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Titre original :  Ottawa Citizen, Nov. 25 1931, page 1.

Provenance : Lien

HORWITZ, JACOB, bijoutier, homme d’affaires et victime d’homicide, né le 9 décembre 1897 à Ottawa, fils de Max Horwitz et de Rebecca Rodkin ; le 20 janvier 1924, il épousa à Montréal Yetta Rosen, et ils eurent une fille ; décédé le 25 novembre 1931 à Ottawa.

Jacob Horwitz, surnommé Jack, était l’un des huit enfants d’un couple d’immigrants juifs d’origine russe. Il suivit les traces de son père et devint bijoutier. Il exploita des bijouteries florissantes à Ottawa, au 74 de la rue Bank et au 168 de la rue Sparks ; durant plusieurs années, il tint aussi une boutique à Hull (Gatineau), au Québec. Comme homme d’affaires, il était très admiré pour son charme discret, sa bienveillance et son affabilité. Il se distingua au sein de la communauté juive d’Ottawa en participant à la vie de sa synagogue (Adath Jeshurun), en faisant des dons en toute simplicité à des œuvres juives et en devenant membre de sociétés comme la Young Men’s Hebrew Association. En 1924, il épousa Yetta Rosen, originaire de Montréal ; deux ans plus tard, ils eurent une fille, prénommée Anita.

En 1931, Horwitz fut tué par balle par Benjamin Simon Edelson, autre éminent bijoutier juif, qu’on appelait Ben. Il entretenait depuis longtemps une liaison avec Alice, qu’Edelson avait épousée 19 ans plus tôt. Ben et Yetta étaient au courant des aventures de leurs partenaires ; selon le témoignage ultérieur de Yetta, Alice avait juré en 1929 qu’elle n’abandonnerait jamais Jack, et affirmait qu’il était le père d’au moins un de ses sept enfants. Le soir du 24 novembre, Ben suivit Jack et Alice jusqu’à une rue déserte et les affronta. Ils se disputèrent, puis convinrent de poursuivre leur entretien dans la boutique d’Edelson, au 24 de la rue Rideau, où, dans un échange houleux, Ben brandit une arme. Une lutte s’engagea entre les deux hommes et deux coups de feu furent tirés. Le second projectile toucha Jack. Il fut transporté en ambulance à l’Hôpital Général d’Ottawa, accompagné d’Alice. Après avoir précipitamment dicté des modifications à son testament et rapidement revu Yetta, il mourut d’une hémorragie interne à une heure cinq du matin. Comme cause officielle du décès, on inscrivit : « Blessure par balle à l’abdomen – “Meurtre” ».

Conformément à la loi juive, les funérailles de Horwitz eurent lieu le lendemain, le 26 novembre. Les parents, amis et curieux qui assistèrent au service et suivirent le cortège étaient si nombreux qu’on fit appel à des policiers pour contrôler la circulation et la foule en route vers le United Jewish Community Cemetery (Jewish Memorial Gardens). Quelques jours après la fusillade, Yetta se retrouva au cœur d’une âpre bataille juridique avec les frères de son défunt mari. Elle fut choquée et consternée d’apprendre que, selon le testament qu’il avait fait sur son lit de mort, Jack avait divisé également son patrimoine entre sa femme, sa fille et son frère aîné, Charles. Quatre ans plus tard, après avoir coupé les ponts avec les Horwitz (ni Anita ni elle ne sont mentionnées sur la pierre tombale de Jack), Yetta se remarierait et partirait vivre avec sa fille et son deuxième mari à Los Angeles.

Edelson fut accusé du meurtre de Horwitz et, après une incarcération de près de deux mois à la prison du comté de Carleton, au 75 de la rue Nicholas, il subit son procès devant la Cour suprême de l’Ontario au palais de justice du comté de Carleton, du 14 au 16 janvier 1932. Le juge John Millar McEvoy présida le procès, l’avocat torontois Peter White agit comme procureur et l’avocat d’Ottawa Moses Doctor représenta la défense. Edelson suscita la compassion en livrant à la barre un témoignage crédible et poignant. Puisqu’Alice ne vint pas témoigner, il fut le seul témoin oculaire à fournir un récit de l’altercation. Il raconta ce qui s’était passé après le premier coup de feu :

J’ai dit : « Jack, va-t’en et je range le fusil. » Il a dit : « Tu peux toujours courir. On verra qui tirera sur qui. » Ses yeux sont devenus rouges et comme sortis de sa tête. Il a poussé Mme Edelson sur le côté et m’a donné un coup de poing sous l’œil droit avec sa main droite. Je pense que sa bague m’a fait une entaille. Puis il a continué à me tordre le poignet et j’ai enlevé mon doigt de la gâchette parce que j’avais peur qu’un autre coup parte. Pendant que nous nous battions, j’ai entendu un autre coup de feu et il s’est saisi le côté, s’effondrant contre le comptoir, et s’est dirigé vers l’arrière de la boutique.

