Titre original :  
Photograph of E.F.B. Johnston (Ebenezer Forsyth Blackie Johnston).
Date: [between 1907 and 1918].
Source: Archives of the Law Society of Ontario (https://www.flickr.com/photos/lsuc_archives/4333357032/in/photolist-7AVA5h)

Provenance : Lien

JOHNSTON, EBENEZER FORSYTH BLACKIE, avocat, fonctionnaire et homme d’affaires, né le 20 décembre 1850 à Haddington, Écosse ; le 5 janvier 1886, il épousa à Barrie, Ontario, Sarah Grace Schreiber, et ils eurent une fille ; décédé le 29 janvier 1919 à Toronto.

Ebenezer Forsyth Blackie Johnston fit une partie de ses études en Écosse. Il était encore jeune quand il immigra dans le Haut-Canada ; ses parents étaient probablement James et Agness Johnston, qui s’installèrent dans une ferme du canton d’East Garafraxa. Il poursuivit sa scolarité dans une école publique de ce canton avant d’entrer au Guelph Collegiate Institute. Pendant quelque temps en 1871, il enseigna dans son canton. Au cours de la session de Pâques 1872, il devint membre de la Law Society of Upper Canada à titre d’étudiant en droit à Guelph. Il prêta le serment de solicitor en 1876 et fut reçu au barreau en 1880.

Pendant qu’il pratiquait le droit à Guelph, Johnston, libéral en vue, se vit offrir les postes de procureur général adjoint et de greffier du Conseil exécutif par Oliver Mowat*, premier ministre et procureur général de l’Ontario. Il exerça ces fonctions d’octobre 1885 à 1889, puis démissionna pour se consacrer à sa florissante pratique de droit criminel. Cependant, il serait à nouveau fonctionnaire provincial – en l’occurrence, inspecteur des greffes – de 1891 à 1894. Nommé conseiller de la reine le 4 janvier 1890, il prit l’année suivante un premier associé, George Ross.

Johnston est réputé surtout pour avoir défendu Clara Ford en 1895. Cette couturière mulâtre avait avoué le meurtre d’un jeune et riche Blanc issu d’une famille de notables. Tirant habilement profit de la sympathie du public à l’endroit des accusés de sexe féminin, Johnston convainquit les jurés que sa cliente était une femme simple qui avait été bernée par des détectives implacables et qu’elle méritait leur pitié. Le procès pour meurtre de Harry et Dallas Hyams, en 1895–1896, est également digne de mention. Le contre-interrogatoire auquel Johnston soumit les médecins experts est souvent cité comme l’un des plus remarquables du genre à cette époque. Johnston ne contredit pas carrément les témoins. Il les amena plutôt à évoquer ou à mentionner des éléments qui semblaient anodins, mais dont il se servit ensuite pour présenter une argumentation qui dut paraître irréfutable au jury. Les frères Hyams furent acquittés.

Dans une allocution à l’Ontario Bar Association, Johnston affirmait que, pour réussir un contre-interrogatoire, l’avocat doit empêcher le témoin de le conduire dans une direction imprévue, commencer le contre-interrogatoire en soulevant seulement un point sur lequel il a de bonnes chances de l’emporter et attaquer le témoin en visant l’élément le plus faible dès le début. Selon lui, l’objectif premier n’était pas d’ordre moral. Il ne s’agissait pas, pour l’avocat de la défense, de faire ressortir le vrai et le faux, mais plutôt d’obtenir quelque chose, parfois un simple détail, qui servirait sa cause ou à tout le moins affaiblirait celle de l’adversaire. Johnston était convaincu que l’on ne pouvait pas apprendre à faire de bons contre-interrogatoires et que, pour se hisser à un niveau exceptionnel, il fallait une « intuition géniale ». Il était, dit-on, le « maître du contre-interrogatoire » ; rares étaient les témoins qu’il n’arrivait pas à confondre. D’ailleurs, en 1915, à l’enquête publique sur la construction de l’édifice du Parlement du Manitoba, on l’engagea seulement pour contre-interroger le principal témoin. Ses honoraires étaient trop élevés, peut-on présumer, pour qu’on retienne ses services durant toute l’audience.

