MATHEVET, JEAN-CLAUDE, prêtre, sulpicien, missionnaire, supérieur, né le 20 mars 1717 à Saint-Martin-de-Valamas (dép. de l’Ardèche, France), fils de Claude Mathevet et de Blanche Ranc, décédé le 2 août 1781 à Montréal.
Entré au grand séminaire de Viviers le 31 octobre 1736, Jean-Claude Mathevet fut tonsuré le 15 juin 1737, reçut les ordres mineurs le 21 décembre suivant et fut ordonné diacre le 23 mai 1739. L’année suivante, le 10 juin 1740, il s’embarquait pour le Canada à bord du Rubis, en compagnie de deux autres sulpiciens, Antoine Faucon et Jacques-Joseph Masson de Montbrac. Ils firent le voyage avec le nouvel évêque de Québec, Mgr François-Louis de Pourroy* de Lauberivière. Ce fut une traversée désastreuse, le quart des passagers succombant à une maladie inconnue. Le jeune sulpicien Masson de Montbrac fut du nombre des victimes ainsi que Mgr de Lauberivière qui mourut quelques jours après son arrivée à Québec.
Mathevet s’occupa de l’enseignement du latin à l’école que tenait le séminaire de Saint-Sulpice dans sa maison de Montréal et aida au ministère de l’église Notre-Dame. Le 5 mars 1747 il fut ordonné prêtre par Mgr de Pontbriand [Dubreil*], dans la chapelle des ursulines de Québec. Il avait commencé son apostolat auprès des Indiens de la mission du Lac-des-Deux-Montagnes (Oka) dès le 12 septembre de l’année précédente, alors qu’il n’était encore que diacre. Le ministère auprès des Algonquins d’abord, puis des Iroquois, devait remplir le reste de sa vie.
Durant la guerre de Sept Ans, lors de la campagne de Montcalm* au fort George (appelé aussi fort William Henry ; aujourd’hui Lake George, New York), en juillet 1757, Mathevet fut aumônier militaire des Indiens en compagnie de François Picquet. Après un séjour d’un an à la cure de Sainte-Anne-du-Bout-de-l’île (Sainte-Anne-de-Bellevue), il se rendit à la mission de La Présentation (Oswegatchie ; aujourd’hui Ogdensburg, New York) au cours de l’année 1758 et, pendant deux ans, avec Pierre-Paul-François de Lagarde, il seconda ou remplaça Picquet auprès des Amérindiens de ce bastion de la défense de la Nouvelle-France.
De retour à la mission du Lac-des-Deux-Montagnes, Mathevet en devint le quatrième supérieur, y exerçant un ministère fructueux de 1761 à 1778. Assisté de François-Auguste Magon de Terlaye, il lutta vigoureusement contre l’ivrognerie qui faisait des ravages parmi les Indiens à qui les Blancs fournissaient illégalement de l’eau-de-vie. Mais Mathevet fut surtout le grand spécialiste de la langue algonquine ; en plus d’une grammaire datée de 1761 il écrivit des sermons en algonquin ainsi qu’une histoire sainte et une vie de Jésus-Christ. Ces deux dernières œuvres furent imprimées et rééditées au siècle dernier. Il connaissait très bien l’iroquois et l’on a conservé 11 cahiers de ses sermons rédigés en cette langue. Il avait aussi composé un lexique dans la langue des Loups. Bien que ce manuscrit soit conservé aux archives du séminaire de Saint-Sulpice à Montréal, il est impossible d’identifier de façon certaine le groupe indien qui parlait cette langue. Il s’agit peut-être des Pocumtucks, Indiens de langue algonquine originaires du sud de la Nouvelle-Angleterre.
Frappé de paralysie en mars 1778, Mathevet dut se retirer au séminaire où il mourut le 2 août 1781. Il fut inhumé sous le chœur de l’église Notre-Dame. Mathevet, que les Algonquins appelaient Ouakoui, c’est-à-dire le ciel, laissa un excellent souvenir chez tous les Indiens.
Deux manuscrits en algonquin de Jean-Claude Mathevet ont été édités au xixe siècle. Il s’agit d’une vie de Jésus et d’une histoire sainte publiées à Montréal en 1861 en un volume intitulé Ka titc tebeniminang Jezos, ondaje aking. Oom masinaigan ki ojitogoban ka ojitogobanen Aiamie tipadjimoˀin masinaigan ˀakˀi enaˀindibanen. Ces manuscrits furent réédités séparément à Montréal, l’histoire sainte paraissant en 1890 sous le titre : Aiamietipadjimowin masinaigan ka ojitogobanen kaiat nainawisi mekatewikonaiewigobanen / L’histoire sainte en algonquin, tandis que la vie de Jésus, publiée en 1892, s’intitulait : Ka titc Jezos tebeniminang ondaje aking enansinaikatek masinaigan ki ojitogoban kaiat pejik kanactageng daje mekatewikonaietc / Vie de Notre-Seigneur Jésus-Christ. Enfin, en 1975, G. M. Day a édité The « Mots loups » of Father Mathevet (Ottawa). [j.-b. h.]
Archives de l-évêché de Viviers (dép. de l’Ardèche, France), Registre des ordinations.— ASSM, 8, A ; 24, Dossier 2 ; Dossier 5.— Allaire, Dictionnaire.— Gauthier, Sulpitiana.— Louis Bertrand, Bibliothèque sulpicienne, ou histoie littéraire de la Compagnie de Saint-Sulpice (3 vol., Paris, 1900).— André Chagny, Un défenseur de la « Nouvelle-France », François Picquet, « le Canadien » (1708–1781) (Montréal et Paris, 1913).— Pierre Rousseau, Saint-Sulpice et les missions catholiques (Montréal, 1930).— M. Trudel, L’Église canadienne.— J.-A. Cuoq, Anotc kekon, SRC Mémoires, 1er sér., XI (1893), sect. i : 137–179.— Olivier Maurault, Quand Saint-Sulpice allait en guerre…, Cahiers des Dix, 5 (1940) : 11–30.
J.-Bruno Harel, « MATHEVET, JEAN-CLAUDE », dans Dictionnaire biographique du Canada, vol. 4, Université Laval/University of Toronto, 2003– , consulté le 2 oct. 2024, https://www.biographi.ca/fr/bio/mathevet_jean_claude_4F.html.
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Auteur de l'article: | J.-Bruno Harel |
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Titre de la publication: | Dictionnaire biographique du Canada, vol. 4 |
Éditeur: | Université Laval/University of Toronto |
Année de la publication: | 1980 |
Année de la révision: | 1980 |
Date de consultation: | 2 oct. 2024 |