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KING, BOSTON, prédicateur méthodiste, né vers 1760 près de Charleston, Caroline du Sud ; décédé en 1802 en Sierra Leone.
Boston King naquit esclave dans la plantation de Richard Waring près de Charleston. Son père, « enlevé en Afrique pendant sa jeunesse », vivait en bons termes avec Waring, et sa mère était également bien traitée à cause de ses talents de nurse et de couturière. King apprit le métier de domestique, mais, à l’âge de 16 ans, toujours sous la férule de Waring, il fut envoyé dans une ville des environs, en apprentissage chez un charpentier. Cette période au cours de laquelle il apprit son nouveau métier fut loin d’être agréable, car son employeur le battait souvent « sans pitié ». Par bonheur, lorsque la Révolution américaine éclata, Waring se joignit aux rebelles, ce qui signifiait que si King réussissait à s’enfuir chez les Britanniques, il obtiendrait sa liberté. La chance se présenta lors de la prise de Charleston par les Britanniques en mai 1780. King se joignit à un mouvement collectif d’esclaves en fuite qui ralliaient l’étendard royal et « commença d’éprouver les joies de la liberté ».
Les conditions de vie chez les Britanniques n’étaient pas en proportion de la générosité de leur offre de liberté. L’insalubrité et le surpeuplement qui régnaient dans les lieux d’hébergement favorisaient les maladies, et King fut parmi ceux qui, en grand nombre, contractèrent la petite vérole. Il se rétablit et se rendit utile à ses bienfaiteurs. Son métier de charpentier aurait pu lui permettre de faire partie de la minorité tout de même imposante de Loyalistes noirs spécialisés dans un domaine, et dont un grand nombre exercèrent leur métier au profit des Britanniques. Mais le manque d’outils l’obligea à chercher un emploi de rechange comme domestique. Cependant, à l’instar d’innombrables Loyalistes de race noire, il prit bientôt part aux combats. Comme estafette, il traversa les lignes ennemies et, grâce à lui, 250 soldats britanniques assiégés à Nelson’s Ferry (près d’Eutawville, Caroline du Sud) purent retrouver leur liberté. Il fut également membre de l’équipage d’un vaisseau de guerre britannique et participa à la capture d’un navire rebelle dans la baie de Chesapeake. Par la suite, il fut fait prisonnier par la marine américaine et remis en esclavage, mais il s’enfuit une deuxième fois, pour trouver refuge de nouveau chez les Britanniques. Les rebelles n’étaient cependant pas les seuls à menacer sa liberté ; de nombreux fugitifs étaient trahis et vendus comme esclaves par des officiers de la milice loyaliste. Il arriva à King lui-même d’être capturé par un capitaine de la milice, mais, doué pour la fuite, il réussit à s’enfuir une fois encore.
Comme la guerre tirait à sa fin, des milliers de Loyalistes, parmi lesquels se trouvait King, se dirigèrent vers New York. Une fois rendu là, il gagna sa vie comme domestique et travailleur journalier, et il épousa Violet, une compagne d’infortune, qui avait fui un propriétaire d’esclaves de Wilmington, en Caroline du Nord. La publication du traité de paix préliminaire, à la fin de 1782, vint rompre la quiétude de King. Selon l’article 7, les Britanniques devaient restituer toutes les propriétés américaines, y compris les esclaves. King écrivait plus tard que la perspective d’un retour à l’esclavage remplit les Loyalistes noirs d’une « angoisse et d’une terreur indicibles ». Leurs craintes n’allaient certes pas se dissiper lorsque leurs anciens maîtres arrivèrent à New York et commencèrent à s’emparer des Noirs dans les rues et dans leurs maisons. À ce moment décisif, sir Guy Carleton, commandant en chef des forces britanniques, annonça son interprétation de l’article 7, déclarant qu’en fait les Loyalistes noirs n’étaient pas la propriété des Américains au moment du traité et que, en conséquence, on devait leur permettre d’être évacués avec les autres Loyalistes. Le général de brigade Samuel Birch, commandant de la ville, délivra des certificats pour garantir la liberté aux réfugiés noirs de New York, qui s’embarquèrent sur des navires de transport, où on consigna leur nom, leur signalement ainsi que leur histoire personnelle dans le « Livre des Noirs ». Du 26 avril au 30 novembre 1783, 3 000 Loyalistes noirs furent envoyés par bateau en Nouvelle-Écosse. Le 31 juillet, King, décrit comme un « solide gaillard » de 23 ans, s’embarqua sur l’Abondance avec son épouse, à destination de Port Roseway, récemment rebaptisé Shelburne.
