SLADE, THOMAS, capitaine de navire et homme d’affaires, né à Poole ou à Wareham, Angleterre, fils de Robert Slade et d’une prénommée Elizabeth ; décédé en 1816 à Poole.

Le voile n’a pas été levé sur la jeunesse de Thomas Slade, et quelques-uns des rares détails que l’on possède proviennent du testament de son oncle, John Slade*, éminent marchand de Poole engagé dans le commerce de Terre-Neuve. À la mort de son fils unique en 1773, John Slade concentra son attention sur quatre de ses neveux afin d’assurer une succession familiale pour l’entreprise. Chacun des neveux assuma des responsabilités particulières au sein de la firme John Slade and Company. Durant plusieurs années, Thomas occupa diverses fonctions dans le commerce florissant de son oncle, dont celles de capitaine de navire et de représentant. En 1780, il commanda le brick Fame, navire de 180 tonneaux, lors d’un voyage entre Fogo, à Terre-Neuve, et Poole. Il resta capitaine, sous les ordres de son frère John, jusque dans les années 1790.

De la société John Slade and Company naquit un nouvel ensemble de firmes qui dominèrent le commerce dans les petits ports de pêche de Terre-Neuve pendant presque tout le xixe siècle. À la mort de John Slade l’aîné, en 1792, la firme possédait d’importants établissements commerciaux et des succursales le long de la côte nord-est de Terre-Neuve et au Labrador. Elle disposait de six bricks et dirigeait une vaste entreprise de ravitaillement pour la population sans cesse croissante de la côte nord-est. La succession fut transmise aux neveux et à leur cousin, George Nickleson Allen. Ils continuèrent à diriger la firme avec succès, bien que la guerre les contraignît à réduire leur chiffre d’affaires pendant les années 1790. Au cours de la décennie suivante, les Slade intensifièrent leurs transactions commerciales et furent en mesure de tirer profit des prix élevés de la morue, du saumon, des peaux de phoque et de l’huile, particulièrement entre 1809 et 1812. De plus, ils cessèrent de se cantonner dans leur bastion traditionnel, la région de Fogo-Twillingate, pour étendre leur activité vers le sud dans les baies de Bonavista, de la Trinité et de la Conception, ainsi qu’à la baie de Sainte-Marie et dans la région de Burin, sur la côte sud.

Malgré la prospérité accrue, les associés ne désiraient pas tous continuer à travailler au sein de la firme. Le premier des héritiers Slade à se dissocier fut Robert, qui s’installa dans la baie de la Trinité en 1804 et loua les locaux de l’entreprise qu’exploitait auparavant John Jeffrey, de Poole. Son commerce prit progressivement de l’ampleur et, en 1817, le taux de l’impôt que devait payer Robert à Poole était calculé sur les revenus d’une entreprise qui s’avérait de plus grande valeur que la John Slade and Company. Le départ de Thomas Slade pour aller fonder une autre société est une des raisons du déclin apparent des affaires de l’ancienne firme entre 1813 et 1817. Le volume des importations et des exportations de la Thomas Slade and Company était évalué à £700 à Poole, en 1817, ce qui la plaçait sur un pied d’égalité avec la John Slade and Company. Thomas Slade et son neveu William Cox étaient les principaux partenaires de la nouvelle compagnie. Les circonstances qui entourèrent la formation de la société restent confuses : on ignore si Slade retira ses capitaux de la société mère pour se lancer lui-même en affaires ou si, à cause de l’expansion, on décida d’administrer une des succursales sous un nom différent. Il semble que la John Slade and Company ait maintenu ses relations commerciales dans les régions de Twillingate et de Fogo, tandis que la Thomas Slade and Company faisait surtout affaire dans la baie de Bonavista. Le nom de Thomas Slade ne fut relié à la nouvelle société que pendant quelques années. Apparemment, il tomba malade en 1816 ; son testament fut fait le 17 septembre et homologué le 11 novembre.

