Titre original :  Professional photograph portrait of Emma Scott Raff Nasmith - 074i25p108-111 - 74.25.109. 
Folder 074 — Margaret Eaton School Pictures, Emma Scott Raff Nasmith Papers — Margaret Eaton School Toronto 1901-1942
From the Margaret Eaton School Digital Collection, held by Redeemer University College, Ancaster, Canada. 
Source: https://archive.org/details/MargaretEatonSchool_redeemer_074/074i25p108-111/page/n1/mode/2up

Provenance : Lien

SCOTT, EMMA (Ema) PRISCILLA (Raff ; Nasmith), éducatrice et auteure, née vers 1868 à Waterdown (Hamilton, Ontario), fille du révérend James Scott et d’Elizabeth Cunningham, tous deux nés en Irlande ; le 6 juin 1894, elle épousa à Owen Sound, Ontario, William Bryant Raff (décédé en 1897), et ils eurent une fille, puis le 20 janvier 1916, à Toronto, George Gallie Nasmith*, et ils n’eurent pas d’enfants ; décédée le 16 février 1940 dans la même ville.

Emma Priscilla Scott grandit à Owen Sound, où son père, orateur éloquent, était ministre méthodiste. Elle reçut un diplôme du collegiate institute de l’endroit. Dans une brochure intitulée I’m going home, elle raconterait son enfance et se remémorerait les lectures que son père faisait à sa famille, après le souper, dans son bureau : « C’est là que nous apprîmes à aimer Shakespeare. » Elle pensait, de même que ses cinq frères et sœurs, qu’il « [les] avait tous accablés d’une injustice en étant un ministre du culte plutôt qu’un citoyen plus prospère ».

Après avoir quitté l’école, Emma Priscilla suivit des cours d’art auprès de George Agnew Reid* à Toronto. Au début des années 1890, elle dirigeait un studio d’art à Owen Sound. Elle se rendit ensuite au Colorado, apparemment à titre de membre d’une troupe de théâtre itinérante. Elle y rencontra son futur époux, William Bryant Raff, comptable d’entreprise minière né à Philadelphie et établi à Aspen. Une fois mariée, elle adopta le nom de famille Scott Raff, donna des leçons artistiques à Aspen et mit au monde une fille, Dorothy Victoria, en 1895. À cause de la santé fragile de William Bryant, la famille séjourna en Arizona, puis à Owen Sound, où on espérait le soigner et le remettre sur pied ; il y mourut néanmoins de tuberculose pulmonaire le 5 juillet 1897.

Mme Scott Raff retourna à Toronto ; du moins pour un temps, elle laissa sa fille à sa mère veuve à Owen Sound. Elle étudia avec Harold Nelson Shaw, chef du programme d’élocution et d’art dramatique au Toronto Conservatory of Music, fondé par Edward Fisher*. En 1899, elle partit pour le Toronto College of Music [V. Frederick Herbert Torrington*] et devint l’assistante de Shaw, où ce dernier avait accepté la direction de la School of Elocution, Oratory, Physical Culture and Dramatic Art. Après l’obtention de son diplôme en 1900, elle donna des cours à cette école, ainsi qu’au Victoria College qui l’engagea cet automne-là pour enseigner la culture physique aux femmes.

En 1901, Mme Scott Raff fonda sa propre école. Elle y donnait des formations en culture vocale, en éducation physique et en littérature, tout en dirigeant, de 1902 à 1913, le programme d’éducation physique à l’Annesley Hall [V. Margaret Eleanor Theodora Addison] du Victoria College et, de 1903 à 1906, le programme d’élocution du Toronto College of Music. En 1909, elle se joignit au Heliconian Club, créé cette année-là pour proposer une contrepartie féminine à l’Arts and Letters Club, exclusivement masculin ; elle en demeurerait membre jusqu’à sa mort. À plusieurs occasions, au début de sa carrière, elle poursuivit des cours au Victoria College et à la University of Toronto ; elle continua aussi ses leçons d’élocution, tant à la Curry School of Expression à Boston qu’à l’Academy of Dramatic Art (qui deviendrait la Royal Academy of Dramatic Art) à Londres. Selon le Toronto Daily Star, elle étudia l’imitation à Londres avec l’acteur Hermann Vezin et la pantomime avec la danseuse Malvina Cavallazzi (Cavalazzi). Vraisemblablement, elle trouva aussi le temps d’assister à des conférences à la University of Oxford, d’étudier en France et de faire de l’archéologie en Grèce. Elle conserverait toute sa vie son intérêt pour les voyages, qui la menèrent en Europe, aux États-Unis et dans la région de villégiature au nord de Toronto.

