DE SMET, PIERRE-JEAN, prêtre, missionnaire jésuite, né le 30 janvier 1801 à Termonde dans le diocèse de Gand en Belgique, cinquième enfant et second fils de Josse De Smet et de sa deuxième femme, Marie-Jeanne Buydens, décédé le 23 mai 1873 à St Louis dans le Missouri.

Le père de Pierre-Jean De Smet, qui était fournisseur, avait un commerce très prospère. De Smet reçut son instruction à la maison paternelle puis dans différents collèges. À l’âge de 19 ans, il entra au petit séminaire de Malines et, au mois d’août 1821, il partit pour les États-Unis pour y faire son noviciat à White Marsh, maison des jésuites près de Baltimore. Il y demeura 18 mois et fut ensuite envoyé à Florissant, au nord de St Louis dans le Missouri, où il fut ordonné prêtre le 23 septembre 1827. Préfet dans une école pour jeunes Amérindiens, St Regis Seminary, de 1824 à 1830, il put se familiariser avec les mœurs et coutumes amérindiennes avant d’être nommé économe du collège de St Louis (aujourd’hui St Louis University).

Le père De Smet souffrait depuis plusieurs années déjà d’une infection de la peau qui l’incommodait beaucoup et les médecins de l’endroit lui conseillèrent d’aller passer quelque temps dans son pays. Il partit donc pour la Belgique en septembre 1833 et ne revint à St Louis qu’en novembre 1837. C’est pendant ce séjour en Belgique qu’il découvrit sa véritable mission : recruter des hommes, des secours matériels et de l’argent pour la mission du Missouri. Peu après son retour aux États-Unis, il fut nommé missionnaire chez les Potéouatamis à Council Bluffs, Iowa. Il se rendit aussi chez les Sioux de la tribu des Yanktons et de celle des Santees pour tenter de négocier la paix entre ces tribus.

Au mois de février 1840, le père De Smet revint de Council Bluffs à St Louis puis, du 30 avril au 31 décembre de la même année, il fit son premier voyage vers les montagnes Rocheuses afin d’explorer le pays c’est-à-dire d’étudier les possibilités d’établir des missions chez les Amérindiens de cette région, principalement chez les Têtes-Plates. Il avait conçu le projet, bien chimérique, de fonder une réduction semblable à celles que les jésuites avaient établies au Paraguay au xviie siècle, une mission où l’homme blanc ne pénétrerait jamais. En 1841, accompagné de deux autres pères et de trois frères, il atteignit la vallée de la Bitterroot où il fonda la mission Sainte-Marie (Stevensville, Montana), à 35 milles au sud de l’actuel Missoula. Au printemps suivant, il visita les premiers missionnaires catholiques du fort Vancouver (Vancouver, Washington), les pères François-Norbert Blanchet et Modeste Demers, pour préparer avec eux l’évangélisation du pays de l’Oregon. Comme il fallait du personnel et du matériel, ils décidèrent que De Smet retournerait vers les états du centre afin d’y obtenir l’autorisation d’aller en Europe solliciter l’aide nécessaire. Il traversa donc une autre fois l’Atlantique avant la fin de l’année et regagna ensuite la côte nord-ouest du Pacifique en passant par le cap Horn pour atteindre le fleuve Columbia le 31 juillet 1844. Il amenait cinq jésuites et un groupe de religieuses de Notre-Dame de Namur. Le père De Smet consacra les 12 mois suivants à fonder de nouvelles missions et à visiter la mission Sainte-Marie. Convaincu cependant que l’existence même de ces missions reposait sur une paix durable entre les Têtes-Plates et leurs ennemis jurés, les Pieds-Noirs, il résolut de visiter la région de ces derniers.

Au mois d’août 1845, il entreprit donc l’important voyage qui devait le conduire jusque dans les territoires de la Hudson’s Bay Company. De la pointe nord du lac Pend d’Oreille, il se rendit par voie de terre dans la vallée de la rivière Kootenay, qu’il suivit jusqu’à la « haute traverse » d’où il atteignit la source du fleuve Columbia. Il descendit ensuite dans la vallée, traversa le col de Sinclair, franchit à nouveau la Kootenay et, empruntant le col du White Man, il atteignit la vallée de la rivière Bow, non loin de l’endroit où s’élève aujourd’hui Canmore, en Alberta. De là, il se dirigea vers le nord et arriva à Rocky Mountain House le 4 octobre. Il y demeura jusqu’à la fin du mois et rencontra des bandes de Cris, de Sauteux et de Pieds-Noirs. Il repartit ensuite à la recherche d’autres bandes de Pieds-Noirs, erra pendant des jours sans succès – à l’est, semble-t-il, de la région qu’il venait de traverser – mais put heureusement regagner Rocky Mountain House. De là on le conduisit au fort Edmonton où il passa l’hiver de 1845–1846 à titre d’invité de la Hudson’s Bay Company. Ces longues pérégrinations dans les régions sauvages constituent le lien important qui unit le père De Smet à l’histoire du Canada. Il n’avait toutefois pas réussi à atteindre son but puisqu’il n’avait rencontré qu’une seule petite bande de Pieds-Noirs.

