WORK, JOHN (à l’origine, Wark, forme qui fut anglicisée dans son contrat avec la Hudson’s Bay Company et que lui et son frère adoptèrent définitivement), fonctionnaire de la Hudson’s Bay Company et conseiller législatif de la Colombie-Britannique, né vers 1792 dans la paroisse de Taughboyne, à St Johnstown (près de Londonderry), dans le comté de Donegal (République d’Irlande), aîné des six enfants de Henry Wark, décédé le 22 décembre 1861 à sa ferme « Hillside » (sur le territoire actuel de Victoria, Colombie-Britannique).
On ne connaît rien de bien certain sur la vie de John Work antérieure à son entrée à la Hudson’s Bay Company, mais on a dit par la suite qu’il fut « élevé comme ouvrier agricole », et sa mauvaise calligraphie fut interprétée comme l’indice d’une éducation déficiente. Work, qui a peut-être fui le foyer paternel, s’engagea à la Hudson’s Bay Company en qualité de commis aux écritures le 15 juin 1814, à Stromness dans les îles Orcades. Il fut commis aux vivres à York Factory en 1814–1815, puis sous-chef à Severn House, deux postes situés sur la baie d’Hudson. Il devint chef de district en 1818–1819. Épargné par la diminution du personnel consécutive à la fusion de la Hudson’s Bay Company et de la North West Company en 1821, Work devint commis de première classe dans le district de Severn. Il fut mis en charge, pour l’année 1822–1823, du district d’Island Lake.
« Homme d’une activité méritoire, commis passable et excellent trafiquant », Work fut muté dans le district du fleuve Columbia en juillet 1823. Il quitta York Factory le 18 juillet, avec deux canots et huit hommes sous les ordres de Peter Skene Ogden*. Pendant ce voyage, Work commença la série de ses 15 journaux, remplis de renseignements et d’observations, rédigés au cours de ses voyages d’exploration de juillet 1823 à octobre 1835. Se dirigeant vers le Columbia via la rivière Athabasca et le col de l’Athabasca, l’expédition atteignit Boat Encampment, au Big Bend, sur le fleuve Columbia, le 13 octobre. Entreprenant la descente du Columbia avec la brigade qui avait été envoyée à leur rencontre, ils atteignirent l’embouchure de la rivière Spokane le 21 ; Ogden et Work firent alors route à cheval, en compagnie de William Kittson, jusqu’à leurs quartiers d’hiver de Spokane House (Washington).
Work se familiarisa avec le rythme coutumier du commerce sur le Columbia inférieur, marqué par l’arrivée du bateau ravitailleur au printemps, et par le départ et l’arrivée des courriers d’York Factory au printemps et à l’automne. Pendant la première saison qu’il y passa, en 1823–1824, Work aida Finan McDonald à étendre la traite dans le pays des Têtes-Plates (Montana) ; et quand le courrier arriva, à la fin d’octobre 1824, Work, en compagnie du gouverneur George Simpson* et de l’agent principal John McLoughlin*, descendit le Columbia jusqu’au quartier général du district au fort George (Astoria, Oregon). En novembre, Work se joignit à une expédition sous les ordres du chef de poste James McMillan* que le gouverneur Simpson envoyait examiner la partie inférieure du fleuve Fraser, dans le dessein de trouver un emplacement pour un poste de première importance, Simpson étant convaincu que les Britanniques ne pourraient pas conserver la rive sud du Columbia. Pendant le voyage de retour, en décembre, McMillan et Work découvrirent le portage de Cowlitz, qui allait devenir un lien important entre le Columbia et la tête du détroit de Puget (Washington). Au printemps de 1825, Work aida au déménagement du quartier général du fort George au nouvel établissement du fort Vancouver (Vancouver, Washington), sur la rive nord du fleuve.