Margaret Wilson Eaton, femme de Timothy Eaton*, fondateur du plus important magasin à rayons de Toronto, figurait parmi les premières étudiantes à mi-temps de l’école de Mme Scott Raff. La directrice persuada son élève qu’il fallait demander à son mari, conservateur méthodiste, de donner environ 50 000 $ pour subventionner la construction d’un bâtiment destiné à loger l’école. Conçu selon le modèle de la bibliothèque nationale de Grèce, à Athènes, et surnommé localement « le temple grec », l’édifice terminé en 1906 fut inauguré au début de l’année suivante sous le nom de Margaret Eaton School of Literature and Expression. Le chancelier Nathanael Burwash*, du Victoria College, présida son premier conseil d’administration.

Le programme triple d’éducation de l’esprit, de l’âme et du corps par l’élocution, l’art dramatique et la culture physique instauré à l’école s’adressait principalement à des élèves de milieu aisé. Mme Scott Raff considérait que « toute culture devait comporter une possibilité de gagner son pain », mais tenait à offrir plus qu’une formation professionnelle. À l’école, on étudiait essentiellement les auteurs Shakespeare et Browning. Mme Scott Raff, se souvint une étudiante, était une « inconditionnelle de Browning » et attirait « beaucoup de gens qui croyaient que parler de Browning était la chose à faire ». Écho des origines de sa fondatrice, l’établissement présenta des pièces de la renaissance littéraire irlandaise (notamment la pièce nationaliste Cathleen ni Houlihan de William Butler Yeats et Isabella Augusta, lady Gregory), apparemment une première dans un théâtre au Canada. Selon l’historien de théâtre Anton Wagner, ces productions, mises en scène par Mme Scott Raff, marquèrent le début du Little Theatre Movement à Toronto. Mme Scott Raff écrivit une pièce, The message, originalement intitulée Love will find a way, montée dans le cadre des exercices de fin d’études en juin 1920. L’action de la pièce, où entrent en jeu le thème des bonnes manières, un serviteur noir qui parle le slang, une planche de ouija et la Bible, se déroule dans une maison canadienne de la classe aisée.

Mme Scott Raff, décrite cette année-là comme « grande et gracieuse, avec une manière de se comporter et de se vêtir d’une simplicité rafraîchissante », possédait une culture étendue ; certains la trouvaient toutefois snob et superficielle. Pour Mme Scott Raff, il importait que les étudiantes proviennent de milieux « bien éduqués » des classes supérieures. La famille comptait beaucoup pour elle ; elle communiqua son amour du théâtre et de la culture physique à sa fille, diplômée de la Margaret Eaton School of Literature and Expression en 1917, et à ses petits-enfants. Elle épousa George Gallie Nasmith en 1916, pendant que ce dernier, bactériologue attaché au corps médical de l’armée canadienne, bénéficiait d’une permission. Homme de taille menue, Nasmith avait « un corps petit et laid mais une âme pure et blanche », selon la description qu’en fit sa femme à ses étudiantes. Arrangée à la hâte, la célébration ne dura que quelques minutes, devant une poignée de témoins, avant que les nouveaux mariés ne montent à bord d’un train en direction de New York, afin que George Gallie retourne à la guerre. Le mariage, lui dit-elle quatre jours plus tard, l’avait rendue « indiciblement heureuse ».

La gestion financière constituait un point faible de Mme Scott Nasmith : en 1924, l’école avait accumulé une dette de 39 000 $. Le conseil d’administration, où siégeaient des membres de la direction de la T. Eaton Company, voulut discrètement fermer l’établissement pour certaines raisons : la culture physique attirait un plus grand nombre d’étudiants (alors que Mme Eaton s’intéressait surtout à la formation en art dramatique), cette dernière refusait de continuer à payer les coûts de dépassement et la municipalité avait exproprié la propriété pour élargir la rue North (Bay). En guise de protestation, la directrice démissionna de son poste en septembre 1924. Soutenant que même Mme Eaton ne pouvait fermer l’école, elle lança l’année suivante un appel émotif au conseil d’administration : « Timothy Eaton n’a jamais créé quoi que ce soit pour le laisser mourir et a absolument refusé de croire au divorce. Je me souviens, comme si c’était hier, que quand nous discutions du nom de la nouvelle école, j’ai suggéré que l’on ajoute Margaret Eaton à School of Expression et il a dit “Maman [sa femme] aimera ça.” » Elle supplia le conseil de garder confiance en l’homme qui était « le fondateur de toutes [leurs] fortunes ».