Thomas Slade, qui ne se maria manifestement pas, laissa une fortune considérable en actions, en argent, en biens immobiliers et en valeurs commerciales. Cette fortune devait être répartie de façon complexe entre les membres de sa famille. Il donna £53 100 à ses proches parents, privilégiant son frère John et son neveu Robert. Il légua aussi £11 000 à d’autres membres de sa famille et des sommes moindres à des parents éloignés. Il laissa à son frère David ses terres sises dans les paroisses d’East Morden et de West Morden, dans le Dorset, en Angleterre, et donna à Thomas, le fils de David, un entrepôt situé à Poole. Il céda la moitié de son « entreprise de Terre-Neuve et toutes [ses] pêcheries, graves, entrepôts, vigneaux, terres et propriétés [...] ainsi que [ses] navires, bricks, sloops, schooners, bateaux, barques, [ses] équipements de pêche et autre matériel de ladite entreprise », à son neveu et partenaire William Cox. L’autre moitié fut placée sous la curatelle de son cousin Robert pour son fils Thomas ainsi que pour le fils de son frère David, également prénommé Thomas. Le testament stipulait en outre qu’à l’âge de 24 ans les deux Thomas deviendraient des associés de la Thomas Slade and Company, qui prendrait alors le nom de Thomas Slade and Thomas Slade.

Peu après le décès de Thomas Slade, le nom de sa compagnie fut changé pour celui de Slade and Cox. En 1824, cette firme possédait 6 navires, qui totalisaient 904 tonneaux, dans le commerce de Terre-Neuve. Elle poursuivit son activité sous cette raison sociale jusqu’en 1828, année où les deux Thomas Slade atteignirent 24 ans. La compagnie adopta alors le nom stipulé par Slade dans son testament. En 1836, la maison portait la raison sociale de Thomas Slade Sr and Company et figurait au nombre des six firmes de la famille Slade à faire du commerce à Terre-Neuve. Thomas Slade fut donc un des nombreux mais néanmoins importants maillons de la chaîne commerciale que constituèrent les firmes Slade à Terre-Neuve entre 1750 environ et 1868.

De toute évidence, Thomas Slade concentra tous ses efforts sur le commerce et prêta peu d’attention aux questions politiques. Il semble qu’il n’ait jamais obtenu ou cherché à obtenir de poste ou de nomination politique à Poole ou à Terre-Neuve. Les Slade furent une des dernières familles de marchands à diriger leurs affaires terre-neuviennes directement de Poole ; ils comptèrent également parmi les derniers commerçants anglais à résister aux tendances du xixe siècle vers la centralisation du commerce à St John’s et vers une gestion intérieure de l’économie de l’île.

Gordon Handcock

Dorset Record Office, P227/CW3–CW5 (Churchwardens, rates and accounts, 1783–1824) ; P227/OV5–OV6 (Overseers of the poor, rates and accounts, 1827–1836).— Nfld., Dept. of Culture, Recréation and Youth, Hist. Resources Division (St John’s), W. G. Handcock, « The merchant families and entrepreneurs of Trinity in the nineteenth century » (copie dactylographiée, St John’s, 1981), 90–124.— PANL, GN 5/1/B/9 ; P7/A/6.— PRO, ADM 1/47 ; PROB 11/1239/618 ; 11/1586/597.— DBC, 4 (biog. de John Slade).— Derek Beamish et al., The pride of Poole, 1688–1851 (Poole, Angl., 1974), 277s.— C. G. Head, Eighteenth century Newfoundland : a geographer’s perspective (Toronto, 1976), 218–221.— Prowse, Hist. of Nfld. (1895), 664.— Newfoundlander (St John’s), 14 oct. 1861 : 3.— Public Ledger (St John’s), 3 juin 1862 : 3.

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Gordon Handcock, « SLADE, THOMAS », dans Dictionnaire biographique du Canada, vol. 5, Université Laval/University of Toronto, 2003– , consulté le 20 nov. 2024, https://www.biographi.ca/fr/bio/slade_thomas_5F.html.

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Auteur de l'article:    Gordon Handcock
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Titre de la publication:    Dictionnaire biographique du Canada, vol. 5
Éditeur:    Université Laval/University of Toronto
Année de la publication:    1983
Année de la révision:    1983
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