NEILSON, HENRY IVAN (avant 1902, il signait parfois Henry J., pour Henry John), ingénieur, peintre, graveur et professeur, né le 27 juin 1865 à Québec, treizième et dernier enfant de John Neilson, arpenteur des terres du dominion, et de Laura C. Moorhead ; le 12 septembre 1911, il épousa à Toronto Matilda Anne Green, et ils eurent deux filles et un fils ; décédé le 27 avril 1931 à Québec.

Henry Ivan Neilson, que sa famille appelait Harry, naquit dans une famille écossaise et canadienne-française distinguée, étroitement liée aux débuts de l’histoire de l’imprimerie dans le Bas-Canada. En 1764, un arrière-grand-oncle, William Brown*, avait fondé avec Thomas Gilmore* l’un des premiers journaux du pays, la Gazette de Québec. Le grand-oncle de Henry Ivan, Samuel Neilson*, prit la relève et, en 1792, lança le Magasin de Québec, premier périodique québécois orné de gravures. Le frère de Samuel Neilson, John*, qui épousa une Canadienne française, était le grand-père paternel de Henry Ivan ; il poursuivit la publication de la Gazette de Québec et devint un homme politique important.

Après ses études au petit séminaire de Québec, de 1875 à 1877, et au séminaire de Nicolet, de 1877 à 1881, Neilson participa aux expéditions d’arpentage de son père le long de la rivière Gander, à Terre-Neuve, en 1885, et de la rivière du Petit Mécatina, au Labrador, en 1886. Il fit ensuite son apprentissage d’ingénieur mécanicien et entra au service de la Compagnie du chemin de fer canadien du Pacifique en 1891. On lui demanda bientôt de servir dans la flotte du Pacifique de la société. Il travailla également pour un voyagiste qui organisait des séjours dans les Caraïbes. En 1895, la Cooke Locomotive and Machinery Company l’engagea comme dessinateur et il fut par la suite nommé ingénieur en chef à la Barbour Flax Spinning Company ; les deux entreprises étaient situées à Paterson, au New Jersey.

En 1896, son employeur l’envoya en Écosse pour examiner de la machinerie ; Neilson fit alors le saut et commença une carrière artistique en fréquentant la Glasgow School of Art pendant l’année 1896–1897. Au cours de l’année suivante, il prit des leçons à l’académie Delécluze à Paris, puis passa l’année 1898–1899 à l’académie des beaux-arts de Saint-Gilles, en Belgique, où il assista aux cours de dessin d’après modèle de Jean-André-Alfred Cluysenaar. De 1900 à la fin de 1909, il vécut à Kirkcudbright, en Écosse, où des artistes, notamment des membres du groupe connu sous le nom de Glasgow Boys, s’étaient rassemblés en une colonie dynamique autour du peintre Edward Atkinson Hornel. Neilson adopta graduellement leur style plus libre, privilégiant comme eux les paysages et les scènes de genre. Il participa à de nombreuses expositions avec la Society of Scottish Artists (membre en 1902), le Scottish Arts Club (membre en 1903) et la Royal Scottish Academy à Édimbourg, tout comme avec le Royal Glasgow Institute of the Fine Arts. Il participa aussi à d’autres expositions ailleurs en Écosse et en Angleterre. Nombre de ces expositions n’étaient ouvertes qu’aux artistes invités et Neilson recevait parfois des critiques élogieuses qui vantaient, en particulier, son fougueux coup de pinceau et de couteau à palette, ainsi que ses couleurs vives ; ses tableaux, cependant, étaient rarement accrochés dans des salles importantes. A spring day on the Solway (vers 1903) et The goat herd (1904) figuraient parmi les tableaux auxquels il tenait le plus. Même s’il fut représenté par des marchands réputés en Écosse et en Angleterre, et qu’il réussit de toute évidence à vendre ses toiles, sa renommée comme peintre n’a pas duré.

