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LANGEVIN, ANTOINE, prêtre catholique et vicaire général, né le 7 février 1802 à Beauport, Bas-Canada, fils d’Antoine Langevin, journalier, et de Catherine Leclaire ; décédé le 11 avril 1857 à Saint-Basile, Nouveau-Brunswick.

Antoine Langevin s’inscrivit au séminaire de Nicolet en 1826. Quatre ans plus tard, il y fut nommé préfet des études, poste qu’il occupa jusqu’en 1833, probablement en même temps qu’il poursuivait des études en théologie. Le 29 septembre 1833, il fut ordonné prêtre à Québec. Peu de temps après, on le nomma vicaire à Nicolet.

En 1835, Langevin devint curé de la paroisse Saint-Basile, dans la région du Madawaska, au Nouveau-Brunswick. Fondée en 1792, cette paroisse était la seule érigée canoniquement au Madawaska à cette époque. À son arrivée, Langevin y trouva une chapelle, une sacristie et un presbytère en bonne condition. Outre cette paroisse, il desservait deux chapelles, l’une à Saint-Bruno (Van Buren, Maine), à 15 milles en aval de Saint-Basile, et l’autre à Sainte-Luce (St Luce Station), à égale distance en amont. Même si la mission du Madawaska, qui s’étendait le long de la rivière Saint-Jean sur une distance d’environ 70 milles, faisait partie du diocèse de Charlottetown, érigé en 1829, l’évêque Angus Bernard MacEachern* avait laissé à l’archevêque de Québec, Joseph Signay*, certains pouvoirs administratifs ; c’est à lui que revenait la nomination des prêtres canadiens-français chargés de desservir une population qui, en 1830, se chiffrait à 2 612 habitants d’origine acadienne et canadienne-française. Langevin dut s’adapter à une vie assez simple qui offrait tout de même certaines compensations, comme l’écrivait en 1834 son prédécesseur, François-Xavier-Romuald Mercier : « Si le missionnaire de Madawaska a la douleur d’être isolé, de l’autre il a la joie d’avoir un grand nombre de vertueux habitants qui aiment leur religion et l’observent fidèlement. »

En 1838, Langevin fut nommé vicaire général de la mission du Madawaska par Bernard Donald Macdonald, le nouvel évêque de Charlottetown, au cours d’une tournée pastorale au Nouveau-Brunswick. Pendant les 22 ans qu’il passa à Saint-Basile, Langevin accomplit un travail remarquable. Dans plusieurs domaines, il œuvra avec zèle et sans relâche. Sa correspondance avec Signay indique que, malgré son énergie et son dévouement pour ses ouailles dispersées, il ne pouvait suffire à la tâche. Bien des fidèles devaient se contenter de recevoir la visite de leur curé seulement huit ou neuf fois par année, les distances et les moyens de transport rudimentaires ne permettant pas de visites plus fréquentes. À plusieurs reprises, Langevin demanda à Signay de créer d’autres paroisses avec un prêtre résidant. Grâce à la persistance de ses demandes, les paroisses Saint-Bruno et Sainte-Luce furent fondées respectivement en 1838 et 1843.

Les Malécites du territoire faisaient eux aussi l’objet des soucis pastoraux de Langevin. Celui-ci profita de ses bonnes relations avec le lieutenant-gouverneur du Nouveau-Brunswick, sir John Harvey, pour obtenir chaque année du gouvernement 50 louis qui lui permettraient de s’assurer l’aide d’un prêtre dans son ministère à Tobique Indian Réserve et à Saint-Bruno où vivaient plusieurs familles de Malécites.

Langevin avait la réputation d’être un bon administrateur. Il usa à bon escient des terres de la fabrique et de quelques terres dans la région appartenant à l’archevêque, soit en les louant à des fermiers, soit en les exploitant afin d’en tirer des profits pour leurs propriétaires. La colonisation fit d’importants progrès au cours des années qu’il passa au Madawaska. La population augmenta de façon marquée et la région connut la prospérité. Ainsi, Langevin put remplacer le vieux presbytère par un nouveau bâtiment de dimension imposante et il entreprit, sans toutefois pouvoir la terminer avant sa mort, la construction d’une nouvelle église. Personnellement, il semble avoir eu suffisamment d’argent pour consentir des prêts à intérêt à différentes personnes de la région. Entre 1839 et l’année de sa mort, il prêta au collège de Sainte-Anne-de-la-Pocatière de fortes sommes, totalisant au moins £1 700.

Dans le domaine de l’éducation, Langevin fit figure de chef de file. Il encouragea la fondation d’écoles primaires et le dévouement des maîtres ambulants. Mais son zèle se manifesta surtout par l’aide qu’il accorda à de jeunes garçons du Madawaska afin qu’ils puissent poursuivre leurs études collégiales, en particulier au collège de Sainte-Anne-de-la-Pocatière. Dès 1839, avec le consentement de Signay, Langevin employa le revenu des terres appartenant à l’archevêque pour payer la pension des étudiants, « dans l’espérance d’en faire [des] ecclésiastique [s] pour ce pauvre diocèse [...] qui en a[vait] tant besoin ». De plus, une partie de ses propres revenus servit au même but. Entre 1855 et 1857, il donna en tout au collège £2 000 destinées à des bourses d’études, lesquelles existent toujours. Le collège hérita de sa succession, évaluée à £3 079.