Les premiers Loyalistes étaient arrivés à Port Roseway en mai 1783. Parmi eux, un groupe de Noirs s’étaient déjà mis à défricher l’emplacement de la ville et à préparer des routes. À six milles de là à peine, l’arpenteur Benjamin Marston* avait prévu un endroit séparé pour les Noirs. King y arriva le 27 août, juste à temps pour assister aux travaux d’arpentage et participer à l’établissement de Birchtown, baptisé en l’honneur du protecteur du groupe à New York. Une assemblée tenue en janvier 1784 permit de constater que Birchtown, avec une population de 1 521 Noirs, était la plus grande colonie de Noirs libres en Amérique du Nord. Chacun d’entre eux reçut un lopin de terre dans la ville, assez grand pour y faire un jardin, mais le retard dans la concession des fermes les obligea à continuer de travailler à Shelburne, où la construction assurait un plein emploi.
Un grand renouveau religieux balaya Birchtown pendant l’hiver de 1783–1784, phénomène commun d’ailleurs à travers toute la Nouvelle-Écosse à mesure que les anciens esclaves envahissaient les églises pour recevoir le baptême. William Black*, évangéliste méthodiste, portait une attention spéciale à Birchtown, où se trouvait la plus grande communauté méthodiste de la Nouvelle-Écosse. John Wesley lui-même fit allusion à l’enthousiasme religieux des Noirs de Birchtown, et, en 1785, on envoya de Baltimore, au Maryland, le méthodiste américain Freeborn Garrettson pour venir aider au recrutement des néophytes. La première personne de l’établissement à se convertir fut Violet, la femme de King. Grâce à la prédication du loyaliste noir Moses Wilkinson, le plus éminent méthodiste de Birchtown, elle fut libérée de ses « mauvais penchants ». Au début de 1785, King se convertit également. Il décrivit ainsi ce qu’il ressentit alors : « Tous mes doutes et mes craintes s’évanouirent : la foi me permit de voir le ciel s’entrouvrir et d’apercevoir le Christ et les anges pleins d’allégresse à mon égard. » Pendant les quelques années qui suivirent, King fit office de prédicateur dans les établissements noirs situés entre Shelburne et Halifax. Ses efforts alliés à ceux d’autres prédicateurs firent qu’en 1790 les Loyalistes noirs constituaient le quart des méthodistes de la Nouvelle-Écosse.
Comme la plupart de ses voisins à Birchtown, King travaillait à Shelburne, comme charpentier, et ajoutait à ses revenus les produits de son jardin. En acceptant des salaires moins élevés, les Noirs s’attirèrent l’hostilité des travailleurs blancs, lesquels provoquèrent une émeute en juillet 1784 et tentèrent de chasser les Noirs de Shelburne. Le problème s’estompa lorsqu’on accorda des fermes aux Blancs, mais, en 1789, les problèmes économiques à Shelburne amenèrent du chômage et plongèrent les Noirs dans une profonde misère. Consterné par la « pauvreté et l’indigence » qui l’entouraient, King quitta Birchtown et trouva du travail à bord d’un bateau de pêche qui avait son port d’attache à la baie de Chedabouctou, où il continuait son œuvre de prédicateur chaque fois que l’occasion se présentait. En 1791, William Black, alors surintendant de district chez les méthodistes de la Nouvelle-Écosse, nomma King prédicateur de l’établissement noir de Preston près de Halifax. Cette communauté noire, très unie, avait pour chefs de file les prédicateurs des communautés anglicane, baptiste et méthodiste. King vécut enfin dans une certaine aisance : il gagnait sa vie convenablement en travaillant à Preston et dans la ville avoisinante de Dartmouth, et jouissait du respect de ses ouailles. Son séjour à Preston fut cependant de courte durée. Quoique satisfait de sa vie en Nouvelle-Écosse, il éprouvait un profond désir de répandre « la connaissance du christianisme » parmi ses frères d’Afrique et, en 1791, il se joignit à d’autres éminents Noirs de la Nouvelle-Écosse, comme David George et Thomas Peters*, afin d’aider John Clarkson de la Sierra Leone Company à recruter des émigrants pour une colonie de Noirs affranchis en Afrique occidentale. L’aide qu’il apporta à Clarkson dans cette entreprise porta fruit : presque tous les membres de la communauté noire de Preston, parmi lesquels un grand nombre étaient séduits par la promesse de concessions de terres gratuites et la perspective de l’autodétermination, se joignirent à l’exode en Sierra Leone.