Finan McDonald quitta la Hudson’s Bay Company cette année-là, et Simpson mit Work en charge de Spokane House, avec instructions d’aménager un nouveau poste, mieux situé, sur le Columbia, aux chutes Kettle, fort que Simpson baptisa Colvile. Work passa la saison de 1825–1826 à trafiquer dans le pays des Têtes-Plates (où il rétablit Flathead House), et à superviser la construction du fort Colvile, qui allait rendre inutile la route de 60 milles qu’empruntaient les convois de marchandises entre le Columbia et Spokane House. Work ferma Spokane House en avril 1826, et, de cette date à l’été de 1829, il eut la direction du fort Colvile. Il était fier du rendement de la ferme de ce poste, qui contribuait à l’autonomie du district à l’égard des coûteuses provisions importées. Pendant ces années, souvent il s’absentait pour de courtes expéditions de traite ou pour se procurer des chevaux, le long de la rivière Snake, pour les brigades de New Caledonia (Colombie-Britannique) et les élevages du fort Vancouver, et quelquefois il accompagnait les chargements de fourrures de New Caledonia et de son propre district vers le Columbia inférieur. En 1829, les troubles de vision qui allaient affliger Work jusqu’à la fin de sa vie, au point de le rendre parfois quasi aveugle, commencèrent à se manifester. Pour l’hiver de 1829–1830, Work prit la direction du district de Colvile, relevant John Warren Dease, mortellement atteint par la maladie, et déménagea son quartier général à Flathead House, où il se trouva « débarrassé de la ferme et des cochons [du fort Colvile], une situation [qu’il] ne regrett[a] d’aucune façon ».
En août 1830, Work fut nommé pour succéder à Peter Skene Ogden à la tête de la brigade de la région de la Snake. De ce mois au 18 juillet 1831, il parcourut quelque 2 000 milles dans ce qui est aujourd’hui l’est de l’Idaho et le nord-ouest de l’Utah, et le long de la rivière Humboldt (Nevada), une région minutieusement explorée par Ogden. Bien que les chargements de fourrures eussent rapporté des profits, ils furent jugés décevants, et Work recommanda qu’on mît fin aux brigades annuelles dans la région de la Snake. Une autre brigade fut envoyée par McLoughlin : Work se rendit dans les régions de la rivière Salmon (Idaho) et des Têtes-Plates en 1831 et 1832. Le terrain accidenté et les maraudeurs pieds-noirs causèrent bien des difficultés aux membres de l’expédition, et les recettes ne furent pas élevées, en partie à cause d’une vive concurrence de la part des Américains. Dans son rapport pour l’année 1832, Simpson recommanda que la compagnie se retirât de la région de la Snake. Entre-temps, à son retour au district de Columbia en juillet 1831, Work avait trouvé sa nomination comme chef de poste, datée du 3 novembre 1830 – promotion qu’il n’espérait plus.
Au début de septembre 1832, Work se rendit à la vallée Bonaventura (Sacramento, Californie) de la Californie mexicaine, où les premières percées pour le compte de la Hudson’s Bay Company avaient été effectuées par Alexander Roderick McLeod* en 1829 et 1830 et par Ogden en 1830. La vallée ne fut guère favorable aux trappeurs, à cause de la présence d’un parti américain et d’une brigade de la Hudson’s Bay Company conduite par Michel Laframboise. L’hostilité des Indiens força Work et Laframboise à s’unir pour explorer la côte, de San Francisco jusqu’au cap Mendocino. Work retourna au fort Vancouver en octobre 1833, déçu de sa chasse, quoique McLoughlin estimât que les 1 023 peaux de castors et de loutres rapportèrent un bénéfice de £627.
En décembre 1834, Work, succédant à Ogden, prit la direction du commerce côtier au fort Simpson (Port Simpson, Colombie-Britannique), dans la baie de McLoughlin. Il fit voile vers le Nord, le même mois, sur un brick de la Hudson’s Bay Company, le Lama, et, pendant les dix mois suivants, il surveilla la construction du fort Simpson, dont on avait abandonné le premier emplacement, sur la rivière Nass, en 1833. Il trafiqua aussi le long de la côte nord de New Caledonia, au nord de l’île de Vancouver et dans les îles de la Reine-Charlotte, toujours aux prises avec la concurrence acharnée des trafiquants côtiers américains. En janvier 1836, il était de nouveau au fort Simpson, sa résidence habituelle jusqu’en 1846 ; il le trouva inhospitalier, et les indigènes y étaient « nombreux, traîtres, [...] et féroces à l’extrême ». Quoi qu’il en soit, il était souvent absent, occupé à diriger la traite, et, jusqu’en 1840, il accompagnait habituellement jusqu’au Columbia les convois qui rentraient à l’automne. Pour économiser sur les importations de vivres, Work dota le fort Simpson d’un potager, et, en 1839, il apporta son concours à l’arpentage de Cowlitz Farm pour la Puget’s Sound Agricultural Company, une filiale de la Hudson’s Bay Company chargée de ravitailler les Russes à Sitka (Alaska).
