ARCHIBALD, WALTER PALMER, officier de l’Armée du salut, fonctionnaire et juge, né le 21 septembre 1860 à Truro, Nouvelle-Écosse, fils de William Pitt Archibald et de Phœbe Ann Huestis ; le 25 janvier 1893, il épousa à Hamilton, Ontario, Jessie Butler, capitaine de l’Armée du salut, et ils eurent deux filles ; décédé le 17 janvier 1922 à Ottawa.

Walter Palmer Archibald fut accepté comme cadet par l’Armée du salut le 14 décembre 1885 ; une assemblée tenue dans sa ville l’avait convaincu de s’y inscrire. On se souviendrait de ce jeune athlète comme du « champion de patinage artistique des provinces Maritimes » alors que lui-même se décrirait « comme un vagabond-né » qui était né de parents chrétiens mais qui « assez jeune avait acquis l’habitude de l’alcool et du tabac ». Sa conversion le réforma. À titre de salutiste, il fut envoyé à Saint-Jean au Nouveau-Brunswick, à Moncton et à Charlottetown. Après un premier voyage à Toronto en novembre 1886, il œuvra dans les refuges et maisons de formation pour hommes tenus par l’Armée du salut ainsi qu’au Children’s Shelter. Vers 1897, il s’engagea dans le mouvement Prison Gate de l’Armée du salut, qui avait été lancé en 1890 en vue d’aider les ex-détenus. Le 5 avril 1900, un an après l’instauration du régime fédéral de libération conditionnelle, il fut autorisé à prendre un congé spécial pour servir bénévolement en tant qu’agent de libération conditionnelle tout en restant secrétaire du programme Prison Gate. Quatre mois après sa promotion au grade de brigadier, survenue le 1er juin 1904, il était présent à une conférence à titre de « commissaire de libération conditionnelle » pour l’Armée du salut.

Avec la permission de celle-ci, Archibald démissionna de son poste (et renonça probablement à sa commission) pour exercer en permanence, à compter du 1er mai 1905, la fonction d’agent fédéral de libération conditionnelle à la direction pénitentiaire du ministère de la Justice. Il était le premier détenteur de ce poste. Faute d’avoir accumulé des actifs financiers au cours de ses 20 années dans l’Armée du salut, il dut emprunter la somme nécessaire au déménagement quand vint le moment de quitter Toronto pour Ottawa avec sa famille. Sa nouvelle fonction, qu’il exercerait jusqu’à son décès à l’âge de 61 ans, consistait à surveiller les prisonniers libérés sous condition en vertu de la première loi canadienne à ce sujet, la Loi concernant la libération conditionnelle des détenus, qui avait été adoptée en 1899. Il travailla seul durant les huit premières années, parcourant le pays afin d’interroger des délinquants et d’évaluer leur cas. En juillet 1911, il décrivit son travail dans un rapport remis au ministre de la Justice, sir Allen Bristol Aylesworth*. Au cours de l’année précédente, il avait fait passer des entrevues à 823 prisonniers, avait rendu visite à 315 hommes libérés sous condition, avait aidé 67 d’entre eux à trouver un emploi et était intervenu en conciliateur dans plusieurs conflits familiaux. Selon lui, la grande majorité des détenus libérés depuis l’instauration du régime « n’[avaient] pas trahi leur parole ni leur honneur ». La sortie du pénitencier, croyait-il, devait se faire par étapes. « L’homme [qui bénéficie] d’une libération conditionnelle est encore un prisonnier au regard de la loi, et son élargissement n’est qu’un moyen d’éprouver sa capacité et sa volonté de vivre en honnête citoyen. » Archibald préconisait des mesures plus vigoureuses pour améliorer les conditions sociales et prévenir ainsi le crime, surtout dans les grandes villes canadiennes, « qui engendr[aient] une criminalité d’un type aussi sordide, du point de vue de la qualité (sinon de la quantité), [à ce qui se trouv[ait] partout ailleurs] dans le monde civilisé ».

Malgré ses réserves sur certaines propositions de réforme, par exemple la sentence indéterminée et la probation, Archibald menait une campagne solide pour faire valoir l’importance du régime de libération conditionnelle et la nécessité de réformer les prisons. Ses discours le menaient dans tout le Canada et à l’étranger. Il prit la parole à plus d’un congrès annuel de la National Prison Association of the United States. En 1908, devant l’Empire Club of Canada à Toronto, il donna sa recette pour réformer les criminels : « de bons traitements, une discipline rigoureuse et saine, des relations équitables, l’admission de sa propre criminalité par le criminel, son désir et sa volonté de se réformer, la reconnaissance du criminel comme être humain par la société et la reconnaissance par l’administration de la justice que, même si punir le crime est juste et nécessaire, il ne faut refuser la clémence d’une libération conditionnelle dans aucun cas où il y a réellement de l’espoir ». Toujours animé par son zèle de salutiste, Archibald qualifiait ses efforts en vue d’améliorer le climat qui entourait les libérés conditionnels « [de] travail pour relever des personnes déchues ». Il admettait que, pour aider des ex-détenus aux prises avec des difficultés financières, lui-même et sa femme fournissaient de 200 $ à 300 $, pris à même son salaire annuel, qui s’élevait à 2 650 $. Avant son allocution devant le conseil municipal de Regina en 1912, le maire le présenta en disant qu’il était « les yeux, les oreilles et le cœur de la justice telle qu’elle [était alors] administrée au Canada ». De l’avis d’un journal de la Saskatchewan, le Moose Jaw Evening Times, il était non pas un fonctionnaire « payé pour s’occuper des criminels, mais plutôt un homme qui aim[ait] le travail humanitaire ». En 1920, Archibald put dresser un bilan avec fierté. « La majorité des gens ont appris à donner à un homme qui sort de prison sa chance de se reprendre », dit-il au sous-ministre de la Justice, Edmund Leslie Newcombe*.

