SÉNÉCAL, JOSEPH-AZARIE, architecte et entrepreneur, né le 14 novembre 1841 à Saint-Marc, sur le Richelieu, Bas-Canada, fils de Jérôme Sénécal et d’Éloïse Martin ; le 18 octobre 1869, il épousa à Belœil, Québec, Philomène Pepin, et ils eurent six enfants, dont deux lui survécurent ; décédé le 20 mars 1917 à Saint-Boniface, Manitoba.
Après avoir fréquenté l’école de son village de 9 à 11 ans, Joseph-Azarie Sénécal s’adonna à l’agriculture. Toutefois, dans la vingtaine, il s’orienta vers le métier de son père, qui était charpentier, et, durant son apprentissage, développa une grande passion pour l’étude de l’architecture. Établi à son propre compte, c’est en 1870 que commença sa longue association à titre d’architecte-entrepreneur avec les religieux, d’abord à Belœil, où il construisit et décora la chapelle du couvent des Sœurs des Saints-Noms de Jésus et de Marie. Son succès dans le domaine de la construction lui permit de devenir copropriétaire vers 1874 d’une manufacture de matériaux de construction, à Hochelaga (Montréal).
Après quelques années, victime de la dépression qui affectait l’économie, Sénécal se retira des affaires et, en 1877, à l’invitation du père Albert Lacombe, il se rendit au Manitoba, où il prit une terre à Baie-Saint-Paul (Saint-Eustache). Trois ans plus tard, il s’installa à Saint-François-Xavier, vivant du commerce de son magasin et de l’agriculture. En 1887, il trouva l’occasion de retourner à sa première vocation : en juin de cette année-là, il partit avec son fils Tancrède pour Fort Macleod (Alberta) construire la maison et agrandir le magasin de l’ancien député de Saint-François-Xavier, Édouard-François Gigot, agent principal de la Hudson’s Bay Company.
Au retour de Fort Macleod, Sénécal continua de s’occuper de son commerce et de sa terre mais, en 1891, il s’établit à Saint-Boniface pour se consacrer entièrement à la construction dans les rôles d’architecte et d’entrepreneur. Aussitôt, les Sœurs des Saints-Noms dé Jésus et de Marie lui offrirent le contrat de l’agrandissement de la première académie Sainte-Marie, à Winnipeg. Ce contrat d’envergure assura à Sénécal une réputation qui en fit l’architecte et l’entrepreneur le plus en demande auprès des institutions religieuses francophones non seulement du Manitoba, mais aussi dans ce qui allait devenir la Saskatchewan et l’Alberta.
L’œuvre de Sénécal en Alberta se répartit entre Calgary et Edmonton et ses environs. En 1894, après les travaux de consolidation et d’agrandissement de l’hôpital Sainte-Croix de Calgary, dirigé par les sœurs grises, il construisit à Edmonton le presbytère des oblats de Marie-Immaculée et l’Hôpital Général des sœurs grises. L’hôpital de la Miséricorde, entrepris en 1905 à la demande des Sœurs de miséricorde, ne sera terminé qu’en 1910. S’il ne reste rien des œuvres mentionnées, l’église de Morinville (1907), conçue par Sénécal, traduit bien le lien qui rattachait l’architecture des francophones de l’Ouest à celle du Québec.
En Saskatchewan, où Sénécal fut moins actif que dans les deux autres provinces des Prairies, deux des trois églises qui lui sont attribuées subsistent encore. L’église de Willow Bunch (1906), dotée de traits du style baroque, fut démolie, mais l’église de Wolseley (1900), au style néo-classique, et la modeste église de Duck Lake, entreprise en 1908, selon les plans signés Sénécal et Hudon, attestent encore de la renommée de l’architecte manitobain dans l’Ouest canadien.
C’est dans son Manitoba adoptif que Sénécal a conçu et construit le plus grand nombre de bâtiments, qui témoignent encore aujourd’hui de l’apport des Canadiens français au patrimoine architectural de l’Ouest. Riche de la réputation acquise auprès des congrégations religieuses après qu’il eut terminé l’aile de l’académie Sainte-Marie à Winnipeg en 1892, il fut chargé de l’élaboration des plans et de la construction de nombreux couvents-pensionnats : Saint-François-Xavier (1892), Saint-Jean-Baptiste (1897, 1910), Saint-Pierre (Saint-Pierre-Jolys) (1900), Brandon (1903), Letellier (1903), et l’école normale de Saint-Boniface (1903). Deux édifices continuent d’être remarqués par leur style néoclassique et leur allure monumentale : la deuxième académie Sainte-Marie (1902–1903), à Winnipeg, qu’il construisit d’après les plans de Samuel Hooper, et le couvent Saint-Joseph (1912), construit pour les Sœurs des Saints-Noms de Jésus et de Marie, à Saint-Boniface. Par contre, des bâtiments hospitaliers dont Sénécal a fait les plans ou assuré la construction – deux ailes de l’hôpital Saint-Roch (1899, 1904), les trois quarts de l’Hôpital Général (1893, 1905, 1914), à Saint-Boniface, et l’hôpital de la Miséricorde (1900, 1907), à Winnipeg – il ne reste qu’une aile de l’Hôpital Général, la partie centrale de l’hôpital de la Miséricorde et l’asile Ritchot (1912), à Saint-Norbert.