L’autonomie dont jouissait Work au fort Simpson avait commencé de s’amenuiser en 1836 à l’arrivée du steamer Beaver. De meilleures communications étant assurées, l’agent principal Duncan Finlayson prit en main, du fort Vancouver, la direction des expéditions de marchandises le long de la côte ; et, à son départ l’année suivante, James Douglas* remplit à peu près les mêmes fonctions à titre de surintendant. McLoughlin lui-même assumait la surveillance générale, si bien que Work en fut réduit à une gestion strictement locale pendant les dix années qu’il passa au fort Simpson, où il se sentit isolé et intentionnellement ignoré. De son poste, Work dirigea les opérations de traite du Beaver, dont la présence et surtout la dépense faisaient continuellement grommeler McLoughlin. En janvier 1838, une mutinerie éclata sur le navire, alors qu’il mouillait au fort ; quand l’ordre fut restauré, Work prit le commandement et conduisit le vaisseau au fort Nisqually (Washington). Le capitaine du navire, William Henry McNeill*, fut promu chef de poste en 1839, au grand dépit de Work, bien qu’il paraisse avoir manqué de fermeté dans ses décisions lors de la répression de l’émeute.
Avec acharnement, Work cherchait à accroître le trafic et à faire des économies, mais il avait toujours le sentiment que ses efforts n’étaient point reconnus. Dans ses lettres annuelles à Edward Ermatinger*, on trouve, à partir de 1829, des plaintes répétées au sujet de « ce maudit pays », de son manque d’avancement et de son désir de retourner en Irlande ou de rejoindre Ermatinger dans le Haut-Canada. Au fort Simpson, Work devint de plus en plus irritable. Une de ses plaintes les plus amères fut adressée à Ermatinger en 1841 : « J’occupe ici, si on fait exception pour les dépôts, l’une des situations les plus importantes au pays ; avant que j’y accède, c’était la source de lourdes pertes, depuis lors on y a réalisé de beaux profits. En dépit de l’opposition et des autres difficultés auxquelles nous avons dû faire face, cela, semble-t-il, n’a pas donné satisfaction. » James Douglas avait été promu agent principal en 1839 ; et, continuait Work, « je ne trouve rien à redire de Mr D, c’est un homme intelligent, mais ceux qui l’ont nommé ont fermé les yeux sur mes efforts et sur le succès remarquable qui en a résulté ».
À l’automne de 1841, le gouverneur sir George Simpson visita à deux reprises le fort Simpson, où il conféra avec James Douglas, le capitaine McNeill et Work. Il décida de fermer tous les postes côtiers, à l’exception du fort Simpson, et de s’en remettre au Beaver pour le trafic côtier, puisque, à la suite de la disparition effective de la concurrence américaine et de l’accord avec la Russian American Company, une aussi forte présence de la compagnie n’était plus nécessaire sur la côte. McLoughlin ne fut point de cet avis, et il fut profondément blessé de n’avoir pas été consulté ; Simpson consentit au maintien du fort Stikine.
Work ayant subi des blessures sérieuses lors de deux chutes qu’il fit à l’été de 1840, Simpson muta, en 1841, le commis de John McLoughlin, fils, Roderick Finlayson*, du fort Stikine au fort Simpson pour y aider Work, laissant McLoughlin seul avec 20 hommes indisciplinés. Le jeune McLoughlin fut assassiné en avril 1842, et le père éploré blâma de ce jour le transfert de Finlayson, qui avait laissé son fils sans défense. Il faisait également valoir que Work n’avait pas vraiment eu besoin de Finlayson, puisqu’il disposait déjà d’une aide suffisante. En 1844, Work envoya vers le sud, à bord du Beaver, trois hommes impliqués dans ce meurtre, avec instructions de les mener le plus tôt possible au fort Vancouver. Mais il y eut un long retard, pour lequel McLoughlin blâma Work. McLoughlin le critiqua aussi pour avoir négligé de recueillir la déposition de Finlayson et de transmettre au fort Vancouver la correspondance et les autres documents du jeune McLoughlin. Les relations de Work avec McLoughlin devinrent encore plus tendues quand McLoughlin adressa à Work un « sérieux reproche » pour la manière dont il utilisa le Beaver pour concurrencer les intrus américains dans le commerce avec les tribus indiennes du Nord pendant l’hiver 1842–1843. McLoughlin transmit des instructions détaillées concernant les opérations du Beaver, et Work estima qu’il était l’objet d’une humiliante condescendance et « d’une réprimande imméritée ».
