THEAKSTON, MAJOR, imprimeur, journaliste et missionnaire urbain, né le 15 juin 1833 à Londres, aîné des six enfants de Major Paylor Theakston et de Sophia Matilda Wood ; le 25 décembre 1858, il épousa Emily Hom (décédée en 1909), et ils eurent sept fils et une fille ; décédé le 11 décembre 1917 des suites de blessures subies dans l’explosion de Halifax.

En 1848, Major Theakston, typographe de son état, se convertit au méthodisme et se mit à œuvrer pour son Église dans sa ville natale, Londres. Par la suite, il visita régulièrement les taudis de l’est de Londres, où il « constata que l’alcool était la principale cause de la pauvreté, de l’infortune et du péché qui régnaient dans la ville ». Selon son propre témoignage, lui-même et Emily résolurent en 1863 d’émigrer en Amérique du Nord britannique avec plusieurs autres familles en vue de créer une colonie chrétienne de tempérance, ambition qui s’évanouit avant la fin de la traversée. En fait, peut-être faisaient-ils partie des immigrants assistés qui vinrent en Nouvelle-Écosse dans le cadre d’un programme conçu par Joseph Howe* et dont la philanthrope anglaise Angela Georgina Burdett-Coutts assuma l’organisation et le financement. L’année suivante, les parents, frères et sœurs de Major rejoignirent les Theakston. La plupart des membres de la famille se fixèrent à Halifax, mais Major alla à Canning, aussi en Nouvelle-Écosse ; après avoir travaillé un moment dans un chantier naval, il retourna à son métier d’imprimeur, d’abord en tant qu’employé du journaliste Harold Albert Borden, puis, en 1865, à titre de propriétaire du King’s County Advertiser En 1866, il s’installa à Wolfville où, avec son frère William, il ouvrit une imprimerie et fonda un journal, l’Acadian. Favorable à la Confédération, cause impopulaire, le journal cessa de paraître en 1870.

En juin de la même année, Theakston devint le missionnaire laïque wesleyen de Halifax, ce qui lui permit en même temps de défendre la cause de la tempérance et de s’occuper des classes laborieuses. Il aida à fonder trois nouvelles églises de mission. Par manque de fonds, la mission ferma en 1877 ; à ce moment-là, Theakston avait déjà ouvert, à côté de son domicile de la rue Agricola, une imprimerie où il apprenait le métier à deux de ses fils. Trois autres de ses fils devinrent aussi typographes. En 1879–1880, Theakston fut propriétaire et rédacteur en chef de l’Alliance Journal : and Temperance Advocate, l’hebdomadaire des Sons of Temperance.

En 1881, Theakston laissa l’imprimerie à ses fils et prit en charge la South Brunswick Street Mission, qui était devenue le foyer du travail missionnaire des méthodistes dans Halifax en 1878 après qu’Edward Jost, boulanger important, eut légué aux méthodistes la chapelle multiconfessionnelle qu’il avait fait construire. En 1889, Theakston devint le missionnaire de la Seamen’s Friend Society de Halifax. À compter de 1893, il œuvra à la North End City Mission ; ce fut sa dernière affectation.

Bien que sa contribution à l’imprimerie et au journalisme n’ait pas été négligeable, Theakston demeure surtout le missionnaire urbain par excellence. Dans les années 1870, il s’occupa principalement de la vie spirituelle des fidèles en faisant des visites à domicile, en tenant des réunions de prières ou de tempérance et en organisant des activités pour enfants telles les écoles du dimanche et les groupes de tempérance (« groupes de l’espoir »). Comme les missions de la ville proprement dite étaient desservies par d’autres, il œuvrait surtout dans les faubourgs. Dans les années 1880, en travaillant dans le centre de la ville, il côtoya les laissés-pour-compte et les personnes souffrant de pauvreté chronique, de sorte qu’il eut davantage l’occasion de faire du travail social. Au cours des années 1890, dans la vieille partie nord de Halifax, les questions raciales s’ajoutèrent aux questions de classe. À la mission, Theakston entretenait des relations étroites avec la communauté noire, dont certains membres accueillaient favorablement les concours annuels de jardinage, les écoles du dimanche et les réunions pour promouvoir la tempérance, l’économie domestique et les loisirs. Tout en organisant ces activités, la mission soutenait matériellement les plus pauvres et leur permettait de prendre à l’occasion des vacances à la campagne.

Le secours aux enfants était un autre aspect du travail de la North End City Mission. Tout comme les établissements pour orphelins, enfants négligés et jeunes délinquants, la mission se spécialisait dans le placement d’enfants en foyer d’accueil de milieu rural. Elle voulut ouvrir une garderie et parvint simplement à tenir un jardin d’enfants pendant une courte période. Toutefois, la Halifax Association for Improving the Condition of the Poor organisa, à la mission, des petits déjeuners pour les enfants d’âge scolaire. Theakston se fit également connaître parce qu’il s’efforça d’humaniser les durs travaux parrainés par cette association pendant les hivers de fort chômage avant la Première Guerre mondiale. Dans le froid du matin, il allait servir du café et des petits pains aux hommes qui s’esquintaient à casser de la pierre en échange de quelques sous. Dans toutes ses initiatives, la mission s’efforçait à la fois de bien déceler les besoins des pauvres, d’éviter de mettre sur pied des services déjà offerts par d’autres organismes de bienfaisance et de fournir de l’emploi.