La philanthropie toute chrétienne d’Archibald et ses appels en faveur d’une réforme pénitentiaire ne plaisaient pourtant pas à tout le monde. Les autorités policières qui voulaient avant tout maîtriser et punir les criminels n’étaient pas toujours d’accord lorsqu’il affirmait que la criminalité et la délinquance juvénile découlaient en partie du conditionnement social. John Taylor Gilmour – qui, en tant que directeur de la Central Prison de Toronto, avait travaillé avec Archibald dans le programme Prison Gate – en vint à s’opposer au régime de libération conditionnelle parce que celui-ci avait trop peu de ressources pour assurer une supervision efficace. En 1912, dans une lettre officieuse à Newcombe, il parla du « goût [d’Archibald] pour la publicité et des méthodes amusantes auxquelles il recour[ait] pour en avoir ». Il allégua aussi qu’Archibald avait commis l’erreur de solliciter de l’argent à des particuliers pour aider des prisonniers. En rejetant ces accusations, Archibald répondit que Gilmour tentait depuis quelque temps « de détruire [son] influence et [sa] réputation et que, à [son] avis, il ne v[alait] pas mieux que n’importe quel groupe de la mafia au pays ». Newcombe écarta les allégations de Gilmour, et Archibald resta en poste sans plus rencontrer d’opposant. En 1919, il commença à siéger comme juge, sans salaire, à la Juvenile Court du comté de Carleton. Il put y faire preuve d’humanité, contrairement aux magistrats de police qui l’avaient précédé.

Walter Palmer Archibald mourut subitement d’une défaillance cardiaque dans la soirée du 17 janvier 1922. Il revenait d’une assemblée trimestrielle du conseil de l’église méthodiste Dominion, le temple qu’il fréquentait depuis son installation à Ottawa. Il laissait dans le deuil sa femme, Jessie Butler, et leurs filles, Eva May et Frances Willard. Il avait appartenu à la franc-maçonnerie, soutenu la Sailors’ Mission et participé à la fondation des sections locales des Big Brothers et des Big Sisters. On put lire, dans l’Ottawa Evening Journal, qu’il avait été le père du régime canadien de libération conditionnelle. Pour lui rendre hommage, l’Armée du salut a baptisé W. P. Archibald Centre sa première maison fédérale de transition pour ex-détenus, inaugurée à Toronto en 1983.

David R. Murray

Walter Palmer Archibald est l’auteur de « The parole system – an historical review », Canadian Law Rev. (Toronto), 6 (1907) : 222–229.

AO, RG 22-354, nº 10609 ; RG 80-5-0-210, nº 13257 ; RG 80-8-0-863, nº 9243.-- BAC, MG 29, D61, 1 : 236 ; RG 13, 173, dossier 1001 ; 253, dossier 2315.-- Salvation Army, George Scott Railton Heritage Centre, Arch. and Museum (Toronto), W. P. Archibald Centre, hist. and description ; W. P. Archibald personnel file.-- Ottawa Evening Journal, 18 janv. 1922.-- War Cry (Toronto), 16 juill. 1887, 27 juin 1891, 11 févr. 1893.-- Annuaire, Toronto, 1893, 1900.-- Canada, Parl., Doc. de la session, 1906, nº 34 : 15–21, app. A ; 1906–1907, nº 30 : 4 ; 1912, nº 34 : 9–13.-- Canadian men and women of the time (Morgan ; 1912).-- D. O. Carrigan, Crime and punishment in Canada : a history (Toronto, 1991).-- Greg Marquis, Policing Canada’s century : a history of the Canadian Association of Chiefs of Police (Toronto, 1993).-- National Prison Assoc. of the United States, Proc. of the annual congress (Pittsburgh), 1903 : vi, 299–311 ; 1904 : vii, 217–230 ; (Indianapolis), 1905 : 218s., 305–310.-- Standard dict. of Canadian biog. (Roberts et Tunnell).

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David R. Murray, « ARCHIBALD, WALTER PALMER », dans Dictionnaire biographique du Canada, vol. 15, Université Laval/University of Toronto, 2003– , consulté le 22 déc. 2024, https://www.biographi.ca/fr/bio/archibald_walter_palmer_15F.html.

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Auteur de l'article:    David R. Murray
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Titre de la publication:    Dictionnaire biographique du Canada, vol. 15
Éditeur:    Université Laval/University of Toronto
Année de la publication:    2005
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