L’état de santé de Work était devenu encore plus inquiétant, du fait d’un ulcère qu’il développa à la lèvre et qui était peut-être dû à son habitude de fumer la pipe. En septembre 1844, le sloop Modeste arriva au fort Simpson, et les deux médecins du bord lui enlevèrent à peu près la moitié de la lèvre supérieure. Il fallut trois autres interventions avant que la tumeur fût entièrement excisée. Les années d’isolement et de privation de Work touchaient à leur fin, car McLoughlin démissionna de la compagnie en mars 1846, et, coïncidence, le même mois Work reçut sa nomination d’agent principal. Le conseil du département de Northern avait résolu en 1845 de mettre le département du Columbia entre les mains de trois agents principaux ; en 1846, il nomma Douglas, Ogden et Work au bureau de direction du département, Work étant chargé de la région côtière (comprenant les forts Simpson, Stikine et Langley) et du Beaver. Londres, cependant, ne confirma pas la nomination de Work avant 1849.
Une fois encore, Work recommença ses longs voyages sur la côte. En 1849, il abandonna le fort Stikine et établit le fort Rupert pour exploiter les gisements de charbon du nord de l’île de Vancouver. En 1850, quand les mineurs et les employés s’y mirent en grève pour revendiquer un salaire doublé, Work s’amena en canot du fort Simpson, se rendit au fort Victoria (Victoria) conférer avec Douglas, puis retourna, encore en canot, pour apaiser la « mutinerie » par la persuasion, complétant ainsi un voyage de quelque 1500 milles. Des rapports sur la découverte d’or dans les îles de la Reine-Charlotte lui parvinrent au fort Simpson en 1850. Le parti qu’il envoya à la recherche de l’or n’en trouva pas, mais on découvrit que les îles de la Reine-Charlotte comprenaient deux grandes îles au lieu d’une seule. Work lui-même fit la traversée à partir du fort Simpson, en 1851, et découvrit la veine aurifère. La nouvelle de cette découverte parvint en Californie et déclencha une ruée vers l’or peu importante en 1852. Quand des indigènes se lancèrent à l’abordage du Susan Sturgis, Work put payer la rançon de l’équipage, mais pas avant que le navire eût été pillé et brûlé. Work maintint son quartier général au fort Simpson jusqu’en novembre 1851, alors que, en compagnie du docteur William Fraser Tolmie*, il se rendit au fort Nisqually à la tête du détroit de Puget, où le Beaver et le voilier Mary Dare débarquèrent les passagers avant de se rendre à Olympia (Washington) pour acquitter les droits de douane. Les navires y furent saisis pour irrégularités douanières et c’est en février seulement que Work put retourner au fort Victoria.
Work passa son dernier été au fort Simpson en 1852, mais ses intérêts se portaient de plus en plus vers le fort Victoria où il avait établi sa nombreuse famille en 1849, de manière à assurer l’éducation de ses enfants les plus jeunes. En avril 1825, le gouverneur Simpson avait donné à McLoughlin l’avis que Work devait épouser la fille d’un chef cayuse, de façon à assurer la protection des brigades de la compagnie sur le Columbia. Work n’épousa pas une Indienne, mais, à l’hiver de 1825–1826, il mentionna pour la première fois sa femme à la façon du Nord, Josette Legacé, une Indienne spokane métisse, qu’il appelait sa « petite Côte ». Souvent elle accompagnait Work dans ses expéditions. En décembre 1836, elle et deux de leurs quatre filles avaient rejoint Work au fort Simpson ; les deux aînées fréquentèrent l’école du fort Vancouver, puis la mission méthodiste sur la rivière Willamette (Oregon), et, en 1841, elles s’en vinrent au fort Simpson. Work y instruisit ses enfants, au nombre de dix (dont trois garçons) quand la famille s’en alla au fort Victoria ; le plus jeune y naquit en 1854. Au fort Victoria, les enfants furent mis à l’école dirigée par le révérend Robert John Staines* et sa femme, et, le 6 novembre 1849, Work et Josette se mariaient devant Staines. Work devint le beau-père de plusieurs employés bien connus de la compagnie : le docteur William Fraser Tolmie, Roderick Finlayson, Edward Huggins et James Allan Grahame*.
