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MARSDEN, JOSHUA, ministre méthodiste wesleyen et auteur, né le 21 décembre 1777 à Warrington (Cheshire, Angleterre) ; en 1804, il épousa à Halifax Mary Seabury, et ils eurent au moins huit enfants, dont cinq moururent en bas âge ; décédé le 11 août 1837 à Hoxton (Londres).
Joshua Marsden descendait d’une famille « respectable » et prospère qui fut cependant réduite, à cause de l’ineptie du père, à vivre modestement. Marsden ne reçut donc qu’une instruction ordinaire, qu’il compléta sans doute par de nombreuses lectures, si l’on en juge par l’érudition et la culture manifestées dans ses écrits. Comme beaucoup d’autres prédicateurs évangéliques, il considérait avoir eu une jeunesse particulièrement dissolue : il se rappelait s’être battu avec ses camarades, avoir trompé ses parents, avoir été « odieusement désobéissant » envers sa mère, avoir joué aux cartes et dansé, s’être « enivré avec des spiritueux » et avoir été « très fort pour chanter des chansons grossières ». Il lui était cependant arrivé de « pleurer » sur sa « propre méchanceté » et de conclure que son « cœur renfermait les germes du péché universel ».
En 1796, Marsden s’enrôla dans la marine, en partie pour échapper aux réprimandes et aux adjurations de sa mère. Dans cet « horrible séminaire du vice », il vit « l’impiété dans toutes ses manifestations diaboliques ». Heureusement peut-être, son navire fit naufrage au large d’Alderney, en décembre 1796. Il revint alors sans le sou en Angleterre mais, comme il craignait les détachements de racoleurs, il se joignit à l’équipage d’un navire marchand. À nouveau il frôla la mort et, dès que le navire arriva à quai, il s’esquiva pour retourner chez lui, ayant désormais perdu tout intérêt pour la vie en mer. Comme il s’était réfugié à la campagne pour échapper aux racoleurs, on l’invita un jour à fréquenter les services méthodistes. Les sermons qu’il entendit touchèrent sa conscience, mais à ce moment encore « l’idée d’une piété véritable, faite d’abnégation et de renoncement au plaisir, ne [lui] plaisait pas du tout ». Souvent envahi par la crainte de la damnation, induit en tentation par sa nature perverse, réconforté par le sermon de John Wesley sur la justification par la foi, il lui arrivait de s’effondrer par terre « dans la plus atroce affliction ». Le dimanche de la Pentecôte 1798, inspiré par la prédication de George Marsden, il vit se dissiper en lui « les sombres nuages de l’incroyance » et il se sentit « capable de saisir le Christ par la foi ». À partir de ce moment, il adopta « l’amour de Dieu [...] comme principe souverain, la parole de Dieu comme règle et la gloire de Dieu comme but ».
Après sa conversion, Marsden, rempli d’« un amour ardent pour les âmes », se laissa convaincre d’aller prêcher : on l’engagea sans tarder à titre de prédicateur local dans la circonscription ecclésiastique de Bolton, de la British Methodist Conference. À l’époque, la secte méthodiste, animée par le zèle du révérend Thomas Coke, commençait à établir des missions outre-mer ; Marsden résolut donc de se faire missionnaire itinérant. Ainsi, lorsque William Black* vint en Angleterre, en 1799, pour recruter des ministres capables de remplacer les prédicateurs de l’Église méthodiste épiscopale des États-Unis qui l’avaient aidé à fonder les sociétés méthodistes dans les provinces Maritimes de l’Amérique du Nord britannique, Marsden s’offrit pour devenir missionnaire en Nouvelle-Écosse. À la session de 1800 de la conférence méthodiste, on désigna Marsden, William Bennett* et deux autres à titre de collaborateurs de Black, sous la direction générale de Coke. Ils arrivèrent à Halifax le 4 octobre, et Marsden fut affecté à la circonscription de Cumberland, point de départ de la mission de Black en Nouvelle-Écosse.
