LEVASSEUR, NOËL, maître sculpteur, né à Québec en 1680, fils de Noël Levasseur, menuisier, et de Marguerite Guay ; le 3 avril 1701, il épousa à Montréal Marie-Madeleine Turpin, qui signa Marie Tuqin ; décédé le 12 décembre 1740 et inhumé le jour suivant à Québec. Petits-fils du maître menuisier Jean Levasseur* dit Lavigne.

On sait peu de chose des années d’apprentissage de Noël Levasseur, mais on peut supposer qu’il apprit le métier de menuisier avec son père et s’initia à la sculpture avec les maîtres de l’école de Saint-Joachim. Son contrat de mariage avec Marie-Madeleine Turpin, daté du 3 avril 1701, le situe à Montréal. Il y vivait probablement depuis quelque temps afin de parfaire sa formation. Il fut en effet, à Montréal, en contact assez étroit avec le sculpteur Charles Chaboulié pour que ce dernier, alors célibataire, se soit engagé en 1702 à laisser tout son avoir au premier-né des époux Levasseur. Malheureusement, aucune œuvre de Chaboulié ne permet de juger de son influence possible sur Noël Levasseur.

Établi définitivement à Québec en 1703, où il éleva une famille de 13 enfants, Noël Levasseur se fit une clientèle parmi les curés et les communautés de Québec et des environs. Mais il lui arriva aussi de travailler pour des particuliers ; en 1715, par exemple, Levasseur « promet et soblige de partir incessamment pour se rendre au Cap St-Ignace, auquel lieu il fera toutte la sculpture et ornements qui seront nécessaires au navire que led. [capitaine Louis Prat] Prat fait construire aud. lieu ». Si rien ne nous est parvenu des sculptures des vaisseaux du xviiie siècle, il ne faut pas oublier qu’il y eut une sculpture profane dans la colonie française. On attribue d’ailleurs à Noël Levasseur deux cartouches en bois sculpté polychrome, l’un au Musée du Québec, l’autre aux Archives publiques du Canada, représentant les armoiries royales de France. Ces cartouches auraient été commandés par Gaspard-Joseph Chaussegros* de Léry en 1727 pour orner les portes et les édifices administratifs de la ville de Québec.

Bien que le nom de Levasseur apparaisse dans les livres de comptes de beaucoup de paroisses des environs de Québec, il reste malheureusement peu d’ouvrages pour témoigner de son œuvre. Il en est ainsi pour Saint-Laurent (île d’Orléans) où il construisit un retable en 1711, pour Lauson où il exécuta le même genre de travail de 1730 à 1733, pour Saint-Augustin où il œuvra en 1731, pour Notre-Dame de Québec en 1732, pour Beauport en 1733. Il avait aussi travaillé à Varennes en 1726, à la Pointe-aux-Trembles (Montréal) en 1727, à Boucherville en 1729. Il est impossible de retracer aujourd’hui la Vierge à lEnfant de Notre-Dame de la Jeune-Lorette qui portait une inscription commençant ainsi : « Je suis donné par Noël Levasseur sculpteur et son épouse Marie Madeleine Turpin le 1er mars 1729, pour faire la procession du scapulaire et du rosaire [...] ». Impossible non plus de retracer « deux figures de bois représentant la Ste-Vierge et St-Joseph et deux autres représentant le bœuf et l’âne » sculptées en 1733 pour la paroisse de Sainte-Croix de Lotbinière.

Il nous reste, outre le maître-autel de l’Islet exécuté probablement par Noël Levasseur en 1728, une œuvre capitale que nous pouvons lui attribuer avec certitude : le maître-autel de la chapelle de l’Hôpital Général de Québec (1722). Levasseur fut sans doute aidé par son fils aîné, François-Noël*, qui, avec son fils cadet, Jean-Baptiste-Antoine*, durent toute leur formation à leur père et collaborèrent avec lui jusqu’à sa mort. L’entreprise familiale dura encore longtemps, puisqu’après 1740 les fils Levasseur partagèrent le même atelier et travaillèrent aux mêmes endroits.

Le tabernacle du maître-autel de la chapelle de l’Hôpital Général constitue une œuvre unique en son genre. C’est une construction architecturale de bois doré d’une grande simplicité : sur une prédelle, un avant-corps, s’avançant par décrochements avec un arc cintré soutenu par dix colonnes corinthiennes, est surmonté d’un dôme, d’une lanterne et d’un ange volant. Cet avant-corps est flanqué de deux ailes incurvées à la base desquelles se trouvent huit niches encastrées entre des colonnes corinthiennes, la partie supérieure étant construite en trois étages ornés de motifs décoratifs ajourés. La base de l’avant-corps porte les armes de Mgr de Saint-Vallier [La Croix] qui fit don de ce maître-autel aux religieuses de l’Hôpital Général. Les huit niches des ailes et les cinq niches du dôme renferment des statuettes qui restent encore aujourd’hui une énigme : elles n’ont pas toutes été faites par le même sculpteur. Il semble bien qu’on ait confié les statuettes du dôme à un sculpteur et celles des ailes à un autre. L’un d’eux pourrait être Noël Levasseur, sans qu’on sache lesquelles lui attribuer, faute d’étude suffisante des styles et de documentation.

Continué par ses deux fils, François-Noël et Jean-Baptiste-Antoine, et son cousin Pierre-Noël*, Noël Levasseur domina, bien au-delà de sa mort, la sculpture canadienne du xviiie siècle.

Jean Trudel

IOA, Dossiers Levasseur.— Jug. et délib., I, III, IV, V.— Tanguay, Dictionnaire, V : 387s.— Ramsay Traquair, The old architecture of Quebec (Toronto, 1947), passim.— Marius Barbeau, Les Le Vasseur, maîtres menuisiers, sculpteurs et statuaires (Québec, circa 1648–1818), Les Archives de folklore (Montréal), III (1948) : 35–49.— Gérard Morisset, Une dynastie d’artisans : Les Levasseur, La Patrie (Montréal), 8 janv. 1950.

Bibliographie de la version révisée :
Arch. du monastère des ursulines (Québec), MQ/1E/1/9, 4, 4.1 (Marché de construction entre les ursulines et Pierre-Noël Levasseur pour la construction du retable du maitre-autel et de la balustrade, 13 juin 1730).​— Bibliothèque et Arch. nationales du Québec, Centre d’arch. de Québec, CE301-S1, 13 déc. 1740 ; Centre d’arch. du Vieux-Montréal, CE601-S51, 3 avril 1701.​— F.-M. Gagnon, « Trudel, Jean, Un chef-d’œuvre de l’art ancien du Québec [...] [compte rendu] », RHAF, 27 (1973–1974) : 118–119.— Jean Trudel, la Chapelle des ursulines de Québec (Québec, 2005) ; Un chef-dœuvre de lart ancien du Québec : la chapelle des ursulines (Québec, 1972).

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Jean Trudel, « LEVASSEUR, NOËL », dans Dictionnaire biographique du Canada, vol. 2, Université Laval/University of Toronto, 2003– , consulté le 20 déc. 2024, https://www.biographi.ca/fr/bio/levasseur_noel_2F.html.

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Auteur de l'article:    Jean Trudel
Titre de l'article:    LEVASSEUR, NOËL
Titre de la publication:    Dictionnaire biographique du Canada, vol. 2
Éditeur:    Université Laval/University of Toronto
Année de la publication:    1969
Année de la révision:    2019
Date de consultation:    20 déc. 2024