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McGARVEY, OWEN, fabricant et marchand de meubles, né vers 1821 à Keady (Irlande du Nord), fils de Francis McGarvey et de Bridget Murray ; le 8 mai 1848, il épousa Margaret Cooper de Montréal, et ils eurent des filles et un fils ; décédé le 7 juillet 1897 au même endroit.
Owen McGarvey immigra à Montréal vers l’âge de 17 ans. Déjà peintre de son métier, il ouvrit en 1843 un commerce de peinture, de pétrole et de vitre où il vendait aussi de simples chaises de cuisine prêtes à peindre. Ce faisant, il suivait une pratique répandue parmi les marchands de peinture de l’époque mais, dans son cas, le commerce des meubles prit peu à peu le dessus. Dans les bottins de la ville, il passa de la rubrique des peintres à celle des fabricants de meubles, et en 1856 il effectua l’un des nombreux déménagements qui allaient lui permettre de disposer de salles de montre et d’ateliers toujours plus grands. Son dernier déplacement, dans les années 1880, le mena à l’angle des rues Notre-Dame et McGill, où son commerce, surmonté durant de nombreuses années d’une gigantesque berceuse, finit par occuper six étages ; ses vitrines, prétendait-il, avaient les « plus grandes vitres au monde ».
Comme d’autres ébénistes montréalais, McGarvey offrait aussi des meubles qui n’étaient pas de sa fabrication. Au début de sa carrière, la plupart des chaises qu’il vendait étaient assemblées sommairement pour lui à L’Assomption et finies à sa manufacture de Montréal. Dans les années 1860, il vendait chaque année jusqu’à 15 000 de ces chaises. Au fil des ans, il devint à la fois importateur et fabricant « de mobilier simple ou raffiné de tous les styles ». Aux expositions provinciales et nationales, où il se distinguait régulièrement (il remporta huit premiers prix et sept deuxièmes prix à l’Exposition du dominion en 1882), il présentait souvent des assortiments de meubles de provenances très diverses. Aux grandes expositions étrangères toutefois, celles de Paris en 1855 et 1867, d’Anvers en 1885 et de Londres en 1886, il n’envoyait que des meubles de sa manufacture ; là encore, il recevait diplômes et médailles, et son carnet de commandes se remplissait.
Le stock de McGarvey, importé, comme les marchandises de Philadelphie qu’il annonçait en 1878, acheté à d’autres manufacturiers canadiens ou fabriqué dans son propre atelier, représentait ce qui se faisait de « nouveau, [de] chic et [de] pratique en fait de mobilier moderne ». Sans jamais abandonner les chaises de cuisine (en 1878, il en avait 50 000 en réserve) ni les berceuses en bois qui étaient sa marque de commerce (et qui lui valurent une mention honorable à Paris en 1855), il se spécialisa de plus en plus dans le mobilier en bois de rose, acajou ou noyer noir, richement sculpté et orné d’élégants pieds-de-biche. Il fit connaître à sa clientèle les styles qui évoquaient le passé : le néo-gothique, le néo-élisabéthain et le pseudo-Queen Anne. Dès que l’ouvrage publié à Londres en 1868 par Charles Locke Eastlake, Hints on household taste in furniture, upholstery, and other details, commença de faire sentir son influence dans l’industrie, il annonça des meubles de « style Eastlake ». Le plus souvent, ce que l’on en vint à regrouper sous cette appellation n’évoquait que de loin les meubles massifs assemblés, comme au Moyen Âge, par les chevilles de bois dont Eastlake prônait l’utilisation, mais le nom d’Eastlake faisait grande impression. Il en allait de même dans le cas du « mobilier d’art » ; McGarvey en annonçait de grandes quantités, mais d’ordinaire, à Montréal, il ne s’agissait de rien de plus que de meubles dorés ou finis ébène.
Pour satisfaire la soif de nouveauté des Victoriens, McGarvey offrait des meubles faits de cornes de bouvillon – des « sièges de fantaisie » par exemple, comme il en présenta à la Colonial and Indian Exhibition de Londres en 1886. Il détenait un brevet pour la fabrication d’un divan combiné à une étagère à bibelots. Pour la nursery, il vendait un berceau à mécanisme d’horlogerie qui pouvait bercer un bébé durant deux heures, et une chaise haute qui se transformait en cheval à bascule. Quand commença la vogue des meubles en rotin, dans le dernier quart du siècle, il en offrit non seulement dans les tons habituels – blanc et vert – mais dans des tons plus exotiques – or, argent ou bronze. Il avait aussi, en réserve, des ensembles de petit salon en bois courbé, des meubles laqués pour la chambre à coucher et du mobilier de bureau.
Avant-gardiste dans ses techniques de vente, McGarvey évitait de mettre ses meubles aux enchères, sauf à l’occasion du déménagement de son commerce. D’ailleurs, il mettait les clients en garde contre cette pratique, courante à l’époque, car souvent on y vendait des meubles fabriqués expressément pour ces occasions sans offrir aucun recours s’ils ne donnaient pas satisfaction. Il préférait recréer, dans ses salles d’exposition, des petits salons, des bibliothèques ou des chambres afin que les clients puissent voir de quoi des meubles bien faits et coûteux avaient l’air dans une maison. Vendre beaucoup, récolter de petits bénéfices, satisfaire sa clientèle, tels furent ses objectifs durant plus d’un demi-siècle.
