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CHRISTIE, WILLIAM MELLIS, boulanger et fabricant de biscuits, né le 5 janvier 1829 à Huntly, Écosse, enfant unique de John Christie et de Jane Grant ; le 21 mars 1855, il épousa Mary Jane McMullen, et ils eurent sept enfants dont quatre vécurent jusqu’à l’âge adulte ; décédé le 14 juin 1900 à Toronto.
William Mellis Christie fit ses premières classes à l’école paroissiale de Forglen, à une trentaine de milles de son lieu de naissance, et en novembre 1843, à l’âge de 14 ans, il entra en apprentissage chez un boulanger de Turriff, non loin de là. Il termina sa formation en 1847 et, jugeant que les perspectives économiques de l’Écosse étaient trop limitées, il immigra au Canada l’année suivante. En septembre 1848, il travaillait comme boulanger chez William McConnell, à Toronto. La boutique était située rue Yonge, à la limite nord de la ville, et Christie, pour quatre dollars par mois en plus de la nourriture et du logement, cuisait le pain pendant la nuit et allait le livrer en charrette à bras aux clients de l’agglomération voisine de Yorkville (Toronto). Vers 1850, il trouva un emploi à la boulangerie d’Alexander Mathers et d’Alexander Brown, également située à l’extrémité nord de la rue Yonge, qu’il reprit en 1853 avec George Maver. Christie essuya quelques revers financiers l’année suivante mais, en 1856, il avait assez bien rétabli sa situation pour désintéresser son associé, acheter la boutique et embaucher trois aides.
Christie commença à se tailler une réputation dans la biscuiterie quand l’Agricultural Association of Upper Canada, qui tint son exposition à Toronto en 1858, lui accorda le prix du meilleur assortiment de biscuits. Deux ans plus tard, Christie s’associait à son beau-père, James McMullen, et décidait de s’adonner exclusivement à la fabrication de biscuits. L’entreprise, qui comptait six hommes, produisait à la main plus de 4 300 boîtes de biscuits par an, et son chiffre d’affaires atteignait quelque 13 000 $. Vers 1864, Christie commença à approvisionner surtout les grossistes.
L’augmentation rapide de la demande tout au long des années 1860 força Christie à se tourner vers son ancien employeur, Alexander Brown, pour obtenir des capitaux. Les deux hommes s’associèrent en 1868 sous la raison sociale de Christie, Brown and Company et, à la fin de l’année, installèrent des machines à vapeur dans la biscuiterie agrandie de la rue Yonge. Deux ans plus tard, le nombre d’employés avait doublé – ils étaient alors 12 – et les ventes, quadruplé. Après un déménagement au cœur de la ville en 1872, et un autre à une adresse voisine vers la fin de 1874, l’entreprise prit encore de l’expansion et finit par occuper tout un quadrilatère à l’angle des rues Duke (Adélaide) et Frederick. Christie acheta la part de son associé en février 1878 mais conserva le nom de Christie, Brown and Company ; il demeura jusqu’à sa mort le seul propriétaire de l’entreprise.
En 1876, Christie s’était rendu à l’Exposition universelle de Philadelphie présenter ses échantillons de biscuits et en était revenu avec des médailles d’argent et de bronze. Il fit imprimer des illustrations de ces récompenses sur ses emballages et, encouragé par ce succès, entreprit lui-même de faire connaître ses produits dans d’autres foires internationales, au Canada et à l’étranger. L’entreprise, qui avait ouvert un bureau de ventes à Montréal en 1880, vit son personnel passer de 120 au milieu des années 1880 à 375 une quinzaine d’années plus tard. Christie n’eut qu’une seule véritable concurrente à Toronto durant les 30 dernières années du xixe siècle, la pâtisserie de William Hessin, et il l’avait dépassée en taille pendant les années 1870. En 1890, à Toronto, environ le cinquième des travailleurs de la boulangerie, c’est-à-dire les deux tiers de ceux de la biscuiterie, étaient au service de Christie. Dès la fin des années 1880, bien des gens considéraient la compagnie comme la plus grande entreprise du genre au Canada. Au dire de tous, Christie s’assurait lui-même de la qualité des produits que son entreprise vendait. Elle offrait plus de 400 variétés de gâteaux et de biscuits et comptait des clients dans tous les coins du pays, mais semble avoir fait peu d’exportation du vivant de son fondateur. Durant plusieurs années cependant, comme le nota le Toronto World en 1900, la biscuiterie anglaise Huntley and Palmers avait eu une « entente permanente » avec Christie « pour l’utilisation des nombreux perfectionnements » que ce dernier apportait « à la fabrication des biscuits ». On peut lire dans ce journal que « Christie jou[ait] avec les recettes et les machines pendant des semaines jusqu’à ce qu’il obtienne la forme, le goût et l’apparence qu’il cherch[ait] pour son produit ». En juin 1899, la Christie, Brown and Company se constitua en société par actions – mesure destinée en partie à faciliter la disposition des biens de son propriétaire après sa mort –, et Christie lui-même conserva les 5 000 actions.
