BOUCHER, PIERRE-JÉRÔME, dessinateur, cartographe, ingénieur, né en Normandie, France, vers 1688, décédé à Louisbourg, île Royale (île du Cap-Breton), le 3 juillet 1753.
Après trois ans d’apprentissage à Rochefort en France (1709–1712), Boucher, qui était enseigne de vaisseau, servit en qualité de dessinateur et de cartographe sur le Vénus qui croisait dans les eaux des Indes. De retour en France, c’est à Louisbourg qu’on l’affecta en 1717 en qualité de dessinateur sous les ordres de Jean-François de Verville*, directeur des fortifications. Il aida à faire un plan en relief de Louisbourg. En 1720, il fut promu sous-ingénieur, puis lieutenant en 1721. Tout le temps que Verville fut en poste, Boucher dirigea une partie des travaux de construction et, chaque année, de novembre à l’ouverture de la saison des travaux, il travaillait avec Jean-Baptiste de Couagne* aux plans et aux préparatifs. Après la nomination d’Étienne Verrier à la charge d’ingénieur en chef, Boucher vit augmenter ses responsabilités pour ce qui était du tracé des plans, de l’arpentage et de l’estimation des coûts ; de plus, il dressa de nombreuses cartes du littoral et de l’intérieur des terres de l’île Royale et initia à cet art Claude-Étienne, le fils de Verrier. À l’intention du gouverneur et du commissaire ordonnateur, il prépara des estimés pour la construction de routes et de ponts. En 1740, à la mort de Couagne, il fut promu capitaine en demi-solde. On le recommanda une première fois pour la croix de Saint-Louis en 1741 et on la lui accorda finalement en 1747.
Boucher participa à la défense de Louisbourg lors du siège de 1745 et il y fut légèrement blessé ; il fit partie du conseil de guerre qui décida de capituler devant les forces anglo-américaines. Il passa 18 mois en Angleterre comme prisonnier de guerre puis il fut rapatrié à Rochefort où il aida à la reddition des comptes pour les fortifications de Louisbourg et signa le rapport à titre d’ingénieur responsable. Le ministre de la Marine, Maurepas, ne donna pas suite à son idée d’envoyer Boucher au Canada pour y travailler sous les ordres de Gaspard-Joseph Chaussegros de Léry ; plutôt, en 1748, il lui confia la direction de travaux déjà en cours en Vendée, aux Sables d’Olonne, sur la côte poitevine, et ensuite au port de Croix-de-Vie. Quelques mois plus tard, il fut décidé que Boucher se joindrait au contingent qui, en 1749, allait reprendre possession de Louisbourg, vu qu’il était, parmi les ingénieurs disponibles, celui qui était le mieux en mesure d’évaluer l’ampleur des travaux requis pour remettre Louisbourg en état de défense. Pendant un an, à titre d’ingénieur responsable, il prépara des rapports détaillés sur l’état des fortifications et des bâtiments publics, y compris ceux que les armées anglaises et américaines avaient construits ou modifiés au cours des quatre années d’occupation, et il dressa un estimé minutieux des travaux nécessaires. En 1750, Louis Franquet fut envoyé à Louisbourg et il devint le supérieur hiérarchique de Boucher, lequel continua à travailler sous ses ordres avec, toutefois, une autonomie considérable, particulièrement pendant les voyages que Franquet effectua en France et au Canada.
