GILMOUR, ALLAN, marchand de bois, constructeur et propriétaire de navires, né le 29 septembre 1805 à Craigton, Mearns (région de Strathclyde, Écosse), fils de John Gilmour, fermier, et de Margaret Urie ; en 1839, il épousa Agnes Strang de St Andrews, Nouveau-Brunswick, et ils eurent un fils ; décédé le 18 novembre 1884 à Glasgow, Écosse.
Allan Gilmour fréquenta l’école paroissiale de Mearns où il acquit une base solide en mathématiques et des éléments de comptabilité. En 1819, il obtint un emploi de commis au siège social de l’entreprise d’importation de bois Pollok, Gilmour and Company, association peu structurée fondée à Glasgow en 1804 et enregistrée en 1812 comme société en nom collectif, grâce à son oncle, Allan Gilmour l’aîné, principal associé de la compagnie. Son assiduité au travail et sa compréhension rapide du fonctionnement de l’entreprise l’amenèrent à être promu en 1821 à un poste de commis dans la succursale prospère de Miramichi au Nouveau-Brunswick. En 1824, il fut affecté à celle de Bathurst, dans la même province, où il prit régulièrement des leçons de français d’un prêtre de la région ; il parvint à parler cette langue avec beaucoup de facilité. En 1825, sur les conseils de son oncle, il retourna en Écosse et passa une année à Greenock, centre de construction navale en plein essor à l’époque, où il se familiarisa avec le dessin de plans et les principes de la construction des navires. De 1826 à 1828, il travailla à Saint-Jean, Nouveau-Brunswick, chez Robert Rankin and Company, filiale de la Pollok, Gilmour and Company, fondée par Robert Rankin* en 1822. La filiale de Saint-Jean prenait de l’expansion ; d’abord engagée dans l’exportation du bois, elle se lança ensuite dans l’importation de textiles, de vivres et de matériaux de construction, et la construction de navires, à laquelle Gilmour se consacra. Par cette extension de sa sphère d’activité à la construction navale, la firme pouvait utiliser sur les lieux une partie de son bois et augmenter ses profits, grâce à la vente des bateaux et de leur cargaison de bois à Liverpool.
Gilmour eut la possibilité d’assumer des fonctions de direction dans l’entreprise au début de 1828, année où, conjointement avec Gilmour l’aîné et William Ritchie* de Montréal, il fit une étude des ressources en bois du haut Saint-Laurent et du Haut-Canada. Cette étude conduisit à la fondation à Québec d’une compagnie appelée Allan Gilmour and Company ; les associés en furent les deux Allan Gilmour, des membres de la famille Pollok, de Glasgow, et Ritchie. On commença l’exploitation à l’anse au Foulon en juillet 1828, et la compagnie s’agrandit bientôt sur la rive sud du fleuve, près de Lévis, à l’anse aux Sauvages ; sous la direction du jeune Gilmour, elle devint rapidement l’un des principaux acheteurs de trains de flottage. Pour son entreprise du Nouveau-Brunswick, la Pollok, Gilmour and Company avait avancé de l’argent à ceux qui travaillaient dans ce domaine et s’assurait ainsi d’un approvisionnement en bois chaque printemps ; cependant, chez les marchands de bois de Québec, la coutume voulait qu’on fit une offre pour les trains de bois que des entrepreneurs indépendants faisaient flotter sur le Saint-Laurent. De nombreux marchands avaient recours à des agents d’affaires postés en amont, souvent des aubergistes, qui les avertissaient de l’approche des trains de bois. En 1832, à l’instigation de Gilmour l’aîné, on tenta d’accaparer le bois par préemption des trains descendant le fleuve et cela se fit avec tellement de succès qu’on réalisa des profits considérables. En 1835, on employait 150 hommes pour recevoir les trains dans les anses où était établie la compagnie. Aidé de son frère cadet John*, Gilmour ouvrit lui aussi une entreprise de construction navale à l’anse au Foulon et se spécialisa dans les gros navires solidement bâtis, destinés au commerce du bois, dont l’Advance, jaugeant 1466 tonneaux, qu’on qualifia de « léviathan de son époque », fut un exemple.
De Québec, l’Allan Gilmour and Company fit transporter surtout du bois équarri sur les navires de la compagnie, tout en exportant aussi une certaine quantité de madriers et de douves. Jusqu’en 1830 le principal port de destination fut Greenock, mais après cette date les bateaux déchargèrent leur cargaison à Liverpool. La compagnie y possédait d’immenses cours d’entreposage de bois équarri et vendait elle-même son bois à des constructeurs qui, reconnaissant sa qualité de matériau de construction, l’utilisaient pour en faire des poutres dans les immeubles qu’on érigeait alors, pendant une vague de construction, en Grande-Bretagne.