En 1906, Neilson passa le printemps au Québec ; il tint à Montréal sa première exposition individuelle, qui fit l’objet de critiques enthousiastes, et exposa ses tableaux à l’Académie royale des arts du Canada à Ottawa. En 1908, il passa plusieurs mois à étudier à Édimbourg ; pendant cette période, il fut initié à la gravure à l’eau-forte par Ernest Stephen Lumsden, qui fonderait un atelier de gravure au nouvel Edinburgh College of Art vers la fin de cette année-là. Neilson semble n’avoir réalisé que deux eaux-fortes en Écosse, mais son enthousiasme était tel que, lorsqu’il revint à Québec en octobre 1909, il apporta avec lui une presse à gravure.

Neilson établit rapidement des contacts avec les organisations artistiques de la province et, en 1911, il fut le fondateur et premier président de la Society of Quebec Artists. Après leur mariage cette année-là, lui et sa femme s’installèrent à Valcartier. Même s’il mit en vente des peintures et des estampes au château Frontenac et dans deux autres établissements commerciaux de Québec, il considérait Toronto, d’où venait sa femme, comme un marché potentiel important. Il y passa les hivers de 1913–1914 et de 1919–1920, exposant au studio qu’il louait ou à la Mackenzie and Company Art Gallery. En 1914, le couple s’établit à Cap-Rouge, village à l’ouest de Québec. L’année suivante, Neilson se joignit au Canadian Art Club et à l’Arts Club of Montreal, et devint membre associé de l’Académie royale des arts du Canada, où il exposa régulièrement de 1911 à 1928. Homme sociable et doté de sens civique, il organisa la division de Québec de l’exposition artistique qui entreprit une tournée nationale en 1915 pour soutenir le Fonds patriotique canadien. La Galerie nationale du Canada acheta deux de ses toiles : Une pastorale d’octobre, Cap Rouge, Québec (1915) et Guirlande du printemps (1918).

Les encouragements des critiques et des conservateurs de musée incitèrent Neilson à se consacrer davantage à l’eau-forte, qu’il avait reprise en 1910. La création d’une section d’art graphique à l’Exposition nationale canadienne de Toronto en 1909 et une série d’expositions à l’Art Museum of Toronto de 1914 à 1917 annonçaient un regain d’intérêt envers cette forme d’art. Les estampes de Neilson, tout comme ses tableaux, dépeignaient tant les routes tranquilles de la province de Québec que la vie trépidante le long du fleuve Saint-Laurent. Dessinées sur des plaques de cuivre, habituellement sur le lieu même du sujet, certaines de ses estampes reflétaient le style réservé de l’école britannique, mais d’autres révélaient une technique rapide et rude qui donnait une impression de mouvement et de dynamisme rappelant la vivacité de sa peinture. Commentant le travail de Neilson en 1919, le Daily Mail and Empire de Toronto notait : « il y a les scènes portuaires animées, qui débordent de virilité. Les paysages industriels sont toujours traités par M. Neilson avec la quantité de vigueur nécessaire, et il donne des interprétations satisfaisantes de cet aspect de la vie canadienne moderne. Par ailleurs, rien ne pourrait être plus exquis ou plus délicatement poétique qu’“Un village canadien-français”. » L’expérience de Neilson comme marin et son profond attachement à la nature se conjuguent admirablement dans ses estampes (les 73 dont on connaît l’existence à ce jour). À une époque où les goûts populaires penchaient plutôt pour des vues pittoresques de l’Europe, Neilson représenta des scènes urbaines et rurales québécoises. Quelques autres artistes avaient abordé ces sujets à l’occasion, mais Neilson fut le premier aquafortiste de la province à le faire sur une base régulière. Il déclara au journaliste et amateur d’art Jules-Siméon LeSage « n’avoir en Europe rencontré d’aussi jolis coins de nature à peindre ».

Grâce à sa compétence technique, à sa connaissance des courants internationaux et à sa presse à graver (il était impossible autrement de trouver des presses grand format pour l’enseignement), Neilson fut tout naturellement choisi comme professeur au moment de la fondation de l’école des beaux-arts de Québec en 1921. Il y enseigna le dessin, le croquis en couleur, la gravure à l’eau-forte et l’anatomie. En 1928, toujours sous l’influence puriste de Lumsden, il déclara fièrement à un reporter du Chronicle-Telegraph de Québec : « C’est la seule école au Canada […] où [la gravure à l’eau-forte] est enseignée comme on l’enseigne en Europe, en ce sens que le processus complet est exécuté par l’étudiant, même le mélange des encres et l’impression. » On peut considérer ses cours comme étant la première formation en gravure donnée au pays. Omer Parent, Alfred Pellan*, Simone Hudon et Albert Rousseau* comptent parmi ses élèves les plus connus.

