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SULLIVAN, JOHN GODFREY, ingénieur, conseiller municipal et chargé de cours, né le 11 janvier 1863 à Bushnell’s Basin, Perinton, New York, fils de Thomas Sullivan et d’Honora (Hanora) Doody ; le 24 avril 1894, il épousa à Ovid, New York, Sarah Ann Farrell, et ils eurent deux filles et deux fils ; décédé le 7 août 1938 à Winnipeg.
John Godfrey Sullivan termina ses études secondaires dans le village de Fairport, près de son lieu de naissance, et fréquenta la Cornell University à Ithaca, où il obtint un diplôme d’ingénieur civil en juin 1888. Il commença sa carrière un mois plus tard à titre de porte-mire au Great Northern Railroad dans le territoire du Montana. Le Spokane Falls and Northern Railway, dans le territoire de Washington, l’embaucha au printemps de 1889, puis le promut sous-ingénieur. À l’automne de l’année suivante, Sullivan partit travailler sur la ligne d’expansion jusqu’au Pacifique du Great Northern Railroad, qui rejoignait Seattle, dans l’État de Washington.
Sullivan séjourna au Canada pour la première fois en juillet 1893 afin d’occuper le poste d’ingénieur adjoint à la Compagnie de chemin de fer et de houille d’Alberta [V. sir Alexander Tilloch Galt*], établie à Lethbridge. L’année d’après, une grève interrompit la construction et il retourna aux États-Unis en octobre. Durant les six années suivantes, il travailla dans différentes compagnies de chemin de fer dans le Nord-Ouest. Au Montana, il agit d’abord, pendant quelques mois, en qualité de contremaître cantonnier pour la Northern Pacific Railroad Company, puis comme ingénieur arpenteur sur le tracé du Butte, Anaconda and Pacific Railway. Au printemps de 1895, il s’installa en Colombie-Britannique, où il occupa le poste d’ingénieur adjoint principal du Kaslo and Slocan Railway [V. John Hendry*]. L’année suivante, il effectua des travaux de repérage à titre d’ingénieur arpenteur, puis, de 1898 à 1900, il travailla en tant qu’ingénieur adjoint principal au Columbia and Western Railway, dans le secteur de Rossland, où il acquit de l’expérience dans le forage de tunnels. De 1900 à 1905, on chargea Sullivan, ingénieur de division responsable de la construction du chemin de fer canadien du Pacifique, de l’arpentage et de la construction de toutes les nouvelles lignes de chemin de fer à l’ouest de Fort William (Thunder Bay), en Ontario.
En 1905, Sullivan reçut la citoyenneté britannique. De septembre de la même année à janvier 1907, il fut ingénieur en chef adjoint (et durant trois mois, ingénieur en chef par intérim) du canal de Panama, où il collabora principalement au creusage de la coupe Gaillard. Il apporta au modèle original de la charrue latérale de la Lidgerwood Manufacturing Company des améliorations qui augmentèrent son efficacité et permirent ainsi d’économiser des millions de dollars. En février 1907, il s’installa à Montréal et devint directeur de la construction du chemin de fer canadien du Pacifique à l’est, puis, l’année suivante, ingénieur en chef adjoint. Muté au poste d’ingénieur en chef adjoint des lignes de chemin de fer à l’ouest, il partit vivre à Winnipeg en février 1911 et fut promu ingénieur en chef en moins de huit mois. Quatre ans plus tard, on le nomma ingénieur en chef de la Compagnie du chemin de fer canadien du Pacifique. En 1916, toujours à l’emploi de la compagnie, il siégea au comité d’ingénieurs chargé d’étudier l’aménagement du projet d’aqueduc du Greater Winnipeg Water District [V. Henry Norlande Ruttan*], qui approvisionnerait la région en eau fraîche depuis le lac Shoal, en Ontario.