L’affectation de Marsden dura jusqu’en 1802, après quoi on l’envoya successivement à Annapolis Royal, à Halifax, à Liverpool et à Saint-Jean, au Nouveau-Brunswick. L’évêque Francis Asbury l’ordonna à la conférence tenue à New York en juin 1802, et la conférence britannique l’admit sans réserve en 1804. Quatre ans plus tard, l’infatigable Coke persuada Marsden d’accepter une nomination aux Bermudes, colonie inhospitalière qui avait emprisonné son premier missionnaire méthodiste. Marsden arriva aux Bermudes au début de mai 1808, après avoir une fois de plus évité le naufrage de justesse ; « pensif et abattu [...], écrivit-il, je trouvais ma seule consolation en Dieu et dans ma bible ».
Là encore, la Providence veilla sur Marsden. Dans cette société fondée sur l’esclavage, il démontra qu’il considérait les Noirs comme des êtres humains, supervisa la construction d’un temple ouvert à tous et créa une école du dimanche pour apprendre la lecture aux Noirs, en trouvant le moyen de museler l’opposition du gouvernement et de la communauté blanche. Au début de son séjour aux Bermudes, on le considéra comme « un imposteur, un exalté ou pire encore » ; à son départ, en 1812, la société méthodiste comptait 136 membres.
L’arrivée de Marsden à New York coïncida avec le début de la guerre de 1812. Comme il ne pouvait se rendre par voie de terre, avec sa famille, en Amérique du Nord britannique, ni partir pour l’Angleterre en bateau, il fut pour ainsi dire interné aux États-Unis. Toutefois, Asbury lui donna une affectation temporaire, sous l’autorité de Freeborn Garrettson*, qui avait auparavant collaboré à l’établissement de la communauté méthodiste des Maritimes. Contrairement à beaucoup de ses compatriotes, Marsden admirait les États-Unis, pays où ne subsistait « presque aucun vestige du papisme, cette superstition jadis trop répandue. En terre de vraie liberté, les conditions doivent toujours retarder la croissance de cette plante vénéneuse. » Il participa à plusieurs assemblées en plein air, « ces formidables sources de grâces », au cours desquelles il était « transporté comme par la force d’un merveilleux torrent ». L’expérience l’amena à conclure que Dieu avait mis « son grand sceau sur ces rites sylvestres ».
Le 23 octobre 1814, Marsden s’embarqua enfin pour l’Angleterre d’où il ne devait plus jamais repartir. Il reçut diverses affectations, à commencer par celle de Plymouth Dock (Plymouth), en 1815. En 1836, en raison de sa santé chancelante, il devint surnuméraire dans la circonscription de First London. Marsden prêcha pour la dernière fois le 30 juillet 1837 dans le fameux temple de City Road : en s’appuyant sur les versets 5 à 8 du chapitre xl du livre d’Isaïe, il souligna alors l’importance de se consacrer à Dieu tôt dans la vie.
Marsden n’était pas un prédicateur exceptionnel et n’atteignit jamais la notoriété chez les méthodistes. Bien qu’il ait manifestement gagné l’estime de ses ouailles et le respect d’Asbury, il ne fut pas un personnage charismatique. Il ne suscita pas de vagues de réveils comme Black et Garrettson. Il se décrivait plutôt ainsi :
Un évêque rural prêchant en tous lieux,
Sous le chêne déployé ou le hêtre majestueux,
Dans les décors sylvestres annonçant le salut
Avec pour temple, les bois, et pour abat-voix, les cieux ;
Ou un prêtre des bois passionné d’absolu,
Portant la lumière jusqu’aux cabanes perdues.
Marsden entretenait des rapports d’amitié avec des hommes en vue comme le lieutenant-colonel Samuel Vetch Bayard et Simeon Perkins*. Il incita les méthodistes de Saint-Jean, malgré la pauvreté ou l’indifférence d’un grand nombre, à construire un nouveau temple, et il participa lui-même aux travaux. Aux yeux de ses coreligionnaires de la Nouvelle-Écosse et du Nouveau-Brunswick, il incarna un méthodisme simple et sans artifice, au sein duquel on ne mettait jamais en question l’identité sociale et culturelle fondamentale des communautés d’Angleterre et d’Amérique du Nord britannique.
À la différence d’un grand nombre de ses confrères, Marsden écrivit beaucoup. Son autobiographie, Grace displayed [...], son récit intitulé The narrative of a mission [...] et ses nombreux poèmes, sans prétendre à la reconnaissance littéraire, sont tout de même passionnants par ce qu’ils révèlent de ses occupations journalières, de ses dispositions et de sa vie spirituelle.
