HUOT, MARIE-CATHERINE, dite Sainte-Madeleine, supérieure de la Congrégation de Notre-Dame, née à L’Ange-Gardien, en aval de Québec, le 30 avril 1791, fille de Jacques Huot, cultivateur, et de Catherine Plante, décédée à Montréal le 7 janvier 1869.

Catherine Huot reçut son instruction de sa mère qui avait étudié chez les sœurs de la Congrégation de Notre-Dame à Sainte-Famille, île d’Orléans. C’est par cette intermédiaire que la jeune fille les connut et désira se joindre à elles. Après sa profession religieuse, le 28 septembre 1809, Catherine Huot, devenue sœur Sainte-Madeleine, travailla d’abord à la communauté de Montréal, puis elle enseigna, de 1812 à 1820, aux missions de Saint-Denis-sur-Richelieu, de Québec et de Rivière-Ouelle. Elle revint ensuite à Montréal où elle passa bientôt aux premières charges de l’institut, qu’elle assuma pendant 46 ans, jusqu’à sa mort.

Supérieure de 1828 à 1840, de 1843 à 1849 et de 1855 à 1861, mère Sainte-Madeleine présida ainsi aux destinées de la Congrégation de Notre-Dame au moment où celle-ci connaissait un développement remarquable, suivant ainsi le rythme de croissance de l’Église de Montréal. En témoignent les statistiques de la communauté : en 1828, l’institut ne comprenait que 80 sœurs, selon les limites imposées par une ordonnance épiscopale de 1698 ; en 1869, par suite de la suppression de cette restriction par Mgr Ignace Bourget* en 1843, il en comptait 459. À Montréal, en 1828, la congrégation n’avait que le pensionnat de la maison mère et l’externat de Notre-Dame-des-Victoires ; en 1869, elle tenait, en plus de deux pensionnats (Villa-Maria et Mont Sainte-Marie) et de quatre académies (Saint-Denis, Saint-Vincent, Sainte-Anne et Saint-Patrice), neuf écoles dont la plupart avaient été fondées par les sulpiciens pour les enfants des ouvriers ou des immigrés irlandais. Ces écoles étaient gratuites à l’origine, et les sœurs s’y rendaient « le matin après la messe, en voiture » pour en revenir « le soir à cinq heures ». Mais l’expansion de la congrégation déborda Montréal jusqu’à Rimouski et Baie-Saint-Paul sur les rives du Saint-Laurent, Sherbrooke dans les Cantons de l’Est, et Huntingdon ; 21 missions furent ainsi fondées.

Sous le gouvernement de mère Sainte-Madeleine, la congrégation posa également les jalons d’une grande avance missionnaire. Elle répondait ainsi aux besoins des groupes catholiques d’origine irlandaise surtout. En 1828, elle ne comptait, en plus de la maison mère, que 17 missions, toutes francophones, alors qu’en 1869, elle en avait 68, dont 5 nouvelles en Ontario, 8 dans les provinces Maritimes et 5 aux États-Unis. Préoccupées de s’intégrer aux collectivités qui les recevaient, les sœurs acceptèrent alors de dispenser un enseignement exclusivement en anglais, ce qui est à l’origine du caractère bilingue et biculturel de la Congrégation de Notre-Dame.

Le recrutement considérable et l’expansion rapide de la congrégation sous le supériorat de mère Sainte-Madeleine s’accompagnèrent d’une nouvelle orientation des études. Il semble bien, d’après l’histoire de la communauté, qu’il y avait un réel retard intellectuel à la congrégation depuis la Conquête. Les sœurs s’étaient limitées « à se prémunir contre les envahissements du protestantisme, sans chercher pour la gloire de la religion à donner plus de relief aux écoles catholiques ». Elles commencèrent tôt à enseigner l’anglais, mais ce n’est qu’après 1830 qu’elles étendirent le programme des études secondaires à presque toutes les branches du savoir, depuis la grammaire, la géographie, l’arithmétique, l’histoire, la chimie, la minéralogie, etc. jusqu’à la broderie, le dessin et la musique vocale et instrumentale, même la guitare. Et la qualité de cet enseignement est remarquée, non seulement dans les journaux du temps, mais même dans le « Rapport du surintendant de l’Éducation pour le Bas-Canada », qui, déplorant le manque de préparation des institutrices, fait exception pour les sœurs de la congrégation.

Pendant cette ère de progrès scolaires et d’expansion missionnaire, la Congrégation de Notre-Dame vivait à l’intérieur les événements qui devaient donner une forme définitive à son gouvernement et consolider son existence dans l’Église : institution du généralat en 1864, approbation de l’institut par Rome en 1876 et sanction de ses règles en 1889.

Une si grande évolution de la congrégation au xixe siècle ne dépend pas seulement d’un contexte favorable à l’initiative et à la générosité. Elle repose sur l’intelligence et l’idéal de femmes religieuses à qui la société confiait un grand nombre de responsabilités. Dans cette perspective, mère Sainte-Madeleine devient un prototype et la représentante d’une époque charnière de l’histoire sociale de Montréal et de la province.

Andrée Désilets

Archives de la Congrégation de Notre-Dame (Montréal), Biographie des sœurs décédées depuis le 17 août 1855 jusqu’au 14 juin 1871 (texte dactylographié) ; Correspondance de mère Sainte-Madeleine ; Notices historiques, écoles de la Commission scolaire de Montréal.— Canada, prov. du, Assemblée législative, Journaux, 1856, 2, app.16.— Mélanges religieux, 10 sept. 1841, 5 avril 1842, 21 avril 1843.— L.-P. Audet, Le système scolaire, IV, V.— Lionel Groulx, L’enseignement français au Canada (2 vol., Montréal, 1931–[1933]).— Lemire-Marsolais et Lambert, Hist. de la C.N.D. de Montréal, VII : 145, 158.— C. E. Phillips, The development of education in Canada (Toronto, 1957).— Vie de la mère Sainte-Madeleine, supérieure de la Congrégation de Notre-Dame de Montréal, par un ancien supérieur de communauté (Montréal, 1876).

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Andrée Désilets, « HUOT, MARIE-CATHERINE, dite Sainte-Madeleine », dans Dictionnaire biographique du Canada, vol. 9, Université Laval/University of Toronto, 2003– , consulté le 20 nov. 2024, https://www.biographi.ca/fr/bio/huot_marie_catherine_9F.html.

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Titre de la publication:    Dictionnaire biographique du Canada, vol. 9
Éditeur:    Université Laval/University of Toronto
Année de la publication:    1977
Année de la révision:    1977
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