Dans son impressionnante plaidoirie, qui inspira une grande compassion pour Edelson, Doctor soutint que la fusillade avait été accidentelle. Plus important encore, il dépeignit l’accusé trompé comme un homme respectable et un mari dévoué.

À l’issue de ce procès sensationnel, qui avait attiré des foules extraordinaires, Edelson fut acquitté. Vraisemblablement, le jury, composé entièrement d’hommes, le considéra comme un bon citoyen en général qui, même s’il était coupable d’un meurtre, avait cherché de manière compréhensible à défendre son honneur personnel et le bien-être de sa famille. White savait pertinemment que la pitié pour Edelson influencerait le verdict : il avait prévenu les membres du jury que « [leur] jugement ne pouvait pas être rendu avec un véritable sens du devoir s’[ils se] laiss[aient] influencer par les préjugés ou la compassion ». Cependant, dans le contexte castrateur de la grande dépression, où d’innombrables hommes avaient été privés de leur rôle de soutien de famille et étaient perçus comme dépouillés de leur autorité, et où, par conséquent, les femmes servaient de boucs émissaires, le jury admirait Edelson, qui travaillait dur, avait réussi tout seul et avait voulu protéger sa famille non seulement d’un intrus, mais aussi d’une épouse immorale. Il semble que, pour les jurés, la responsabilité de la fusillade incombait finalement à Alice ; selon la réaction euphorique du public dans la salle d’audience après l’acquittement, les spectateurs partageaient apparemment leur avis. Le caractère primordial que revêtait la notion d’honneur masculin avait aidé Edelson à recouvrer sa liberté ; il resterait marié à Alice durant les 40 années suivantes, jusqu’au décès de cette dernière en 1972.

L’affaire Edelson-Horwitz est un chapitre largement oublié de l’histoire de la communauté juive d’Ottawa, principalement parce que celle-ci, qui avait honte de ce scandale et craignait qu’il attise l’antisémitisme, évita généralement d’en parler publiquement. Par conséquent, les descendants des deux familles ne savent pas grand-chose, voire rien du tout, de cet incident dont on ne trouve aucune mention dans les livres d’histoire locale ni dans les mémoires qui documentent la vie des Juifs à Ottawa durant les années 1930.

Monda Halpern

Notre ouvrage intitulé Alice in Shandehland : scandal and scorn in the Edelson/Horwitz murder case (Montréal et Kingston, Ontario, 2015) constitue la principale source utilisée pour la rédaction de cette biographie. Il repose en grande partie sur les comptes rendus du procès – ceux publiés dans l’Ottawa Citizen et l’Ottawa Evening Journal, et ceux conservés aux Ottawa Jewish Arch., aux Arch. de la ville d’Ottawa et dans les arch. privées de Sharon Edelson –, ainsi que sur des entrevues avec des membres des familles Edelson et Horwitz.

AO, RG 80-2-0-453, no 10200 ; RG 80-8-0-1261, no 11975.— FD, Jewish B’Nai Jacob, Montréal, 20 janv. 1924.— Ottawa Jewish Arch., O0062 (Young Men’s Hebrew Assoc. fonds), Booster, janvier 1921 ; Bull., 11 nov., 2 déc. 1921.— Ottawa Citizen, 18 janv. 1932.— Lara Campbell, Respectable citizens : gender, family, and unemployment in Ontario’s Great Depression (Toronto et Buffalo, N.Y., 2009).— Ruth Kahane Goldberg, « The depression and war », dans A common thread : a history of the Jews of Ottawa, Anna Bilsky, compil. (Renfrew, Ontario, 2009), 47–115.

Bibliographie générale

Comment écrire la référence bibliographique de cette biographie

Monda Halpern, « HORWITZ, JACOB », dans Dictionnaire biographique du Canada, vol. 16, Université Laval/University of Toronto, 2003– , consulté le 20 avril 2024, http://www.biographi.ca/fr/bio/horwitz_jacob_16F.html.

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Auteur de l'article:    Monda Halpern
Titre de l'article:    HORWITZ, JACOB
Titre de la publication:    Dictionnaire biographique du Canada, vol. 16
Éditeur:    Université Laval/University of Toronto
Année de la publication:    2019
Année de la révision:    2019
Date de consultation:    20 avril 2024