Selon Hector Willoughby Charlesworth*, Johnston n’adressait pas directement la parole à un client accusé de meurtre ni à aucun des proches de cet accusé avant le procès. Clara Ford fut peut-être la seule exception. Pour se préparer à plaider, Johnston rassemblait les faits et, « avec la froideur d’un mathématicien », bâtissait une théorie d’innocence sur laquelle il fonderait sa défense, en orientant chaque question vers ce but. Il craignait que rencontrer un client « ne gêne le cheminement impartial de ses pensées ».

Dans les affaires criminelles, le principal adversaire de Johnston était Britton Bath Osler*, qu’il tenait en haute estime et dont il essayait même parfois d’imiter les méthodes. Selon Charlesworth, Johnston « n’avait pas l’autorité ni la distinction d’Osler, et il était moins suave et moins équitable dans ses contre-interrogatoires ». Cependant, il était assez habile pour tourner à son propre avantage la belle réputation d’Osler. Par exemple, en s’adressant au jury, il louait les remarquables qualités de la couronne et réclamait de la compassion pour son client en faisant valoir que lui-même n’avait pas la compétence nécessaire pour obtenir justice.

La dernière grande affaire criminelle dans laquelle Johnston joua un rôle fut celle qui opposa en 1903 Robert Roswell Gamey, député conservateur à l’Assemblée législative de l’Ontario, et James Robert Stratton, secrétaire de la province dans le gouvernement libéral de George William Ross. Gamey accusait Stratton de lui avoir offert de l’argent et d’autres récompenses pour qu’il appuie le gouvernement. Johnston défendit Stratton avec succès dans une enquête publique. Tout au long de sa carrière, il s’intéressa à la politique et entretint d’étroites relations avec le Parti libéral. On dit qu’il refusa plusieurs offres visant son entrée à l’Assemblée.

Avec le temps, Johnston se mêla de plus en plus au monde des affaires, comme bon nombre de ses collègues. Membre du conseil d’administration de la Crown Bank of Canada en 1903, de la Traders Bank of Canada en 1912 et de la Standard Reliance Mortgage Corporation en 1913, il fut aussi vice-président de la Banque royale du Canada de même que président de la Globe Savings and Loan Company en 1900 et président de la Title and Trust Company en 1912.

En même temps, Johnston fut actif dans des organisations juridiques et dans le milieu des arts de Toronto. Président honoraire de l’Association du barreau canadien en 1911–1912, il occupa la vice-présidence de 1915 à 1918. Il fut élu pour la première fois au conseil de la Law Society of Upper Canada en 1911. Fin connaisseur et collectionneur réputé, il écrivit quelques textes sur l’art, fit partie du premier conseil d’administration de la Toronto Guild of Civic Art en 1897, occupa par la suite la vice-présidence de l’Art Museum of Toronto et sollicita des dons pour l’Art Gallery of Toronto. Il collectionnait de la faïence ancienne de Delft et se rendait souvent aux Pays-Bas pour obtenir les meilleures pièces. Sa collection en comptait environ 600.

Ebenezer Forsyth Blackie Johnston mourut à l’âge de 69 ans chez lui, avenue Bernard, à Toronto. Il laissait dans le deuil sa fille et sa femme, qui se dévoua beaucoup pour l’Imperial Order Daughters of the Empire.