En 1916, Sullivan suscita un intérêt international grâce à la construction du tunnel Connaught dans les monts Selkirk, en Colombie-Britannique. Entre 1910 et 1913, consciente de l’augmentation du trafic ferroviaire et de la concurrence potentielle de rivaux comme la Grand Trunk Pacific Railway Company et la Canadian Northern Railway Company [V. Charles Melville Hays*], la Compagnie du chemin de fer canadien du Pacifique avait décidé de doubler sa voie entre Calgary et Vancouver. Au col Rogers, un tunnel éliminerait les goulets d’étranglement sur la surface de la ligne ; dans son étude d’octobre 1912, Sullivan prédit qu’on réaliserait d’importantes économies si on parvenait à traverser la montagne. La Foley, Welch, and Stewart [V. John William Stewart] décrocha le contrat le 1er juillet 1913, avec une échéance de trois ans et demi. À titre d’ingénieur en chef du projet, Sullivan collabora étroitement avec le directeur de l’entreprise, A. C. Dennis. Rompant avec la tradition en génie, Sullivan ne souhaitait pas atteindre les coûts de main-d’œuvre élevés associés à la méthode européenne de creusement des tunnels et à la technique américaine, plus lente. Au lieu de cela, il accepta et modifia le plan de Dennis. Ils percèrent d’abord, à travers le mont Macdonald, un petit tunnel de travail préliminaire de 8 pieds sur 11 pieds, aussi appelé tunnel d’approche, parallèlement à l’axe du tunnel projeté, puis ouvrirent des segments annulaires dans la roche pour créer le tunnel principal. Cette technique, employée pour la toute première fois, accéléra la construction, car elle facilita la progression du tunnel sans perturber les travaux ailleurs. Les ingénieurs applaudirent cette réalisation, que la Première Guerre mondiale a toutefois reléguée à l’arrière-plan. D’une longueur de cinq milles, le tunnel à double voie fut terminé 11 mois plus tôt que prévu et coûta environ la moitié des 12 millions de dollars initialement estimés. Des trains réguliers commencèrent à l’utiliser le 9 décembre 1916. Nommé en l’honneur du duc de Connaught [Arthur*], gouverneur général du Canada de 1911 à 1916, le tunnel était alors le plus long en Amérique du Nord. Sa construction diminua la pente de la voie, en réduisant de 552 pieds le plus haut sommet atteint par le chemin de fer, raccourcit le trajet et élimina la nécessité d’installer des galeries pare-neige pour protéger les ouvriers et l’équipement des grosses chutes de neige et des avalanches.
Deux ans après l’achèvement du tunnel Connaught, Sullivan démissionna de son poste à la Compagnie de chemin de fer canadien du Pacifique, qui retiendrait tout de même ses services comme consultant jusqu’en 1927. De 1918 à 1935, il travailla comme ingénieur-conseil. Reconnu internationalement en tant que spécialiste de l’arpentage pour la construction de chemins de fer, il produisit des rapports sur une variété d’importants projets de génie et arbitra des litiges entre employés et compagnies de chemin de fer. En 1919, il étudia un plan de distribution d’électricité soumis par le gouvernement du Manitoba. De 1919 à 1922, il présida la Manitoba Drainage Commission (aussi appelée commission Sullivan), qui trouva une solution au problème de drainage des terres de la vallée de la rivière Rouge.
Durant sa procédure d’arbitrage avec le chemin de fer du Grand Tronc (1920–1921), le gouvernement fédéral engagea Sullivan. En 1922, ce dernier fournit des renseignements au premier ministre de la Colombie-Britannique sur les aspects relatifs au génie physique du Pacific Great Eastern Railway et mena un projet d’arpentage fédéral dans le but de localiser un passage pour le chemin de fer dans la vallée de la rivière de la Paix. L’année suivante, Sullivan fit partie d’une commission qui conseilla le gouvernement du Manitoba sur son système hydroélectrique. En 1924, il devint président de la Canadian Engineering and Construction Company, à Winnipeg, et de la Sullivan, Kipp, and Chace, entreprise qu’il avait cofondée la même année. Il occuperait ces deux postes jusqu’à la fin de sa vie.
Sullivan exerça aussi son travail de consultant à l’extérieur du Canada. Il réalisa notamment un rapport sur l’emplacement d’une voie ferrée entre Cincinnati, dans l’Ohio, et Chattanooga, au Tennessee, en 1924. L’année suivante, une firme d’ingénierie britannique retint ses services pour un tunnel routier projeté entre Liverpool et Birkenhead. En 1926, il présenta un rapport au Denver and Salt Lake Railway sur la ventilation du tunnel Moffat au Colorado.
Durant la campagne pour la mairie de Winnipeg en 1919, Sullivan était entré dans l’arène politique alors dominée par l’âpre lutte des classes subséquente à la grève générale de Winnipeg [V. Mike Sokolowiski*]. Il bénéficiait de l’appui de sir Augustus Meredith Nanton* et d’autres membres du Citizens’ Committee of One Thousand, favorable aux entreprises. Afin d’éviter la division du vote, Isaac Cockburn, conseiller municipal sortant, démissionna pour laisser sa place à Sullivan, élu dans le quartier no 1, division électorale où vivaient des gens assez aisés. Compétent et franc, il resterait en poste pendant quatre mandats, jusqu’en 1927.
Sullivan avait adhéré à l’American Society of Civil Engineers en 1899 et à l’American Railway Engineering Association vers 1914 (il en serait le président quatre ans plus tard). En 1900, il devint membre de la Société canadienne des ingénieurs civils, fondée entre autres par Alan Macdougall* en 1887 ; celle-ci prendrait le nom d’Institut canadien des ingénieurs en 1918, après sa réorganisation. Sullivan siégea à son conseil en 1910 et en 1918, et il en fut vice-président de 1911 à 1913 ainsi que président en 1922, quand l’organisme exerça des pressions sur plusieurs provinces afin qu’elles mettent en place un système d’accréditation professionnelle pour les ingénieurs qui leur fournirait les mêmes bases juridiques dont bénéficiaient les avocats et les médecins. À cet égard, Sullivan joua un rôle de premier plan dans le développement des professions au Canada.