McGarvey n’était pas moins actif dans la collectivité en général que dans les affaires. Fidèle de l’église St Patrick, il se préoccupa toujours du bien-être des catholiques irlandais de la ville. Il fut vice-président de la St Patrick’s Total Abstinence Society et membre du conseil d’administration de l’asile des orphelins de Saint-Patrice de Montréal et de la Maison de refuge de Sainte-Brigitte de Montréal. De plus, il fut membre à vie du conseil d’administration du Montreal General Hospital, vice-président de l’Hôpital Notre-Dame, vice-président de la Compagnie d’assurance mutuelle contre le feu de la cité de Montréal et bienfaiteur de l’Association des beaux-arts de Montréal. Lorsque le Bureau de commerce de Montréal construisit son premier immeuble, en 1892, McGarvey, membre de l’organisme depuis déjà plusieurs années, était porteur d’obligations hypothécaires.
Owen McGarvey avait pris son fils John comme associé le 6 juin 1876. Sans doute espérait-il qu’il lui succéderait à la Owen McGarvey and Son mais il mourut avant lui, le 18 juin 1888. L’entreprise s’éteignit donc en même temps que son fondateur. À sa mort, McGarvey était, de tous les fabricants de meubles montréalais, celui qui était en affaires depuis le plus longtemps. Parti de presque rien, disait la Gazette, il s’était taillé « une place de choix parmi les grands marchands et manufacturiers » de la ville. Sa parfaite intégrité, sa connaissance approfondie du métier et son esprit d’initiative expliquaient sa « prospérité ininterrompue ».
AC, Montréal, État civil, Catholiques, Notre-Dame de Montréal, 10 juill. 1897.— ANQ-M, CE1-51, 8 mai 1848.— BE, Montréal, déclarations de sociétés, 6 : 533.— H.-C., Board of Arts and Manufactures, Journal (Toronto), 7 (1867) : 202.— Argus (Montréal), 17 sept., 9 déc. 1857.— Eastern Townships Gazette and District of Bedford Advertiser (Granby, Québec), 27 janv., 7 avril 1865.— Gazette (Montréal), 8 mai, 6 déc. 1878, 9 mai 1879, 1er mai, 20 sept., 2 oct. 1880, 5 mai 1881, 20 sept. 1882, 8 oct. 1885, 6 nov., 4 déc. 1886, 19 janv., 22 sept. 1888, 31 déc. 1890, 8, 12 juill. 1897.— La Minerve, 13 mars 1878.— Montreal Daily Star, 19 mai 1892.— Montreal Daily Witness, 22 déc. 1888.— Montreal Herald, 17 sept. 1863, 1er, 30 déc. 1865, 22 déc. 1873.— Montreal Transcript, 13, 17 sept., 4 oct., 18 déc. 1862, 3 oct. 1864.— Pilot (Montréal), 30 sept. 1858.— Antwerp Universal Exhibition, 1885, official catalogue of the Canadian section (Londres, 1885).— Canada at the Universal Exhibition of 1855 (Toronto, 1856).— Canada directory, 1853, 1857–1858.— Canadian album (Cochrane et Hopkins), 2 : 383.— The Colonial and Indian Exhibition, London, 1886 ; official catalogue of the Canadian section (Londres, 1886).— Mercantile agency reference book, 1866 ; 1881 ; 1887.— Montreal directory, 1852–1853.— F. W. Terrill, A chronology of Montreal and of Canada from A.D. 1752 to A.D. 1893 [...] (Montréal, 1893).— Golden jubilee of St. Patrick’s Orphan Asylum : the work of fathers Dowd, O’Brien and Quinlivan, with biographies and illustrations, J. J. Curran, édit. (Montréal, 1902).— Industries of Canada, city of Montreal, historical and descriptive review, leading firms and moneyed institutions (Montréal, 1886).— Montreal Board of Trade, A souvenir of the opening of the new building, one thousand eight hundred and ninety three (Montréal, 1893).— Montreal business sketches [...] (Montréal, 1864).— Montreal illustrated, 1894 [...] (Montréal, [1894]).— Special number of the Dominion Illustrated devoted to Montreal, the commercial metropolis of Canada (Montréal, 1891).
Elizabeth Collard, « McGARVEY, OWEN », dans Dictionnaire biographique du Canada, vol. 12, Université Laval/University of Toronto, 2003– , consulté le 20 déc. 2024, https://www.biographi.ca/fr/bio/mcgarvey_owen_12F.html.
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Auteur de l'article: | Elizabeth Collard |
Titre de l'article: | McGARVEY, OWEN |
Titre de la publication: | Dictionnaire biographique du Canada, vol. 12 |
Éditeur: | Université Laval/University of Toronto |
Année de la publication: | 1990 |
Année de la révision: | 1990 |
Date de consultation: | 20 déc. 2024 |