JOSEPH, JUDAH GEORGE (Gershom), marchand et artisan, né en 1798 à Exeter, Angleterre ; il épousa une prénommée Rebecca, et ils eurent deux filles et deux fils ; décédé le 17 mai 1857 à Toronto.
À la fin des années 1830 et au cours des années 1840, la petite population juive de Toronto s’agrandit avec l’arrivée de Juifs venant d’Angleterre, d’Allemagne, du Bas-Canada et des États-Unis. Surtout boutiquiers et artisans qualifiés – épiciers, marchands de vêtements ou de tabac, bijoutiers – ils cherchèrent à s’intégrer à la vie sociale et économique de Toronto. Judah George Joseph, l’un des membres les plus en vue de cette communauté naissante, était né dans une famille qui, à ce qu’on a dit, « possédait des alliances hautement respectées ». Il passa la plus grande partie de sa jeunesse dans les îles Anglo-Normandes de Jersey et de Guernesey. Il émigra aux États-Unis en 1829 et, par la suite, s’établit comme bijoutier et opticien à Cincinnati, dans l’Ohio. Ses affaires prospérèrent, mais à cause de « sa nature généreuse [... il] devint la victime de faux amis » ; il se fit rouler et perdit la plus grande partie de ses biens. On rapporte que vers 1840 Joseph alla se fixer avec sa famille à Hamilton, dans le Haut-Canada. Attiré peut-être par les perspectives commerciales offertes par Toronto, il s’y installa entre 1842 et 1844 et ouvrit un commerce, rue King, près du marché St Lawrence, qui était alors le principal quartier commercial de la ville. En plus d’exercer son métier de bijoutier et d’opticien, il fabriquait de l’argenterie, des mécanismes d’horlogerie, des instruments de calcul et de dessin, et du matériel scientifique. Joseph observait les rites traditionnels juifs et fermait sa boutique le samedi, jour du sabbat. Il établit un commerce florissant, acquit des propriétés et jouit d’une très grande popularité grâce à ses manières « joyeuses, ouvertes et familières ».
Joseph joua un rôle prépondérant dans la formation de la Hebrew Congregation of Toronto, petit groupe qui, de toute évidence, ne remplissait pas de fonctions religieuses. Cependant, en septembre 1849, Joseph et Abraham Nordheimer* posèrent les fondations de l’organisation communautaire juive à Toronto en achetant un terrain appartenant à John Beverley Robinson*, en vue d’en faire un cimetière. Cette propriété d’une demi-acre, située dans le canton d’York à l’est de Toronto (dans ce qui est aujourd’hui l’avenue Pape), devait être administrée par fidéicommis à l’intention de la Hebrew Congregation of Toronto qui, probablement, ne s’occupait que du cimetière. En 1850, le jeune fils de Joseph, Simeon Alfred, fut l’un des premiers à y être enterré, et il est possible que la maladie de son garçon ait motivé Joseph à faire cet achat, car il « aimait son foyer et était profondément attaché à sa famille ».
Joseph refusa de se joindre à la première synagogue de la ville, la Toronto Hebrew Congregation (Sons of Israel) (connue aujourd’hui sous le nom de Holy Blossom Temple), quand elle fut mise sur pied en 1856. Pour lui, les conditions nécessaires à l’adhésion ont peut-être semblé restrictives ; il y aurait eu aussi un fossé social sinon économique entre les administrateurs du cimetière (membres bien établis de la communauté) et les fondateurs de la synagogue (dont beaucoup tel Lewis Samuel* étaient de nouveaux arrivants). Néanmoins, comme juif de stricte observance, Joseph continua à faire ses paiements annuels par l’intermédiaire de la synagogue pour l’entretien d’un shochet (celui qui égorge les animaux de la manière fixée par la loi), ce qui était évidemment un arrangement pratique pour faciliter ses achats de viande kascher. Vers 1859, le cimetière fut transféré à la synagogue, à laquelle le fils de Joseph, George, se joignit deux ans plus tard.
Les notices nécrologiques élogieuses consacrées à Judah George Joseph le qualifient « de bon citoyen et d’ami sincère ». Un grand nombre de personnes assistèrent à son enterrement qui eut lieu au cimetière juif et qui se fit selon la coutume orthodoxe ; cela donna probablement l’occasion aux résidents de l’endroit d’observer pour la première fois une cérémonie juive. Après sa mort, les affaires de Joseph furent prises en main par son gendre Henry Joseph Altman, de Birmingham, en Angleterre, et Thomas Hawkins Lee, de Toronto.
AO, RG 1, A-1-6, 25 ; RG 22, sér. 305, J. G. Joseph ; RG 55, sér. 3, 1, nos 194, 255–256, 404, 1511–1512.— CTA, RG 1, A, 1853–1857.— Holy Blossom Temple Arch. (Toronto), RG 1(a) : 8, 23–25, 29–31, 91, 94.— Toronto Boroughs and York South Land Registry Office (Toronto), Deed no 69381.— British Colonist (Toronto), 21 mai 1857.— Leader, éd. quotidienne, 19 mai 1857 ; éd. semihebdomadaire, 26 mai 1857.— Toronto Mirror, 29 mai 1857.— Toronto directory, 1846–1847 ; 1850–1851 ; 1856 ; 1862–1863 ; 1866.— The Jew in Canada : a complete record of Canadian Jewry from the days of the French régime to the present time, A. D. Hart, édit. (Toronto et Montréal, 1926), 41.— J. E. Langdon, Canadian silversmiths, 1700–1900 (Toronto, 1966), 89.— Robertson’s landmarks of Toronto, 3.— B. G. Sack, History of the Jews in Canada, from the earliest beginnings to the present day, [Ralph Novek, trad.] (Montréal, 1945 ; [2e éd.], Maynard Gertler, édit., 1965), 116, 152.— S. A. Speisman, The Jews of Toronto : a history to 1937 (Toronto, 1979), 12–13, 16–17, 23, 25.— S. J. Birnbaum, « The history of the Jews in Toronto », Canadian Jewish Times (Montréal), 29 nov. 1912, 24 janv. 1913.— David Eisen, « Jewish settlers of old Toronto », Jewish Standard (Toronto), 15 déc. 1965, 1er janv. 1966.
Stephen A. Speisman, « JOSEPH, JUDAH GEORGE (Gershom) », dans Dictionnaire biographique du Canada, vol. 8, Université Laval/University of Toronto, 2003– , consulté le 2 oct. 2024, https://www.biographi.ca/fr/bio/joseph_judah_george_8F.html.
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Auteur de l'article: | Stephen A. Speisman |
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Titre de la publication: | Dictionnaire biographique du Canada, vol. 8 |
Éditeur: | Université Laval/University of Toronto |
Année de la publication: | 1985 |
Année de la révision: | 1985 |
Date de consultation: | 2 oct. 2024 |