J. Kristin Bryson

Les publications d’E. F. B. Johnston comprennent : « The prisoner as a witness », Canada Law Journal (Toronto), 33 (1897) : 666–673 ; J. H. Jurres : an appreciation (Toronto, 1910) ; un essai intitulé « Painting and sculpture in Canada » dans Canada and its provinces ; a history of the Canadian people and their institutions [...], Adam Shortt et A. G. Doughty, édit. (23 vol., Toronto, 1913–1917), 12 : 593–640 ; et « A divorce court for Canada », Saturday Night, 25 avril 1914 :; 2 mai 1914 : 4s. ; 9 mai 1914 : 4. Un autre article intitulé « The art of cross-examination », a été publié dans Criminal Law Quarterly (Aurora, Ontario), 31 (1988–1989) : 22–42. La notice nécrologique de Johnston a paru le 30 janv. 1919 dans des journaux de Toronto : Daily Mail and Empire ; Evening Telegram ; Globe ; News ; Toronto Daily Star ; et World. On mentionne aussi son décès dans le Canada Law Journal, 55 (1919) : 156s. et dans Saturday Night, 8 févr. 1919 :; un hommage rédigé par Hector Willoughby Charlesworth et intitulé « Reflections : the death of E. F. B. Johnston », a paru dans Saturday Night, 15 févr. 1919 : 2.

AN, RG 31, C1, 1871, East Garafraxa Township, Ontario, 2e div. : 13.— AO, RG 18-40 ; RG 22-305, no 37748.— Arch. du Barreau du Haut-Canada (Toronto), 1-1 (Convocation, minutes), 16 : 56–58 ; 1–5 (Convocation, rolls), barrister’s roll, Easter term, 1880 ; common roll, Easter term, 1872 ; 1-7 (Convocation, election of benchers), 15 : 29193 ; « Ontario bar biographical research project ».— EAC, Diocese of Toronto Arch., Trinity Church (Barrie, Ontario), reg. of marriages, 5 janv. 1886.— MTRL, BR, Biog. scrapbooks, 3 : 39 ;: 701–704 ; 16 :140.— Northern Advance (Barrie), 14 janv. 1886.— Annuaire, Toronto, 1870–1920.— Canada Law Journal, 36 (1900) : 321–323 ; 42 (1906) : 169.— Canadian annual rev. (Hopkins), 1903–1904, 1907, 1910, 1912–1913, 1915–1917, 1919.— Canadian men and women of the time (Morgan ; 1898 et 1912).— H. [W.] Charlesworth, Candid chronicles : leaves from the note book of a Canadian journalist (Toronto, 1925) ; More candid chronicles : further leaves from the note book of a Canadian journalist (Toronto, 1928).— Cyclopædia of Canadian biog. (Rose et Charlesworth), 3.— G. T. Denison, Recollections of a police magistrate (Toronto, 1920).— Dominion annual reg., 1885.— A. R. Hassard, Not guilty, and other trials (Toronto, 1926).— Cheryl MacDonald, « The curious case of Olive Sternaman : was it murder ? » Beaver, 71 (1991–1992), no 5 : 32–38.— J. E. Middleton, The municipality of Toronto : a history (3 vol., Toronto et New York, 1923),: 63s.— L. A. Mode, « Art notes : the watercolour collection of E. F. B. Johnston », Saturday Night, 19 oct. 1895 : 9.— Carolyn Strange, « Wounded womanhood and dead men : chivalry and the trials of Clara Ford and Carrie Davies », dans Gender conflicts : new essays in women’s history, Franca Iacovetta et Mariana Valverde, édit. (Toronto, 1992), 149–188.— W. S. Wallace, Murders and mysteries, a Canadian series (Toronto, 1931 ; réimpr., Westport, Conn., 1975).— F. L. Wellman, Gentlemen of the jury ; reminiscences of thirty years at the bar (New York, 1924 ; réimpr., 1937).

Comment écrire la référence bibliographique de cette biographie

J. Kristin Bryson, « JOHNSTON, EBENEZER FORSYTH BLACKIE », dans Dictionnaire biographique du Canada, vol. 14, Université Laval/University of Toronto, 2003– , consulté le 2 déc. 2024, https://www.biographi.ca/fr/bio/johnston_ebenezer_forsyth_blackie_14F.html.

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Auteur de l'article:    J. Kristin Bryson
Titre de l'article:    JOHNSTON, EBENEZER FORSYTH BLACKIE
Titre de la publication:    Dictionnaire biographique du Canada, vol. 14
Éditeur:    Université Laval/University of Toronto
Année de la publication:    1998
Année de la révision:    1998
Date de consultation:    2 déc. 2024