Major Theakston accomplissait seul une somme énorme de travail spirituel et social. En outre, c’était lui qui collectait la plus grande partie des fonds de la mission. Cependant, il avait de l’aide. Un comité de direction formé d’éminents laïques et religieux supervisait les activités et les finances de la mission. Souvent, des ministres anglicans, baptistes, méthodistes et presbytériens célébraient des offices à la mission ou y donnaient les sacrements. Des étudiants en théologie et des membres de la Young Men’s Christian Association de la Dalhousie University faisaient du bénévolat, comme les groupes de jeunes de bon nombre d’églises protestantes de la ville. Des bienfaiteurs importants donnaient temps, argent et conseils ; l’indispensable groupe des dames auxiliaires, formé en 1902, organisait des réunions d’information pour les mères. Des membres de la famille Theakston collaboraient aussi, de plusieurs manières : ils enseignaient à l’école du dimanche, faisaient des visites, convoquaient des réunions, prononçaient des conférences, jouaient de la musique. Le cinquième fils de Theakston, George Wesley, devint missionnaire adjoint et succéda à son père. Dans un hommage paru peu avant la mort accidentelle de Major Theakston, l’Acadian Recorder nota : « sa profonde compassion, la sincérité de ses convictions religieuses, sa patience et son amabilité, son sens de l’humour et sa merveilleuse capacité de travail sont autant [de qualités] qui ont fait un grand succès du travail auquel il a choisi de consacrer sa vie. M. Theakston a tendu la main aux nécessiteux de toute condition et de toute confession et, avant que les œuvres caritatives et humanitaires soient organisées et financées comme elles le sont maintenant, il a accompli des réalisations et exercé des fonctions d’une ampleur quasi incroyable. »

Judith Fingard

AN, RG 31, C1, 1891, 1901, Halifax (mfm aux PANS).— Dalhousie Univ. Arch. (Halifax), MS 1, Dalhousie Univ. Young Men’s Christian Assoc., reports, 1893–1903.— Halifax County Court of Probate (Halifax), Estate papers, no 4109 (mfm aux PANS).— PANS, MG 9, 365 : 37 ; MG 20, 557 ; 1016, no 23 ; MG 100, 237, nos 14–15.— Arch. privées, Judith Fingard (Halifax), Collection d’enregistrements, de lettres et de journaux personnels d’Evelyn Theakston Van Beek, fille de George Wesley Theakston.— Acadian (Wolfville, N.-É.), 16 janv. 1869.— Acadian Recorder, 9 oct. 1897, 27 sept. 1901, 7 janv., 17 sept. 1902, 10 sept. 1904, 7 déc. 1905, 15 juin 1915, 15 juin, 12 déc. 1917.— Alliance Journal : and Temperance Advocate (Halifax), 26 déc. 1878, 9, 30 janv. 1879, 5, 12 févr., 24 juin, 4 sept., 30 nov., 4, 11, 25 déc. 1880.— Evening Mail (Halifax), 29 janv., 11 oct. 1904, 20 juill., 25 août, 15 sept. 1905 ; 16 juin, 31 juill., 26 déc. 1908, 15 janv., 14 avril 1909, 12, 18, 23 nov. 1910, 1er, 10 févr. 1911.— Kings County Advertiser (Canning, N.-É.), 18 mars 1865.— Mail-Star (Halifax), 13 août 1958.— Morning Chronicle (Halifax), 6 juill., 31 août, 8 déc. 1870, 25 déc. 1876, 14 févr. 1877, 8 juill. 1879, 14 sept., 25 déc. 1882, 27 févr., 3 mars 1885, 17 sept. 1886, 21 févr. 1899.— Morning Herald (Halifax), 24 janv. 1885, 11 juill. 1889, publié par la suite sous le titre Halifax Herald, 14, 30 nov., 12 déc. 1892, 25 nov. 1893, 4 déc. 1896, 16 déc. 1898.— Novascotian (Halifax), 2 mars 1863.— Provincial Wesleyan (Halifax), 22 févr. 1871, 6 mars 1872, 12 mars 1873, 2 févr. 1874, publié par la suite sous le titre Wesleyan (Halifax), 22 janv. 1876, 7 juill. 1877, 1er juin. 1881.— Watchman (Halifax), 6 janv. 1881.— Annuaire, Halifax, 1871–1917.— P. R. Blakeley, Glimpses of Halifax, 1867–1900 (Halifax, 1949 ; réimpr., Belleville, Ontario, 1973).— Judith Fingard, « City missions and social welfare in the Maritimes » (exposé présenté à l’Atlantic Canada Studies Conference, 1983) ; The dark side of life in Victorian Halifax (Porter’s Lake, N.-É., 1989) ; « The North End City Mission : building use in the old north end » (exposé présenté à la Royal Nova Scotia Hist. Soc., 1991) ; « Race and respectability in Victorian Halifax », Journal of Imperial and Commonwealth Hist. (Londres), 20 (1991–1992) : 169–195.— N.-É., House of Assembly, Journal and proc., 1864, app. 24.— North End City Mission, Report (Halifax), 1895–1912, 1914–19.

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Judith Fingard, « THEAKSTON, MAJOR », dans Dictionnaire biographique du Canada, vol. 14, Université Laval/University of Toronto, 2003– , consulté le 22 déc. 2024, https://www.biographi.ca/fr/bio/theakston_major_14F.html.

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Auteur de l'article:    Judith Fingard
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Titre de la publication:    Dictionnaire biographique du Canada, vol. 14
Éditeur:    Université Laval/University of Toronto
Année de la publication:    1998
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