Bien que Work eût souvent exprimé le désir de trouver « un coin tranquille du monde civilisé », la préoccupation que lui causait la dualité culturelle de sa famille l’amena à s’établir en permanence au fort Victoria. En août 1852, il acheta 823 acres de terre arable sur la lisière nord du fort et y construisit un manoir, « Hillside ». En 1859, il était propriétaire de plus de 1800 acres. En 1853, le gouverneur James Douglas nomma Work, « un gentilhomme probe, une personnalité respectable, et le plus grand propriétaire foncier de l’Île-de-Vancouver », au Conseil législatif de la colonie. Il en fut un membre actif et loyal, qui donna son appui à Douglas dans la controverse entourant la nomination de David Cameron* comme juge en chef de l’Île-de-Vancouver. Ses liens avec la Hudson’s Bay Company l’associèrent inévitablement au « Family-Company Compact ». Il s’opposa à la création d’une chambre d’Assemblée pour la colonie en 1856, parce qu’il y avait « si peu de monde à gouverner » et « personne pour payer les taxes qui en couvriraient les dépenses ». En mai et juin 1861, Work tint la place du gouverneur en l’absence de Douglas et il resta membre du conseil jusqu’à sa mort.
Work remplissait toujours ses fonctions d’agent principal de la Hudson’s Bay Company, et Douglas et lui agirent comme mandataires de sa Fur Trade Branch qui, en 1856, acheta de la terre dans le but d’attirer des colons bona fade qui n’avaient pas les moyens d’acquérir les lots d’un minimum obligatoire de 20 acres à £1 l’acre. À la suite de la démission de Douglas, qui se retira de la compagnie en 1858 pour devenir gouverneur à la fois de l’Île-de-Vancouver et de la Colombie-Britannique, un nouveau bureau de direction fut formé pour s’occuper des affaires de la compagnie ; Alexander Grant Dallas*, Dugald Mactavish* et John Work en étaient membres. Avec la création de la Colombie-Britannique comme colonie de la couronne, les droits de propriété de la compagnie devenaient douteux ; aussi Work et Mactavish préparèrent-ils un rapport appuyant les revendications de la compagnie sur 14 postes de l’intérieur.
En 1861, la fièvre débilitante avec laquelle Work était revenu de Californie en 1833 se manifesta de nouveau. Après deux mois de souffrances et de faiblesse croissante, il mourut à « Hillside » le 22 décembre. À ses funérailles assistèrent tous les chefs de la colonie, les agents principaux de la compagnie et les officiers de marine. Work fut inhumé là où est maintenant Pioneer Square, près de la cathédrale Christ Church, où son tombeau couvert par le lierre est aujourd’hui un point de repère bien en vue.
