CLINCH, JOHN, médecin, ministre de l’Église d’Angleterre, fonctionnaire et juge, né le 9 janvier 1748/1749 à Cirencester, Angleterre, fils jumeau de Thomas Clinch, de Bere Regis, Angleterre ; le 17 juin 1784, il épousa Hannah Hart, d’English Harbour, Terre-Neuve, et ils eurent sept fils et une fille ; décédé le 22 novembre 1819 à Trinity, Terre-Neuve.

John Clinch fréquenta l’école à Cirencester avec Edward Jenner, qui devait plus tard découvrir la vaccination, et tous deux se rendirent à Londres pour y étudier la médecine sous la direction de John Hunter, anatomiste et chirurgien de renom. Clinch, par la suite, pratiqua la médecine dans le Dorset, où il obtint des renseignements sur Terre-Neuve de la bouche de Benjamin Lester, marchand à Poole et à Trinity. Il ouvrit aussi une école du dimanche sur le modèle de celle de Robert Raikes, qu’il avait rencontré à Gloucester. D’orientation évangélique par conviction, il ne tenait pas compte des différences entre les diverses dénominations religieuses et amenait les enfants célébrer le culte dans une chapelle congrégationaliste de Poole.

En 1775, Clinch partit pour Bonavista, à Terre-Neuve, où il vécut de la médecine ; il était aussi prédicateur laïque à l’église anglicane. Huit ans plus tard, il alla se fixer à Trinity et, l’année suivante, s’y maria. Inquiet du « déclin de la vraie religion et du succès du papisme », il organisa, en l’absence d’un ministre, un culte public, prononça des sermons et présida aux mariages, baptêmes et sépultures. En 1784, les habitants adressèrent une requête à la Society for the Propagation of the Gospel in Foreign Parts, demandant qu’il fût nommé missionnaire ; Clinch, pour sa part, demanda à la société de le nommer sans qu’il eût à se rendre en Angleterre pour y recevoir les ordres. La Society for the Propagation of the Gospel insista, néanmoins, et, une fois les enquêtes faites sur sa vie et ses mœurs, et sur la foi d’une recommandation personnelle de Richard Routh, receveur des douanes de Terre-Neuve, on l’ordonna en Angleterre et on le nomma missionnaire à la baie de la Trinité en 1787.

Pendant sa carrière de 32 ans comme missionnaire, Clinch se plaignit constamment de manquer de soutien financier. En 1789, il ne put recueillir que £24 pour la réparation de l’église, et, trois ans plus tard, il dut la réparer à ses propres frais. En 1815, l’édifice croulait littéralement et, même en tenant compte d’un don de £100 provenant de la Society for the Propagation of the Gospel, il ne put amasser suffisamment d’argent pour construire une nouvelle église. Ses paroissiens étaient pauvres, et certains devaient parfois traverser en Angleterre pour solliciter des secours de leurs paroisses d’origine. Le coût de la vie connut une hausse vertigineuse en 1805, à cause de la guerre contre l’Espagne, et de nouveau en 1809, par suite de la remise en vigueur de l’embargo américain sur les produits britanniques. Le typhus se répandit, il y eut des épidémies de petite vérole, et, en 1799, puis de nouveau en 1804, une « fièvre inflammatoire [...] sévit avec violence ». L’Église d’Angleterre, peu à peu, perdit ses appuis à la baie, en faveur des méthodistes. En 1794, un prédicateur méthodiste, George Smith, visita Trinity ; l’année suivante, il avait persuadé certaines personnes de Bonavista de solliciter, dans une requête, sa nomination comme missionnaire de la Society for the Propagation of the Gospel. Cette tentative échoua, mais, en 1810, William Ward, ministre méthodiste d’Angleterre, était installé à Trinity, où il rivalisait avec Clinch. Ce dernier se plaignait amèrement que la baie de la Trinité, qui, peu d’années auparavant, était un fief de l’Église d’Angleterre, fût « devenue une pépinière pour de fanatiques prédicateurs itinérants ».