L’école, renommée la Margaret Eaton School en 1925, continua à connaître des difficultés. Mary Grace Hamilton, qui en devint la directrice l’année suivante, la sauva et la transforma en une école normale, autogérée et autofinancée, pour les femmes qui s’intéressaient à l’éducation physique. En 1941, l’établissement offrirait, avec la University of Toronto, le premier programme de licence en éducation physique au Canada. L’université reçut ainsi de l’école des étudiants, du personnel enseignant, une bibliothèque et une tradition qui légitimait l’éducation physique. À ce moment-là, quelque 450 femmes avaient obtenu un diplôme de l’école fondée par Mme Scott Nasmith dans les domaines de l’élocution et de l’éducation physique. L’actrice Dora Mavor* comptait parmi ses remarquables anciennes étudiantes.

Emma Priscilla Scott Nasmith mourut d’une crise cardiaque le 16 février 1940. Le 24, le critique d’art Augustus John Bridle* notait dans le Toronto Daily Star que « les personnes réunies en foule à l’enterrement [… devaient leurs] premiers élans vers la beauté dans la musique et l’art dramatique à cette lumineuse apôtre ».

John Byl

Emma Priscilla Scott (Raff ; Nasmith) a notamment publié Of queen’s gardens et I’m going home, deux brochures imprimées à compte d’auteur, la première vers 1914 et la deuxième probablement en 1920. Elle a aussi écrit « The message » (s.l.n.d.).

Deux vidéoclips de Mme Scott Nasmith sont accessibles à youtu.be/0yIgSXyhVTw et youtu.be/WnYfpGdztIU (consultés le 28 août 2018). Grâce à la générosité de son arrière-petit-fils , Robert Fennell Young, la Redeemer Univ. (Ancaster, Ontario) a pu mettre en ligne une grande quantité de documents relatifs à Mme Scott Nasmith et à la Margaret Eaton School, dont des manuscrits, des documents imprimés, des images et autres travaux secondaires, sur le site « The Margaret Eaton School digital collection » : libguides.redeemer.ca/MES (consulté le 28 août 2018) ; la collection numérisée comporte une partie de la correspondance du sujet, ainsi que des tapuscrits de ses pièces de théâtre. Les AO conservent également la correspondance de Mme Scott Nasmith (Eaton collection, F 229).

L’école et sa directrice ont fait l’objet de deux thèses de doctorat : la nôtre, « The Margaret Eaton School, 1901–1942 : women’s education in elocution, drama and physical education » (thèse de ph.d., State Univ. of N.Y. at Buffalo, 1992), et celle d’A. H. Lathrop, « Elegance and expression, sweat and strength : body training, physical culture and female embodiment in women’s education at the Margaret Eaton schools (1901–1941) » (thèse de d. éd, Univ. of Toronto, 1997). Pour rédiger notre thèse, nous avons en partie utilisé des entrevues avec d’anciens élèves de l’école. Subséquemment, nous avons correspondu avec Robert Fennell Young et ainsi bénéficié d’information sur sa famille.

UTARMS, A1973-0026 (Univ. of Toronto, dept. of graduate records), box 403, file 11.— Evening Telegram (Toronto), 17 févr. 1940 : 3.— Hilda Ridley, « Pen portraits of progressive women : Mrs. Geo. G. Nasmith », Christian Guardian (Toronto), 13 oct. 1920 : 12.— Toronto Daily Star, 17 févr. 1940 : 25 ; 24 févr. 1940 : 24.— John Byl, « Directing physical education in the Canadian YWCAs : Margaret Eaton School’s influence, 1901–1947 », Sport Hist. Rev. (Champaign, Ill.), 27 (mai–novembre 1996) : 139–154.— « Canadian women in the public eye : Mrs. G. G. Nasmith », Saturday Night, 11 sept. 1920 : 26.— The Oxford companion to Canadian theatre, Eugene Benson et L. W. Conolly, édit. (Toronto, 1989), 139, 399.

Comment écrire la référence bibliographique de cette biographie

John Byl, « SCOTT, EMMA PRISCILLA (Raff ; Nasmith) », dans Dictionnaire biographique du Canada, vol. 16, Université Laval/University of Toronto, 2003– , consulté le 21 nov. 2024, https://www.biographi.ca/fr/bio/scott_emma_priscilla_16F.html.

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Auteur de l'article:    John Byl
Titre de l'article:    SCOTT, EMMA PRISCILLA (Raff ; Nasmith)
Titre de la publication:    Dictionnaire biographique du Canada, vol. 16
Éditeur:    Université Laval/University of Toronto
Année de la publication:    2022
Année de la révision:    2022
Date de consultation:    21 nov. 2024