L’influence et l’action du vicaire général Langevin se firent aussi sentir sur le plan politique. Il entretenait de bonnes relations avec les autorités gouvernementales du Nouveau-Brunswick, surtout avec le lieutenant-gouverneur Harvey qui fut l’invité du vicaire général lors de sa visite dans le Madawaska pendant la querelle entre le Maine et le Nouveau-Brunswick au sujet des frontières qui les séparaient. Langevin fut un ardent défenseur de la cause britannique, et c’est peut-être grâce à son emprise sur ses paroissiens que ceux-ci demeurèrent tranquilles durant le conflit. Il continua à desservir les paroisses qui se retrouvèrent en territoire américain après la conclusion du traité Webster-Ashburton en 1842 [V. sir James Bucknall Bucknall Estcourt]. Harvey écrit à propos de Langevin : « Le Madawaska et la province entière du Nouveau-Brunswick furent heureux de posséder un guide aussi éclairé à une époque aussi critique de son histoire. »

Bien que Langevin ait joui de l’estime générale au cours de ses années à Saint-Basile, son caractère autoritaire, dominateur et parfois intransigeant suscitait occasionnellement du mécontentement, voire de l’hostilité, chez certains de ses paroissiens. Ainsi, 44 d’entre eux signèrent, en 1849, une pétition adressée à Signay dans laquelle ils se plaignaient des conflits qui existaient entre Langevin et la fabrique au sujet du contrôle de la caisse paroissiale et soulignaient qu’ils n’avaient plus confiance en « un homme dont la conduite journalière ne tend[ait] qu’à les tyranniser & qui se fai[sait] un plaisir de les traiter d’ignorants & les mettre au rang de la brute, chaque fois que l’occasion s’en présent[ait] ». Par contre, neuf des citoyens les plus en vue de la région indiquèrent quelques mois plus tard, dans une lettre à Signay, qu’ils étaient « parfaitement satisfaits » de la conduite de leur curé.

Ces conflits assombrirent les dernières années du ministère d’Antoine Langevin. Au dire de l’abbé Thomas Albert, historien du Madawaska, Langevin était « un homme de talents administratifs supérieurs. D’une énergie indomptable, d’une persévérance inlassable [et] d’un caractère autoritaire », il fait figure d’un des grands bienfaiteurs de la région et d’un prêtre zélé qui aida généreusement les Madawaskayens à traverser une des périodes les plus difficiles de leur histoire. Il mourut prématurément dans sa paroisse le 11 avril 1857 et fut inhumé le 20 dans l’église de Sainte-Anne-de-la-Pocatière (La Pocatière, Québec).

Guy R. Michaud

L’auteur tient à remercier Mgr Ernest Lang d’Edmundston au Nouveau-Brunswick pour les renseignements qu’il a fournis.  [g. r. m.]

AAQ, 311 CN, IV : 122–124, 127–134, 137–138, 140–142, 147–148, 150–154, 163 ; 60 CN, II : 88.— ANQ-Q, CE1-5, 7 févr. 1802 ; CE3-12, 20 avril 1857 ; CN2-30, 29 mars 1841, 29 juill. 1842, 12, 21 mai 1852, 6 déc. 1856, 10 mai 1857.— Allaire, Dictionnaire, 1 : 302.— Tanguay, Répertoire (1893), 214.— Thomas Albert, Histoire du Madawaska d’après les recherches historiques de Patrick Therriault et les notes manuscrites de Prudent L. Mercure (Québec, 1920).— H. G. Classen, Thrust and counterthrust : the genesis of the Canada-United States boundary (Don Mills [Toronto], 1965).— Douville, Hist. du collège-séminaire de Nicolet.— Wilfrid Lebon, Histoire du collège de Sainte-Anne-de-la-Pocatière (2 vol., Québec, 19481949).— Roger Paradis, « la Bourse Langevin : une page de l’éducation des Acadiens au Madawaska », Soc. hist. acadienne, Cahiers (Moncton, N.-B.), 7 (1976) : 118130.— « Une grande et noble figure de l’histoire du Madawaska, le grand vicaire Langevin, 18351857 », le Brayon (Edmundston), 3 (1975), no 2 : 16–19.

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Guy R. Michaud, « LANGEVIN, ANTOINE », dans Dictionnaire biographique du Canada, vol. 8, Université Laval/University of Toronto, 2003– , consulté le 22 nov. 2024, https://www.biographi.ca/fr/bio/langevin_antoine_8F.html.

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Auteur de l'article:    Guy R. Michaud
Titre de l'article:    LANGEVIN, ANTOINE
Titre de la publication:    Dictionnaire biographique du Canada, vol. 8
Éditeur:    Université Laval/University of Toronto
Année de la publication:    1985
Année de la révision:    1985
Date de consultation:    22 nov. 2024