John Work, qui finit par être connu au sein de la Hudson’s Bay Company comme le « Vieux Gentilhomme », fut un serviteur consciencieux de la compagnie, même s’il manquait quelque peu d’imagination. Bon meneur d’hommes, il savait néanmoins tenir compte des précédents et suivre les instructions reçues, bien qu’il fût capable de montrer du dépit quand il se croyait injustement traité. John Tod*, l’un des amis les plus intimes de Work, le décrivait vers la fin de la quarantaine comme « un vieux bonhomme drôle à voir – de cheveux, il ne lui reste que trois petites mèches lutines qui font saillie bien au-dessus du collet de son manteau, et l’extrémité de son nez touche en fait celle de son menton [...] Le pauvre Work est constamment à se plaindre et je ne doute pas qu’il ait pour cela quelque raison, mais, [sauf pour] la fragilité de sa santé qui m’inquiète beaucoup parfois, je suis porté à croire qu’ils ne sont pas peu nombreux les maux dont il se plaint qui sont purement imaginaires. » Le gouverneur Simpson, dans son fameux « Character Book », décrit Work comme « un homme qui se donne sans cesse de la peine, régulier, économe, attentif à tout ce qui touche aux affaires et qui jouit d’une bonne réputation personnelle [...] Un drôle de type, avec les manières et l’adresse d’un clown, et à qui une bonne dose de simplicité donne presque l’allure d’un idiot. C’est néanmoins un homme perspicace et sensé, et qui ne manque pas de fermeté quand cela est nécessaire. »
On perçoit quelque chose du caractère insaisissable de Work dans la correspondance que lui et John Tod entretinrent avec Edward Ermatinger. Il fut un homme tout dévoué à sa famille et sa préoccupation constante allait au bien-être et au bonheur de sa femme et de ses enfants. Profondément religieux, il prônait « l’authentique religion du cœur, qui est d’ordre pratique », et s’opposait à une « religion toute professionnelle » qu’il considérait « trop encline au spectacle et à l’ostentation ». Visiblement non adonné à la pensée spéculative, il pouvait critiquer très durement ceux qui l’étaient. Souvent dogmatique, il avait des vues conservatrices en politique et s’affichait entièrement pro-britannique. Sa carrière professionnelle peut être connue avec plus de certitude grâce aux vivantes descriptions des journaux qu’il a si méticuleusement tenus et à sa correspondance d’affaires prosaïque. Sa carrière sur la côte du Pacifique fut longue et honorable ; des quatre hauts fonctionnaires de la côte (McLoughlin, Douglas, Ogden et Work), Ogden seul y arriva aussi tôt que John Work. Il n’avait pas les puissants charismes de McLoughlin et de Douglas pour l’administration et la diplomatie, ni l’initiative et l’esprit d’aventure d’Ogden, mais sa carrière embrasse l’histoire du nord-ouest du Pacifique, depuis la traite des fourrures à l’intérieur des terres et sur la côte jusqu’à la ruée vers l’or et à la colonisation ; et dans cette histoire, Work joua un rôle important, s’il ne fut pas déterminant.
[John Work], Fur brigade to the Bonaventura ; John Work’s California expedition, 1832–1833, for the Hudson’s Bay Company, A. B. Maloney, édit. ([San Francisco], 1945) ; The journal of John Work, a chief-trader of the Hudson’s Bay Co., during his expedition from Vancouver to the Flatheads and Blackfeet of the Pack northwest, W. S. Lewis, édit. (Cleveland, Ohio, 1923) ; The journal of John Work, January to October, 1835, H. D. Dee, édit. (Victoria, 1945) ; The Snake country expedition of 1830–1831 ; John Work’s field journal, F. D. Haines, édit. (Norman, Okla., [1971]).
HBC Arch., A.34/2, ff.18d.–19.— PABC, Isaac Burpee, The story of John Work of the Hudson’s Bay Company, June 15th, 1814, to December 22nd, 1861 (déc. 1943) (copie dactylographiée) ; Edward Ermatinger, Correspondence inward, 1828–1856 (copies) ; Edward Ermatinger papers, 1826–1843 ; John Work, Correspondence outward, 1828–1849, 1850–1858 ; Journal of a journeork Factory to Spokane House, 18 July–28 October 1823 ; Journal of trading in Columbia valley, 15 April–17 November 1824.— HBRS, III (Fleming) ; IV (Rich) ; VI (Rich) ; VII (Rich) ; XXX (Williams).— R. H. Dillon, Siskiyou trail : the Hudson’s Bay Company route to California (New York, [1975]), 180–213, 222.
William R. Sampson, « WORK (Wark), JOHN », dans Dictionnaire biographique du Canada, vol. 9, Université Laval/University of Toronto, 2003– , consulté le 21 déc. 2024, https://www.biographi.ca/fr/bio/work_john_9F.html.
Permalien: | https://www.biographi.ca/fr/bio/work_john_9F.html |
Auteur de l'article: | William R. Sampson |
Titre de l'article: | WORK (Wark), JOHN |
Titre de la publication: | Dictionnaire biographique du Canada, vol. 9 |
Éditeur: | Université Laval/University of Toronto |
Année de la publication: | 1977 |
Année de la révision: | 1977 |
Date de consultation: | 21 déc. 2024 |