BILLINGS, JOSEPH, marin et explorateur ; il épousa Ekaterina von Pestel ; décédé en 1806, probablement en Russie.
Même si des documents britanniques indiquent que Joseph Billings naquit à Turnham Green (maintenant partie de Londres) en 1758, d’autres sources donnent Yarmouth, en Angleterre, et ses états de service en Russie mentionnent qu’il avait 37 ans en 1798. Il s’enrôla dans la marine royale le 8 avril 1776 comme gabier breveté et s’embarqua sur le Discovery, qui, avec le Resolution, fit voile vers le Pacifique Nord sous le commandement de James Cook*. Au cours de ce voyage pendant lequel Billings devint astronome adjoint, l’expédition fit escale à la baie de Nootka (Colombie-Britannique), du 29 mars au 26 avril 1778, et visita par la suite l’Alaska, la mer de Béring, la presqu’île de Kamchatka, en Russie, et le port de ravitaillement portugais de Macao (près de Canton, république populaire de Chine). Billings était encore gabier breveté lorsqu’on l’affecta au Resolution en septembre 1779, mais il fut promu maître principal à son retour d’expédition en Angleterre au mois d’octobre 1780.
On ne connaît rien des activités de Billings immédiatement après son arrivée au pays ; on sait, cependant, qu’il offrit en 1783 ses services à la marine impériale russe au même grade qu’il détenait dans la marine britannique. Ses états de service dans la marine russe indiquent qu’il fut nommé lieutenant de vaisseau le 1er janvier 1783, même s’il ne gagna probablement pas la Russie avant octobre. Comme à ce moment-là l’impératrice Catherine et ses conseillers projetaient d’explorer les régions situées à l’extrémité nord-est de l’Empire russe, Billings, à titre d’ancien « compagnon » de Cook, semblait un bon choix comme chef d’expédition. En août 1785, l’impératrice Catherine, stimulée en apprenant que le comte de Lapérouse [Galaup*] avait commencé son voyage d’exploration, chargea officiellement Billings de diriger « une expédition [...] dans le but d’approfondir les connaissances acquises, sous son règne glorieux, des mers situées entre la Sibérie et la côte opposée de l’Amérique ». Billings avait aussi pour mission de faire rapport sur le commerce des fourrures en Alaska et de prendre possession au nom de la Russie de tout territoire qui n’aurait pas encore été découvert par quelque puissance européenne.
Billings quitta Saint-Pétersbourg le 25 octobre 1785. Dans son voyage vers l’est à travers la Russie, il rencontra son ancien camarade de bord, John Ledyard, originaire de la Nouvelle-Angleterre, qu’il aurait engagé si ce dernier n’avait pas été arrêté comme espion français. Le capitaine James Burney, qui les avait connus tous deux lors de l’expédition de Cook, nota plus tard, dans un livre relatant l’exploration dans le nord-est de la Russie, que l’impératrice Catherine aurait dû emprisonner Billings et confier sa mission à Ledyard. Le voyage par voie de terre jusqu’à la côte est ainsi que les préparatifs à cet endroit furent très longs, et ce n’est qu’à l’été de 1789 que Billings prit la mer pour la première fois. Ayant perdu un de ses deux vaisseaux dans une tempête, il n’alla pas plus loin que Petropavlovsk (Petropavlovsk-Kamchatski) où il hiverna. Le 9 mai 1790, après avoir remplacé le vaisseau perdu, l’expédition mit finalement à la voile et, contournant vers le nord le chapelet des Aléoutiennes, débarqua dans l’île Unalaska le 3 juin. Les navires atteignirent le détroit du Prince-Guillaume avant de rebrousser chemin vers la presqu’île de Kamchatka pour y passer l’hiver. Durant le tempétueux voyage de retour, il devint de plus en plus apparent que Billings manquait de compétence comme navigateur et qu’il était arrogant et têtu. En juin 1791, son vaisseau était de nouveau dans les Aléoutiennes, mais Billings décida de mettre un terme à son exploration de l’Amérique pour accomplir sa seconde mission, soit dresser la carte du littoral nord-est de la Russie. Le désappointement fut général mais, comme le rapporta son secrétaire Martin Sauer, « les observations de chaque officier qui s’était permis jusque-là de manifester une opinion étaient toujours reçues par le commandant d’un ton irascible et désobligeant ». À la baie St Lawrence (Guba Sv. Lavrentiya) dans la presqu’île de Tchoukotka, Billings mit ses plans à exécution. Il dirigea une équipe de reconnaissance à travers les terres en direction du nord-ouest, mais les vivres manquèrent et l’équipe fut prise en embuscade. Cette expédition eut peu de succès et, pendant ce temps, le navire sous le commandement de l’hydrographe de l’expédition, Gavriil Andreevich Sarychev, retourna explorer les Aléoutiennes.
