 2020, pour souligner le 100e anniversaire de la première exposition du groupe des Sept, comporte notamment une reproduction de The church by the sea par MacDonald.
Au début de 2015, on a annoncé la découverte d’œuvres inconnues de MacDonald dans une collection privée. Acquises par la Vancouver Art Gallery, ces œuvres avaient soi-disant été enterrées en 1931 sur une propriété de l’artiste à Thornhill et retrouvées seulement en 1974 ; la galerie en a envoyé certaines à l’Institut canadien de conservation à Ottawa pour les faire authentifier, mais n’a pas commenté les résultats du rapport de septembre 2016, qui n’a pas été rendu public.
Pour le troisième prénom de MacDonald, nous utilisons dans notre texte la graphie Hervey, telle qu’écrite par son étudiant Edmund Robert Hunter (infra), qui le connaissait bien, et comme le préférait probablement MacDonald lui-même. Notons que la graphie Harvey figure dans ses actes de baptême, de mariage et de décès, accessibles en ligne à : FamilySearch, « England births and christenings, 1538–1975 » : www.familysearch.org/ark:/61903/1:1:NJJQ-SZ6 ; « Ontario deaths, 1869–1937 and overseas deaths, 1939–1947 » : www.familysearch.org/ark:/61903/1:1:JKHC-W43 ; et « Ontario marriages, 1869–1927 » : www.familysearch.org/ark:/61903/1:1:KZBH-VCW (consultés le 9 juill. 2020).
Lisa Christensen, The Lake O’Hara art of J. E. H. Macdonald and hiker’s guide (Calgary, 2003).— I. A. C. Dejardin et al., Painting Canada : Tom Thomson and the Group of Seven (catalogue d’exposition, Dulwich Picture Gallery, Londres, 2011).— E. R. Hunter, J. E. H. MacDonald : a biography & catalogue of his work (Toronto, 1940).— J. E. H. MacDonald et Paul Duval, The tangled garden (Toronto, 1978).— Marylin McKay, « St. Anne’s Anglican Church, Toronto : Byzantium versus modernity », Annales d’hist. de l’art canadien (Montréal), 18 (1997) : 6–27.— [N. E. Robertson], J. E. H. MacDonald, R.C.A., 1873–1932 (catalogue d’exposition, Art Gallery of Toronto [Musée des beaux-arts de l’Ontario] et Galerie nationale du Canada, [Toronto ?, 1965]).— D. P. Silcox, The Group of Seven and Tom Thomson (Toronto, 2003 ; éd. subséquentes, Richmond Hill, Ontario, 2006 et 2011).— Robert Stacey, J. E. H. MacDonald, designer : an anthology of graphic design, illustration and lettering ([Ottawa], 1996).— S. L. Thomson, « J. E. H. MacDonald », dans J. E. Adamson et al., Canadian art : the Thomson Collection at the Art Gallery of Ontario ([Toronto et Seattle, Washington], 2008).— Bruce Whiteman, J. E. H. MacDonald (Kingston, Ontario, 1995).
David P. Silcox, « MacDONALD, JAMES EDWARD HERVEY (Harvey) », dans Dictionnaire biographique du Canada, vol. 16, Université Laval/University of Toronto, 2003– , consulté le 20 nov. 2024, https://www.biographi.ca/fr/bio/macdonald_james_edward_hervey_16F.html.
Permalien: | https://www.biographi.ca/fr/bio/macdonald_james_edward_hervey_16F.html |
Auteur de l'article: | David P. Silcox |
Titre de l'article: | MacDONALD, JAMES EDWARD HERVEY (Harvey) |
Titre de la publication: | Dictionnaire biographique du Canada, vol. 16 |
Éditeur: | Université Laval/University of Toronto |
Année de la publication: | 2023 |
Année de la révision: | 2023 |
Date de consultation: | 20 nov. 2024 |