N’eût-il été que missionnaire, Clinch aurait pu obtenir plus de succès comme évangéliste. Mais, dans les conditions où il se trouvait, il devait assumer une multitude de fonctions. En 1799, il était devenu juge du tribunal de surrogate de Terre-Neuve (et, comme tel, il touchait un salaire) ; en d’autres temps, il fut magistrat, arpenteur et receveur des douanes. Franc-maçon actif - il avait été initié dans la Poole Lodge of Amity No. 137 en 1780 –, il fut en 1816 l’un des fondateurs et premier maître de l’Union Lodge No. 6981 de Trinity. Clinch trouva encore le temps de préparer un glossaire de 112 mots béothuks, dont beaucoup étaient inconnus jusqu’alors.

Mais Clinch concentra le gros de ses énergies au soin des malades. En 1798, il procéda à ce qui semble l’une des premières vaccinations dans le Nouveau Monde, sur la personne du neveu de sa femme, Joseph Hart. Son vieil ami Jenner lui avait parlé de ce nouveau procédé et lui avait même envoyé des filets de vaccin. Avec ceux-ci, auxquels s’en ajoutèrent d’autres que lui fournissait le neveu de Jenner, George Charles Jenner, missionnaire de la Society for the Propagation of the Gospel à Harbour Grace, Clinch fut bientôt assez occupé. En janvier 1802, il écrivait à Jenner : « je commençai par vacciner mes enfants et poursuivis ce travail salutaire jusqu’à ce que j’eusse vacciné 700 personnes de tout âge et condition ; beaucoup d’occasions se sont présentées à St John’s (où la petite vérole faisait de grands ravages), et ces occasions donnèrent une preuve convaincante de la sûreté de ce procédé aux habitants et aux travailleurs des pêcheries de la baie de la Trinité ; ils virent (d’abord avec étonnement) que ceux qui s’étaient soumis au vaccin de Jenner se trouvèrent vaccinés contre la petite vérole et exposés à l’infection sans en subir le moindre inconvénient ». Encouragée par le gouverneur Charles Morice Pole et adoptée avec enthousiasme par le docteur John McCurdy, de St John’s, la pratique de la vaccination s’étendit jusqu’à Ferryland, Placentia et Halifax.

Clinch avait une nombreuse famille, et il aimait blaguer dans ses lettres à la Society for the Propagation of the Gospel au sujet de l’arrivée, chaque année, d’un nouvel enfant. Ses trois premiers fils étaient mentalement retardés ; le quatrième, John, devint médecin après avoir fait son apprentissage auprès d’un chirurgien et apothicaire de Cirencester ; le cadet, Joseph Hart, entré dans le clergé anglican à Boston, acquit de la renommée pour sa connaissance poussée de l’hébreu. Mary Elizabeth, sa seule fille, se maria en 1823 à William Bullock*, successeur de Clinch à la mission de Trinity. Quant à Clinch lui-même, il mourut d’une attaque d’apoplexie, après une longue maladie.

Missionnaire, John Clinch obtint peu de succès, et ses efforts d’évangélisation, peut-être à bon droit, sont complètement passés sous silence par les historiens. Comme médecin, toutefois, il pourrait prétendre non sans raison avoir été le premier Canadien à utiliser le vaccin.

Frederick Jones

Dorset Record Office, D365/F7–F8.— USPG, C/CAN/Nfl., 1 ; Journal of SPG, 26–32.— William Densham et Joseph Ogle, The story of the Congregational churches of Dorset, from their foundation to the present time ([Bournemouth, Angl., 1899]).— H. P. Smith, History of the Lodge of Amity No137, Poole (Poole, Angl., 1937).— J. W. Davies, « A historical note on the Reverend John Clinch, first Canadian vaccinator », Canadian Medical Assoc., Journal (Toronto), 102 (1970) : 957–961.

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Frederick Jones, « CLINCH, JOHN », dans Dictionnaire biographique du Canada, vol. 5, Université Laval/University of Toronto, 2003– , consulté le 23 déc. 2024, https://www.biographi.ca/fr/bio/clinch_john_5F.html.

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Auteur de l'article:    Frederick Jones
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Titre de la publication:    Dictionnaire biographique du Canada, vol. 5
Éditeur:    Université Laval/University of Toronto
Année de la publication:    1983
Année de la révision:    1983
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