Finalement, l’expédition fut réunie presque au complet le 2 janvier 1794 à Iakutsk et retourna à Saint-Pétersbourg en mars. Au cours des neuf années qu’elle dura, elle n’avait ajouté que très peu aux connaissances géographiques de la côte du Pacifique Nord. Cependant, les rapports de cette mission révélèrent que les autochtones d’Alaska étaient l’objet d’un « esclavage abject » de la part des marchands russes et permirent peut-être l’amélioration de leurs conditions de vie, ainsi qu’allait l’observer George Vancouver* lors de sa visite d’un poste de traite en Alaska. En 1790, Billings avait été en contact avec l’Espagnol Salvador Fidalgo, près de Kodiak ; toutefois, cette rencontre d’intérêts impériaux rivaux n’avait pas eu de conséquences politiques immédiates en raison de la controverse au sujet de la baie de Nootka, qui préoccupait l’Espagne [V. James Colnett ; Esteban José Martínez*] et devait compromettre les droits à la souveraineté qu’elle revendiquait sur toute la côte nord-ouest de l’Amérique. Des cartes de grande valeur du Pacifique Nord furent dressées par Sarychev ; plus tard, un explorateur russe, l’amiral Ivan Fedorovich Kruzenshtern, dans une description de ces réalisations hydrographiques, tenta de louanger Sarychev au détriment de Billings.
En 1796, Joseph Billings fut affecté à la flotte de la mer Noire où il dirigea des levés hydrographiques de la côte. En 1799, il fit paraître le résultat de ses travaux dans un atlas plus précis et plus complet que tout ce qui avait été publié auparavant. Au mois de novembre de la même année, il fut mis à la retraite, bénéficiant de la solde entière attribuée à son grade de capitaine commodore. Il mourut en 1806, laissant un dossier discutable quant à ses découvertes dans l’Arctique et le Pacifique Nord. Cependant, il ressort clairement qu’il contribua à l’expansion, à la consolidation et, par la suite, à la reconnaissance officielle des intérêts russes en Alaska.
James Burney, A chronological history of north-eastern voyages of discovery ; and of the early eastern navigations of the Russians (Londres, 1819 ; réimpr., Amsterdam et New York, 1969).— The journals of Captain James Cook on his voyages of discovery, J. C. Beaglehole, édit. (4 vol. en 5 et une chemise, Londres et Cambridge, Angl., 1955–1974), 3, iie part. : 1474.— G. A. Sarychev, Puteshestvie flota kapitana Sarycheva po severovostochnoĭ chasti Sibiri [...] (2 vol. en 1, Saint-Pétersbourg, Russie, 1802) ; Puteshestvie kapitana Billingna [...] (Saint-Pétersbourg, 1811).— Martin Sauer, An account of a geographical and astronomical expedition to the northern parts of Russia [...] by Commodore Joseph Billings [...] (Londres, 1802 ; réimpr., Richmond, Angl., 1972).— Bol’shaia Sovetskaia entsiklopediia, A. M. Prokhorov et al., édit. (3e éd., 30 vol., Moscou, 1970–1978), 3 : 949.— DNB.— Cook, Flood tide of empire.— B. M. Gough, Distant dominion : Britain and the northwest coast of North Arnerica, 1579–1809 (Vancouver, 1980).— R. V. Makarova, Russians on the Pacific, 1743–1799, R. A. Pierce et A. S. Donnelly, trad. et édit. (Kingston, Ontario, 1975).— L. H. Neatby, Discovery in Russian and Siberian waters (Athens, Ohio, 1973).
Barry Morton Gough, « BILLINGS, JOSEPH », dans Dictionnaire biographique du Canada, vol. 5, Université Laval/University of Toronto, 2003– , consulté le 22 nov. 2024, https://www.biographi.ca/fr/bio/billings_joseph_5F.html.
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Auteur de l'article: | Barry Morton Gough |
Titre de l'article: | BILLINGS, JOSEPH |
Titre de la publication: | Dictionnaire biographique du Canada, vol. 5 |
Éditeur: | Université Laval/University of Toronto |
Année de la publication: | 1983 |
Année de la révision: | 2021 |
Date de consultation: | 22 nov. 2024 |