Une flotte de 15 navires quitta la Nouvelle-Écosse pour la Sierra Leone en janvier 1792, King et les Noirs de Preston voyageant à bord de l’Eleanor. Une fois arrivée à Freetown, Violet King succomba à une fièvre épidémique, mais King lui survécut et fonda une chapelle méthodiste. Il vit ses ambitions se réaliser lorsque la Sierra Leone Company le nomma, en août 1793, professeur et missionnaire chez les Africains de la côte Bullom, en face de Freetown. Il devint ainsi le premier missionnaire méthodiste d’Afrique. En mars 1794, pour l’aider à mieux s’acquitter de son ministère, la compagnie l’envoya en Angleterre où il fréquenta la Kingswood School, près de Bristol, pendant deux ans. Durant son séjour, il écrivit son autobiographie qui se termine en 1796. Dès son retour en Afrique à la fin de septembre 1796, la société l’engagea comme professeur à Freetown et dans les environs, mais il semble qu’il n’ait pas tiré satisfaction de son travail, car il ambitionnait d’exercer le ministère auprès des indigènes d’Afrique. Il quitta bientôt la colonie pour se rendre dans un des postes de la compagnie situé au pays des Sherbros, à une centaine de milles vers le sud, où il put probablement reprendre ses activités missionnaires. Il y mourut, ainsi que sa deuxième épouse, en 1802.
Boston King fut un des trois loyalistes noirs à avoir laissé un récit personnel de ses expériences. John Marrant* a écrit une prestigieuse chronique intitulée A narrative of the Lord’s wonderful dealings [...], qui constitue la plus importante partie de son héritage, et David George, qui est resté célèbre comme fondateur de l’Église baptiste noire dans les Maritimes, a publié un récit très révélateur de sa vie dans le Baptist annual register de Londres. Si les « Memoirs [...] » de Boston King ne sont ni une grande œuvre littéraire ni une œuvre historique, ils permettent néanmoins, par les souvenirs que l’auteur évoque, de se faire une idée de la vie d’un simple loyaliste noir pendant la Révolution américaine et aux premiers temps de la Nouvelle-Écosse.
L’original de « Book of Negroes » se trouve au PRO, PRO 30/55/100. Une photocopie est disponible à la NYPL, British Headquarters papers, doc. 10427, tandis qu’une transcription comportant de légères variations se trouve aux APC, MG 23, B1, 55, et aux PANS, RG 1, 423. Boston King est l’auteur de « Memoirs of the life of Boston King, a black preacher, written by himself during his residence at Kingswood School », Methodist Magazine (Londres), 21 (1798) : 105–110, 157–161, 209–213, 261–265.
APC, MG 23, D1, sér. 1, 24 (transcriptions aux PANS).— BL, Add.
James W. St G. Walker, « KING, BOSTON », dans Dictionnaire biographique du Canada, vol. 5, Université Laval/University of Toronto, 2003– , consulté le 20 déc. 2024, https://www.biographi.ca/fr/bio/king_boston_5F.html.
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Auteur de l'article: | James W. St G. Walker |
Titre de l'article: | KING, BOSTON |
Titre de la publication: | Dictionnaire biographique du Canada, vol. 5 |
Éditeur: | Université Laval/University of Toronto |
Année de la publication: | 1983 |
Année de la révision: | 1983 |
Date de consultation: | 20 déc. 2024 |