Gilmour était le neveu préféré de Gilmour l’aîné, dont il portait le prénom, et son succès à Québec le valorisait encore davantage aux yeux de son oncle qui comptait lui léguer non seulement sa part d’associé de la firme mère à Glasgow, mais aussi sa vaste fortune et des propriétés foncières en Écosse. Malheureusement, ces projets s’écroulèrent par suite d’une violente querelle qui éclata en 1837–1838 entre Gilmour l’aîné et ses associés, les neveux des associés des premiers jours, John et Arthur Pollok. Gilmour l’aîné quitta la firme, retira son capital et pria instamment son neveu d’en faire autant. Le jeune Gilmour refusa de suivre l’exemple de son oncle, perdant ainsi toute chance d’entrer en possession d’un gros héritage. À la fin de 1838, les associés de Glasgow lui demandèrent de revenir en Écosse et de devenir gérant de la Pollok, Gilmour and Company. Lorsqu’il accepta, on décida de partager l’exploitation de la compagnie entre deux principaux sièges sociaux, l’un à Liverpool, se spécialisant dans le commerce du bois, sous la direction de Robert Rankin, et l’autre, à Glasgow, dirigé par Gilmour, s’occupant surtout de transport maritime. Cet arrangement se révéla heureux, puisque Rankin et Gilmour étaient de bons amis.
D’après les dires de John Rankin dans A history of our firm [...], il est à peu près certain que Robert Rankin fut le grand patron de l’entreprise, mais le rôle que Gilmour joua comme « chef des travaux maritimes » s’avéra capital. Il dirigea sa flotte de navires de façon efficace et économique et, selon l’expression de John Rankin, « il était énergique, d’une rare détermination, impétueux, passionné (bien que par moments seulement), mais il pouvait être têtu ». Jusqu’à sa retraite en 1870, à l’époque où l’entreprise était essentiellement une compagnie de transport maritime plutôt que d’importation de bois, Gilmour fut considéré comme l’un des plus importants propriétaires de navires d’Écosse et l’un des principaux experts en matière de commerce du bois canadien. Il avait aussi fourni des renseignements importants à des commissions parlementaires sur les lois de la navigation, de 1846 à 1848, sur l’évaluation du tonnage des bateaux et autres questions maritimes en 1853–1854.
À Glasgow, Gilmour résidait dans l’élégante rue St Vincent et, à mesure qu’augmenta sa fortune, il loua puis acheta des propriétés de campagne où il put donner libre cours à son goût pour la vie au grand air. Au Canada, il avait chassé l’orignal ; en Écosse, il pêcha et pratiqua le tir sur ses propriétés de Lundin et de Montrave, dans le Fifeshire. Il demeura jusqu’à sa mort associé des diverses succursales de la Pollok, Gilmour and Company au Canada ; parmi le grand nombre d’hommes d’affaires de Glasgow dont la carrière avait débuté au Canada, il était considéré comme l’un de ceux qui avaient particulièrement bien réussi. Il fut certainement au premier rang des magnats du bois au xixe siècle, et on peut attribuer son succès dans le plus rentable des secteurs d’activité s’offrant à un entrepreneur britannique, non seulement à son sens des affaires, mais aussi au fait que les diverses entreprises de la Pollok, Gilmour and Company en Amérique du Nord britannique avaient été bien montées et disposaient d’un personnel compétent depuis le tout début de l’ère du commerce du bois.
La plupart des documents des diverses entreprises des Pollok et des Gilmour furent détruits après la publication en 1921 de l’histoire de la firme par John Rankin, mais on peut trouver quelques papiers de famille et d’affaires couvrant les premières années aux Univ. of Glasgow Arch., Adam Smith Business Records Store, UGD/36. [d. s. m.]
Canadian business history ; selected studies, 1497–1971, D. S. Macmillan, édit. (Toronto, 1972).— A. R. M. Lower, Great Britain’s woodyard : British America and the timber trade, 1763–1867 (Montréal et Londres, 1973).— MacNutt, New Brunswick.— John Rankin, A history of our firm, being some account of the firm of Pollok, Gilmour and Co. and its offshoots and connections, 1804–1920 (2e éd., Liverpool, Angl., 1921).— The Scottish tradition in Canada, W. S. Reid, édit. (Toronto, 1976).— D. M. Williams, « Merchanting in the first half of the nineteenth century : the Liverpool timber trade », Business Hist. (Liverpool), 8 (1966) :103–121.
David S. Macmillan, « GILMOUR, ALLAN (1805-1884) », dans Dictionnaire biographique du Canada, vol. 11, Université Laval/University of Toronto, 2003– , consulté le 20 nov. 2024, https://www.biographi.ca/fr/bio/gilmour_allan_1805_1884_11F.html.
Permalien: | https://www.biographi.ca/fr/bio/gilmour_allan_1805_1884_11F.html |
Auteur de l'article: | David S. Macmillan |
Titre de l'article: | GILMOUR, ALLAN (1805-1884) |
Titre de la publication: | Dictionnaire biographique du Canada, vol. 11 |
Éditeur: | Université Laval/University of Toronto |
Année de la publication: | 1982 |
Année de la révision: | 1982 |
Date de consultation: | 20 nov. 2024 |