À quelques reprises, au cours des 32 années qu’il passa à Louisbourg, on accorda à Boucher des congés pour rentrer en France et régler des affaires de famille. En 1749, il n’avait pas ramené sa femme et ses enfants à Louisbourg, et ils étaient sa principale préoccupation. Au cours de l’hiver 1732–1733 – il avait alors environ 45 ans – il avait épousé à Port Dauphin (Englishtown, N.-É.) Marguerite-Madeleine de Goutin (fille de Mathieu* et sœur de François-Marie de Goutin), qu’on disait une personne de mérite mais de peu de biens. Elle lui apporta en dot deux terrains dans la ville de Louisbourg, qu’il réunit aux terrains adjacents déjà en sa possession ; il détenait également une concession à Petit Lorembec (Little Lorraine, N.-É.) qui fut le théâtre d’une petite bataille au cours du siège de 1745. Après la mort de sa femme (survenue apparemment en France après 1750), Boucher dut prendre des dispositions pour assurer l’avenir de ses quatre enfants, sa propre santé étant maintenant défaillante. Cloué au lit pendant quatre mois par la goutte et une pénible maladie dorsale, il fit son testament le 8 juin 1753. La paralysie le gagna et il mourut moins d’un mois plus tard. Des tuteurs furent nommés et, conformément aux modalités de son testament, ses biens meubles furent vendus au bénéfice de ses héritiers. Ces biens étaient de peu de valeur : l’article le plus important consistait en une réserve de farine évaluée à 97 ». La disposition de ses biens immobiliers était également prévue par son testament.
Boucher est l’ingénieur qui fut en service à Louisbourg pendant la plus longue période ininterrompue. De tous ses supérieurs hiérarchiques, seul Saint-Ovide [Monbeton] trouva à redire à son sujet ; il écrivit qu’il était une « Créature à M. Verville » et qu’il continuait à suivre la ligne de conduite de ce dernier, même après qu’il fut parti. Verrier ne pouvait imaginer meilleur maître pour former son fils à la cartographie et il le recommanda hautement pour la croix de Saint-Louis. Léry avait été enchanté à la perspective de l’avoir avec lui au Canada. Jacques Prévost* de La Croix, commissaire ordonnateur, écrivit qu’après sa mort Boucher serait difficilement remplaçable, ce à quoi Franquet ajouta qu’il y avait peu d’ingénieurs capables de lever des plans et de les dessiner avec autant d’exactitude.
Boucher fut non seulement l’auteur d’excellentes cartes de l’île Royale, de plans et de documents techniques touchant les fortifications, les routes, les ponts et les bâtiments publics, mais c’est aussi lui qui dessina bon nombre d’autres plans qui portent comme signature Verville, Verrier ou Franquet. C’est à Boucher que revient une part appréciable du mérite de l’élaboration des plans de Louisbourg et de l’exécution des travaux publics ; il a contribué aussi dans une large mesure au développement de l’île Royale sous le régime français.
AN, Col., B, 52, 53, 54, 57, 65, 66, 68, 74, 91, 95, 97 ; Col., C11A, 126, pièce 62 ; Col., C11B, 6–23 ; Col., C11C, 13, 16 ; Col., D2C, 222/1 ; Col., D2D, 1 ; Col., E, 43 ; Col., F1A, 19, 20, 28, 30 ; Col., F3, 50, ff.321–322 ; Marine, C7, 39 ; Section Outre-Mer, Dépôt des fortifications des colonies, Am. sept., nos 208, 223, 224 ; Section Outre-Mer G1, 406 ; 407 ; 408 ; 466, no 69 Section Outre-Mer, G2, 181, f.522 ; 202, dossier 287 Section Outre-Mer, G3, 2 039, 2 047.— APC, Map div., H3/201, H3/239, M/210, M/310 ; MG11, Nova Scotia A, 34, pp. 156–165.— BN, Cartes et plans, Portefeuille 131, div. 6, no 6 ; div.7, no 5.— CTG, Bibliothèque,
F. J. Thorpe, « BOUCHER, PIERRE-JÉRÔME », dans Dictionnaire biographique du Canada, vol. 3, Université Laval/University of Toronto, 2003– , consulté le 20 nov. 2024, https://www.biographi.ca/fr/bio/boucher_pierre_jerome_3F.html.
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Auteur de l'article: | F. J. Thorpe |
Titre de l'article: | BOUCHER, PIERRE-JÉRÔME |
Titre de la publication: | Dictionnaire biographique du Canada, vol. 3 |
Éditeur: | Université Laval/University of Toronto |
Année de la publication: | 1974 |
Année de la révision: | 1974 |
Date de consultation: | 20 nov. 2024 |