Autant que possible, Joshua Marsden « divisait sa journée en périodes régulières ». Il se levait ordinairement à quatre heures du matin et, jusqu’à huit heures, il méditait et écrivait ; le reste de l’avant-midi était consacré à des visites pastorales. L’après-midi, il lisait et tenait des réunions de classe, et le soir il présidait des services. Les rudes hivers d’Amérique du Nord l’incommodaient beaucoup. Il voyait son madère tourner en sirop, il se réchauffait en avalant des verres de gin et, pour ses déplacements, il s’emmitouflait dans une véritable montagne de vêtements, mais sans grand résultat. Il nota que le Nouveau-Brunswick était « beaucoup plus froid que la Nouvelle-Écosse (pourtant dotée d’un climat suffisamment rigoureux) ». Ses écrits exposent en toute franchise « son monde de misères », conséquence, selon lui, de son impuissance chronique à résister aux tentations et de son goût pour « les livres et les études insolites et agréables ». Il trouvait tout de même un réconfort et un soutien dans sa foi profonde en la Providence, « gloire et héritage de tout missionnaire chrétien fidèle ». Il admettait qu’aux yeux de beaucoup il paraissait présomptueux « d’imaginer que Dieu tout-puissant arrêtera[it] le cours des éléments à la demande d’un misérable ver de terre ». Néanmoins, il était persuadé que Dieu répondait personnellement à ses prières, par exemple en le protégeant des dangers de la mer ou en intervenant efficacement dans toutes les phases critiques de sa vie. Pour lui :
Dieu est constamment à nos côtés,
Bouclier d’or contre les dangers ;
Au bord du Niger ou du Nil
Comme au fond des vastes forêts,
Sur la plus lointaine des îles,
Sa bonté te sourit sans arrêt !
On rapporte qu’en août 1837, à la suite d’une brève maladie, « il ferma les yeux et mourut paisiblement pour vivre » dans l’éternité.
Parmi les écrits de Joshua Marsden, on trouve son autobiographie, Grace displayed : an interesting narrative of the life, conversion, Christian experience, ministry, and missionary labours of Joshua Marsden [...] (New York, 1813 ; 2e éd., 1814) et The narrative of a mission to Nova Scotia, New Brunswick, and the Somers Islands ; with a tour to Lake Ontario [...] (Plymouth-Dock [Plymouth], Angl., 1816 ; réimpr., New York, 1966 ; 2e éd., Londres, 1827). Nous avons consulté la deuxième édition de ces deux ouvrages pour préparer cette biographie. D’autres publications de Marsden, dont plusieurs volumes de poésie, sont recensées dans National union catalog et British Library general catalogue. Une gravure de Marsden paraît dans la seconde édition de Grace displayed.
SOAS, Methodist Missionary Soc. Arch., Wesleyan Methodist Missionary Soc., corr., North America (mfm à l’UCC-C).— Wesleyan Methodist Church, Minutes of the conferences (Londres), 2 (1799–1807)–8 (1836–1839).— G. G. Findlay et W. W. Holdsworth, History of the Wesleyan Methodist Missionary Society (5 vol., Londres, 1921–1924), 1.— G. [S.] French, Parsons & politics : the rôle of the Wesleyan Methodists in Upper Canada and the Maritimes from 1780 to 1855 (Toronto, 1962).— Smith, Hist. of Methodist Church.
Goldwin S. French, « MARSDEN, JOSHUA », dans Dictionnaire biographique du Canada, vol. 7, Université Laval/University of Toronto, 2003– , consulté le 23 déc. 2024, https://www.biographi.ca/fr/bio/marsden_joshua_7F.html.
Permalien: | https://www.biographi.ca/fr/bio/marsden_joshua_7F.html |
Auteur de l'article: | Goldwin S. French |
Titre de l'article: | MARSDEN, JOSHUA |
Titre de la publication: | Dictionnaire biographique du Canada, vol. 7 |
Éditeur: | Université Laval/University of Toronto |
Année de la publication: | 1988 |
Année de la révision: | 1988 |
Date de consultation: | 23 déc. 2024 |