MAYRAND, ÉTIENNE, commerçant et homme politique, né à Montréal le 3 septembre 1776, du mariage de Jean-Baptiste Mayrand et d’Agathe Roy, décédé à Rivière-du-Loup (Louiseville, comté de Maskinongé) le 22 janvier 1872.

La formation intellectuelle du jeune Mayrand fut, sans doute, assez superficielle, bien qu’à cette époque il existât à Montréal des écoles élémentaires sous la direction des sulpiciens. Il s’intéressa de bonne heure à la traite des fourrures et voyagea dans l’Ouest canadien, travaillant pour la North West Company ; il revint de cette aventure avec un capital intéressant. Pendant son séjour, Étienne Mayrand avait épousé une Indienne dont il eut deux filles qu’il ramena avec lui au Bas-Canada. Il n’est pas facile de préciser la date de ce retour : ce fut sûrement au début du xixe siècle puisque, le 20 août 1806, Mayrand se mariait en secondes noces à Sophie Héneau, de Berthier ; il en eut un enfant, décédé prématurément. Il s’établit alors à Rivière-du-Loup, où il fit fortune grâce à un commerce de grain et de foin. Ce succès lui permit d’agir comme prêteur et agent immobilier. Il se fit construire une confortable maison de pierres mesurant 60 pieds de longueur par 35 pieds de largeur avec deux grandes pièces qui servaient de « salons », l’un pour la famille et l’autre pour le maître de céans. Si quelque visiteur distrait pénétrait dans ce dernier sans y avoir été expressément invité, « il était foudroyé du regard », note Édouard-Zotique Massicotte*, et il apprenait, sans ménagements, que « le maître ne recevait pas dans le moment ».

À l’occasion de la guerre canado-américaine de 1812, Mayrand servit comme officier de milice. Promu lieutenant au 2e bataillon de Rivière-du-Loup en 1813, il fut nommé capitaine au 8e bataillon pie la division de Trois-Rivières. Cet intérêt aux choses militaires se continua puisqu’on le retrouve commandant du 4e bataillon du comté de Saint-Maurice en 1846. Il prit sa retraite en 1855 à l’âge de 79 ans.

Le succès remarquable de Mayrand dans les affaires l’amena à s’intéresser également à la politique. Dès novembre 1809, il servit comme directeur du scrutin pour le comté de Saint-Maurice lorsque Louis Gugy* fut choisi pour représenter ce comté à la chambre d’Assemblée. Bien plus, il brigua lui-même les suffrages dans cette circonscription, qu’il représenta de 1816 à 1820 (selon Édouard-Zotique Massicotte il fut député de 1816 à 1838). Il était partisan de l’ordre et, en politique, il fut toujours franc conservateur. Le 2 avril 1838, il était nommé membre du Conseil spécial qui remplaça la chambre d’Assemblée durant les troubles de 1837–1838 et participa aux délibérations de cet organisme jusqu’à la mise en place du gouvernement de l’Union en 1841. Enfin, il devint membre du Conseil législatif le 9 juin 1841, mais il démissionna le 22 du même mois. Il s’occupa alors de finance et d’immeuble.

Parallèlement à ses activités commerciales et politiques, Étienne Mayrand assuma diverses responsabilités importantes dans la vie publique de sa région et même au niveau provincial. C’est ainsi qu’il fut commissaire pour les communications intérieures du Bas-Canada (12 janvier 1818), commissaire au tribunal des petites causes (13 novembre 1821), membre d’une commission chargée de faire le relevé hydrographique du lac Saint-Louis afin d’en améliorer la navigation (5 juillet 1836) et commissaire pour administrer le serment d’allégeance (21 décembre 1837).

Francis-Joseph Audet*, dans son étude sur les députés de Saint-Maurice, affirme que Mayrand fut « visiteur des écoles » de son comté (4 juillet 1826) : il ne peut s’agir, dans ce cas, que des écoles royales créées par la loi scolaire de 1801, car la loi des écoles de syndics ne fut votée qu’en 1829. D’ailleurs, il existait une école royale à Rivière-du-Loup et il est vraisemblable que Mayrand en ait été nommée visiteur en raison de son prestige social. Ces « visiteurs », selon les règlements de l’Institution royale, devaient faire rapport à la corporation, tous les six mois, du « nombre et des progrès des écoliers, de la conduite du maître, de sa conformité ou non-conformité aux directions de l’Institution, des défauts qui [pouvaient] exister dans les provisions faites pour l’éducation du lieu ou de toute irrégularité dans le mode de les faire appliquer ». Ils devaient aussi « faire un examen formel de l’école [...], ils [avaient] l’autorité de fixer les heures de l’école, le nombre et la durée des vacances et les différents jours de fête qu’il [serait] à propos d’allouer, de régler le taux de la tuition et de nommer les enfants qui [seraient] admis gratis et ceux dont les parents [seraient] obligés de payer, le tout étant sujet à l’approbation de l’Institution ».

Étienne Mayrand mourut à Rivière-du-Loup, à l’âge vénérable de 96 ans. Après le décès de sa seconde épouse, il avait épousé à Montréal, le 30 septembre 1811, Thérèse Heney qui lui donna huit enfants et mourut en 1825. Le 2 août 1827, il épousait en quatrièmes noces, à Québec, Félicité Le Maître-Bellenoix, veuve de Louis Gauvreau. Étienne Mayrand servit loyalement son pays sous quatre souverains, George III, George IV, Guillaume IV et la reine Victoria, pas moins de 19 gouverneurs généraux et 21 lieutenants-gouverneurs. Il connut la constitution de 1791, celle de 1840 et la Confédération canadienne.

Louis-Philippe Audet

AJM, Registre d’état civil (notes biographiques fournies par J.-J. Lefebvre).— Journal de la chambre d’Assemblée du Bas-Canada, 1824, app. Y, Règles et règlements pour les écoles de fondation royale dans la province du Bas-Canada sous la conduite de l’Institution royale.— Desjardins, Guide parlementaire.— Turcotte, Conseil législatif de Québec, 134s.— Audet, Le système scolaire de la province de Québec, IV : 274s.— F.-J. Audet, Les députés de Saint-Maurice, 18081838, et de Champlain, 1830–1838 (« Pages trifluviennes », sér. A, 12, Trois-Rivières, 1934), 45–48 ; Membres du Conseil spécial, BRH, VII (1901) : 82s.— F.-L. Desaulniers, Les députés de Saint-Maurice, BRH, V (1899) : 284s.— É.-Z. Massicotte, La famille de l’honorable Étienne Mayrand, BRH, XXXIII (1927) : 708–712.

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Louis-Philippe Audet, « MAYRAND, ÉTIENNE », dans Dictionnaire biographique du Canada, vol. 10, Université Laval/University of Toronto, 2003– , consulté le 20 nov. 2024, https://www.biographi.ca/fr/bio/mayrand_etienne_10F.html.

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Titre de la publication:    Dictionnaire biographique du Canada, vol. 10
Éditeur:    Université Laval/University of Toronto
Année de la publication:    1972
Année de la révision:    1972
Date de consultation:    20 nov. 2024