HARRIS, JAMES STANLEY, forgeron, industriel, marchand et fonctionnaire, né le 25 octobre 1803 dans le comté d’Annapolis, Nouvelle-Écosse, fils de Benjamin Harris et de Rachel Bolscomb (Balcomb) ; en 1837, il épousa Louisa Ann Wilson, de Dorchester, Nouveau-Brunswick, et ils eurent un fils et huit filles ; décédé le 11 juin 1888 à Portland (maintenant partie de Saint-Jean, Nouveau-Brunswick).

James Stanley Harris ne fréquenta pas longtemps l’école et commença à l’âge de 15 ans son apprentissage de forgeron. En 1823, il déménagea à Saint-Jean, où il termina son apprentissage et devint un habile taillandier sous la direction de James Wood, l’un des ferronniers les plus expérimentés et le premier fabricant d’outils tranchants de la ville. Harris s’associa en 1828 avec Thomas Allan (Allen), expert machiniste également, pour fabriquer des outils au sein de la firme Harris and Allan. Avec un capital de départ d’environ $5 000, ils ouvrirent un atelier à Portland Bridge et une quincaillerie pour vendre leurs produits. Trois ans plus tard, ils mirent sur pied la première fonderie du Nouveau-Brunswick. Cette petite fonderie, située à Portland, coulait la fonte brute importée dans un fourneau dont la soufflerie fonctionnait à l’aide de deux gros soufflets actionnés par des hommes qui se relayaient ; celle-ci devint plus puissante lorsque la vapeur fut introduite. Les partenaires comptèrent parmi les premiers au Nouveau-Brunswick à fondre des poêles Franklin et à fabriquer des clous découpés et un ensemble de pièces moulées pour les moulins. À mesure que leurs ventes augmentèrent, Harris et Allan agrandirent leurs bâtiments et en construisirent des nouveaux, tout en bois. Au début des années 1840, leur usine comprenait une fonderie, des ateliers de construction mécanique, de forgeage, de modelage et d’ajustage, ainsi qu’un vaste entrepôt.

En 1845, un incendie rasa les ateliers de moulage et de construction mécanique ainsi que d’autres bâtiments ; une machine à vapeur, des tours et une grande quantité de matériaux et de produits manufacturés furent détruits. Harris et Allan qui n’étaient pas assurés perdirent $30 000, mais le travail reprit dans un nouvel atelier de moulage moins de 15 jours après l’incendie. Vers 1856, un autre incendie détruisit l’atelier de construction mécanique, la chaufferie et un entrepôt, ce qui représentait des pertes s’élevant de nouveau à $30 000. Un atelier de construction mécanique en briques, de trois étages, fut aussitôt construit, mais d’autres bâtiments furent reconstruits en bois et rasés par le feu en 1871 ; lors de ce troisième incendie, un entrepôt, un atelier où l’on fondait des poêles et une remise contenant des wagons de chemin de fer en construction furent détruits, les pertes atteignant cette fois $40 000.

Harris et Allan firent de bonnes affaires pendant de nombreuses années dans la fabrication et la vente de poêles, de machines agricoles, de grilles de foyer, de manteaux de cheminée, de tôle à clous, de fer en barres, de genouillères en fer pour les navires, d’arbres de transmission et de toutes sortes de formes martelées. Leur firme exploitait également un atelier pour les matériaux d’ardoise qu’elle marbrait et vendait pour la décoration intérieure. Leurs appareils ménagers et leur machinerie agricole étaient vendus au magasin de la firme à Saint-Jean. Pendant le boom de la construction navale à Saint-Jean dans les années 1850, l’entreprise réalisa d’excellents profits dans ce domaine, mais Harris prévit que le transport terrestre prendrait de l’importance, et la compagnie diminua graduellement la fabrication de poêles et de machines agricoles pour se lancer dans la production de wagons et de pièces de chemin de fer. Durant les années 1850, Harris et Allan furent également copropriétaires de la York and Carleton Mining Company, entreprise du Nouveau-Brunswick qui produisait de la fonte brute. De 1855 à 1870, Harris fut un important actionnaire de la Saint John Manufacturing Company qui exploitait une filature de laine à Mispec, près de Saint-Jean.