Au printemps suivant, le père De Smet et des compagnons en suivant le sentier tracé par la compagnie et en passant par la rivière Saskatchewan-Nord atteignirent Jasper House où ils passèrent le jour de Pâques, le 12 avril 1846. De là, ils empruntèrent la rivière Wood pour finalement rejoindre le fleuve Columbia après avoir enduré d’atroces souffrances. Trois semaines plus tard, le 29 mai, ils arrivèrent au fort Colvile (près de l’actuel Kettle Falls, Washington) et, avant la fin du mois de juin, ils étaient au fort Vancouver. Le père De Smet fit une rapide visite des établissements religieux le long de la rivière Willamette et remonta ensuite vers les terres hautes avec des approvisionnements pour les missions de cette région. Le ou vers le 8 août, il était de retour à Sainte-Marie sur la Bitterroot, la première mission qu’il avait fondée. Il retourna ensuite à St Louis. Ces longs voyages des années 1845 et 1846 eurent lieu approximativement à la même époque et dans les mêmes régions que les voyages du peintre Paul Kane qui était à la recherche des Amérindiens de l’Ouest (De Smet fit lui-même des croquis en cours de route).

L’œuvre missionnaire du père De Smet dans les régions des Rocheuses était terminée. Pendant les dernières années de sa vie, il fit plusieurs voyages en Europe (en fait il traversa l’Atlantique 19 fois) et, bien qu’il eût quitté les missions, il s’en occupait encore énormément. Entre 1851 et 1870, il visita plusieurs fois les territoires du haut Missouri pour le compte du gouvernement américain. Le père De Smet connut peut-être le plus beau moment de sa vie en 1868 quand, accompagné uniquement d’un interprète, de quelques chefs amis et de quelques braves, il entra dans le camp de Sitting Bull [Ta-tanka I-yotank*] et le persuada d’accepter le traité de Fort Rice qu’un observateur jugeait « le plus complet et le plus sage qui ait été conclu jusque-là avec les Indiens de ce pays ». De Smet se rendit une dernière fois chez les Sioux en 1870. Il mourut trois ans plus tard et fut inhumé à Florissant où, 50 ans plus tôt, il avait terminé son noviciat.

Wm. L. Davis

Les fonds d’archives suivants contiennent les papiers De Smet : Archives générales de la Compagnie de Jésus (Rome). ASJ, Province belge du nord (Bruxelles), Papiers De Smet. ASJ, Missouri Province (St Louis University), Pius XII Library, Desmetiana section. Holland Library (Washington State University, Pullman), De Smet family papers.

Même s’il n’existe aucune bibliographie complète dans une même étude des œuvres publiées de De Smet, on trouve d’utiles références dans : Bibliographie nationale : dictionnaire des écrivains belges et catalogue de leurs publications, 1830–1880 (4 vol., Bruxelles, 1886–1910), I : 536s. ; Bibliothèque de la Compagnie de Jésus. Première partie. Bibliographie, par les pères Augustin et Aloys de Backer. Seconde partie. Histoire, par Auguste Carayon, Carlos Sommervogel, édit. (11 vol., Bruxelles et Paris, 1890–1932), VII : 1 307–1 310. Il n’existe que deux biographies, imparfaites, de De Smet : [P.-J. De Smet], Life, letters and travels of Father Pierre-Jean De Smet, s.j., 1801–1873 [...], H. M. Chittenden et A. T. Richardson, édit. (4 vol., New York, 1905) ; Eugène Laveille, Le P. De Smet (1801–1873) (1re éd., Liège et Arras, 1912 ; 2e éd., Liège et Lille, 1913). Dans la première citée, on trouve, en regard de la page 150, un portrait du jeune De Smet ; un autre, peint après qu’il fut reçu chevalier de l’ordre de Léopold le 18 juin 1865, est introduit vis-à-vis de la page 839. De Smet a lui-même préparé la carte la plus précise de ses voyages en Alberta et en Colombie-Britannique ; elle a été reproduite dans Missions de l’Orégon et voyages aux montagnes Rocheuses aux sources de la Colombie, de l’Athabasca et du Sascatshawin en 1845–1846 (Gand, [1848]).  [w. l. d.]

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Wm. L. Davis, « DE SMET, PIERRE-JEAN », dans Dictionnaire biographique du Canada, vol. 10, Université Laval/University of Toronto, 2003– , consulté le 20 déc. 2024, https://www.biographi.ca/fr/bio/de_smet_pierre_jean_10F.html.

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Auteur de l'article:    Wm. L. Davis
Titre de l'article:    DE SMET, PIERRE-JEAN
Titre de la publication:    Dictionnaire biographique du Canada, vol. 10
Éditeur:    Université Laval/University of Toronto
Année de la publication:    1972
Année de la révision:    2013
Date de consultation:    20 déc. 2024