Jusqu’en 1870, Christie s’était toujours logé à l’étroit avec sa famille et ses pensionnaires à l’étage de la boutique de la rue Yonge. Comme la prospérité de son entreprise lui procurait une certaine aisance, il alla vivre dans des maisons de plus en plus grandes et mieux aménagées. En 1881, il s’installa avec sa famille dans l’hôtel particulier qu’il avait fait construire dans le chic quartier de Queen’s Park. Sa réussite phénoménale lui assura une place parmi les hommes d’affaires et les leaders politiques de Toronto, et il se lia avec son confrère libéral Oliver Mowat*. En 1879, Christie prit part à la fondation de l’Industrial Exhibition Association et il serait durant nombre d’années président de son comité hippique. Il fut membre du conseil du Board of Trade de Toronto de 1883 jusqu’à sa mort, devint administrateur de la University of Toronto en 1887 et entra dans la Canadian Manufacturers’ Association en 1891. Pendant les 20 dernières années de sa vie, Christie prit goût aux voyages et parcourut le Canada, les États-Unis, la Grande-Bretagne et l’Europe. D’une générosité discrète envers les œuvres de bienfaisance, il partagea le temps que lui laissaient ses affaires et ses voyages entre le jardinage et la lecture. Homme taciturne, c’était un impérialiste loyal et un fervent presbytérien, et il demeura toujours sceptique à l’égard du syndicalisme.
Christie se rendit en Écosse, dans son village natal, au cours de l’été de 1899. Peu après son retour au Canada, une tumeur maligne au cou fit son apparition. Le cancer proliféra rapidement et il s’éteignit à sa résidence de Queen’s Park le 14 juin 1900. La Christie, Brown and Company, évaluée à 500 000 $, revint à son unique fils, Robert Jaffray Christie. La famille la vendit à la fin des années 1920, et une société américaine, Nabisco Brands Limited, continue à l’exploiter sous son nom d’origine.
De la fabrication artisanale dans une petite boutique à la division du travail dans une grande entreprise mécanisée, William Mellis Christie réussit la transition entre deux ères de l’histoire économique du Canada. Doué pour la mécanique, toujours soucieux de la qualité de ses produits, il mit sur le marché des biscuits d’une vente facile. Fin publicitaire, il sut faire de Christie un nom qui fut sur toutes les lèvres à son époque.
AN, RG 31, C1, 1861, 1871, Toronto.— AO, MU 2181, corr., 1898–1899 ; MU 7728, no 1 ; RG 55, partnership records, York County, Toronto, nos 235, 1703.— Arch. privées, Helen Christie (Toronto), Christie family papers and letters.— CTA, RG 1, A, 19, 26 oct. 1868, 29 juill. 1872, 19 août 1874 ; RG 5, F, 1848–1871.— York County Surrogate Court (Toronto), no 14104 (mfm aux AO).— Canadian Grocer (Toronto), 22 juin 1900.— Canadian Manufacturer (Toronto), 3 août 1888 : 76.— W. F. Munro, Diary of the Christie party’s trip to the Pacific coast (Toronto, [1897] ; 2e éd., [1897]).— Daily Mail and Empire, 15 juin 1900.— Evening Telegram (Toronto), 14 juin 1900.— Globe, 5 avril 1893, 15 juin 1900.— Toronto Daily Star, 14 juin 1900.— Toronto World, 15 juin 1900.— Commemorative biog. record, County York, 47–48.— Cyclopædia of Canadian biog. (Rose et Charlesworth), 1.— Toronto directory, 1850–1873.— Globe, 14 juin 1926.— Hist. of Toronto, 1 : 376–377.— Illustrated Toronto, past and present, being an historical and descriptive guide-book [...], J. Timperlake, compil. (Toronto, 1877), 276–278.— Industries of Canada : historical and commercial sketches of Toronto and environs [...] (Toronto, 1886), 199.— Special number of the Dominion Illustrated devoted to Toronto, the commercial metropolis of Ontario (Montréal, 1892), 53.— Toronto, Board of Trade, « A souvenir », 184.
Dean Beeby, « CHRISTIE, WILLIAM MELLIS », dans Dictionnaire biographique du Canada, vol. 12, Université Laval/University of Toronto, 2003– , consulté le 21 déc. 2024, https://www.biographi.ca/fr/bio/christie_william_mellis_12F.html.
Permalien: | https://www.biographi.ca/fr/bio/christie_william_mellis_12F.html |
Auteur de l'article: | Dean Beeby |
Titre de l'article: | CHRISTIE, WILLIAM MELLIS |
Titre de la publication: | Dictionnaire biographique du Canada, vol. 12 |
Éditeur: | Université Laval/University of Toronto |
Année de la publication: | 1990 |
Année de la révision: | 1990 |
Date de consultation: | 21 déc. 2024 |