TATE, HENRY WELLINGTON, écrivain tsimshian ; il se maria et eut au moins une fille ; décédé le 24 avril 1914 à Port Simpson, Colombie-Britannique.

Henry Wellington Tate a laissé seulement quelques traces de son existence avant 1903, année où Franz Boas* l’engagea pour écrire les récits qui forment la base de son ouvrage monumental, Tsimshian mythology (1916). Agé de 25 ans environ, bien habillé et de belle prestance, il figure sur une photographie avec Thomas Crosby et ses élèves de la mission méthodiste de Port Simpson. La photo, sur laquelle il est identifé comme « interprètre et maître assistant », n’est pas datée ; on peut seulement déduire qu’elle fut prise au début des années 1880. Ensuite, Tate réapparaît en 1894. Dans une lettre écrite au Missionary Outlook (avec Samuel Bennett), il décrit la Band of Christian Workers, aile autochtone évangélique de la mission de Crosby, et l’expédition hivernale qu’elle fit avec le capitaine William Oliver, du vapeur Boscowitz, pour prêcher à l’extérieur de Port Simpson. C’était, dit-il, « la première fois que nous [...] partions seuls pour aller répandre la bonne parole ».

Malgré ses liens étroits avec Crosby, il semble que Tate travailla aussi avec l’évêque anglican de Caledonia, William Ridley, initiateur d’une traduction tsimshiane des Évangiles parue en 1886. En effet, Tate utilisa l’orthographe de Ridley dans ses textes pour Boas.

Tate dut acquérir son deuxième prénom quand son grand-père maternel, l’influent chef Arthur Wellington Clah, l’adopta à titre de « fils de [sa] sœur ». Pareille adoption avait indubitablement du poids dans le régime matrilinéaire des Tsimshians, quoique l’on ignore le motif précis de Clah. On connaît cependant une conséquence importante de son geste. Ce fut après que Clah eut reçu une lettre de Boas (qui avait eu le nom de Clah par un informateur kwakiutl, George Hunt*) et l’eut transmise à Tate que se noua la fructueuse collaboration entre le célèbre anthropologue de New York et son précieux informateur tsimshian. Tate saisit au vol l’occasion de travailler et écrivit quelque 2 000 pages de récits en dix ans.

On en saurait bien davantage sur Tate si sa première lettre à Boas, où il se présentait, n’avait pas été perdue. Datée du 13 mai 1903, la réponse de Boas existe toujours ; les détails pratiques – modalités de paiement, commandes précises d’histoires – y abondent. La première lettre de Tate qui a été conservée date de l’année suivante. À ce moment-là, il avait déjà remis plusieurs longs textes mythologiques et était à la veille de se consacrer au cycle du Corbeau, à la demande de Boas. Il escomptait finir ce travail dans le courant de l’année, mais il revenait à peine d’une excursion de pêche à la rivière Nass et était sur le point d’aller en faire une autre sur la Skeena. « Alors j’espère que vous serez patient », disait-il.

Boas sut attendre et les résultats furent impressionnants, malgré les difficultés. Marius Barbeau* mit le doigt sur l’une d’entre elles en disant, dans une recension de Tsimshian mythology, que Henry Wellington Tate était « rongé par le manque d’assurance ». Tate, avait-il découvert, n’avait « pas l’habitude de prendre les histoires sous la dictée. Il répugnait même à révéler aux autres autochtones qu’il les écrivait. Notre assistant [William Beynon* (Kuskin)] savait seulement qu’il « conservait un petit livre chez lui pour ces choses ». Ce commentaire révèle de la discrétion et de la sensibilité chez Tate. Il ne se contentait pas de noter servilement la tradition orale, mais présentait les histoires telles qu’il les avait assimilées. Beynon, dont le prestige d’anthropologue autochtone ne fait aucun doute, résuma la question en termes plus positifs dans une lettre à Barbeau le 19 mars 1918 : « [Tate] n’avait pas la pleine confiance de tous ses informateurs [...] ni d’argent pour les payer. En dépit de cela, il semble s’être bien tiré d’affaire. » Beaucoup plus tard, le 8 mars 1954, dans une lettre à l’anthropologue Philip Drucker, Beynon signala combien Tsimshian mythology lui avait été précieux au fil des ans. Tate, disait-il, a « certainement fait un travail extraordinaire, et un très grand mérite lui revient ». Quiconque étudie les Tsimshians et leur mythologie sera d’accord.

Ralph Maud

Les histoires de Henry Wellington Tate figurent dans Tsimshian mythology : based on texts recorded by Henry W. Tate, Franz Boas, édit. (Washington, 1916 ; réimpr., New York, 1970) ; on les trouve aussi dans Tsimshian texts (new series), Franz Boas, édit. (publiés avec Haida songs, J. R. Stanton, édit., dans American Ethnology Soc., Pub., 3, Leyden, N.D., 1912 ; réimpr., New York, 1974), et dans une édition récente que nous avons préparée à partir des manuscrits originaux de Tate, The porcupine hunter and other stories the original Tsimshian texts of Henry W. Tate (Vancouver, 1993). La lettre rédigée par Tate et Sam[uel] Bennett a paru sous le titre « The Indian work : a missionary trip » dans le Missionary Outlook (Toronto), nouv. sér., 14 (1894) : 86s. [r. m.]

American Anthropologist (Washington), nouv. sér., 19 (1917) : 548563 (Marius Barbeau, recension de Tsimshian mythology).— C. [R.] Bolt, Thomas Crosby and the Tsimshian : small shoes for feet too large (Vancouver, 1992).

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Ralph Maud, « TATE, HENRY WELLINGTON », dans Dictionnaire biographique du Canada, vol. 14, Université Laval/University of Toronto, 2003– , consulté le 20 nov. 2024, https://www.biographi.ca/fr/bio/tate_henry_wellington_14F.html.

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Auteur de l'article:    Ralph Maud
Titre de l'article:    TATE, HENRY WELLINGTON
Titre de la publication:    Dictionnaire biographique du Canada, vol. 14
Éditeur:    Université Laval/University of Toronto
Année de la publication:    1998
Année de la révision:    1998
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