BINMORE, ELIZABETH, enseignante, née en 1860 à Montréal, une des trois enfants de Thomas Binmore, teneur de livres, et de Mary C. Morton ; décédée célibataire dans cette ville le 24 août 1917.

De 1875 à 1878, Elizabeth Binmore fréquenta la McGill Normal School, unique établissement public de Montréal où les femmes de langue anglaise pouvaient alors faire des études supérieures [V. William Henry Hicks*]. Étudiante douée, elle obtint chaque année l’un des trois diplômes offerts par l’école normale : le brevet d’enseignement élémentaire en 1876, le brevet des écoles modèles en 1877 et le brevet d’enseignement secondaire en 1878. Tous ces diplômes l’« habilitaient à enseigner pendant une période indéfinie partout dans la province de Québec ». Mlle Binmore était donc bien armée pour sa carrière, qu’elle commença avant l’âge de 20 ans. Elle enseigna à Bradford, en Pennsylvanie, ainsi que dans les écoles protestantes de Clarenceville, de Longueuil et de Montréal. De 1892 à 1905, elle enseigna surtout les mathématiques à la Montréal Senior School, puis en 1906, les mathématiques et les sciences à la Commercial and Technical High School.

Le McGill College ayant ouvert sa faculté des arts aux femmes en 1884, Elizabeth Binmore eut l’occasion de parfaire sa formation. Elle fut parmi les pionnières puisqu’elle fit partie de la troisième classe féminine de McGill et obtint sa licence ès arts en 1890. Parmi ses huit compagnes de classe se trouvaient Maude Elizabeth Seymour Abbott* et Carrie Matilda Derick*, qui allaient toutes deux connaître la renommée. En outre, Mlle Binmore étudia la botanique avec David Pearce Penhallow* et reçut une maîtrise ès arts en 1894 en déposant un mémoire sur l’anatomie des fucacées. Elle-même et Euphemia McLeod furent d’ailleurs les premières femmes à qui McGill décerna une maîtrise. Elle suivit des cours d’été à la Harvard University, en botanique en 1893, puis en chimie en 1906 et en 1907. Cependant, elle ne reçut aucun diplôme pour ces études, car Harvard n’en décerna pas aux femmes avant le milieu du xxe siècle.

Avec sa formation hors du commun et son énergie extraordinaire, Elizabeth Binmore pratiqua un enseignement neuf et vivant. Elle employait divers moyens pour diminuer le recours à la simple mémorisation et aux règles. Selon elle, la musique devait être un agrément et le français, « naturel ». On lui reconnaît le mérite d’avoir contribué à propager le « sloyd », une des grandes innovations pédagogiques de la fin du xixe siècle. Le sloyd (terme dérivé d’un mot suédois signifiant dextérité) était une méthode d’apprentissage manuel destinée à inculquer des vertus telles la persévérance, l’application, l’indépendance et le respect du « bon travail honnête ». On prêtait à cette méthode une profonde valeur morale.

Elizabeth Binmore voyagea beaucoup en Europe et œuvra dans un grand nombre de groupes éducationnels, notamment l’Alumnae Society of McGill University, dont elle fut présidente en 1897–1898. Première femme élue à la présidence de la Teachers’ Association of Montreal en 1896, elle appartint de plus en 1916 au comité directeur de la Provincial Association of Protestant Teachers.

Elizabeth Binmore prenait à cœur l’amélioration des conditions de travail dans l’enseignement, secteur à prédominance féminine. Dès 1893, elle avait présenté à la Teachers’ Association une communication sur la situation financière des institutrices de Montréal. Ses mots ont un accent tout à fait contemporain : elle attirait l’attention sur le fait qu’elle employait « femme » au lieu de « dame », car ce dernier terme évoquait « une classe oisive ». Elle appelait à l’action d’un ton ferme. Les salaires, affirmait-elle, étaient « trop bas pour permettre à quiconque de subsister durant douze mois ». Les institutrices, selon elle, devaient recevoir « une juste rémunération pour un labeur accompli consciencieusement et avec succès ».

Un événement tragique éveilla la conscience sociale d’Elizabeth Binmore. En février 1907, une école située dans Hochelaga (Montréal) prit feu ; la directrice, Sarah Maxwell, périt dans les flammes en se portant au secours des enfants. Elizabeth Binmore organisa une campagne publique en vue d’honorer la mémoire de cette femme courageuse. Elle-même continua probablement à enseigner jusqu’à sa mort en 1917.

Margaret Gillett

La conférence qu’Elizabeth Binmore a prononcée devant les membres de la Teachers’ Association a été publiée dans l’Educational Record of the Prov. of Quebec (Québec), 13 (1893) : 69–74.

Arch. de la Commission des écoles protestantes du Grand Montréal, Bureau des commissaires des écoles protestantes de la cité de Montréal, annual reports, 1874–1890, 1916–1917.— Compagnie du cimetière du Mont-Royal (Outremont, Québec), Burial reg..— Harvard Univ. Arch. (Cambridge, Mass.), Course enrolment cards.— McGill Univ. Arch. (Montréal), Acc. 145), no 4 (McGill Normal School, minute-book) ; RG 30 (faculty of education), c.6 ; RG 32 (faculty of arts), c.62.— Gazette (Montréal), 27 févr. 1907, 25 août 1917.— The Alumnae Society of McGill University, 1889–1989 ; a century of involvement (Montréal, 1989).— Canadian men and women of the time (Morgan ; 1912).— Educational Record of the Prov of Quebec, 4 (1884)–37 (1917).— Margaret Gillett, We walked very warily : a history of women at McGill (Montréal, 1981).— C. Johansson, « Manual training in Canada », Educational Record of the Prov. of Quebec, 23 (1903) : 1–9.— McGill Univ., Annual calendar (Montréal), 1886–1895.

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Margaret Gillett, « BINMORE, ELIZABETH », dans Dictionnaire biographique du Canada, vol. 14, Université Laval/University of Toronto, 2003– , consulté le 20 déc. 2024, https://www.biographi.ca/fr/bio/binmore_elizabeth_14F.html.

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Auteur de l'article:    Margaret Gillett
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Titre de la publication:    Dictionnaire biographique du Canada, vol. 14
Éditeur:    Université Laval/University of Toronto
Année de la publication:    1998
Année de la révision:    1998
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