Lorsque Thomas Allan mourut en 1860 ou 1861, Harris racheta sa part dans la compagnie. La nouvelle firme, la James Harris and Company, se lança alors dans la fabrication de roues de wagon ; toujours à la fine pointe du progrès en ce qui a trait aux procédés de fabrication, l’entreprise se classa au premier rang dans la fabrication des roues en Amérique du Nord. Elle commença bientôt à produire aussi des mécanismes de manœuvre pour locomotives, des wagons de voyageurs, des fourgons et des wagons à plate-forme. En 1870, Harris se porta acquéreur de grandes usines de laminage à Saint-Jean ; la compagnie put ainsi, grâce à cet achat, entreprendre de gros travaux dépassant la capacité de production de n’importe quelle firme rivale canadienne. L’histoire des usines de Harris coïncide en fait avec le boom qu’avait connu la construction des chemins de fer au Nouveau-Brunswick à partir des années 1850. Pendant les décennies 1860 et 1870, l’entreprise travailla beaucoup pour les chemins de fer Intercolonial et Western Extension et, lorsque l’Intercolonial opta pour un chemin de fer à faible écartement en 1875, la firme de Harris remplit en six mois un contrat de $300 000 qui nécessita 500 tonnes de fer forgé pour les essieux, 1 500 tonnes de fonte pour les wagons ouverts et 1 000 tonnes de fer pour des travaux connexes. Les ateliers de la compagnie utilisaient, au début des années 1880, plus de 4 000 tonnes de fer annuellement, dont la moitié était du fer au charbon de bois importé des États-Unis et destiné aux roues de wagon, et le reste, de la fonte brute et du fer malléable importés en grande partie d’Angleterre.

L’entreprise de Harris employait, en 1881, 230 hommes et avait un chiffre de ventes annuel de $200 000 ; en 1888, le nombre d’employés passa à 282 dans les manufactures de wagons de chemin de fer et à 78 dans l’usine de laminage. Les réclames publicitaires de la compagnie en 1888 indiquent que celle-ci fabriquait des wagons de toutes sortes, des bandages d’acier, des roues de wagon en fer trempé, des essieux de wagon en fer martelé, des machines à vapeur, de la machinerie pour les moulins, des roues à turbine hydraulique, des pièces de pompe, de pont, de clôture et de navire, des barres coniques et parallèles pour des genouillères de navires, de la tôle à clous, des arbres de transmission et des formes de toutes sortes. Harris surveilla lui-même le fonctionnement de son entreprise jusqu’à quelques mois avant sa mort en juin 1888. Son gendre, James C. Robertson, qui était associé depuis décembre 1887, prit la direction de la compagnie. Selon une clause du testament de Harris, la compagnie fut vendue moins de trois ans après sa mort. En 1892, le gouvernement fédéral expropria pour $200 000 le terrain de cinq acres que possédait la compagnie à Saint-Jean ; la compagnie s’installa par la suite à Amherst, Nouvelle-Écosse, et fusionna avec la Rhodes Curry and Company.

Harris joua un rôle modeste dans les affaires locales il exerça les fonctions de membre du conseil municipal de Portland de 1871 à 1876 et de juge de paix du comté de Saint-Jean de 1866 à 1884. Il fut un des administrateurs de l’église méthodiste de Portland et, à un certain moment, président de la section de Portland de la British and Foreign Bible Society. En 1875, il était à la fois président de la Manufacturers’ and Mechanics’ Exhibition, qui se tint à Saint-Jean au début de l’automne de cette année, et du comité consultatif de l’Exposition internationale du centenaire de Philadelphie qui eut lieu en 1876. Il fut aussi membre du conseil d’administration de la Dominion and Loyalist Centennial Exhibition, qui se tint en 1883.

La perspicacité et le sens des affaires de Harris ont manifestement contribué à la réussite de l’ancien apprenti forgeron qui devint un important industriel canadien ; il laissa derrière lui des biens évalués à $235 000.

D. Rik Whittaker

Fernhill Cemetery (Saint-Jean, N.-B.), Burial records, J. S. Harris.— Musée du N.-B., Allan’s Foundry, Ledger, 1866–1870.— Portland United Church (Saint-Jean), Burial records, juin 1888.— N.-B., Acts, 1847 ; 1849 ; 1854–1855.— Daily Sun, 13 déc. 1887–15 juin 1888.— Daily Telegraph, 1er oct. 1875–1er oct. 1885.— Saint John Globe, 25 janv. 1892.— Canadian biog. dict., II : 684–687.— St. John and its business : a history of St. John [...] (Saint-Jean, 1875), 128.— P. G. Hall, « A misplaced genius », New Brunswick Magazine (Saint-Jean), 1 (juill.–déc. 1898) : 247–256.

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D. Rik Whittaker, « HARRIS, JAMES STANLEY », dans Dictionnaire biographique du Canada, vol. 11, Université Laval/University of Toronto, 2003– , consulté le 20 déc. 2024, https://www.biographi.ca/fr/bio/harris_james_stanley_11F.html.

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Titre de la publication:    Dictionnaire biographique du Canada, vol. 11
Éditeur:    Université Laval/University of Toronto
Année de la publication:    1982
Année de la révision:    1982
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