Durant plus de 15 ans, John Godfrey Sullivan fut un membre éminent de la section de Winnipeg du Rotary Club. Il était également membre du Club de Manitoba et du St Charles Country Club de cette ville, ainsi que du Club St James de Montréal. Catholique, il faisait partie des Chevaliers de Colomb. Il donna des cours en génie à l’université de Manitoba, qui lui décerna un doctorat honorifique en droit en mai 1936. La même année, l’Institut canadien des ingénieurs lui octroya sa plus haute distinction, la médaille sir John Kennedy. Après une longue maladie, Sullivan mourut chez lui, à Winnipeg, à l’âge de 75 ans. Le Winnipeg Free Press écrivit qu’un « homme [ayant] le tunnel Connaught comme monument commémoratif ne tomber[ait] jamais dans l’oubli dans l’Ouest canadien ».
John Godfrey Sullivan a notamment écrit Spiral tables, prepared for the Canadian Pacific Railroad (New York, 1908) et Report on the engineering and economic features of the Pacific Great Eastern Railway (Victoria, 1922). Son discours à titre de président de l’Institut canadien des ingénieurs (ICI) a paru dans Engineering Journal (Montréal), 5 (1922) : 485–486. Sa candidature, datée de 1900, à la Société canadienne des ingénieurs civils (qui deviendrait l’ICI) se trouve à BAC, MG28-I277 (Engineering Instit. of Canada fonds, membership files, pre 1920), vol. 19, John G. Sullivan, Form A ; le fonds contient également les curriculum vitæ de Sullivan de 1863 à 1923 et un tapuscrit de l’article « John G. Sullivan, ., president, the Engineering Institute of Canada », publié dans Engineering Journal, 5 (1922) : 87. La plus longue description de la carrière de Sullivan figure dans l’article « John G. Sullivan, . », Engineering Journal, 21 (1938) : 439–440. À sa mort, plusieurs périodiques ont fait paraître des notices sur lui, par exemple : Canadian Engineer (Toronto), 16 août 1938 : 24, 26 ; Canadian Transportation (Toronto), 41 (1938) : 450 ; Railway Engineering and Maintenance (Chicago), septembre 1938 : 559 ; Winnipeg Free Press, 9 août 1938 ; et Winnipeg Tribune, 8 août 1938.
Les deux ouvrages suivants comportent de l’information sur les méthodes novatrices utilisées dans la construction du tunnel Connaught : J. G. Sullivan, « Methods adopted in the construction of Rogers Pass Tunnel », Soc. canadienne des ingénieurs civils, Trans. (Montréal), 30 (1916) : 129–134 (un résumé de cet article figure dans Canadian Engineer, 20 avril 1916 : 467–469), et A. C. Dennis, « Construction methods for Rogers Pass Tunnel », Canadian Engineer, 1er mars 1917 : 189–192. D’autres articles sur le sujet ont paru à la même époque, dont : « The Rogers Pass Tunnel », Engineering News (New York), 2 avril 1914 : 718–719 ; « Roger’s Pass Tunnel in the Selkirks », Canadian Engineer, 26 août 1915 : 295–296 ; « Tunneling at Roger’s Pass », Canadian Engineer, 10 févr. 1916 : 232 ; et « Progress in the art of tunneling », Engineering News, 11 janv. 1917 : 77. Le texte de G. G. Backler et T. D. Heaver, « The timing of a major investment in railway capacity : CPR’s 1913 Connaught Tunnel decision », Business Hist. (Londres), 24 (1982) : 300-314, fournit quant à lui une bonne analyse de la décision prise en faveur de la construction du tunnel.
J. Rodney Millard, « SULLIVAN, JOHN GODFREY », dans Dictionnaire biographique du Canada, vol. 16, Université Laval/University of Toronto, 2003– , consulté le 21 déc. 2024, https://www.biographi.ca/fr/bio/sullivan_john_godfrey_16F.html.
Permalien: | https://www.biographi.ca/fr/bio/sullivan_john_godfrey_16F.html |
Auteur de l'article: | J. Rodney Millard |
Titre de l'article: | SULLIVAN, JOHN GODFREY |
Titre de la publication: | Dictionnaire biographique du Canada, vol. 16 |
Éditeur: | Université Laval/University of Toronto |
Année de la publication: | 2022 |
Année de la révision: | 2022 |
Date de consultation: | 21 déc. 2024 |