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TASKER, PATRICK, commerçant et fonctionnaire, né le 3 ou le 4 décembre 1823 à Greenock, Écosse, troisième fils de James Tasker, marchand ; décédé le 2 novembre 1860 à St John’s.
Patrick Tasker arriva à Terre-Neuve en avril 1842 pour travailler à titre de commis dans une entreprise dont les propriétaires étaient apparentés à sa famille, la Hunters and Company, succursale à St John’s de la James Hunter and Company, établie à Greenock. La firme de St John’s avait pris une part active dans le commerce du poisson à Terre-Neuve depuis le milieu du xviiie siècle et, comme tous les principaux marchands de poisson de St John’s, elle exportait du poisson dans le sud de l’Europe et aux Antilles, importait des provisions et de l’équipement de pêche pour être vendus dans les petits villages de pêcheurs et armait des navires pour chasser le phoque au printemps. Les bâtiments en pierre de la compagnie furent détruits dans l’incendie du 9 juin 1846 qui ravagea une grande partie de la ville, constituée principalement d’édifices à charpente de bois. La Hunters and Company survécut cependant au désastre et put reprendre ses activités.
Tout au long des années 1840, la compagnie de St John’s fut gérée au nom de la famille Tasker par un groupe d’actionnaires associés. À la suite du départ de George Logan en 1850, les Tasker devinrent les seuls propriétaires de la Hunters and Company. Malgré son jeune âge et son manque d’expérience, Patrick en devint le nouveau directeur ; pendant les quelques années qui suivirent, il prit conseil de l’Écossais Peter McBride, marchand de St John’s, qui possédait une expérience de plus de 25 ans dans l’île.
La nouvelle situation de Tasker lui permit d’être facilement admis dans l’élite commerçante de la ville. Il fut élu en 1850 au conseil d’administration du St John’s Hospital, établissement destiné aux marins et aux pêcheurs, mais qui accueillait également les malades et les pauvres de la ville. Depuis 1836, les 15 membres de ce conseil étaient choisis tous les quatre ans par un vote de tous les propriétaires et capitaines de navires enregistrés dans le port de St John’s. Ainsi l’élection de Tasker attestait qu’il avait gagné le respect de ses collègues commerçants plus âgés. En 1854, il fut réélu et choisi comme président du conseil, poste qu’il occupa pendant une année ; après l’introduction du gouvernement responsable l’année suivante, le gouvernement libéral de Philip Francis Little* prit l’entière direction administrative et financière de l’établissement. À l’été de 1854, Tasker fut nommé président du nouveau groupe d’inspecteurs de santé, lequel imposa à la population sceptique des règles sanitaires strictes afin de faire disparaître le système répandu partout du tout-à-l’égout, particulièrement dans les rues surpeuplées et les ruelles étroites du centre de la ville. Lors d’une sérieuse épidémie de choléra qui se déclara plus tard cette année-là et qui fit plus de 500 victimes, la propreté de St John’s contribua sans doute à abaisser le taux de mortalité. Lorsque l’intensité de l’épidémie eut diminué à la fin de décembre, Tasker avait acquis le respect et l’admiration de toutes les classes de la société.
Tasker fut membre de la St John’s Chamber of Commerce de 1852 jusqu’à sa mort et occupa en 1854 le poste de président de la St John’s Water Company, créée après l’incendie de 1846 afin d’approvisionner le secteur commercial en eau. Promoteur actif, il devint en 1854 membre du comité organisateur qui fonda l’Union Bank of Newfoundland, premier établissement bancaire privé de la colonie qui eut du succès, ainsi qu’un important actionnaire d’une fabrique d’huile, de savon et de chandelles. Membre du conseil d’administration de plusieurs établissements financiers et sociétés d’assurances de la région, il fut en 1860 président de la Newfoundland Marine Insurance Company et de la Permanent Loan and Investment Society.
Comme beaucoup d’autres marchands, Tasker ne s’opposait pas à ce qu’on accorde à l’île un gouvernement responsable en 1855, mais il s’éleva contre la formation de groupements politiques qui s’ensuivit, faite selon des principes religieux et sectaires, et à l’élection comme députés de personnes choisies selon ces principes. Les marchands de St John’s, qui étaient en majorité protestants (Tasker était presbytérien), craignaient que leurs intérêts ne soient sous-représentés au sein d’une chambre élue. En ce sens, Tasker était représentatif de la communauté commerçante de la ville, qui considérait l’encouragement et la protection des intérêts de ses membres comme vital pour le bien-être de la colonie, attitude qui n’était pas surprenante dans une société où la pêche constituait la pierre angulaire de l’économie.
