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DOUGALL, LILY, écrivaine, née le 16 avril 1858 à Montréal, dernière des neuf enfants de John Dougall* et d’Elizabeth Redpath ; petite-fille de John Redpath* ; décédée célibataire le 9 octobre 1923 à Cumnor, Angleterre.

Fille d’un marchand aisé qui fonda des journaux religieux, dont le Montreal Witness, Lily Dougall étudia d’abord dans des écoles privées. En 1881, elle fit à Édimbourg un bref séjour pendant lequel elle servit de demoiselle de compagnie à l’une de ses tantes et en profita pour commencer à suivre des cours au University of Edinburgh Centre for the Education of Women afin de se préparer à une carrière de femme de lettres. Vers 1885, elle s’inscrivit à la University of St Andrews en Écosse et, en 1887, elle obtint un « lady literate in arts », soit l’équivalent de la maîtrise ès arts décernée aux hommes. De 1885 à 1900, elle vécut tantôt en Grande-Bretagne, tantôt au Canada. En 1900, elle élut domicile en Angleterre, en grande partie pour des raisons de santé (elle souffrait d’asthme), mais elle continua de passer de longues périodes au Canada, surtout chez son frère John Redpath Dougall à Montréal.

Lily Dougall publia sa première nouvelle en 1889. Les suivantes paraîtraient dans divers périodiques, notamment le Temple Bar de Londres, l’Atlantic Monthly de Boston, le Longman’s Magazine de Londres et le Chambers’s Journal de Londres et d’Édimbourg. Son premier roman, Beggars all, lancé à Londres en 1891, reçut un accueil enthousiaste de la part des critiques et du public. Cette histoire, qui se passe en Angleterre, contient déjà la combinaison d’éléments qui caractériserait ses œuvres d’imagination ultérieures : une intrigue peu banale qui tient le lecteur en haleine, des personnages qui excitent la curiosité, une remise en question des présupposés moraux de l’époque. Par le caractère intellectuel de son écriture et son intérêt pour la vie de tous les jours, Lily Dougall fait penser à George Eliot. Publié à Londres en 1893, son deuxième roman, qui se déroule au Canada et s’intitule What necessity knows, fut lui aussi fort bien accueilli. Par son ampleur, il rappelle Middlemarch […] (Londres, 1871–1872) d’Eliot, mais il présente aussi des similitudes avec les romans de Jane Austen, notamment Pride and prejudice (Londres, 1813). Complexe, écrit dans un style plein de verve et riche en symboles, avec des descriptions lyriques du paysage canadien, What necessity knows comporte de multiples facettes. On peut le lire pour ses triangles amoureux, son tableau de la diversité sociale et psychologique des immigrants britanniques installés dans les Cantons-de-l’Est, son exploration de la régénération spirituelle ou ses portraits de femmes fortes à l’esprit indépendant.

Véritable étudite, Lily Dougall mettait un point d’honneur à consulter des spécialistes. Elle envoya ses premières nouvelles et ses premiers romans à Henry Sidgwick, professeur de morale à Cambridge ainsi que cofondateur et premier président de la Society for Psychical Research. Dès ses jeunes années, elle avait été intriguée par la télépathie, le spiritisme, la guérison par la foi et la relation entre les mondes spirituel, psychologique et physique. Admise en 1895 à la société, elle y resterait de nombreuses années.

Les trois romans suivants de Lily Dougall ont aussi pour cadre le Canada. Le plus ouvertement didactique est The Zeit-geist, paru à Londres en 1895. Il raconte la conversion d’un homme aux mœurs dissolues qui se tourne vers la spiritualité et la philanthropie, et qui devient libre-penseur et essentiellement panthéiste. Pour ce livre, Mlle Dougall sollicita l’avis de deux philosophes d’Oxford, William Wallace et Edward Caird.

En 1899, à Londres, Lily Dougall publia The Mormon prophet. Ce roman sur l’émergence du mormonisme s’appuyait sur des recherches dans les archives de l’Église de Jésus-Christ des saints des derniers jours et sur des entrevues avec des gens qui avaient connu le fondateur de cette confession religieuse, Joseph Smith. L’auteure s’y intéressait principalement à la complexité de cet homme. Elle avait rencontré le philosophe et psychologue William James pour discuter des visions de Smith, des révélations qu’il prétendait avoir reçues et, d’une façon plus générale, du mysticisme.

Le premier ouvrage théologique de Lily Dougall, Pro Christo et Ecclesia (Londres, 1900), publié sous le couvert de l’anonymat en raison de son caractère polémique, fut qualifié d’« ouvrage d’une grande puissance » par la critique, et l’on crut que l’auteur était un éminent ecclésiastique. Mlle Dougall y développe les mêmes idées que dans ses œuvres de fiction : elle préconise un renouveau du christianisme par l’amour et la joie, critique le sectarisme et fait valoir que la religion chrétienne doit s’adapter aux nouvelles connaissances. Bien qu’elle ait publié trois autres romans les huit années suivantes, elle se concentra sur l’écriture d’ouvrages religieux et philosophiques qu’elle ne signait pas. Peu à peu, son identité fut connue, et les érudits furent de plus en plus nombreux à la consulter.

