PRITCHARD, AZARIAH, officier dans l’armée et dans la milice, espion, colonisateur, entrepreneur, seigneur et juge de paix, né probablement dans la colonie du Connecticut, fils de James Pritchard ; décédé vers 1830, probablement à New-Richmond, Bas-Canada.
Lors du déclenchement de la Révolution américaine en 1775, Azariah Pritchard demeurait à Derby, dans le Connecticut, où il exerçait le métier de meunier. Fidèle à la couronne britannique, il aida l’année suivante 160 loyalistes à franchir les lignes rebelles pour atteindre l’île Long, dans la colonie de New York. Accusé d’avoir transmis des renseignements aux Britanniques, il fut toutefois acquitté par un tribunal de guerre en 1777 ; il décida de se sauver dans la province de Québec avec sa femme et ses trois enfants, et servit de guide à la frontière, dans la région du lac Champlain. À la suite de cette décision, il se serait fait confisquer 600 acres de terre en bordure du fleuve Connecticut, en plus de ses propriétés à Derby et d’un navire qu’il avait équipé.
En 1779, Pritchard était capitaine dans un bataillon des King’s Rangers [V. Robert Rogers*]. Cantonné à Saint-Jean (Saint-Jean-sur-Richelieu), il fut tout de suite utilisé comme agent secret. Il mena à bien de nombreuses missions de pénétration ; au Connecticut et au Vermont, et de contre-espionnage dans la province de Québec jusqu’à ce qu’il prenne sa retraite de l’armée en 1784. Pendant son service, Pritchard fut l’objet de nombreux soupçons à la suite d’actions plus ou moins légales qu’il aurait accomplies. On lui reprochait d’avoir pratiqué le commerce illicite du bœuf avec le Vermont et d’avoir introduit de la fausse monnaie dans la province de Québec en 1782, puis d’avoir fait le trafic du thé en haut du lac Champlain et d’avoir acquis malhonnêtement des terres le long de la baie Missisquoi en 1783. Ces accusations, sans fondement solide, furent à chaque fois réfutées.
La guerre d’Indépendance terminée, les autorités britanniques pensèrent à licencier leurs troupes et à les installer sur des terres propices à l’agriculture. Parcourant la région de Yamachiche, près de Trois-Rivières, Pritchard s’activa à recruter des colons pour un établissement dans la baie des Chaleurs. Le 9 juin 1784, après que le licenciement fut chose faite, 315 personnes s’embarquèrent à destination de la baie des Chaleurs. Le senau Liberty sur lequel se trouvaient Pritchard et sa famille arriva à Bonaventure le 27 juin. Comme les bonnes terres y étaient déjà occupées par des Acadiens, 77 des arrivants, dont Pritchard, gagnèrent le lieu voisin, Paspébiac. Les lots y furent immédiatement délimités.
Doté d’un esprit d’entreprise certain, Pritchard adressa le 18 août une demande pour construire un moulin à farine sur la rivière Caplan, afin de venir en aide aux nouveaux colons de Paspébiac. Il se lança aussi dans l’exploitation forestière. Par la suite, il fit plusieurs demandes pour qu’on lui concède des terres, construisit un moulin à scier à proximité et se fixa finalement à New-Richmond. La famille Pritchard connut l’aisance financière et accumula alors les charges : Azariah devint capitaine du bataillon de la milice britannique du canton de Richmond vers 1792 et juge de paix du district de Gaspé en 1811 ; son fils Azariah fut nommé enseigne dans le même bataillon, puis maître inspecteur et mesureur de bois de construction en 1810.
Entre-temps, de nouveaux soupçons menacèrent la carrière de Pritchard. On l’accusa de façon précise, en juin 1790, d’avoir vendu des actes contrefaits accordant la nationalité britannique et d’avoir fait le trafic de fausses lettres de mer pour la Méditerranée. Le commerce aurait duré deux ans et se serait étendu jusqu’en Virginie. Pritchard collabora étroitement à l’enquête ; malgré cela, on lança un mandat d’arrêt contre lui. Il fut acquitté par le jury à la suite d’un procès tenu à New-Carlisle en juillet 1790, puis remercié par lord Dorchester [Carleton*] pour son zèle à découvrir ces pratiques frauduleuses.
En 1801, Azariah Pritchard obtint par voie d’échange la seigneurie du Bic. Il renforçait ainsi son entreprise forestière. Il s’en départit en 1822 pour acquérir des terrains dans la ville de Québec. À la fin de ses jours, il laissa à son fils Azariah le soin d’assumer la relève dans le district de Gaspé.
ANQ-Q, CN1-99, 13 nov. 1810 ; CN1-285, 27 juin 1801, 18 oct. 1822.— BL, Add. mss 21820 : 68–69 ; 21821 : 33–35 ; 21822 : 58–59, 68–69, 200–204 ; 21828 : 30–35 ; 21838 : 71–81 ; 21862 : 195.— La Gazette de Québec, 11 juill. 1793, 24 mai 1810, 6 juin 1811.— Almanach de Québec, 1792–1797.— « Papiers d’État », APC Rapport, 1890 : 265, 267, 281–286, 288.— P.-G. Roy, Inv. concessions, 3 : 156.— Le Centenaire de la paroisse de New-Richmond, 1860–1960 (s.l., 1960).— Lanctot, le Canada et la Révolution américaine.— J.-D. Michaud, le Bic, les étapes d’une paroisse (2 vol., Québec, 1925–1926).— W. H. Siebert, « The Loyalist settlements on the Gaspé peninsula », SRC Mémoires, 3e sér., 8 (1914), sect. ii : 399–405.
Mario Mimeault, « PRITCHARD, AZARIAH », dans Dictionnaire biographique du Canada, vol. 6, Université Laval/University of Toronto, 2003– , consulté le 20 déc. 2024, https://www.biographi.ca/fr/bio/pritchard_azariah_6F.html.
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Auteur de l'article: | Mario Mimeault |
Titre de l'article: | PRITCHARD, AZARIAH |
Titre de la publication: | Dictionnaire biographique du Canada, vol. 6 |
Éditeur: | Université Laval/University of Toronto |
Année de la publication: | 1987 |
Année de la révision: | 1987 |
Date de consultation: | 20 déc. 2024 |