Le choix de Tasker au conseil d’administration de plusieurs sociétés de la région démontre sa popularité. En octobre 1855, il fut nommé président de la St Andrew’s Society et, quatre mois plus tard, il fut élu président de l’Agricultural Society, qui était une association non confessionnelle. Les progrès de la franc-maçonnerie à St John’s dans les années 1850 sont pour une bonne part attribuables aux talents d’organisateur de Tasker, passé maître dans le recrutement de nombreux jeunes membres de professions libérales et hommes d’affaires de la ville. En 1856, les francs-maçons étaient assez prospères financièrement pour obtenir un bail à long terme de l’une des meilleures salles de bal de la colonie. Deux ans plus tard, ils nommèrent Tasker grand maître provincial adjoint de l’ordre pour Terre-Neuve. En janvier 1860, Tasker aida à organiser la St John’s Volunteer Association, réserve de fantassins destinée à venir en aide aux Royal Newfoundland Companies, en garnison dans la colonie, et fut élu capitaine de la première compagnie.
À la fin des années 1850, les affaires de Tasker commencèrent à décliner. La compagnie subit de lourdes pertes dans le secteur de la pêche en 1857 et, malgré des réductions considérables du volume de ses activités, elle ne put s’en remettre. En mai 1860, Tasker devait £2 000 aux marchands de St John’s ainsi que £8 000 à des créanciers en Écosse, dont la moitié à son père. On ne sait quel effet (si tant est qu’il y en ait eu) ses déboires financiers produisirent sur sa santé. Mais tandis qu’il travaillait à réduire les activités de la compagnie, il mourut des suites d’une « courte mais grave maladie », un mois seulement avant son trente-septième anniversaire. Une fois ses dettes réglées, la Hunters and Company ferma officiellement ses portes en 1862, après un siècle d’activité commerciale à Terre-Neuve.
Patrick Tasker fut un des chefs de file de la jeune génération de marchands et de membres de professions libérales, ainsi que du monde des affaires à Terre-Neuve. De nombreuses sommités de l’île, tels Thomas* et Charles James Fox* Bennett, de même que Hugh William Hoyles*, Laurence O’Brien* et le gouverneur sir Alexander Bannerman*, firent partie du cortège funèbre lors de ses obsèques. L’ordre des francs-maçons créa en juin 1861 un fonds en son honneur destiné à assurer l’éducation des enfants de francs-maçons décédés. L’année suivante, l’ordre érigea un imposant monument sur sa tombe pour commémorer les services qu’il avait rendus à la ville. Un de ses contemporains. le décrivit comme un homme « distingué [ayant] des manières agréables et aimables », et ajouta que son « honorabilité, [sa] droiture de caractère et [son] abilité le destinaient à une place de choix dans la communauté ».
AASJ, Edward Morris diary (mfm aux MHGA).— BLHU, R. G. Dun & Co. credit ledger, Canada, 10 : 27.— MHGA, Tasker name file.— T.-N., Dept. of Health (St John’s), John Joy, « A sketchy survey of Newfoundland health services until the beginning of the 20th century » (copie dactylographiée, 1971).— PANL, GN 2/1, 1854 ; GN 9/1, 1856.— Courier (St John’s), 1862.— Newfoundlander, 1842–1860.— Newfoundland Express (St John’s), 1851–1860.— Public Ledger, 1842–1860.— Royal Gazette and Newfoundland Advertiser, 1842–1860.— When was that ? (Mosdell).— Gunn, Political hist. of Nfld.— Keith Matthews, « A history of the west of England-Newfoundland fishery » (thèse de ph.d., Univ. of Oxford, Oxford, Angl., 1968).— Prowse, Hist. of Nfld. (1895).— Shannon Ryan, « The Newfoundland cod fishery in the nineteenth century » (thèse de
Melvin Baker, « TASKER, PATRICK », dans Dictionnaire biographique du Canada, vol. 8, Université Laval/University of Toronto, 2003– , consulté le 16 nov. 2024, https://www.biographi.ca/fr/bio/tasker_patrick_8F.html.
Permalien: | https://www.biographi.ca/fr/bio/tasker_patrick_8F.html |
Auteur de l'article: | Melvin Baker |
Titre de l'article: | TASKER, PATRICK |
Titre de la publication: | Dictionnaire biographique du Canada, vol. 8 |
Éditeur: | Université Laval/University of Toronto |
Année de la publication: | 1985 |
Année de la révision: | 1985 |
Date de consultation: | 16 nov. 2024 |