Même si les nouvelles responsabilités de Neilson réduisirent sa production artistique, il réalisa quelques-unes de ses meilleures estampes, notamment Chapelle de procession à Saint-Pierre-de-l’Île-d’Orléans (1927) et Vieille scierie, Petite Rivière (1931), pendant ses années d’enseignement. Il fut nommé directeur de l’école en 1929. Au départ seul Canadien parmi les professeurs, on lui devrait d’avoir instauré, à titre de directeur, un style d’enseignement détaché des normes académiques françaises, axé sur l’étudiant et informel, considéré comme mieux adapté au tempérament et aux aspirations des étudiants canadiens-français.

Huit mois après l’achèvement d’un énorme tableau, Conseil souverain (1926–1930), pour le Conseil législatif, Neilson mourut. On lui avait confié, ainsi qu’à Charles Maillard*, directeur de l’école des beaux-arts de Montréal, la tâche de superviser l’ouvrage après la mort du peintre Charles Huot*. Épuisé par ce travail et par ses fonctions de direction, Neilson succomba à des problèmes respiratoires occasionnés, entre autres, par les produits chimiques utilisés dans le procédé de la gravure.

L’insertion de Henry Ivan Neilson dans l’un des plus modernes courants artistiques britanniques lui conféra une largeur de vues qui lui permit d’apporter une contribution substantielle à titre d’artiste et d’éducateur au Canada. Il joua un rôle capital dans la mise sur pied d’une formation artistique structurée dans la province de Québec. En outre, il laissa l’une des premières et l’une des plus importantes collections d’estampes originales représentant la vie le long du fleuve Saint-Laurent.

Jan Johnson

De précieux renseignements nous ont été fournis par la fille de Henry Ivan Neilson, Helen Ridout Neilson. Une entrevue avec elle figure dans L. M. Fortin, « le Rôle d’Henry Ivan Neilson, artiste/graveur/enseignant, dans l’évolution de la gravure au Québec » (mémoire de m.a., Concordia Univ., Montréal, 1996).

BAnQ-Q, E4, 1960-01-483/628 ; P192.— Univ. Laval, Div. des arch., P433/D1, 1 (fonds École des beaux-arts de Québec), « Historique de l’école des beaux-arts » (attribué à J.-B. Soucy, 1938 ?).— Chronicle-Telegraph (Québec), 18 oct. 1928.— Daily Mail and Empire, 17 mai 1919.— Canadian encyclopedia, 3 : 1483–1485.— Canadian men and women of the time (Morgan ; 1912).— J. L. Caw, Scottish painting past and present, 1620–1908 (Édimbourg, [1908 ?]).— Alphonse Désilets, « les Beaux-Arts à Québec », le Terroir (Québec), [12] (1930–1931), nos 2–3 : 27, 29.— Jan Johnson, « Henry Ivan Neilson (Québec, 1865–1931) », dans Printmaking in Québec, 1900–1950, Multiscript/la Langagerie, trad. (catalogue d’exposition, Musée du Québec, 1990), 110–113.— J.-S. LeSage, Notes et esquisses québécoises : carnet d’un amateur (Québec, 1925).

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Jan Johnson, « NEILSON, HENRY IVAN (Henry J.) », dans Dictionnaire biographique du Canada, vol. 16, Université Laval/University of Toronto, 2003– , consulté le 21 déc. 2024, https://www.biographi.ca/fr/bio/neilson_henry_ivan_16F.html.

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Titre de l'article:    NEILSON, HENRY IVAN (Henry J.)
Titre de la publication:    Dictionnaire biographique du Canada, vol. 16
Éditeur:    Université Laval/University of Toronto
Année de la publication:    2014
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