Sénécal s’était spécialisé dans les couvents et les hôpitaux, mais il est aussi l’auteur des plans et même de la construction de nombreuses églises du Manitoba, dont celles de Saint-Léon (1895), de Gretna (1897), de Sainte-Anne-des-Chênes (1896) et l’église du Saint-Esprit (1899), à Winnipeg. Même s’il n’en fut pas l’architecte mais l’entrepreneur, son œuvre la plus renommée demeure la cathédrale de Saint-Boniface (1906), construite d’après les plans de Jean-Omer Marchand* et Samuel Stevens Haskell, de Montréal, dont il ne reste aujourd’hui, après l’incendie de 1968, que la façade et les murs latéraux.
Joseph-Azarie Sénécal jouissait de l’estime des religieux et de la population en général, qui appréciaient la qualité de ses nombreux bâtiments publics et privés. Sur le plan social, son engagement et son intégrité lui valurent des postes clés dans la vie de Saint-Boniface : président de la Société Saint-Jean Baptiste en 1901, président de la commission scolaire en 1896, conseiller municipal et maire de la ville, élu en 1901 sans opposition.
On trouve des renseignements sur les réalisations de Joseph-Azarie Sénécal à titre d’architecte et d’entrepreneur dans les Arch. des Sœurs des Saints-Noms de Jésus et de Marie, à Longueuil, Québec, et à Saint-Boniface, Manitoba, dans les Arch. des Sœurs grises, à Saint-Boniface et à Edmonton, dans les Arch. de l’archevêché de Saint-Boniface et les Arch. of the Archdiocese of Edmonton, ainsi qu’aux PAA, à Edmonton.
ANQ-M, CE1-46, 16 nov. 1841 ; CE1-49, 18 oct. 1869.— Edmonton Bulletin, 14, 21 mars 1895.— Le Manitoba (Saint-Boniface), 3 sept., 13 oct. 1887, 25 août 1915, 21 mars 1917.— Winnipeg Free Press, 29 sept. 1973.— Winnipeg Tribune, 29 sept. 1973.— Gilles Cadrin, « J.-A. Sénécal, architecte et entrepreneur », dans l’Ouest canadien et l’Amérique française ; les actes du huitième colloque du Centre d’études franco-canadiennes de l’Ouest [...] (Regina, 1988).— Catholic centennial souvenir, 1812–1912 ; a sketch of the achievements of the Catholic Church in western Canada (Winnipeg, 1912).— Hélène Chaput, Histoire de la congrégation des Sœurs de SS. NN. de Jésus et de Marie ; mère Marie-du-Rosaire [...] (Saint-Boniface, 1982).— Priscille Cormier, « Cathédrales de Saint-Boniface », les Cloches de Saint-Boniface (Saint-Boniface), 72 (1973) : 274s.— Lionel Dorge, le Manitoba, reflets d’un passé (Saint-Boniface, 1976), 169.— La Petite Histoire ; paroisse Saint-Mathieu de Belœil, 1772–1972 (Richelieu, Québec, 1972), 151s.— Clovis Rondeau, la Montagne de Bois (Willow-Bunch, Sask.) ; histoire de la Saskatchewan méridionale (Québec, 1923), 163–169.— Short sketches of the history of the Catholic churches and missions in central Alberta, É.-J. Legal, compil. ([Winnipeg, 1914 ?]), 28–30, 82.
Gilles Cadrin, « SÉNÉCAL, JOSEPH-AZARIE », dans Dictionnaire biographique du Canada, vol. 14, Université Laval/University of Toronto, 2003– , consulté le 20 déc. 2024, https://www.biographi.ca/fr/bio/senecal_joseph_azarie_14F.html.
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Auteur de l'article: | Gilles Cadrin |
Titre de l'article: | SÉNÉCAL, JOSEPH-AZARIE |
Titre de la publication: | Dictionnaire biographique du Canada, vol. 14 |
Éditeur: | Université Laval/University of Toronto |
Année de la publication: | 1998 |
Année de la révision: | 1998 |
Date de consultation: | 20 déc. 2024 |