En 1911, après avoir habité à divers endroits en Angleterre, Lily Dougall s’installa à Cumnor, près d’Oxford, où sa maison devint un foyer de discussions philosophiques. Les collaborateurs des quatre recueils d’essais résultant de ces débats comprenaient des spécialistes de toute une gamme de disciplines. Dans ses propres œuvres, Mlle Dougall explorait des questions comme les aspects psychologiques de l’expérience religieuse, le rapport entre la religion et la science et entre la religion et l’art ou le devoir des Églises à l’égard des problèmes sociaux. Elle était ouverte aux divers courants du christianisme. Elle participa à des rencontres de scientistes chrétiens ; ils lui demandèrent d’écrire pour leur publication. Elle fut invitée à publier dans un périodique unitarien de Londres, le Hibbert Journal. Elle assista aux cours d’été de la Société des amis et écrivit pour la revue mensuelle de celle-ci. Elle tint chez elle une conférence sur la guérison par la foi. La relation entre la santé physique, mentale et spirituelle suscitait chez elle un intérêt croissant. Elle devint membre active de la Guild of Health et composa un livre pour les groupes d’études de cette organisation. De plus en plus préoccupée par les questions sociales et politiques, elle assistait à des conférences et à des assemblées sur des sujets très divers, dont le socialisme fabien.

Charles Gardner, auteur d’un ouvrage consacré aux progrès du modernisme dans l’Église d’Angleterre au début du xxe siècle, In defence of the faith (Oxford, 1927), parle de Lily Dougall dans son chapitre intitulé « Some women rebels » et vante Pro Christo et Ecclesia en ces termes : « Pour ceux qui avaient grandi dans le vieil évangélisme puritain, il s’agissait d’un nouvel évangile. Le pharisaïsme est traqué, mis à nu sans pitié, et la Figure délicieusement humaine des évangiles apparaît sous une douce lumière. » En commentant la collaboration de Lily Dougall avec le « brillant » Cyril William Emmet dans The Lord of thought [...] (1922), Gardner note : « Mlle Dougall a beaucoup de choses éclairantes et stimulantes à dire sur le problème de l’apocalypse. » Il est intrigué par la remarquable influence que Mlle Dougall exerçait sur des érudits et philosophes contemporains tels Burnett Hillman Streeter, Percy Dearmer ou Harold Anson et sur le critique littéraire Arthur Clutton-Brock.

Publiés à la fois en Grande-Bretagne et aux États-Unis, les romans de Lily Dougall firent l’objet de recensions nombreuses et favorables, tout comme ses ouvrages philosophiques et religieux. Cette écrivaine à l’esprit rationnel et curieux usa de ses talents pour contester le statu quo en matière sociale et religieuse et inspira de l’admiration à bon nombre des plus grands intellectuels de son temps. Elle mourut d’un arrêt cardiaque à sa maison de Cumnor.

Lorraine McMullen

Lily Dougall est l’auteure de nombreux romans et ouvrages religieux. Le Répertoire de l’ICMH contient une liste partielle de ceux-ci. D’autres écrits sont mentionnés dans le catalogue de la Bibliothèque nationale du Canada (Ottawa). On trouve dans le fonds John Dougall and family (AN, MG 29, C34) une partie de sa correspondance, des notes biographiques sur elle et des documents financiers. La Bodleian Library, Univ. of Oxford, Dept of Special Coll. and Western mss, possède aussi de la correspondance, des articles de journaux, des manuscrits non publiés, des papiers d’affaires et du matériel biographique. L’introduction de Victoria Walker à la réédition de l’ouvrage de Lily Dougall, What necessity knows (Ottawa, 1992), 7–23, fournit également des renseignements biographiques sur cette dernière.

ANQ-M, CE601-S95, 18 juill. 1858.— Compagnie du cimetière du Mont-Royal (Outremont, Québec), Dougall family memorial marker.— Gazette (Montréal), 11 oct. 1923.— Manchester Guardian (Manchester, Angleterre), 16 oct. 1923.— Times (Londres), 11 oct. 1923.— Joanna Dean, « Mysticism and religious modernism : Lily Dougall (1858–1923) », Canadian Soc. of Church Hist., Hist. papers (s.l.), 1996 : 57–84.— Edinburgh Assoc. for the University Education of Women, Calendar (Édimbourg), 1879–1882.— Charles Gardner, In defence of the faith (Oxford, 1927).— Lorraine McMullen, « Lily Dougall : the religious vision of a Canadian novelist », Sciences religieuses (Waterloo, Ontario), 16 (1987) : 79–90 ; « Lily Dougall’s vision of Canada », dans A mazing space : writing Canadian women writing, Shirley Neuman et Smaro Kamboureli, édit. (Edmonton, 1986), 137–147.— The Oxford companion to Canadian literature, William Troye, édit. (Toronto, 1983).— R. N. Smart, « Literate ladies – a fifty year experiment », Alumnus Assoc. of the Univ. of St Andrews, Alumnus Chronicle (St Andrews, Écosse), 59 (juin 1968) : 21–31.— Standard dict. of Canadian biog. (Roberts et Tunnell).— B. H. Streeter, In memoriam, Lily Dougall ; a sermon preached at Cumnor Church on Sunday evening, October 21, 1923 (Oxford, s.d.).

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Lorraine McMullen, « DOUGALL, LILY », dans Dictionnaire biographique du Canada, vol. 15, Université Laval/University of Toronto, 2003– , consulté le 29 déc. 2024, https://www.biographi.ca/fr/bio/dougall_lily_15F.html.

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Auteur de l'article:    Lorraine McMullen
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Titre de la publication:    Dictionnaire biographique du Canada, vol. 15
Éditeur:    Université Laval/University of Toronto
Année de la publication:    2005
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